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[RP] Chasteté bien ordonnée commence par les autres

.mahaut.

- C’eeeeest…


L’homme regarda ses deux interlocuteurs et voyant la partie perdue d’avance, chercha du réconfort dans l’observation approfondie d’une enseigne.
Ne trouvant finalement aucune aide dans le balancement du coq en métal se balançant au gré du vent, il finit par baisser les yeux vers le sol.


- C’est compliqué.

Il avait progressé, c’était certain. Espérant avoir trouvé un échappatoire, il releva la tête et fixa les deux personnes face à lui. Un visage soucieux et un visage inquiet. Le tout était peu rassurant.

- Non mais concrètement. Pas de détails et de blablas.

Raté. Une autre solution, vite.

- J’suis pas ben sûr que ce soit à moi d’vous répondre, vous savez. J’veux dire, les usages chez les nobles, c’est… C’est pas ben pareil qu’avec les bêtes.
- Oh, il y a presque autant de plumes.
- Ah ? Ben c’que j’veux dire c’est qu’dans mon domaine, c’est pas aussi officiel. Y’a un mâle, ça c’est sûr, on n’entend que lui.
- Pareil ! C’est pareil.
- Et plein d’femelles. Pour un seul mâle.
- Oh. Bah, vu le nombre de nobles célibataires ces temps-ci… Mais peu importe. Je crois que vous faites aussi dans les chapons ?
- Euh… Oui. Les plus beaux d’la région.
- Parlez-m’en un peu plus.
- Non non non non, vraiment ça ne va pas vous intéresser.
- Mais si ! J’élève des poules moi aussi !
- Oui mais là n’est pas vraiment le propos.
- Mais si !
- Ah ben si, y’en a un avec la question qu’elle m’a posé, mais j’dois dire que j’suis pas sûr du fait qu’j’doive y dire ou pas. On parle bien de poules, là ? Je vous réponds en tant qu'éleveur-spécialisé en reproduction, vous êtes bien d'accord ?
- Mais faites, faites !
- N’en faites rien ! Je vous en prie, partons. Vous n’aurez pas de réponse à vos questions ici et vous mettez messire mal à l’aise.
- Je vous mets mal à l’aise ?
- Ben… le p’tit coup de canon au début ça m’a mis en confiance, parler des poules aussi, pensez ! C’est mon métier… Mais vous dire mon point d’vue sur la chasteté d’vos bestioles…
- Mais pas elles enfin !
- Ah ? J’ai mal compr…
- Moi !


Il s’étouffa dans son godet de vin. Ce coup là, il ne s’en remettrait pas. Toussant comme un beau diable, il vit l’homme pousser sans ménagement la femme vers le carrosse tandis que celle-ci protestait.
En tant qu’éleveur de poules, il avait eu bien des clients, y compris des tordus et des durs en affaire. Mais c’était la première fois qu’il avait une noble jurant comme un charretier qui venait lui demander ce qu’il entendait au juste par « maintenir sa chasteté » tout en arborant une robe rose fuchsia au décolleté inconvenant, même pour une éleveuse de poules.

Dans le carrosse, la brune s’installa sur la banquette en ronchonnant et en donnant un coup d’éventail sur ce qui passait à sa portée : coussin, loquet, plafond, doigts d’écrivain particulier.


- Aiieuuuu, mais ça fait maaaaaal !
- Mais de quoi vous mêlez-vous ? Je m’en sortais très bien !
- Vous avez failli étouffer un homme ! Regardez, il tousse toujours !
- C’est les poussières, ça, moi je ne laisse jamais mes poules sur de la terre battue non nettoyée, ça leur donne des parasites. Il ne m’a pas l’air très bon comme éleveur.
- C’est ça. Dénonçons-le à la ligue de protection des gallinacées et partons.
- Il ne m’a pas l’air très bon non plus en conseiller en affaires conjugales.
- Dénonçons-le à la ligue de protection de… des nobles… euh qui… oublions-le, voulez-vous ?
- Mais Anatole ! Comment voulez-vous que je m’en sorte ? A qui voulez-vous que je pose la question ? A des nobles ? Pour qu’ils se moquent de moi ?
- Oh en général vous vous en fichez. Demandez à Elayne.
- Pour qu’elle me dise la vérité ? Vraiment, mais où avez-vous la tête ?
- Pff… En gros vous voulez demandez à quelqu’un qui va vous mentir. Suffit de trouver quelqu’un prêt à le faire contre argent.
- Oh, non, jamais je ne paierai quelqu’un.
- Il faut que je le fasse ?
- Non, Anatole, non ! Vraiment ! Vous faites tout de travers ! Je dois faire ça noblement. Je dois en discuter avec quelqu’un de confiance, qui me dira son point de vue en toute honnêteté.
- Sauf Elayne.
- Sauf Elayne. Et d’autres personnes dans son genre. Mais pas de menteurs pour autant. Je veux du naturel, du frais. La question est importante. Je ne veux pas la bâcler avec le premier venu. Et je veux quelqu’un qui n’ira pas hurler tout haut l’affaire.
- Trouvez un prêtre, alors. Secret de confession, tout ça… Par contre vous n’allez pas aimer sa réponse, je vous le dis tout de suite.
- Hmpf…
*petits coups d’éventail selon l’ordre établi*
- Aieu !
- Allons allons, ça vous étend les doigts, ils sont tous boudinés.
- C’est faux et d’ailleurs avec les coups, ils enflent alors c’est de votre faute si…
- CORNECUL DE MORTECOUILLES !
- Hein ?? quoi ??
- Boudinet !
- C’est faux ! Ils sont juste abîmés par…
- Nan, pas vous ! Choubinet !
- Qu… Je ne comprends pas tout, là…
- Evidemment, vous êtes limousin. Choubinet, Doudinet, Boudinet ! Lui, il saura ! Et il est curé !
- Vous voulez dire… Oh non. Oh non non non non non !
- Siiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ! Ecrivez !!! Cher Choubinet !

_________________
.mahaut.


Cher Choubinet,

Voilà bien longtemps que je n'ai pas pris la plume pour... Bon alors Anatole je vous le dis tout de suite si vous m'interrompez de suite juste pour signaler que c'est vous qui écrivez et pas moi, ça ne va pas le faire du tout. Ai-je été assez claire ? Rose claire ? Pastel, à la limite.
Reprenons. Raaaah, pis vous faites des ratuuuuures ! C'est moche ! Faites un poney pour camoufler ! Avec des fleurs dans les cheveux. Roses. Et jaunes. C'est le printemps. Oh, faites un brin d'herbe ! Et des étoiles ! Et... Ah oui, la lettre. Vous faites un coeur sur les i, hein, comme d'habitude ?

Cher Choubinet,

Je ne sais pas si tu te souviens encore de moi. J'étais la Cheffe Suprême des Trucmachinchosistes, la Grande Prêtresse, même, la numéro 1 et cela devrait te rappeler des choses vu que tu étais mon fidèle subalterne, le numéro 2, fidèle compagnon de l'ombre (en un peu moins brillant, naturellement). Voilà, là, tu me remets. Mahaut. Coucouuuuuuuuuuu ! Faites les signes des bras, Anatole ! Ben je sais pas, moi, faites des flèches. Non mais là on dirait une hache qui coupe les bras... Raaah... Bon ben faites du sang, on dira que c'est un rébus.

J'espère que les moines ont fini par te laisser sortir, ou alors que tu as réussi à creuser un tunnel avec des morceaux de lépreux comme pelle, ou que tu as soudoyé des enfants de choeur avec du vin de messe ou que tu les as menacés avec Sifflard ou que... Mais quoiiiii Anatole, je cherche tous les cas de figures ! Oh faites une figure qui sourit ! Avec les dents ! Faites une carie. Vous avez débordé et l'oeil est de travers. Pff.

J'espère que tu es sorti et que tu es bien vivant. Ou alors que tu m'as mise sur ton testament et là c'est façon de parler parce que je ne crois pas qu'un jour tu m'aies faite monter sur un vélin marqué "testament de Lotx", je m'en serai souvenue, ne serait-ce que parce que je serais tombée.

Si tu es bien vivant, c'est super ! Faites une figure qui tape dans les mains. Mais pas de hache cette fois. Faites une baguette de fée, c'est joli. Avec une étoile au bout. Et des paillettes sur le manche. Je sais pas, moi, collez-les, COMMENT VOULEZ VOUS QUE J'ECRIVE UNE LETTRE TRANQUILLEMENT AVEC TOUTES VOS INTERVENTIONS ? Je suis lasse, si lasse... Servez-moi à boire. Sans renverser. J'avais dit sans renverser ! Ben oui ça fait des tâches ! Vite, servez-moi du blanc, ça enlèvera les tâches de rouge ! Renversez, maintenant, ne soyez pas godiche ! Oh. Ça ne part pas. Mais c'est rose. J'aime bien.

Je reprends. Pour nous, tout va bien, on a voyagé, rencontré des douaniers, des armées, des armées sans douaniers et des douaniers sans papiers, et on n'a tué personne. Evidemment, nous ne sommes pas morts non plus, vu que nous sommes invincibles. Malheureusement, ce n'est pas le cas de Roudoudou de lumière, qui a pris la clé des champs, et là aussi c'est façon de parler, il n'a pas littéralement pris la clé des champs, ils sont ouverts, mêmes les portails s'ouvrent sans clés à Barbezieux, on n'est pas là pour embêter les gens. Non, il est mort, tout simplement. Ca a été très dur pour moi, psychologiquement. Je suis encore fragile d'ailleurs. Faites un dessin de la fragilité pour qu'il comprenne.

Bref, c'est difficile pour moi de faire mon deuil, on était si proches, mes 3000 écus et moi... On m'a conseillée d'aller les pleurer sur sa tombe et je l'ai fait, j'en ai même profité pour l'ouvrir un peu et voir s'il allait bien (et j'ai regardé, il n'avait pas de clé sur lui)(ni 3000 écus). Il allait bien, mais il était mort et sans un sou. Ça enlève beaucoup de son charisme, j'ai trouvé, c'était dommage. En tous cas il avait laissé une lettre pour dire à quel point j'étais merveilleuse et autres évidences, mais il y a un passage que je ne lis pas bien. Déjà parce qu'il a écrit ça mourant et donc ça tremblotte, mais aussi parce que je l'ai lu à minuit en plein cimetière et qu'Anatole s'était fait dessus et donc je n'arrivais pas à me concentrer. Je te demande donc ton avis en toute objectivité de poney rose, OH ! Dessinez un poney rose ! Je te retranscris la phrase dans son contexte :

blablablablabla Merci de faire respecter mes dernières volontés. Il existe une probabilité non négligeable que tu fus ivre lorsque tu en as pris connaissance la première fois, aussi te les rappellerai-je car elles ne sont pas nombreuses :
Octroyer le fief de son (ton) choix à mon ami et frère d’armes, le très méritant Lenanceendu25.
Que tu fasses vœu de chasteté en mémoire et respect de ton seul amour véritable.


Voilà. Ah si, Je précise qu'à la suite il a mis "Oui, moi, oui, pffff."

Qu'est-ce que tu comprends, toi, en lisant ça ? A part qu'il t'a pas transmis de titre ?

Réponds-moi vite !

Gros poutous poutous,

Je signe moi même Anatole, donnez moi ça :

MAO

Ah mes sceauuuux ! oubliez pas mes sceauuuuuux !



Ils sont beaux, hein ? Vous croyez que je peux les mettre en grand sur mon château ? Bon, vous l'envoyez ce pigeon oui ou non ? Je suis toujours obligée de vous attendre !

_________________
Lotx
Depuis l'annonce tragique des dernières élections royales, le garçonnet avait jugé plus prudent de prendre retraite loin, très loin des intrigues royales. En effet, certain que d'ici quelques jours des troupes d'armées royales guidées par on ne savait quel démon allaient parcourir le royaume pour massacrer à qui mieux mieux, il avait décidé de se retrancher à un endroit où personne n'aurait été le chercher: les latrines de l’archevêché. Après tout, chacun s'attendrait à le voir s'enfermer dans les caves. Quant à la file immense de clercs se tenant douloureusement l'entrejambe on mettrait sans doute cela sur le compte d'un problème intestinal, les constipés n'étant assurément pas personnes rares au sein de l’Église.
Ayant installé une large poutre en bois pour bloquer l'entrée, il avait alors pris siège à l'endroit consacré et de la même manière que le nouveau roi devait siéger sur son propre trône (enfin si l'on considérait que le roi régnait fesses à l'air). En guise de sceptre une belle collection de bouteilles lui permettrait de patienter le temps d'un règne tandis qu'un balai originellement destiné au nettoyage des lieux ferait office d'épée si un soldat (ou un moine au bord de l'hydronéphrose) réussissait à enfoncer la porte. Ainsi à l'abri il pouvait alors régler ses affaires courantes en criant à travers la porte ses ordres à ses chanoines. Il parlait alors de leur envoyer faire "des petites commissions" ce qui l'amusait beaucoup. Sa tranquillité était tellement parfaite qu'un instant il se demandât s'il ne resterait pas ici même lorsque le roi aurait quitté le royaume (ce qui, le connaissant, risquait d'arriver vite). Mais le destin semblait en avoir décidé différemment puisque soudainement...


Soubineeeeeeeeeeeet! Y a du courrier pour t...
-AAAAAAAAAAAAARGH!
*SHBAFFFF*


Quelques minutes plus tard, le vicaire avait quitté son lieu de retranchement pour son bureau où il s'attelait à penser le crâne d'un père Sifflard dont la taille de la bosse se rapportait à sa mauvaise humeur.

Nanmé comment j'aurais pu savoir aussi que tu avais fait creuser un tunnel sous la chapelle permettant de rejoindre directement les latrines pour... euh... Pour y faire quoi d'ailleurs?
-Là n'est pas la question soubinet, tu m'as donné de la trique! Tu as érizé une protubérance qui est devenue rouze et gorzée de sang. Turze...
-Oui enfin bon... Qu'est-ce que t'aurais fait toi si t'avais vu une tête sortir du trou pour apparaître pile devant ton... 'fin... au niveau de... entre les deux... euh...
-Ben la situation s'étant déza présentée, ze peux t’affirmer que...
-Ouais nan, j'veux pas savoir en fait.
-Raaaah! Et puis qu'est-ce que tu fais de tes mains? Bande mieux que ça... ma tête!
-Ah non hein! Si j'serre plus après tu vas encore m'dire que tes flux sanguins descendent pluss correctement. J'te connais!
-Humpf, me faire ça à moi! Alors que ze ne faisais que venir en missionnaire pour t'apporter un messaze...
-Ah ouais tiens. C'était quoi au fait?


D'une main branlante, le clerc vicieux tendit la missive au nabot qui se tenait derrière lui. Ce dernier lâcha les bandages ainsi qu'un grognement à la lecture des premiers paragraphes. Une discussion se lança alors au sujet de la réponse la plus adaptée à fournir et puis, rapidement, on envoya une oie blanche -animal que l'on considérât comme le plus adapté- porter le nouveau message.



Chère dame,

je dois avouer que vous avez été étonnante, votre écriture ressemble comme deux gouttes de liqueur à celle de Mao et on aurait facilement pu tomber dans le piège. Mais vous avez fait une grossière erreur. Une erreur fatale même! Vous avez dit que Mao était numéro un du trucmachinchosisme OR chacun sait que c'est pas vrai puisque c'est moi le numéro un et qu'elle elle n'était que le larbin accessoire dont je tolérais la présence dans l'organigramme de par mon auguste mansuétude. Et forcément la vraie Mao elle le savait ça. Pis en plus je veux pas dire mais la vraie Mao elle est pas aussi frolix *barré* elle fait pas des phrases aussi bien. Elle a un vocabulaire un peu limité la vraie Mao (je peux pas la blâmer d'être moins intelligente que moi, notez bien, c'est pour ça qu'elle est que numéro deux) et donc elle aurait pas eu un discours aussi construit. Vous vous êtes donc fait avoir.

M'enfin comme je suis gentil, pour le reste de la missive je consent à faire COMME SI vous étiez la vraie Mao.

Chère Mao, j'apprends avec beaucoup de tristesse la perte de tes 3000 écus (et accessoirement de Roudoudou) et reçois donc toutes mes condoléances à ce sujet. Mais bon comme on dit, un de perdu dix de retrouvés donc ça m'étonnerait pas que tu touches bientôt 30000 écus hein?

Je note cependant que dans son testament feu ton mari était un cuistre! Farpaitement! Il a donné un fief à un illustre inconnu dont tout le monde il s'en fout alors que moi, MOI, le meilleur porteur de parole qui fut jamais à son service (et aussi le seul) j'ai même pas le droit à une enluminure dédicacée d'un joueur de soule célèbre.

Pour le reste c'est très simple. La chasteté en fait c'est toute une manière de vivre qui aboutit à une finalité seule: ne pas avoir de gosses. Alors le plus simple ben c'est de deviendre prêtre et... ah non attends, Sifflard me dit que ça marche que si on parle d'enfants reconnus. Bon, ben dans ce cas tu peux tout simplement ne plus épouser personne. Et quand tu vois un noble l'envoyer se faire marier avec quelqu'un d'autre. Par exemple quelqu'un de ta connaissance qui n'aurait pas eu la chance d'hériter d'un titre de ton mari et qui aurait (au hasard) un nom commençant par "Lo" puis une lettre au milieu et se terminant par un "x". Ça doit bien pouvoir se trouver ça hein?

Sinon y a Sifflard qui se propose aussi pour te montrer les différentes manières de ne pas avoir de descendance. Après, au pire, s'il arrivait un petit accident il suffirait juste que les gens ne soient pas au courant hein? Y a des décoctions très bien pour ça, ou alors, tout simplement, des aiguilles à tricoter. 'Faut pas trop, trop s'inquiétationner non plus, c'est pas comme s'il t'avait demandé de rester sobre ou de vivre dans la pauvreté hein?

Mille colombes,
Mgr Lotx


_________________
Authentique prêtre aristotélicien en connexion directe avec le Très Haut. Baptêmes, mariages, retour de l'être aimé en 48 heures, repousse votre belle-mère.
.mahaut.
- Vous dites ?
- Je dis que vous avez reçu une oie.
- Vivante ?
- Trois fois que je passe la serpillère. Vivante, donc. Bieeeen vivante.
- Oh. Excusez-moi.


Anatole se retira légèrement de la porte et l'aubergiste entendit un dialogue démarrer avec une personne plus éloignée. Au bout d'un moment, le limousin repassa la tête par la porte, l'air découragé.

- Elle demande s'il y avait un paquet cadeau avec. Un gros ruban, tout ça.
- Nan.
- Il dit que non, il n'y en avait pas.


Malgré la distance, l'aubergiste entendit nettement un juron sortir de la pièce.

- Notez, il y a comme un courrier attaché avec.
- Il dit qu'il y a peut-être un courrier avec. Excusez-moi.


Il repassa la tête en arrière avant de la ramener vers l'aubergiste, précipitamment.

- Je vais vous poser une question bizarre.
- Ha ben d'habitude vous prévenez pas à l'avance.
- De quelle couleur est l'oie ?
- Euh... Blanche.
- Il dit qu'elle est blanche ! Vous êtes sûr qu'elle n'était pas rose ?
- Non non, blanche. On voyait bien le logo "oie blanche périgourdine" dessus.
- Ah, voilà. C'est bien un courrier de Lotx, dame Mahaut !


Le petit cri de joie parvint jusqu'au rez de chaussée de l'auberge, faisant lever les yeux des clients attablés.


- Et euuuh... vous la prenez, du coup ?
- Pensez donc ! Une véritable oie blanche périgourdine ! Faites monter !


Peu de temps plus tard, l'aubergiste fut rappelé pour "question urgente". Il était habitué au fait, désormais, et était moins proche de l'apoplexie que quand on l'avait fait venir en pleine nuit, pour une question de vie ou de mort et qu'il avait dû trancher si oui ou non les petits motifs à fleurs de la tapisserie avaient été dessinés à la main ou pas.
En entendant la requête de la folle, il laissa échapper un petit sifflement.


- Vous voulez ma mort ?

Néanmoins il céda. Et bien vite, on apporta un rat d'égout déguisé en roy (avec une petite couronne accrochée aux oreilles) pour qu'il porte le message suivant :






Cher choubi,

C'est bien ce que je pensais, les moines ont profité que tu leur tournais le dos (je t'avais bien dit de ne jamais le faire !) pour te lobotomiser par derrière. Buvez un coup, Anatole, z'êtes tout rouge.
On ne dira jamais assez le danger que provoque un séjour prolongé chez les moines, ces assassins en robe de bure sans même un froufrou de dentelle. Tenez, ils ont tué mon mari, déjà. Si, Anatole, si ! Ce n'est pas parce qu'on n'en a pas eu la preuve que c'est pas ça ! Je l'ai bien lu dans son testament, hein. Entre deux lignes. Codé. Si vous prenez toutes les voyelles des lignes impaires et que vous les mêlez aux consonnes des cinquièmes mots par colonne vous obtenez "Rome m'a tuer". Il ne m'en faut pas plus pour me faire une opinion. Oh non.

Bon, mais passons, de toute façon tout cela se finira devant Aristote, robe de bure en dentelle ou pas. Enfin sauf pour moi, j'ai poney. Reprenons.

Je vais essayer de communiquer avec toi comme je le faisais avant, en prenant des mots simples et en articulant bien. Oui, Anatole, vous vous efforcerez de bien articuler en écrivant.

Je conçois ton désarroi en découvrant que Roudoudou étoilé ne t'a pas mentionné dans son ultime courrier. Mais vois-tu, en bon éleveur qu'il était, il savait se montrer très proche des animaux et il était très doué pour communiquer avec eux. Il savait penser comme eux, se mettre à leur niveau pour mieux comprendre leur problème. Fatalement, il a donc développé une mémoire de poule, voilà. Tu sais qu'un matin je suis entrée chez lui en faisant comme si c'était normal eh bien il n'a même pas réagi. Du coup je lui ai dit qu'on était mariés et il m'a crue. Tu peux essayer avec ton évêque. Tu entres, tu dis que tu es envoyé par Aristote, juste pour prendre quelques notes, qu'il ne se dérange pas et hop, pastèque, tu es pape.

Tu comprendras bien que cette méthode nécessite une grande psychologie et que donc, il faut se concentrer sur un type de cible. Je te laisse les hommes d'église et je me concentre sur les nobles célibataires vieillissants. Il se peut néanmoins qu'on entre en concurrence à un moment donné. Nos liens d'amitié sauront y résister, d'autant plus que j'ai un décolleté vachement plus garni que le tien. Si, Anatole, si ! Quand même ! Cessez de ricaner !

Il y a cependant un point de ton courrier que je trouve peu clair. Quand tu dis "un de perdu, dix de retrouvés" et que tu l'appliques à mes 3000 écus, est-ce que ça implique une date limite de réalisation ? Car j'ai beau attendre, pour l'instant rien en se décide. Si aucun noble de 80 ans ne passe à a portée, j'ai bien peur de devoir rapidement faire appel aux largesses paternelles et va savoir pourquoi, je ne suis pas en odeur de sainteté (un comble pour moi !) depuis que j'ai eu accès aux cuves de cognac dans la grange-dont-je-ne-devais-pas-être-mise-au-courant. C'est fou ce qu'un père peut se montrer borné. Une question de générations, sans doute. Ah et en parlant de générations, je me disais... quand tu dis qu'il suffit de ne pas avoir d'enfants, est-ce que ça implique de ne pas concevoir l'idée même de s'entrainer à en faire ? Parce que c'est différent, hein ! Le mariage est un combat, et personne ne songe à combattre sans un entrainement digne de ce nom. Je me suis mariée sans préparation et résultat, mon époux est mort. J'ai la ferme intention de ne pas recommencer cette technique. On n'aura qu'à dire que si je dis clairement "pouce ça compte pas" alors je n'irai pas à l'encontre de ce voeu. Et d'ailleurs, pourquoi dit-on faire vœu de chasteté ? Depuis quand est-ce qu'on veut être chastetueux ? Je fais confiance en ton jugement, je sais que tu ne me diras que des choses positives à ce sujet. Tu as toujours été pour l'entrainement, Sifflard me l'a souvent répété. Ces corps adolescents qu suent dans l'effort, les mains qui glissent, l'esprit de corps... En revanche je n'ai jamais saisi son allusion aux savonnettes, il faudra qu'on en discute sérieusement un jour prochain.

J'attends ta réponse avec impatience !

Le temps de patienter, et pour amuser le petit peuple, je te fais parvenir ce courrier par l'incarnation même de Von ! Pour une fois que le peuple est familier de l'esprit royal !

Gros poutous poutous

Anatole, vous me mettez des licornes arc en ciel un peu partout hein. Et vous me broderez "bottez-moi les fesses" sur le costume de la vermine. En rose, naturellement.
Allons allons, pressons ! J'ai un foie gras d'oie à faire, moi ! Attrapez-moi la bestiole. Petit petit petit petit... Elle a l'air bête, hein ? Ca me rappelle le Périgord. Petit petit petiiiiit ! Mais si, regardez, on dirait Planta ! Petiiiiiiiit ! Hiiii, elle a tourné la tête, vous voyez !


_________________
Lotx
Et pendant ce temps, au parti commun... enfin à l’archevêché de Rouen, le garçonnet était en proie avec la responsable déléguée du personnel des chanoines et bonnes sœurs du diocèse : la sœur Marie-Arlette.

Nanmé écoutez ma soeur, moi j'entends bien quesque vous dites hein? M'enfin limitationner le temps de prières à trente-cinq heures par semaine ça m'paraît quand même un tantinet difficile à envisag...
-Ah oui? Et vous pensez que ce n'est pas difficile pour nous de travailler dans ces conditions? On en parlait hier avec les prêtres responsables du culte de Saint Dycaliste, je leur ai dit comme ça "CAMARAAAAAAAADES! On nous exploite! On travaille dans des conditions iniques! Ignobles" Eh bien ils étaient tous d'accord. Parce que la force vive de l’Église, monseigneur, c'est nous!
-Ouais, ouais j'connais l'rofrain... Bon, et si j'vous offrais un congé maternité ça vous irait?
-...Vous voulez dire un congé maternité pour des prêtres?
-Ben ouais, on sait jamais hein? Si vous prendez le père Sifflard par exempl...
-Ah oui tiens parlons-en de lui!
-Ben quoi quesqu'y a?
-Les camarades et moi-même ne supportons plus le harcèlement -oui, j'ai bien dit le harcèlement!- dont nous sommes victimes! Passe encore qu'il regarde sous nos soutanes, passe encore que l'on récupère les cierges dans un état déplorable mais qu'il se soit imposé pour faire les visites médicales ah ça non!
-Oui mais enf...
-Vous saviez que la moitié des bedeaux était en dépression nerveuse hein? Et puis d'ailleurs en parlant de conditions INACCEPTABLES de travail, il faut impérativement creuser de nouvelles latrines. Parce que l'autre jour, je ne sais pas quel est le sinistre empaffé qui y est resté pendant cinq heures mais je ne vous explique pas l'état des bénitiers. Et qui c'est qui nettoie, c'est le prolétacléricat! Déjà qu'à chaque fois qu'on y va on y entends de curieux râles... Alors je vous le dit tout de suite, si vous ne réglez pas immédiat... HIIIIIIIIIIIIIIIIIIII!
-Allons bon... Quesque z'avez à beugler? J'vous ai même pas encore évoqué la délocalisation de l'église de Dieppe dans le Saint-Empire...
-LA! LA! UN RAT! HIIIIIIIIIII!
-Ah ouais tiens? Oh, regardez, il a une petite couronne! Oh et un petit message!


Un peu plus tard, un peu plus loin.

CAMARAAAAAAADE aubergiste? Pourriez-vous m'indiquer où se trouve la dénommé Mahaut, j'ai un message pour elle et on m'a dit qu'elle était très intéréssée par l'écoute de mes cent soixante-treize points pour l'amélioration des conditions de travail des vassaux.

Ben ouais quoi, il fallait bien trouver un truc pour l'encourager à porter le message elle-même...



Chère Mao,

je te trouve quand même vachement égoïste, si, si. Tu as déjà héritationné une fois, laisse-en un peu aux autres quoi. Oui, le partage des richesses que ça s'appelle. Je veux dire, pas que les hommes d'église soient pas grave affriolants hein? Enfin je parle de leurs titres évidemment. Mais bon, d'un point de vue purement héréditaire c'est quand même vachement plus dur d'héritationner d'un titre d'évêque que de vicomte hein? Déjà rien que pour se marier c'est un peu compliqué.

M'enfin bon, de toute manière puisque tu tiens à conservationner notre amitié en cas de compétition la question ne se pose même pas. De toute façon moi au moins je pourrais les confesser directement le mariage alors qu'avec toi ce sera plutôt la pénitence, forcément.

Pour quesqu'y concerne le "un de perdu, dix de retrouvé" note bien que c'est pas contractuel. Je veux dire si on prend la virginité de Sifflard par exemple ben il en a jamais retrouvé hein, même pas une. Bon, il a pas beaucoup cherché aussi faut dire. Par contre il a trouvé dix bonne-sœurs. Alors tu vois, peut-être que tu retrouveras pas 30.000 écus mais 30.000 bonne-sœurs.
Pour les enfants bien sûr que tu peux t'entraîner à en faire. Tant que tu échoues c'est bon hein? A la limite le mieux ce serait de t'entrainer avec quelqu'un avec qui tu risquerais pas d'avoir des enfants. Bon alors y a Von mais je sais pas s'il serait d'accord. Je peux demander à Flex si tu veux? Ou alors moi je veux bien t'entraîner. Comme je suis chaste aussi (ainsi que pur et innocent) ben nos deux chastetés combinés vont former une super-chasteté qui barreront la route à toute natalité hein? Pis en plus comme t'es noble et que moi je suis beau et intelligent on y gagne tous les deux!

Bon au sujet du concept de chasteté c'est un peu compliqué hein? M'enfin disons que ça remonte au temps d'Aristote. Et Aristote en fait il était pas très beau et il avait pas beaucoup de succès avec les filles. Du coup il s'est dit "si moi je peux pas eh bien personne ne pourra" du coup il a inventé la chasteté. Et depuis comme tous les cardinaux sont restés des vieux tromblons ben y z'ont conservationné l'idée en fait...

Voilà, sinon je te fais parviendre ce message par la soeur Marie-Arlette, ce qui permettra de m'en débara... enfin de te faire profitationner de sa verve. J'suis sûr que tu seras très, très intéréssée par sa conception sur comment que tu dois traiter tes employés. Si, si.

Bisouilles à la castillonnaise,
Mgr Lotx


_________________
Authentique prêtre aristotélicien en connexion directe avec le Très Haut. Baptêmes, mariages, retour de l'être aimé en 48 heures, repousse votre belle-mère.
.mahaut.


Cher Choubinet,

Je pense avoir tout bien compris. Je savais bien que je n'avais qu'à te demander et que tu saurais m'éclairer ma lanterne, même si techniquement tu es trop loin pour le faire et que j'en ai pas besoin parce qu'il fait jour, mais c'est une matamore, quoi, une figure de sylphide.

Donc, si je fais vœu de chasteté envers mon défunt mari, alors cela veut dire que je ne dois pas avoir d'enfant avec lui. En revanche, j'ai le droit de m'entrainer, du moment que je ne finalise pas et que tu es là pour témoigner que tout était très chaste. Ensuite, j'hérite d'un titre d'évêque.
Je dois dire que tu m'enlèves une épine du pied, même si encore une fois tu es trop loin et si je n'ai pas d'épine dans le pied, rapport au fait que je garde toujours mes escarpins et que j'évite soigneusement les trucs qui piquent (on m'a raconté la belle au bois dormant et je te le dis, à moi on me la fera pas, les trucs qui piquent c'est pour les nunuches ou pour les pauvres).

Ce que je ne comprends pas, c'est que j'ai cru comprendre que les moines et curés faisaient eux-aussi voeu de chasteté, rapport à Aristote qui arrivait pas bien-bien à conclure. Bon, je veux bien que la solidarité ce soit un truc important pour vous (les nuits dans les dortoirs, les punitions collectives, toussa, ça créé des liens). Mais pourquoi est-ce que vous promettez de ne pas avoir d'enfants avec mon ex-mari ? Je veux dire, il était si demandé que ça ? Il avait coutume de venir vous voir dans les monastères ? Je ne cache pas que je suis un peu inquiète car se dévoile ainsi tout un pan de sa personnalité que je n'avais pas soupçonné jusque là. Etait-il un chaud larbin ? Anatole, je ne vois pas pourquoi vous vous étranglez de rire, c'est très vexant. Je n'avais jamais saisi pourquoi il avait voulu aller au monastère pour ses derniers jours...

Je vous préviens officiellement : si jamais un enfant était né de vos rencontres avec Roudoudou (le Grand Machin nous en préserve !), je refuse catégoriquement de prendre en charge ses frais d'éducation, et encore moins de le reconnaître et de lui filer un titre. S'il est doué, il a qu'à s'en trouver un tout seul, comme les grands. Non mais.

De mon côté, il va sans dire que si je me remarie avec un marquis ou un Prince comme je l'ai prévu dans ma top-priority-list (après acheter une tiare et redécorer le Louvre), et que si ce dernier insiste pour avoir une descendance, je te ferai signe pour que tu assistes à la chose. Peut-être auras-tu la chance de porter l'enfant de mon futur mari pendant que je m'occuperai des détails pratiques (acheter une nourrice, trouver un endroit très loin pour le placer et cirer le haut des marches à la sortie de la chambre de mon futur-époux). Il va sans dire que nous partagerons tout : toi, la souffrance de l'enfantement, moi, la douleur de devoir partager mes bouteilles avec le futur-époux qui voudra fêter ça. Et ne t'en fais pas pour le retour de couches (c'est amusant comme expression, je ne savais pas qu'il y avait un service de retour à l'envoyeur, c'est très vicieux un bébé), je suis sûr que tu retrouveras ta taille de bête très rapidement.

Je te remercie d'avoir su apaiser mes esprits.

Il se peut qu'on aille te chercher, un jour, peut-être, alors ne bouge pas trop de ton trou.

Bien éthyliquement,

Mahaut de Verteuil, de Barbezieux, de Nabinaud et de toutes les poules



PS : J'y pense ! Je te renvoie Soeur Marie-Arlette (que je te remercie d'avoir envoyée avec ce courrier). J'ai bien évidemment écouté attentivement ses réclamations et conformément à tes recommendations sous-entendues, j'ai dit oui à tout. Ne me remercie pas, c'est normal. J'espère quand même qu'elle arrivera entière, elle n'arrête pas de pleurer nerveusement en criant "révolution" et en levant le poing, ça fait 3 fois qu'Anatole se prend un coup, je pense qu'elle lui a pété le nez. Qu'est-ce qu'on a rigolé. Pour veiller sur elle, je te joins un des paysans locaux qui vient régulièrement me dire qu'il en a gros, je me suis dit que ça pouvait t'intéresser. Gros poutous poutous.

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