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[RP - intimiste] Elle viendra !

Della
Lorsqu'elle avait briser les scels de la lettre venue de si loin dans le Sud, sa main tremblait. Toujours la peur d'une nouvelle mauvaise. Après tout, comment étaient ces gens, là-bas ? Elle n'en avait aucune idée. Peut-être étaient-ils sauvages ou violents ou pire !

A la lecture des premiers mots, le coeur avait pu calmer ses battements. Rien de grave. Avant même d'aller plus loin dans la lecture, Della avait serré le parchemin contre son coeur, y avait reniflé doucement une odeur, son odeur. Oui, elle en était persuadée, c'était bien son odeur malgré les lieues parcourues, son parfum était là, intacte. Les yeux fermés, elle respirait profondément, les traits si fins d'un visage si loin dansant derrière ses paupières closes.

    Ma très chère Della,
    Muo Dunne,
    Salut.

    Que tu me manques depuis la Castille, chère chérie !

Déjà, des larmes soulignaient les yeux bleus, et la respiration redevint haletante, sur la peau, les poils se hérissaient...Elle ! Elle était là, dans les mots, dans chaque mot qui s'étalaient les uns après les autres, elle était là, l'unique, la Belle, Elle !

    Tu as toujours eu l'esprit adroit, ainsi que Béatrice me le disait souvent

Oh...le souvenir de leur trio, de leur amitié tellement intense, tellement...le souvenir de la disparue poignant, encore tellement vif, tellement...Béatrice, Elle et elle. Que de souvenirs, que de rires, et que de grandes et belles choses ! Hier...si loin, déjà.
    Malheureusement, le Seigneur a rappelé auprès de lui son enfant, ôté la chair de ma chair, et laissé en moi un ventre si vide qu'il me désespère.

Coeur qui se serre à l'évocation d'un ventre stérile comme le fut le sien avant que le Très Haut ne les bénisse enfin en leur donnant l'enfant tant désiré. Comment rester insensible à ce cruel état ? Comment ne pas revivre encore et encore l'angoisse qui monte avec la lune ? Comment envoyer la force qu'il faut, là-bas, si loin, à Elle ?

    Jamais encore il n'avait été à ce point brutal avec moi ; [...], mais à peine une lune plus tard qu'il revenait, et oh Della... Je n'ose te dire à quel point les choses ont changé, ici. Il n'est jamais doux, ni posé lorsqu'il partage mon lit,[...] J'en ai mal partout,[...] mais à toi, et dans ta langue au moins, je peux l'avouer : j'ai mal, tout le temps j'ai mal, j'ai mal aussitôt qu'il ouvre la porte, quand il se pose sur le lit, j'ai l'impression qu'il lion aborde mes couvertures, [...] Et ensuite il me rappelle mon serment d'épouse, [...] rappeler ce qu'il veut de moi.

Rictus mauvais déformant les lèvres, l'oeil est rempli de haine et à nouveau la poitrine se soulève vite, trop vite face à la perfidie des hommes, d'un homme ! Ainsi c'est donc tout ce qu'il voulait d'Elle ? Un monstre, c'est un monstre, oui ! Elle est si douce, si belle, si femme...Elle est une reine, Elle mérite de la douceur, de l'amour...Si Elle était restée, elle lui en aurait donné de la douceur...Souvenir de ce jour, à Paris, dans une boutique, d'un manteau en peau de loup...Et un manque cruel qui serre les entrailles à en suffoquer !

Ma Colombe...tu me manques tant. Mots qui se perdent...

    J'ai revu celui que tu n'aimes pas. Je n'en parlerai pas ici, comprends-moi. Viens ou invite moi, mais décidons de nous revoir ou je meurs de toi.
    Je t'aime.

Moi aussi, je t'aime.

Mais l'allusion à celui qu'elle n'aime pas lui laisse un goût amer en bouche. Elle ne l'aime pas parce que Elle l'aime ! Comme Elle n'aime pas son époux, pour la même raison. La jalousie. Elles sont jalouses. Elles s'aiment mais elles ne peuvent s'aimer parce qu'elles sont femmes et que les femmes, ça se marie avec un homme qui les touche, qui les couche et qui les engrosse pour leur propre fierté ! Alors, elles s'aiment de loin, et elles se manquent parce que loin l'une de l'autre.




La Duchesse d'Orléans, épouse du Duc d'Orléans se servit un verre de vin, plongea son regard dans le liquide rouge, rouge comme le sang.

_________________
Della
    La main caresse les cheveux blonds, aussi blonds que les siens, remet doucement une mèche en place, frôlant la peau laiteuse d'une joue qui rosit un peu. Et le coeur bat, ce coeur qui ne peut se retenir de chavirer à chaque fois qu'Elle est là. Alors la main dessine le relief du visage, les doigts sculptant à nouveau chaque trait qui trouve son éclat dans l'instant suspendu du temps qui n'en finirait pas si seulement...


Le réveil fut brutal ce matin-là.
Ivre encore du bonheur qu'elle venait de vivre en rêve, Della se leva rapidement, cherchant du regard une trace de l'impossible réalité du songe. Il fallait se rendre à l'évidence, Elle n'était pas là !
Mais Elle pourrait y être !
Il suffisait de la faire venir.
Oui !
Oui, bien sûr, la faire venir !
Elle ne pouvait partir, devait rester ici, en Orléans auprès de son époux. Mais Elle...Elle, Elle viendrait ! Elle viendra !


La matinée passa.
Le reste de la journée aussi.
Qui vit une Della rayonnante, souriant, riant, virevoltant tel un papillon aux premiers rayons du soleil de printemps.
Un baiser peut-être un peu plus appuyé à son cher époux, une caresse peut-être un peu plus légère et un regard sans doute prometteur jalonnèrent ce jour heureux d'une vie heureuse d'un bonheur à venir par procuration.

Ce fut le soir, alors que le soleil allait décliner que la plume transcenda le vélin.

Citation:
Ma Douce Colombe,


Je pleure. Les mots que je lis sont si cruels, tu souffres et je pleure.
Ô comme je te comprends, mon Âme !
Rappelle-toi le temps où je désespérais de donner un fils à mon époux. Je sais la souffrance de se dire que l'on ne remplira jamais notre devoir de femme et d'épouse.
Mais cela n'explique en rien la violence dont tu parles !
Pourquoi cet homme se donne-t-il le droit d'être aussi bestial avec une si fragile créature ? Qui est-il donc, celui-là qui te violente ? Puisse le Très Haut le punir, et vite ! Sinon, je le ferais, moi.
Te souviens-tu ? Notre plan pour punir celui qui t'avait fait souffrir ? Cela dut être la seule fois où je rencontrai la sorcière avec plaisir. Faisons la même chose, veux-tu ? Payons pour qu'il paie.

Ô Blanche, comme ces mots me meurtrissent. Ils me rongent l'âme, je rêve de venir te sortir des griffes du dragon.
Tu me parles de venir te voir...Hélas, je ne puis. Pas encore. Kéridil est Duc à présent, en Orléans et je suis à ses côtés, il désirait que je le fus et c'est donc ma place. Orléans est pareil à lui-même, calme et tellement prévisible. Je me repose d'une campagne ducale en Bourgogne très rude où beaucoup ont sué des gouttes de sang. L'espèce de mégère que ma Mère avait fait élire est devenue folle au bout de quinze jours et le Duché est devenu un théâtre ridicule ! Pense donc, des saltimbanques en ont même fait un spectacle ! Cette vipère d'Edwen a déposé plainte à la Hérauderie contre ma Mère, ma Vassale et moi ! J'enrage de ne l'avoir pas étripée, celle-là !
Orléans est donc un temps de repos. D'autant que je suis tellement déçue. Eusaias ne fut pas élu. J'en viens à me demander si je dois rester à la Cour où si je dois la quitter. Pour Nébisa, je décidai de rester. Elle était tellement peu présente qu'au final, j'ai fait ma vie comme je l'entendais entre les murs de mon Office. Pour Vonafred, je ne sais encore. Parfois, je me dis que tout laisser serait tellement agréable. Puis, l'instant d'après, je me demande ce que je ferais si je n'avais plus Paris. Je ne veux pas reprendre la politique, j'ai perdu le goût du combat. La diplomatie ne m'attire plus non plus. Alors ? Quoi ? Pondre des enfants ? Je ne suis même pas assurée d'en pouvoir encore enfanter. Depuis la naissance de Clément, pas une seule alerte. Kéridil ne m'a encore rien fait remarquer et je n'ai pas encore revu l'interrogation au fond de son regard, espérant que je lui annonce une grossesse, comme ce fut le cas avant Clément. Je m'en réjouis car que lui répondrais-je s'il revenait à la charge ? Mon corps a peut-être donné tout ce qu'il avait à donner ?

Ma Chérie, comme cela serait simple si toi et moi étions homme et femme. Te souviens-tu ?
Ma Cousine m'a demandé hier, de lui dire si elle était séduisante.
Je ne m'attendais pas à cette question, bien sûr. J'ai sursauté puis, j'ai ri.
Jamais ne m'étais attardée à considérer ce genre de choses, chez une femme autre que toi.
J'en restai troublée un long moment...

Si tu venais ?
Oui, viens !
Je vais enfin avoir bientôt un Chapelain à Montpipeau et enfin, allons-nous pouvoir baptiser Clément. Il faut que sa marraine soit là !
Viens.
Tu resteras ici, jusqu'à la fin du printemps et même en été si tu le désires. J'écrirais à ton époux, je lui dirais que j'ai besoin de toi, que je te garde encore.
Nous pourrons rester seules, parler et rire et danser ! Tout autant que nous le voudrons ! Nous jouerons avec les enfants et nous ferons de longues promenades à cheval.
Nous aimerons le lever du soleil parce qu'il signifiera une nouvelle journée ensemble.
Nous aimerons la lune parce qu'elle brillera pour nous.
Viens.

Je prépare ta venue.
Je t'aime, ma Colombe.

Mille baisers.
Della.


La lettre partira, arrivera.
Commencera alors l'attente, celle de la réponse qui promettra sa venue, assurément.

Il est aisé de vivre heureux, de voir la vie colorée et les lendemains enchanteurs.
Il suffit de presque rien.
Une promesse...Une attente...
Dis, quand reviendras-tu ?(*)


(*)Barbara.
_________________
Della
Je veux des fleurs !
Des fleurs partout !

Mais, votre Grâce, des fleurs, en cette saison...


Oui, et ? C'est le printemps, non ?
Allez dans les bois, allez sur les chemins, vous en trouverez des fleurs !

Bien, votre Grâce.

Et je veux qu'il y en ait, tout le temps, qu'on les change lorsqu'elles fanent.
Vous entendez ?

Ou...oui, votre Grâce.

Le jardin. Il faut qu'il y ait des fleurs dans le jardin du château.
De toutes les couleurs.

Ce sera fait, votre Grâce.

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Clarinha, je veux des nouvelles tentures, celles-ci sont vieilles et fades, je veux...quelque chose de lumineux.

Ça faut maich louch, a louch dou sol... A louch para que ach petites fleurs poussent. Que veut a minha dona ? Ella pense jà à des courch no particoulièr ? Azoul, vermeillo, verde ?

Hé bien...des couleurs gaies seraient absolument parfaites ! Qu'on oublie cet hiver et vite ! Faites-nous rêver, Clarinha !

----------------------------

Il faut repeindre la chambre qui donne sur le jardin, la grande chambre.

C'est une chambre réservée aux invités, votre Grâce.

Oui et alors ? Je veux qu'elle soit repeinte, elle pue, cette chambre !
Clarinha s'occupe déjà des rideaux et des tapisseries, occupez-vous de la peinture.
Ah...et faites refaire la literie aussi. Qu'on change tout !
Et commandez deux grands coffres pour la meubler et une chaire, sculptée...belle, très belle.

Votre Grâce attend-elle des invités ?

Faites ce que je dis.

Oui, votre Grâce.


----------------------------

Tu crois qu'elle est folle ?

Mais non, elle a trop d'argent.

Ou alors, elle va faire chambre à part !


Tu dis n'importe quoi, ces deux-là s'entendent bien.

Remarque, quand le Duc va voir ce que ça coûte, tout ça...
*Rire*

Oui ! Tu l'as dit !

De quoi parlez-vous ?

Des travaux que la Duchesse veut qu'on fasse pour la chambre, là.
Et toutes ces fleurs !


Ah oui...c'est pour son amie, une hispanique à ce que je pense.

Oooooh...elle arrive quand ?

J'sais pas.

_________________
Della
Une carte du pays lointain était étalée sur la table, éclairée par un grand chandelier.
Il faisait nuit noire, elle ne pouvait dormir et avait quitté son lit, pour venir se pencher sur les routes menant vers le Sud, vers Elle.

Sa récente lettre avait à nouveau emplit d'espoir, le coeur de la Duchesse. Des idées fusaient pour se voir, pour se revoir et ne plus se quitter.
Tout le reste importait si peu à côté de ces retrouvailles qui seraient l'apothéose de leur amitié où enfin, elles pourraient se donner tout cet amour qu'elles cultivaient l'une pour l'autre.

Citation:
Ma Della,
Duchesse,

Ces mots m'emplissent de joie. Tu es telle que j'ai toujours rêvé de t'appeler. Tu dois rayonner, au sommet de cette gloire que vous avez autant méritée l'un l'autre... Ah, douce Della, que je suis heureuse pour vous! Cette nouvelle n'est pas sans rejoindre d'autres, de France, dont je ne connais pas l'exacte vérité : un coursier de Bretagne, à qui je donne une lettre de temps en temps, et en qui j'ai toute confiance malgré sa condition de marin, m'a glissé à l'oreille l'autre jour, que de sombres choses se tramaient en Bretagne et en France. Point pour les mêmes raisons, cependant. De la Bretagne cela est quasi sûr, car j'ai demandé sitôt à Chimera de Dénéré-Malines, la duchesse de Cholet (mais elle n'a été duchesse que pour six moi en tant que Chambellan), la duchesse, donc, et elle m'a répondu par les mêmes échos. Elfyn, celui qui prétend être roi de Bretagne, serait au plus mal. Oh, souhaitons qu'il meure !
Dans son dernier édit, où il nomme Lemerco régent, il a aussi destitué ma suzeraine. Celle-là même qui est désormais reine de France... Leyah, donc.

Les nobles de Bretagne ont décidé de publiquement se réunir, pour nommer un régent jusqu'à ce qu'Elfyn ne meure. C'est une fronde pure et simple, mais vois-tu, quand la majorité décide que ça ne l'est pas... J'ai dit et fait pareil qu'eux, six mois avant, mais ce que j'ai fait moi, ils le considèrent comme intolérable... N'aurais-je pas juste été plus rapide et plus avisée ?

L'autre nouvelle concerne la France. On me dit qu'un second roi s'est fait élire ? Allons, la chose me parait étrange stricto sensu, mais connaissant de loin Eusaias, j'imagine qu'elle peut être aussi un peu vraie. Cet homme m'amuse. Il me séduit par sa façon chimérique de retourner aux us et coutumes féodaux. Ah, un chevalier légitime, qui tape un poing curassé sur la table et obtient grâce... J'espère que ces rumeurs sont vraies, j'espère qu'il s'est en effet élevé envers Vonafred.

Tiens moi, si cela est vrai, informée des avancées de son expédition. Carolum enrage, il voudrait prêter main forte à Vonafred (je ne sais d'ailleurs même pas comment il a pu connaître ces informations) et je le trouve un peu idiot. Fort heureusement, mon époux est moins têtu, et nous gardons la bête en cage.
Il est probable d'ailleurs que les choses changent aussi, ici... Astaroth peine à contenir sa haine au roi, il n'est plus si loyal, et je le vois bien devenir roi à sa place bien vite...

Cela étant, si Eusaias s'est élevé, il n'est plus question du Louvre et des hommages respectifs aux Roi et Reyne. Nous irons en chaque duché, rencontrer les ducs et comtes. J'aime ainsi à penser que j'abandonnerai la délégation espagnole au beau milieu du centre bleu roy, à Orléans, et que j'y resterai avec toi tout le jour. Peut être pour cela faudrait-il que l'on trouve un arrangement plus proche entre la castille et l'orléans... N'avez-vous point de diplomate spécialisé dans ces pays? Non qu'il ait besoin de parler castillan, car vois-tu, la chose m'incombe et je parle mieux français de jour en jour... Quoique l'autre fois j'eusse dû utiliser une conjugaison trop hasardeuse, car elle m'a paru très étrange. Ne dit-on pas "je chantis, tu chantis" ? Laissons-là. Je disais : trouvons un arrangement de la Castille à l'Orléans. Tu avais une vassale à marier je crois ? Essayons de lui trouver un castillan. Ou promettons à un tout autre noble, le loisir d'un coït rauque et brun. T'ai-je dis à quel point les femmes ici sont vulgaires ? Ma brutalité à l'exprimer t'aura choqué, sans doute... Mais elles sont toutes impures, fardées, sans grâce, sans intelligence... La répudiée d'Astaroth doit être un peu sorcière. En tous cas, elle écarte les cuisses avec beaucoup d'habileté.
Mais je m'éloigne encore du sujet ! Oh, Della, enjoint ton époux à un rapprochement diplomatique ! Peut être même que je pourrais écrire à Eusaias ? Ne pourrions-nous pas partager un ami, cela ferait de nous plus que des sœurs!

C'est étrange, tu vois. Je suis subitement heureuse, mais je ne peux m'empêcher de repenser à ta lettre : tu me dis bien des problèmes concernant la Bourgogne... Ne peut-on point châtier cette souillon, car enfin elle entâche ton nom très grossièrement ! C'est extrêmement mal-aisé, je trouve... Et très méprisable. Je lui aurais publiquement dit ma façon de penser à cette dinde-là !
Et ta mère, que je croyais très éclairée, t'aura fait faire un mauvais choix... Ah. Il faut cependant bien suivre sa commande, puisqu'une fille obéit à celle qu'elle aime.
M'obéirais-tu si je te demandais de me rejoindre ?
Je te rejoindrai, là. Emplie encore de l'émoi que ta lettre m'aura offert.

J'ai beaucoup d'autres choses à te dire, mais Astaroth revient bientôt. Je clos ici. Tu es dans mes pensées.

Blanche da Lua

La missive fut relue encore...
Elle tenterait d'agir auprès de son époux, comme le suggérait la Colombe, pour se rapprochement des pays...Il faudrait manoeuvrer habilement...Il fallait surtout trouver un avantage certain à ce rapprochement, politiquement parlant ou économiquement ? Qu'est-ce que ce mystérieux pays qui lui avait enlever sa Mie pouvait bien avoir à offrir à l'Orléans ?


_________________
Della
Si écrire devenait leur seul lien pour longtemps, alors, elle écrirait encore et encore, tout et rien, ce qui faisait sa vie, ce qui fondait son espoir de revoir enfin cette femme qu'elle aimait à la vie, à la folie.
Aimer ?
Oui, elle l'aimait ?
Jusqu'où pourraient-elles s'aimer ?
Jamais elles n'avaient osé répondre...

Citation:
Ma Colombe,
Ma Reine,


Si tu savais comme je m'amuse de la situation ! Oui, je rayonne, tu as raison. J'aime ça. Probablement autant que Kéridil à qui je dois ce bonheur.
Pourtant, je garde les pieds sur terre et je trouve de la joie dans l'aide et l'appui que je lui assure. Ainsi, pour cette fois, l'Orléans ne m'ennuie pas, je commence même à l'aimer et à apprécier les personnes qui y vivent et le font vivre. Comme partout, il y a des conflits entre certains mais je veux les ignorer et rester impartiale avec tous. C'est un peu comme une nouvelle vie.

Je n'ai guère eu d'autres rumeurs concernant la Bretagne que celles que tu me donnes. Ni ici ni à Paris. J'ignore donc l'état de santé d'Elfyn mais si ce que tu me dis est effectivement vrai, alors, oui, tu étais cette personne plus avisée et visionnaire, mais qui en doutait, à part ceux qui auraient du voir en toi celle qui leur montrait le bon chemin ?
Est-ce notre condition de femmes qui nous oblige à toujours devoir courber l'échine ? Si tu avais été un homme, peut-être t'auraient-ils suivie plus hardiment. Je ne comprends pas les hommes, je ne les comprendrai jamais.

La fronde d'Eusaias semble malheureusement étouffée dans l'oeuf.
Je lui ai écrit, je n'ai pas reçu de réponse. Pourtant, je lui assurais mon soutien.
Je le pense déçu et désabusé.
Dommage.
C'est ainsi.
Tu sais, les gens sont parfois plein d'allant et puis, l'instant d'après, ils s'éteignent.
Peut-être me trompe-je et cette fronde continue-t-elle à germer, mais dans ce cas, Eusaias m'en tiendrait écartée. Tant pis pour lui. Pourtant, je continue de l'aimer. J'aurais aimé avoir un frère comme lui, têtu et borné qu'on a envie de suivre un jour et de tuer le lendemain. J'ai toujours été ainsi avec Eusaias. Sais-tu que lors de notre première rencontre, il a provoqué en duel un de mes amis et qu'il l'a tué le lendemain lors de ce duel ? Je l'ai haï pour ça. Puis, je l'ai aimé. Haï encore. Aimé. Haï...Aimé.

On dit : "Je chantais, tu chantais..." Ton accent et ta voix me manquent, ma Douce.

Il me faut trouver des raisons de convaincre Kéridil d'ouvrir une voie diplomatique vers la Castille. Peut-être les oranges ? Il est gourmand à ses heures et si j'arrivais à lui faire goûter une des oranges de là-bas, peut-être exigerait-il qu'il lui en soit livré régulièrement. Dès lors, il nous deviendrait possible de nous joindre à l'une ou l'autre cargaison afin de nous retrouver là où personne ne nous connaîtrait. Imagines-tu ? Me voilà coiffée d'un fichu et habillée d'une simple robe, assise aux côtés d'un charretier qui transporte les oranges de mon époux, juste pour le plaisir de te revoir ? C'est pure folie, n'est-ce pas ? C'est ce que j'aime, cette folie qui me lie à toi et que rien ni personne n'empêchera, jamais. J'en fais serment.
Envoie-moi une orange, Douce Amie. Que son jus coule...

Pousse ton mari à devenir roi.
J'y ai pensé aussi, pour le mien. J'ai réussi à persuader Eusaias à se présenter, je peux faire de même avec celui qui passe ses nuits à mes côtés.

Je t'aime.
Je t'embrasse.
Je te confie aux soins du Très Haut.

Della.

_________________
Della
Les jours avaient passé, sans apporter ni lettre ni orange...
Pourtant, Della n'en portait aucun ombrage à sa Mie, sachant combien parfois il est délicat de porter tout ce que celle-ci portait à bout de bras. Une seule inquiétude...qu'elle soit malade.


Citation:
Blanche,
Ma Mie,


Pardonne-moi de revenir vers toi, déjà. C'est que, tu me connais, je suis un peu inquiète. Sans nouvelle de toi, tout me passe par la tête : tu es malade, ton mari te retient contre ton gré, tu ne m'aimes plus, tu es avec celui que je n'aime pas...pire encore peut-être.

Puisque ma plume court, je vais te raconter notre pauvre Royaume.
A sa tête, un roi qui comme nous le pensions n'a rien encore une fois d'un dirigeant. Un homme qui fait prince des traitres et des brigands et qui ment au peuple de France pour se donner bonne conscience, qui menace d'envahir la Bourgogne, ma Bourgogne, juste parce que Eusaias lui fait peur.
N'importe quel roi digne de ce nom aurait déjà déchu Bouillon de tout ce qu'il possède, lui aurait fait trancher la tête après l'avoir déclaré félon !
Pas Vonafred ! Non, lui, il préfère raser une province loyale pour passer ses nerfs.
J'attends la levée de ban là-bas. Elle ne saurait tarder, la Bourgogne se sait menacée, les Bourguignons ne sont pas des idiots, ils ont bien compris le jeu malsain du roi.
Je retournerai chez moi, je prendrai les armes et je mourrai, s'il le faut pour la Bourgogne.
J'ai quitté la Curia. J'ai démissionné de l'Office de la Bouche. Je n'en pouvais plus de servir ainsi alors qu'en mon âme, la colère gronde.
Je ne vais plus à Paris. Cette ville me déplait aujourd'hui. Je suis tranquille.

Ca y est, j'ai revu dans le regard de mon époux, la question muette, celle qu'il ne posera pas mais à laquelle il espère une réponse positive. Et à nouveau, les lunes passent et rien. C'est mieux ainsi, pour le moment, si je dois partir me battre, je préfère y aller seule que grosse.

T'ai-je dit que j'étais Championne d'Orléans ?
Au tournoi à l'épée qui a eu lieu pour l'anniversaire du Duché, j'ai gagné !
Je me suis amusée comme une enfant !
Bien sûr, nous ne nous battions pas pour nous blesser ou pire. Nous nous arrêtions dès que l'adversaire était défait ! J'aurais voulu que tu sois là, j'aurais pu porter tes couleurs, peut-être...Imagine donc la tête des Orléanais en voyant leur Duchesse se battre pour sa Colombe !

J'aimerais qu'il y ait la guerre. Ainsi le temps passerait plus vite et tu me manquerais moins. Je m'engagerais et n'aurais pour autre but, chaque jour, que de rester en vie. Ô je ne t'oublierais pas, non, juste que je penserais à toi, un peu moins souvent, un peu moins violemment. Les adversaires recevraient mes coups de lame en force, portée par la colère de te savoir si loin.
Parfois, je me dis que tu aurais du épouser Aimbaud, au moins, tu serais là, moins loin, je prendrais un cheval un matin et je viendrais te voir, nous parlerions, nous ririons, nous nous promènerions.

Clement grandit.
Il faudra bientôt penser à son baptême.
Sa marraine devra être là !
Dis...quand reviendras-tu ?

Je t'embrasse.
Tu me manques.
Que le Très Haut te bénisse.

Della.

Faut-il préciser que cette lettre serait confiée aux bons soins d'un messager qui payé grassement tantôt à son départ et tantôt à son retour, ne se ferait point attaquer, ni ne vendrait la lettre à personne, préférerait la manger que de la laisser tomber entre des mains appartenant à des êtres mal intentionnés ? Non, car tous, vous savez que cette lettre arrivera à bon port !
_________________
Della
Une lettre arriva, de là-bas, si loin.

Della se rua dessus, la lut, la relut, la relut encore, tantôt souriant, tantôt grimaçant, tantôt soupirant, tantôt souhaitant la mort de ce Gondomar avec ses idées ridicules, emprisonnant sa BienAimée !
La nouvelle était bonne : Elle allait revenir...tant pis s'il fallait se rendre en Bretagne pour La voir !
On baptiserait bientôt Clément.


Citation:
Ma chère chérie,

J'espère que tu recevras cette lettre... J'ai changé de coursier, celui là m'a l'air plus fiable. C'est probable cependant que cette lettre retourne à mon mari s'il lui est dévoué comme l'étaient les autres.
Je t'ai écrit plusieurs lettres depuis la réception de ta dernière (mais était-ce seulement la dernière ?) où je te racontais toute ma vie. J'ai fait planter de nouveaux genêts en bas de la tour d'été, cette grande bâtisse (qui n'a rien d'une tour, d'ailleurs) qui longe les anciens remparts. Astaroth me disait que les femmes ont l'habitude d'y vivre l'été, d'où le nom qu'elle porte. Les précédentes femmes de Gondomar lisaient à cet endroit, pour profiter des derniers rayons du soleil qui tombent pile à hauteur de bras. J'ai décidé d'y passer toutes les fins de journée à partir de mai, mais j'ai pris un peu de retard et n'y suis pas encore allée plus de deux jours de suite.

L'une de mes chiennes a mis bas la semaine dernière. Ce sont des cavaliers, ceux-ci que j'avais remarqué en Angleterre. Ils sont si petits, et embêtés par les griffons qui ont pris de l'âge. C'est étrange comme la nature dote les uns de belles couleurs et les autres d'une tignasse grise abominable... Avec eux, ces chiens un peu ours, je vais à Arousa à pieds une fois le mois. Depuis que je suis à nouveau enceinte, Astaroth m’exhorte à tout un tas de règles très contraignantes. Ne plus monter à cheval, ne plus courir, mais marcher, toujours marcher, ça fait monter le sang et le lait, disent les castillans. Pour la force il me fait boire un verre de sang de cheval, que je rends presque tout de suite. Ses médecins disent que c'est l'enfant qui me retourne le cœur ; n'importe qui vomirait ces putrides relents, qui sont encore chauds, et sentent la bête !

Je suis peinée d'apprendre ta bourgogne en danger. C'est peut être l'occasion de te lancer dans les élections ducales, ne crois-tu pas ? La force de ta voix repousserait à elle seule les faux d'en face... J'ai entendu parler de la France, vois-tu. Par Namaycush, dont bien sûr tu auras entendu parler dès lors qu'il a reçu sa principauté... C'est, selon ma mère, un lointain cousin. Tout du moins cela aurait été, par la branche Montfort. Je le trouve très prétentieux, et fort compliqué à saisir. La seule chose que je comprends bien de lui, c'est son esprit très égocentrique. Ou cela est peut être un rôle ? Quoi qu'il en soit, nos discussions ne tournent qu'autour d'un seul axe : le souvenir extrêmement peu glorieux d'un épisode de mon adolescence. Je tombai dans un bac d'eau d'où il me sortit, l'occasion désormais de se gausser de moi en m’appelant "la bulle". Un sobriquet à ce point ridicule qu'il m'en coûtât d'entendre sa Majesté Leyah ainsi me nommer.

Je rentrerai bientôt en France, et en Bretagne. J'ai un excellent ami (Gurwan Maltese) à te présenter. C'est le meilleur politicien breton. Ou en tous cas le plus respectueux. Il me plairait à ce que tu le voies, et que tu me dises si j'ai vu juste en son esprit fin et sa verbe aiguisée. Il est bon, je souhaite utiliser mon nom et ma face pour le servir, et aider sa cause.
Tu me diras s'il les vaut.

Ma chère chérie, il me faut cesser-ci. Je t'aime du plus profond que cela est possible. Avec autant d'intensité que si l'on avait le même sang. Je t'aime comme le jour, et ainsi que les astres l'ont expliqué il m'est difficile de te voir mais cela ne me fait point t'aimer moins. Mon univers en toi remis, il me tarde de vous retrouver tous les deux.
Embrasse donc Clément. Dis lui que sa marraine pense à lui. J'ai mis avec un petit médaillon portant mon portrait ; il sera à toi, ou à lui.
Si j'ai un fils, je t'en ferai marraine.

Affectueusement,

Blanche


Cette lettre s'en alla rejoindre toutes les autres, soigneusement conservées dans un superbe coffret de bois sculpté.
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