Aelith
La dernière quinte de toux l'avait laissée inerte.
Durant presque une heure, allongée sur le lit de l'auberge, elle n'avait plus esquissé le moindre mouvement, les yeux fixés sur le plafond, la respiration sifflante et saccadée. Grâce à Dieu, ce stupide accès de faiblesse ne l'avait pas prise en un quelconque lieu public, ou dans le carosse de sa suzeraine: seule Rhéa, le jeune lévrier qui ne la quittait plus, avait été témoin de ce nouveau coup du sort. La chienne n'avait pas cillé, pourtant: applatie au sol, les yeux fixés sur sa maîtresse, elle avait pris l'habitude de ces violentes réactions. Coup de vent, mouvement de colère, soudaine inquiétude: tout, absolument tout pouvait entraîner ce feu qui se déclarait dans la poitrine de la Flamboyante, embrasant tout sur son passage.
La dernière quinte de toux l'avait laissé inerte, si bien qu'elle avait eu recours à ces services que lui avait proposé Mordric quelques temps plus tôt. Le Chapeauté les accompagnait dans ce tour du Languedoc, et sa proposition secourable avait été évidemment acceptée: Aelith avait ainsi demandé le nom d'un médicastre en qui il avait toute confiance. Réponse donnée, plume prise et missive envoyée plus tard, elle avait eu le bonheur de recevoir une réponse plus que satisfaisante, longuement détaillée et rassurante, accompagnée de quelques remèdes qu'elle avait aussitôt commencé à prendre. Doucement, la douleur dans ses poumons s'était calmée. Petit à petit, elle réapprenait à respirer l'air du Languedoc qu'elle avait cru si néfaste, et qu'elle découvrait si bénéfique.
Les escapades qu'elle s'accordait hors des remparts de la ville à chaque début d'après-midi avaient retrouvé ce parfum de liberté qu'elle ne sentait plus, cette douce effluve salée qui annonçait la mer. C'était une habitude qu'elle avait prise, un saut en-dehors des règles, car la Duchesse d'Auxerre sans doute se serait montrée critique face à ces sorties sans escorte. Et parce qu'il lui avait semblé que le Chapeauté également devait retrouver le goût de respirer, elle l'avait invité à prendre part à ces promenades inopinées, consciente que la Prinzessin aurait désavoué en tous points de telles rencontres. Quelques semaines plus tôt, ne lui avait-elle pas rappelé quelles étaient les convenances? Et la Flamboyante, tête baissée, allait à l'encontre, comme une enfant qui sait d'avance qu'elle sera prise en faute.
Peu importait pourtant, au moment où la Maîtresse Equine avait formulé l'invitation. Elle guérissait. Peut-être avait-il besoin d'en faire autant. Ce jour là, comme tous les autres, elle quitta donc l'auberge sur le dos de Tacite, et Rhéa sur les talons.
Elle savait qu'elle croiserait Mordric hors des remparts, "par hasard".
_________________
Durant presque une heure, allongée sur le lit de l'auberge, elle n'avait plus esquissé le moindre mouvement, les yeux fixés sur le plafond, la respiration sifflante et saccadée. Grâce à Dieu, ce stupide accès de faiblesse ne l'avait pas prise en un quelconque lieu public, ou dans le carosse de sa suzeraine: seule Rhéa, le jeune lévrier qui ne la quittait plus, avait été témoin de ce nouveau coup du sort. La chienne n'avait pas cillé, pourtant: applatie au sol, les yeux fixés sur sa maîtresse, elle avait pris l'habitude de ces violentes réactions. Coup de vent, mouvement de colère, soudaine inquiétude: tout, absolument tout pouvait entraîner ce feu qui se déclarait dans la poitrine de la Flamboyante, embrasant tout sur son passage.
La dernière quinte de toux l'avait laissé inerte, si bien qu'elle avait eu recours à ces services que lui avait proposé Mordric quelques temps plus tôt. Le Chapeauté les accompagnait dans ce tour du Languedoc, et sa proposition secourable avait été évidemment acceptée: Aelith avait ainsi demandé le nom d'un médicastre en qui il avait toute confiance. Réponse donnée, plume prise et missive envoyée plus tard, elle avait eu le bonheur de recevoir une réponse plus que satisfaisante, longuement détaillée et rassurante, accompagnée de quelques remèdes qu'elle avait aussitôt commencé à prendre. Doucement, la douleur dans ses poumons s'était calmée. Petit à petit, elle réapprenait à respirer l'air du Languedoc qu'elle avait cru si néfaste, et qu'elle découvrait si bénéfique.
Les escapades qu'elle s'accordait hors des remparts de la ville à chaque début d'après-midi avaient retrouvé ce parfum de liberté qu'elle ne sentait plus, cette douce effluve salée qui annonçait la mer. C'était une habitude qu'elle avait prise, un saut en-dehors des règles, car la Duchesse d'Auxerre sans doute se serait montrée critique face à ces sorties sans escorte. Et parce qu'il lui avait semblé que le Chapeauté également devait retrouver le goût de respirer, elle l'avait invité à prendre part à ces promenades inopinées, consciente que la Prinzessin aurait désavoué en tous points de telles rencontres. Quelques semaines plus tôt, ne lui avait-elle pas rappelé quelles étaient les convenances? Et la Flamboyante, tête baissée, allait à l'encontre, comme une enfant qui sait d'avance qu'elle sera prise en faute.
Peu importait pourtant, au moment où la Maîtresse Equine avait formulé l'invitation. Elle guérissait. Peut-être avait-il besoin d'en faire autant. Ce jour là, comme tous les autres, elle quitta donc l'auberge sur le dos de Tacite, et Rhéa sur les talons.
Elle savait qu'elle croiserait Mordric hors des remparts, "par hasard".
_________________