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[RP]Les adultes craignent l'enfance, symbôle de leur mort*

Anne_de_breuil
Chapitre I


Elle retenait sa respiration essayant vainement entendre son coeur battre au même rythme que les cloches de l'église. Ding ! Dong ! Papam papam !
Ses yeux verts fixaient intensément les ombres du mur de la chambre, voile gris sur gris, la vie semblait éteinte entre les murs sombres du couvent de Hastings.
En songe parfois, elle voyait le visage d'une femme blonde et grande qui penchait son visage vers elle sans un sourire. Elle se voyait tendre ses bras vers ceux de la dame mais toujours, celle-ci s'effaçait et ce n'était que bures qui l'entouraient.


One ! There is only one God, which thou shalt love and like perfectly.

Elle ne connaissait de perfection et d'amour que ces rêves secrets que jamais on ne la laisserait révéler sur cette île. Un jour, elle ne serait plus une enfant apeurée non, un jour elle n'aurait plus peur des battements de son coeur. Un jour, elle serait une dame devant qui on ne hausserait pas le ton, devant qui on baisserait les yeux.


Rien à faire, son coeur ne suivait pas le rythme des cloches.


Two ! Thou shalt respect His Holy Name, avoiding blasphemy and false oaths.

Un Dieu qui la laisse pourrir dans un tel endroit ne peut qu'être mauvais et ceux qui le servent ne sont que fourberie et hypocrisie.
Un jour, oui un jour, elle fera de l'amour son vice et d'elle la perfection. Elle sera déesse et niera le Très Haut. Un jour rien ne lui fera peur même pas cet Lune qu'ils lui balancent à tout va pour la faire taire.

Ah ! Là son coeur à fait boum en même temps que la cloche tintinabulait.
Un jour elle sera maîtresse de tout, du temps, de la vie, de la mort...


Anne, you're a devil ! In the night you must close your eyes, not to see the moon.

La voix surgissait si près de ses oreilles que la fillette blonde tressauta sur le lit de paille. Elle ne perçut qu'un instant après la douleur sur sa cuisse du bâton qui avait été assené sur sa peau avec fermeté.

Les yeux verts de l'enfant se posèrent sur la soeur aristotélicienne qui lui faisait face. Elle la haïssait et ne le cachait pas.


Get lost in hell, murmura la fillette entre ses dents mais pas assez fort pour éviter un autre coup de branche de noisetier.

Des heures s'écoulèrent sans qu'elle laisse pour autant ses paupières couvrir l'iris de ses yeux. Elle gardait la machoire contractée de rage se promettant d'un jour faire souffir ses bourreaux. Elle imaginait qu'eux aussi verraient leur sang s'écouler sur leur peau et sentiraient la douleur fulgurante du bois qui fouette ce même sang.

A l'aurore, elle se leva nue et fragile. Contrairement aux autres enfants qui vivaient là, Anne se drapa de ses vêtements sans attendre qu'on lui en donne l'ordre mais cette fois, au lieu de rester assise sur le lit à attendre l'appel quasi militaire des sœurs, elle quitta le dortoir pour se faufiler dans le couloir des cellules.

Elle n'avait jamais compris ce qui poussait ses femmes à vivre en recluses dans des pièces si étroites que ces cellules grises et tristes. Elles lui apparaissaient comme n'ayant aucune âme, comme étant vide de tout sentiment. Chaque jour elles se pliaient aux même horaires, même rituels sans autre distraction sans doute, que de faire subir aux enfant qu'elles avaient en charge leur frustration.


Get lost in hell, dit-elle de nouveau tandis qu'elle parcourait le couloir pour aller jusque dans les cuisines. Allez mourir, dit-elle cette fois dans sa langue faisant honneur à ses origines.

Quelques instants plus tard, elle était de nouveau dans le couloir, sa main retroussée dans sa manche tenait un couteau à la lame aiguisée. Anne sentait à la fraicheur qui s'immisçait entre les murs que la matinée se levait apportant avec elle des courants froids, un voile de brouillard typique de cette île maudite et une rosée imperceptible qui se coucherait sur chaque brin, chaque pétale avant que les rayons de l'Astre solaire viennent les tuer goutte après goutte. Elle détestait ce soleil cruel qui régnait en maître au milieu des monstres.

C'était bientôt l'heure. Anne amena sa main frêle à la lumière, la lame brillait prête à s'engorger de sang.

La sorcière allait bientôt se lever et découvrir que c'était elle ici qui décidait de son propre sort, elle qui avait des deux, les ongles les plus acérés, elle qui...

...avant qu'elle n'ait pu entailler la chair de qui que ce soit une main ferme se ferma sur sa peau entourant son poignet. Déjà elle se débattait de toutes ses forces, sa rage prenant le pas sur sa raison. Ses poings tambourinaient de toutes ses forces la poitrine opulente de la sœur qui lui faisait face. Cette dernière lui lançait un regard sans équivoque.


Je vous tuerai, je vous tuerai toutes ! I will kill you all !

Elle n'aurait su dire combien de temps après cela elle était restée enfermée dans ce placard à attendre une sentence qui ne venait pas. La faim et la soif la tiraillait depuis des heures déjà lors qu’enfin la porte s'ouvrit.

La lumière ne fut guère une bénédiction. Trop longtemps dans le noir elle devait garder ses yeux fermés quelques minutes avant de s'habituer de nouveau au jour. Un homme qu'elle ne connaissait pas -d'ailleurs, il n'y avait jamais d'homme dans ce couvent- tenait sa main à presque lui broyer les os. Anne voulait pleurer mais au delà de sa peur son orgueil l'en empêchait. Elle ne pleurerait pas, elle ne leur ferait pas ce plaisir. Ils avancèrent tous les deux jusqu'à la lourde porte dans la cour et sortirent hors du couvent. Longtemps elle avait rêvé de s'échapper de cet endroit et pourtant au moment où elle le quittait, la peur déchirait ses entrailles.

L'homme avançait à grand pas, elle avait bien du mal à le suivre. Pas un mot n'avait été échangé entre eux, aucune soeur n'était venu la voir depuis qu'on avait enserré son poignet. Après avoir parcourut plusieurs rues, Anne sentait les muscles de ses chevilles endoloris et ses pieds gonflés. Elle continuait cependant à retenir ses larmes.

La nuit tombait et Anne comprit qu'elle avait passé toute sa journée enfermée dans le placard du couvent à ruminer ses rancœurs... Elle cherchait un moyen fou pour s'échapper de la poigne de l'homme et repartir au couvent terminer ce qu'elle avait commencé. Du haut de ses onze ans elle avait une foi en elle à toutes épreuves. Parfois, elle essayait vainement de retirer sa main de celle qui la faisait souffrir.
Un vent frais vint chatouiller ses narines et lui apporter une certaine douceur dans la douleur. Des odeurs salines se faisaient sentir. Anne voyait à travers le brouillards des formes devenir plus distinctes : des murs... des tonneaux... un quai... un bateau...

Lorsqu'ils arrivèrent tous deux sur le ponton d'amarrage de l'un d'eux, l'homme lâcha sa main mais lui signifia d'un regard qu'elle avait tout intérêt à ne pas bouger. Elle s'exécuta en restant droite comme un i.

Un autre homme était là, une pipe coincée entre ses lèvres dont il se saisit pour parler.


- Is she ?, demanda l'homme à la pipe
- Yes.
- Got some money ?
- Here !


La fillette assistait à l'échange sans mot dire mais en maudissant son destin jusque là inconvenant.
L'homme qui l'avait accompagné jusqu'au port d'Hastings lui fit signe de les rejoindre. Son compagnon se pencha vers elle lorsqu'elle fut près d'eux.


- Tu es française je crois. Tu vas devoir venir avec moi sur ce bateau, l'église ne veut plus de toi sur cette île. Tu repars dans ta famille.

Elle acquiesça refusant toujours de prononcer le moindre mot se demandant tout de même ce qu'il entendait par famille. Elle n'avait jamais eu que sa mère qui l'avait abandonnée dans ce couvent où elle avait découvert que si l'Enfer existait, le Très Haut lui était en retraite spirituelle depuis déjà trop longtemps. Peut être même était-il mort, ou juste mauvais...




* Peur et amour, Yolande Chéné


1. Il y a seulement un Dieu, il est amour et perfection. 2. Vous respecterez Son Nom Saint, évitant le blasphème et les faux sermons.

3. Anne, tu es un démon ! La nuit tu dois fermer tes yeux pour ne pas voir la lune. 4 et 5. Vas pourir en enfer 5. je vous tuerai toutes

- C'est elle ?
- Oui
- Tu as l'argent ?
- Tiens !

_________________
Rosalinde
[Paris]


La chambre était celle d'une demeure propre et cossue, qui sans nul doute reflétait l'origine et la condition des propriétaires des lieux. Face à la fenêtre, assise à une table de travail sous le regard distrait de sa mère, une enfant rousse lisait, avec une facilité déconcertante pour son âge, quelques vers tirés du Lai du Chèvrefeuille de Marie de France.

- De ces deux il en fut ainsi
Comme du chèvrefeuille était
Qui au coudrier s’attachait :
Quand il s’est enlacé et pris,
Et tout autour du fut s’est mis
Ensemble peuvent bien durer.
Qui plus tard les veut détacher,
Le coudrier tue vivement
Et chèvrefeuille mêmement.
Belle amie, ainsi est de nous.
Ni vous sans moi, ni moi sans vous.


Mais l'enfançonne montrait quelque signe d'exaspération. Relevant la tête vers la figure maternelle, qui était occupée à inspecter le travail de servantes, qui refaisaient le lit, elle demanda avec humeur :

- Mère, pourquoi sommes-nous obligés d'accueillir ma cousine Anne ? Et pourquoi doit-elle dormir avec moi dans MON lit ? Vous n'allez tout de même pas la considérer comme votre fille, n'est-ce pas ?

Un "tsssss" fut la seule réponse qu'elle put obtenir de sa mère.
Léonie était en effet bien trop occupée à calculer combien cette nièce allait leur coûter, et se demandait ce qu'il lui avait pris d'accepter de l'accueillir en son foyer. Enfin, elle espérait qu'Anne serait suffisamment sage pour parvenir à contenir les excès de caractère de sa fille unique, Rosalinde, et jouer pour elle le rôle d'une sœur aînée, ce qui lui permettrait de pouvoir plus à son aise vaquer à ses occupations de veuve fortunée.


- Les voilà !

Et déjà la petite ne tenait plus en place sur son siège, le doigt pointé vers l'extérieur. On pouvait en effet distinguer deux silhouettes au travers du verre translucide. Jupons en main, la voilà qui descend de son perchoir, et se rue hors de la chambre.

- Rose, ne courrez pas dans l'escalier ... !

C'était peine perdue, la gamine était trop impatiente de découvrir sa cousine. Course inutile, d'ailleurs, puisque sa mère eut tranquillement le temps de descendre les escaliers avant que l'huis de s'ouvre, face à une Rose plantée au garde-à-vous devant l'entrée.

Dans l'embrasure apparurent l'homme qui avait été chargé d'aller récupérer la petite de Breuil à Hastings, et Anne.


- Dieu que cette enfant est sale.

Voilà qui furent les premiers mots de Léonie à l'encontre de sa nièce.

Mais sa fille ne l'entendait pas de cette oreille. Armée de son plus beau sourire, elle exécuta une révérence parfaite, comme on le lui avait appris.


- Mademoiselle Anne, il m'est grand plaisir de vous rencontrer.

Singer les minauderies des plus grands était d'ailleurs un des passe-temps favoris de Rosalinde. Se redressant, elle parcourut ensuite les trois enjambées qui la séparaient de sa cousine et, pas farouche pour deux écus, déposa un baiser sur sa joue.
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"Dépêchez-vous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." - Giacomo Casanova
Anne_de_breuil
- Dieu que cette enfant est sale.

Déjà le sentiment de colère installé au fond de la fillette s’amplifiait. Que croyez cette femme ? Elle venait de passer plusieurs jours dans un bateau enfermée dans une cabine lugubre - mais toujours moins que le placard du couvent elle devait l'admettre - sans rien manger d'autre qu'une soupe fade et froide et sans échanger un mot avec les rustres inconnus qui semblaient être de pauvres bougres de marins mais qu'elle estimait se résumer à des parasites dans ses rêves de grandeur.

Anne levait ses yeux vers cette inconnue qui la jaugeait. Ses yeux verts réduits à un éclat faible de lumière au milieu de ses cernes ne firent qu'accentuer le regard noir qu'elle lui lançât.
"J'ai essayé de tuer une sœur, je ne me louperai pas avec toi" semblait-elle dire.

Avant qu'elle n'ait cependant pu peaufiner sa rage, une fillette plus jeune qu'elle l'accueillait comme une dame en utilisant des mots juste et une révérence parfaite.

Le visage contrit de la blonde se parfaisait à présent d'un sourire d'ange qui s'intensifia en sentant les douces lèvres d'enfant se poser sur sa joue.

Anne ne connaissait rien aux élans d'affection mais pour la première fois elle sentit qu'elle pourrait peut être se faire aimer et qui sait, aimer à son tour.

Lui restait encore à savoir combien de temps elle resterait dans cette demeure de goût et qui étaient cette femme et cette fille qui l'accueillaient.

Depuis son enfermement dans le placard elle n'avait plus aucune idée de ce que serait sa vie. Elle cherchait sur quelles bases elle pourrait se projeter si on la plongeait juste dans le brouillard.

Murée dans un mutisme sans faille jusque là, Anne comprit qu'il était dans son intérêt de s'en extirper. Elle réfléchit un instant à ce que la dame voudrait entendre.


- Veuillez pardonner mon état, my dear*, les marins ne connaissent et n'offrent pas le confort.

Elle confina au fond d'elle le sourire qui voulait se manifester. L'homme près d'elle n'aurait plus qu'à tout assumer, après tout c'était elle la victime dans l'affaire... en espérant que la dame ne soit pas déjà avertie de ses méfaits au couvent...

Je suis ravie aussi, miss... mais il n'est point convenable de vous laisser m'embrasser dans cet état

Il lui avait fallut chercher chaque mot pour essayer au mieux de parler comme une dame... Par orgueil elle était certaine d'y être parfaitement parvenue.



Ma chère

[Cheffe Aldraien
Merci d'ajouter la traduction des mots en langue étrangère. Bon jeu.]

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Rosalinde
Il y eut dans l'air comme un instant de gêne, personne ne bougeait ni ne parlait. Et finalement, Anne se résolut à leur démontrer qu'elle n'était point muette, en désignant le matelot comme le responsable de son piteux état. Léonie adressa donc un sombre regard au marin, qui baissa la tête, mais ne dit rien. Ces rufians auraient encore été capables de lui faire payer le savon. Haussant les épaules, elle s'absenta quelques secondes en direction de son bureau non loin.

Rosalinde ne répondit rien à la remarque formulée par sa cousine, se contentant de l'observer avec un sourire satisfait. Elle la jugeait assez jolie pour être digne d'être de sa parentèle, malgré la couche de crasse. Léonie ne tarda pas à revenir avec une bourse rondelette qu'elle remit au marin, qui ne tarda pas à s'en aller sans demander son reste.

Une fois la porte refermée, la petite rousse entreprit de tirer sur la manche maternelle.


- Mère, puis-je aller montrer notre chambre à ma cousine Anne ?
- Faites.


Il n'en fallut pas plus à Rose pour s'emparer de la main de la blonde, et de l'entraîner en direction des escaliers. Mais alors qu'elles n'avaient franchi que quelques degrés, Léonie l'interpela.

- Rosalinde ? Dites à Pernelle de préparer un bain.

La petite, qui s'était arrêtée au son de la voix de sa mère ne put retenir une exclamation de joie.

- Un BAIN !


Elle adorait les bains, c'était une fabuleuse occasion de rendre Pernelle, sa nourrice, complètement chèvre. Cette fois ci elle remontait le colimaçon en courant, tirant la pauvre Anne qui devait avoir bien du mal à suivre, jusque dans sa chambre, dans laquelle ladite Pernelle se trouvait, occupée à quelque travail de broderie.

- Pernelle, un bain, mère a dit !

Et comme la nourrice quittait son poste en grommelant, Rose ajouta :

- Plus vite que ça !

La domestique fut bien forcée de s'exécuter, au pas de charge, les ordres de l'enfançonne étaient dans cette maison parole sainte, si ce n'était lorsqu'ils contredisaient ceux de sa mère, qui lui laissait la plupart du temps une totale latitude de commandement des serviteurs de la mesnie.

Une fois qu'elle se fut assuré que Pernelle était affairée à la tache qui lui était échue, elle se tourna vers sa cousine, et, ayant retrouvé toute l'apparence de la douceur, lui proposa :


- Voulez-vous que je vous montre mes filles ?
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"Dépêchez-vous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." - Giacomo Casanova
Anne_de_breuil
"Notre chambre" avait prononcé la rouquine... "notre".. Anne ne comprenait décidément rien à ce qui lui arrivait. Et voilà que l'enfant l'appelait "cousine" à présent.

Elle n'avait pas de famille. Elle n'avait jamais eu de famille si ce n'est une mère dont elle n'avait souvenance et qui l'avait envoyée dans un couvent sur d'autres terres que la sienne.

Trahie par les adultes au seuil de son enfance. Elle n'avait pas de famille. Un jour elle règnerait seule sur le monde entier, d'un bord à l'autre de la terre et si on s'opposait à elle, Anne enverrait ses ennemis plonger dans le vide éternel par delà les mers. Elle n'avait pas de famille.

Pas de famille mais toujours noyée dans l'incompréhension et la surprise, elle se laissait trainer par la petite qui semblait aimer tant la vie.

Anne se surprit à sourire, pas un de ces sourires de circonstance dont elle avait le secret mais un vrai sourire franc. Son estomac se retournait, une sensation étrange secouait ses entrailles, il lui semblait qu'elle allait s'enfoncer là dans le parquet pour ne jamais en ressortir.
Déjà des lucioles l'entouraient de lumière. Ses jambes flageolèrent et Anne eut juste le temps de s'appuyer à un pan de mur pour ne pas perdre l'équilibre.

Sa "cousine" ne semblait avoir rien remarqué trop occupée à donner des ordres comme une dame. Anne se sentait ridicule, sale, insignifiante. Un mélange de colère, de tristesse et de joie lui déchirait les entrailles.

Pourquoi n'était-ce pas elle qui donnait des ordres ? Pourquoi celle qui le pouvait lui inspirait la sympathie ? Avant qu'elle n'ait pu commencer à chercher des réponses, Rosalinde se tournait vers elle tel un ange.


- Voulez-vous que je vous montre mes filles ?

Ses filles... qu'était-ce encore que cette mascarade ? Elle acquiesça tout de même cherchant vainement à comprendre ce qu'elle faisait dans cette maison parisienne ou une inconnue la traitait comme son égal.
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Rosalinde
Ravie à l'idée de pouvoir montrer son cheptel à la cousine Anne, de nouveau elle lui attrapa la main, et alla avec elle s'agenouiller devant un petit coffre en bois peint. Puis, précautionneusement, elle tira sur un ruban noué autour de son cou, auquel était suspendu une petite clé. Avec des airs solennels, elle introduisit cette clé dans la serrure du coffre, et l'ouvrit.

C'était son coffre à elle, ses trésors, dans lequel s'entassaient pèle-mêle toute sorte d'objets, allant d'un mouchoir brodé appartenant à sa mère jusqu'à un peigne édenté, en passant par un petit pot contenant du rouge pour les lèvres. De ce coffre, elle en sortit trois amas de chiffon, qui s'avéraient être des poupées. D'autorité, elle en mit une dans les bras d'Anne.


- Tenez, je vous confie ma première fille.

A titre de précision, elle ajouta :

- Elle se nomme Florie, et c'est une princesse, car elle est la fille du roi Guillaume. Mais comme il était pingre et mauvais je l'ai tué, et maintenant c'est moi la reine.

Continuant à singer des manières maternelles, elle prit la seconde poupée dans ses propres bras.

- Elle c'est ma seconde fille, Marguerite. Comme elle est la seconde elle a du aller au couvent, mais l'abbé était méchant alors je l'ai tué et elle est revenue vivre avec sa chère maman.

Elle déposa un baiser sur le front du petit personnage de tissu, puis du doigt, pointa la troisième poupée, négligemment posée sur le couvercle refermé du coffre.

- Voici Marie. Mais elle a été vilaine, elle a tapé ses sœurs. Alors je l'ai tuée.

Et effectivement, on pouvait voir que la pauvre enfant... N'avait plus de tête.

D'une oreille à l'autre, la Rose souriait, persuadée du merveilleux de ses jeux qui pourtant, comme tous les jeux d'enfants, ont quelque chose de souvent bien répétitif.


- Elles sont belles, n'est-ce pas ?
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"Dépêchez-vous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." - Giacomo Casanova
Anne_de_breuil
C'était la première fois qu'elle tenait une poupée dans ses bras. A l'inverse de sa "cousine", elle comprenait pleinement l'illusion du terme de fille et restait sceptique quant au réalisme des meurtres. Pourtant, sa première pensée fut que cette fillette tout comme elle ne se laissait pas faire et tout comme elle si on venait à la contrarier elle n'hésitait pas à vouloir faire couler le sang.

Anne qui jusque là avait observait la rousse d'un air hagard et admiratif en même temps baissa ses yeux vers Florie qu'elle tenait dans ses propres bras.


- Ces enfants sont très jolies, elle doivent tenir de leur mère, la reine, dit-elle en souriant.

C'est la dernière poupée qui suscitait une grande curiosité chez la blonde qui désormais ne pouvait détacher ses yeux vers d'un cou de chiffon qui ne voyait aucune tête accrochée à lui. Elle n'avait jamais eu de jouet et se demandait si dans ses jeux elle auraient prit la décision du couper la tête à une chose si précieuse qu'une poupée où si elle aurait fait de chacune de ses enfants des modèles d'obéissance.

La réalité revint à elle en un éclair lorsque par curiosité elle balaya du regard la chambre de Rosalinde. Une chambre bien différente du dortoir qu'elle avait connu au pays anglois. Avait-elle rêvé ou sa "cousine" avait-elle dit que c'était "leur" chambre ?
Pouvait-elle espérer un jour voir ses propres trésors être rangés dans un coffre de bois ? Dormirait-elle le soir même dans des draps qui appelaient le sommeil ?


Dites-moi... qui êtes-vous ? Nous ne nous sommes jamais vues mais vous m'appelez cousine. Vous me montrez vos filles mais je ne connais pas votre nom ?

Je n'ai pas de famille ! Je suis seule !


Elle avait prononcé les derniers mots avec une volonté farouche. Anne balançait entre la joie d'un confort presque palpable et la crainte de perdre toute la liberté dont la solitude lui faisait jouir.

Et d'abord qui était-elle elle même ? Si cette enfant qu'elle aimait déjà était de sa famille alors tout ce qu'elle avait toujours pensé être s'envolait et elle devrait renaître. Le voulait-elle vraiment ? Avait-elle envie d'aimer quelqu'un d'autre qu'elle même ?

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Rosalinde
- Dites-moi... qui êtes-vous ? Nous ne nous sommes jamais vues mais vous m'appelez cousine. Vous me montrez vos filles mais je ne connais pas votre nom ?

Je n'ai pas de famille ! Je suis seule !


L'intervention d'Anne crée la surprise chez Rosalinde. Qui était-elle ? C'est une question qu'elle ne se posait guère. Elle était, c'était déjà suffisant. Elle était le centre de son petit monde. Pernelle, ses filles, le marchand de confiseries, les autres domestiques de sa mesnie. Elle n'avait qu'un dieu qui était une déesse, sa mère.
L'enfançonne prenait sa froide indifférence pour quelque marque de supériorité, et quand Léonie daignait poser les yeux sur elle, sa journée s'en trouvait illuminée pour de bon. Elle n'était pas encore en âge d'être l'objet des maternelles attentions, paradoxalement. Tout ce que Rose était en âge d'apprendre pouvait être délégué à d'autre, n'était pas encore venu le temps de faire d'elle une femme à son image.

Mais il fallait pourtant répondre à Anne.


- Mère a dit que vous étiez ma cousine, parce que vous êtes la fille de ma tante Aalana qui est morte dans le ciel. Mère l'a dit, alors c'est vrai.

Voilà de quoi la curiosité de la de Breuil devrait se satisfaire. La rousse ne posait pas de questions à sa mère, elle acceptait toutes ces paroles comme droit sorties du livre des vertus.

- Et mon nom à moi c'est Rosalinde. Et le nom de Mère, c'est Léonie.

La voilà qui croise les bras, et jette un regard impatient vers Pernelle, qui emplit une cuve d'eau dans un coin de la pièce.
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"Dépêchez-vous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." - Giacomo Casanova
Anne_de_breuil
Aalana... ce prénom résonnait, lointain souvenir oublié qui ressurgit lorsqu'on l'attend le moins, lorsqu'on ne l'attend même pas puisqu'il est oublié depuis longtemps déjà.

Aalana et une famille qui se réveille dans les entrailles d'un enfant qui se croyait, se voulait, s'espérer seule.

Anne fixe intensément sa jeune cousine ne feignant pas la surprise de l'annonce. Ainsi donc, elle allait vivre ici avec ces deux êtres qui partageait son sang.

Et bien il allait falloir qu'elle s'en accomode. Cela renvoyait tous ses plans en l'air mais sans doute s'habituerait-elle très bien au confort.


Rosalinde... si ma mère est morte alors vous êtes ma seule famille vous et votre mère.

L'attention de l'enfant était à présent à jauger de nouveau "Pernelle" qui s'occupait du bain et Anne dût attendre de capter de nouveau son regard. A son tour elle fit alors une révérence à l'attention de sa jeune cousine.

Je ferai tout mon possible pour vous être agréable.

Et elle le ferai son intérêt était là. Si la froideur de sa tante lui avait un moment rappelé les soeurs du couvent, le pétillant de sa cousine éveillait en elle des sentiments nouveaux. Elle se ferait aimer de cette enfant comme elle l'aimerait.
S'il fallait pour lui plaire qu'elle soit aussi aimable à sa tante alors elle obéirait. En échange lui était offert une vie dont elle avait longtemps rêvé, l'éducation qui un jour lui permettrait de briller comme une étoile non, comme les Astres !

Elle serait merveilleuse oui, une enfant sage... peut être même qu'un jour elle aurait ses filles bien à elle.

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Rosalinde
La cousine Anne était manifestement acquise à sa cause. Rosalinde n'en fut que joie. D'ailleurs, pour fêter cela...

- Pernelle, il faudra que tu couses une fille pour ma cousine !

Et, se tournant vers elle :

- Sinon vous allez vous ennuyer pendant que je prendrai soin des miennes. En attendant, je vous prête ma petite Florie. Il faudra la souffleter si elle n'est pas sage.

Peut-être avait-elle entendu le vœu secret de la blonde, finalement. Mais la tornade Rose ne semblait pas vouloir s'en arrêter là, elle avait encore des trésors à faire découvrir. La main est reprise, tirée en une autre direction. Malle, grande cette fois, ouverte, elle en sort trois robes. Une bleue, une verte, et sa préférée, la rose. Sur les instances de sa fille, Léonie les avait fait confectionner pour la petite de Breuil.
Curieuse prédisposition que la rousse avait là, d'anticiper les besoins et désirs des gens. Cela lui serait sans doute utile plus tard, pour l'instant tout ceci n'était encore qu'inconscient chez elle.

Et pendant qu'Anne sélectionnait la robe qu'elle allait porter - son actuelle étant destinée à finir dans la cheminée - Rosalinde était déjà en train de se déshabiller pour aller sauter dans le bain.

En éclaboussant le plus possible la pauvre Pernelle, évidemment.

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"Dépêchez-vous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." - Giacomo Casanova
Anne_de_breuil
Chapitre II

Elle était assise là à s'observer depuis de longues minutes déjà. La maigre enfant qui était arrivée plusieurs années plus tôt dans la capitale était devenue une jeune femme.

Elle avait appris auprès de Rosalinde à aimer les toilettes, le parfum et même parfois en cachette, le maquillage.
Elle avait appris en observant sa tante l'art de la séduction et avait vite compris comme cet art pouvait apporter nombre d'avantage à une femme.

Anne était belle. Anne se trouvait belle. Personne ne l'était autant qu'elle à son avis, mis à part sa chère Rosa.

Le bruit de pas feutrés et d'un froissement de tissu la fit sortir de sa contemplation. Elle tourna son visage vers l'entrée de la chambre pour sourire à sa cousine. Plus jeune qu'elle, la poitrine tout juste finie, la peau encore aussi douce que celle d'un enfant, les yeux brillants toujours de la même lueur qu'au premier jour, Anne était en admiration devant la seule personne qu'elle affectionnait.


Il est encore venu., dit-elle les traits sérieux de celle qui se fait du soucis.

Pourriez-vous m'aider à attacher ces bandes de tissus autour de moi ? Chaque fois que nous le faisons nous même, nos seins restent trop visibles.

La mode n'était pas au relief et elle prenait grand soin à s'appliquer sur ce point.

Tandis qu'elle s'avançait près de Rosalinde partant du principe évident que cette dernière répondrait à sa demande par la positive, elle se saisit d'une dague cachée dans ses bottines. Paris avait cette particularité d'offrir tout ce dont on a besoin et lorsqu'Anne avait vu cette arme, elle avait vu le sang couler, celui d'une soeur dans un couvent anglais pour commencer et ensuite celui de chaque personne qui un jour lui avait manqué de respect. Elle l'avait acheté sans hésiter.


Je sais que vous rechignez à ses méthodes..., ajouta t-elle à présent qu'elle était dos à sa cousine attendant que celle-ci s'occupe d'opprimer sa poitrine. ...mais nous pouvons nous en charger pour vous. Ne trouvez-vous pas qu'il n'y a rien de plus beau que le scintillement d'une lame en pleine lumière ? On dirait des milliers d'étoile prêtent à jaillir.

Il y avait longtemps qu'elle y songeait. La situation ne devait perdurer et seules les deux jeunes filles pouvaient agir. Personne n'aurait le courage s'y atteler.

Elle préférait voir des flots de sangs jaillir de toutes part à la moindre larme sur la joue tachetée de Rosa ou sur sa propre joue car elle aimait autant sa cousine qu'elle s'aimait elle même.

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Rosalinde
A l'annonce de sa cousine, sur les lèvres de Rosalinde se forma un sourire.

S'approchant doucement, elle aida sa ravissante cousine à bander sa poitrine, en prenant toutefois garde à ne pas trop la comprimer, il fallait tout de même qu'elle puisse respirer à son aise.

Affairée à nouer les bandes de tissu, elle ne remarqua pas de prime abord qu'Anne avait tiré un poignard de sa botte. A sa vue, un pli disgracieux vint se former sur son front, là, juste entre les sourcils.

Et, doucement, elle secoua la tête, terminant son nœud.


- Non. Pas de sang, Anne. Le sang tâche, le sang est trop... Visible.

A nouveau elle se prit à sourire, évasivement, puis dénoua les cordons de la bourse qui pendait à sa ceinture. En extirpant une petite fiole de vers, elle la posa sur la coiffeuse.

- Je pensais plutôt à cela, voyez-vous. Net, et sans bavures.

Attrapant une brosse à cheveux, elle se mit à coiffer tendrement sa blonde cousine, lui expliquant plus avant les détails.

- Sa gorge gonflera tant qu'il ne pourra plus respirer et tombera raide mort. Les médecins songeront sans doute à une crise d'apoplexie, ou quelque imbécilité du genre.
Nous n'aurons qu'à verser cela dans la carafe de vin qui sera servie. Mère a interdiction de ses médicastres d'en boire.


A l'aisance avec laquelle la rousse s'exprimait, on voyait que ce n'était pas sa première fois. Anne et elle, c'était le duo infernal. L'amour fou et le bulldozer. Le dernier à en avoir fait les frais était un Suédois. Il était blond, il était beau, il sentait bon le sable chaud (*). Rose l'avait aimé passionnément, et s'était débrouillée pour qu'il croie qu'elle cédait à ses avances. Le plan avait parfaitement fonctionné, mais quand il avait menacé de révéler à sa mère qu'elle n'était plus demoiselle, elle avait décidé de couper court à leurs rapports. Le pauvre était mort, coupé, court. Égorgé dans une ruelle par des bandits dont on avait su retrouver la trace. Trop dommage.

[(*) Référence culturelle ! Au choix :
=> http://www.youtube.com/watch?v=Oueuo6tn3jI
=> http://www.youtube.com/watch?v=wiTGEnaaaqw ]

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"Dépêchez-vous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." - Giacomo Casanova
Anne_de_breuil
Pas de sang... pas de sang... c'était toujours la même rengaine se disait Anne en serrant le manche de l'arme entre ses doigts fins. Elle n'était pas amère, elle connaissait Rosa. Elle avait tenté sans grand espoir d'utiliser ses méthodes. Anne comprenait et souriait. Elle adorait que sa cousine la coiffe, chaque fois que la brosse soulevait des cheveux dans sa nuque des frissons la parcouraient.

Ses yeux s'étaient baissé sur la fiole présentée et elle écoutait avec attention le plan. Sans nul doute, il n'en réchapperait pas.

Elles agiraient donc avec du poison, soit ! Anne préférait voir le sang s'écouler des plaies infligées à ses proies. La prostituée que son dernier amant avait eu le malheur se s'offrir en avait fait les frais. Elle se souvenait parfaitement de ce qu'elle avait ressenti en voyant le liquide épais former une flaque sur le pavé. La fille de joie était devenue la soeur qui lui avait échappé.
Elle avait été maîtresse d'une vie, une vie à laquelle elle avait mit fin. Elle n'était pas l'objet du destin, d'un Dieu cruelle, elle était le destin, elle était une déesse.

Le plaisir avait été si grand que ses écarts avec l'amant lui avaient parus fades et qu'elle y avait mis un terme.

Rosalinde n'aimait pas se salir ses méthodes n'amenait pas la proie à vous regarder surprise, fragile, en détresse comprenant que vous régnez sur un présent qui met fin à tout futur. Rosalinde était propre, sage et nécessaire en cela à l'équilibre d'Anne.


Dans le vin dites vous... oui cela semble tout à fait approprié. Il vide vos caves à l'excès !

Elle avait prononcé cette dernière phrase du ton de celle qui s'outre, mais d'une voix calme et posée.

Rosa, vous êtes un ange ! Jamais je n'aurai su être sage sans votre tempérance.

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Rosalinde
Toujours coiffant les boucles blondes de sa cousine, Rosalinde se prit à rire.

- Chère Anne ! Si seulement il ne vidait que nos caves, nous l'aurions sans doute laissé faire !

En effet, la Rousse ne buvait jamais d'alcool. Ni d'eau, d'ailleurs, hors de question qu'elle attrape une quelconque maladie en se désaltérant de ce breuvage souillé par toutes sortes de maladies. Non, la belle buvait du lait, et rien que du lait, hors de question qu'elle perde ne serait-ce qu'un instant le contrôle de ses sens. Toujours elle devait rester maîtresse d'elle-même.

- Non, il faut aussi que cet ivrogne vide ses bourses en notre mère, et nous dépouille de notre héritage...

Elle sourit encore quand Anne lui dit qu'elle était un ange. Pourtant, c'était elle qui en avait l'apparence, on avait jamais vu d'ange roux. Néanmoins, cette angélique condition lui plaisait, aussi n'y redit-elle rien. Fini de brosser, elle coiffa sa cousine, et recula d'un pas pour admirer son œuvre.

- Parfaite !

Elle s'avança de nouveau et l'embrassa sur les deux joues. La perspective de mettre fin à l'existence de l'amant de sa mère la mettait en joie.

Quelques instants plus tard, laissant à Anne le temps de s'habiller :


- Y allons-nous ?
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"Dépêchez-vous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." - Giacomo Casanova
Anne_de_breuil
Jour où le sang se glacerait, jour où la vie s'envolerait. Anne choisit une robe carmin.

Bien entendu, allons-y ! Il serait indécent d'être un retard pour sa mort.

Sourire en coin, elle suivait Rosalinde le dos droit, le pas souple pinçant du bout des doigts les pans de sa robe pour ne pas trébucher dans les escaliers.

Elles se devaient de n'être point trop solennel aussi Anne commença à feindre une conversation animée avec sa cousine.


Voyez-vous, commença t-elle, j'ai toujours pensé que l'on devrait apprendre et les grec et le latin. Après tout le grec était la langue de ce très cher Aristote et cela serait lui faire grand honneur.

S'il y avait un domaine dans lequel la blonde excellait c'était la religion. Miettes d'une enfance anglaise dont elle se serait bien passée. Cependant la lecture du Livre des Vertus avait été une réelle révélation pour elle. Non pas que sa foi en fut grandie, loin de là mais elle comprit aux premières lignes qu'il était un atout de s'y référer en cas de situation délicate. Tout dans cet ouvrage pouvait prêter nombres d'interprétation dont on pouvait toujours en trouver au moins une qui soit à son avantage.

Comme le jour où elle avait été prise à pécher d'orgueil et avait fait oublié le péché en vantant les mérites du plaisir vertu aristotélicienne.


Il est vrai cependant que le grec est plus difficile d'apprentissage...

Elle s'interrompit étouffant un rire et en échangeant un regard complice avec sa cousine.

Les deux femmes n'étaient plus très loin de l'exécution de leurs desseins.

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