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[RP] Tribulations d'une bretonne en Rouergue

Adenora
C'est se voler soi-même que dépenser une douleur inutile.
William Shakespeare

[Quelque part au bord du lac de Millau]

Ploppp!

Témoignant de son humeur, le jet d'un caillou vint à troubler la surface de l'eau, autre que celle limpide d'une rivière en Breizh où par le même geste elle avait un jour tenté d'évacuer, de pareille manière, autre déception. Comme alors, quelques cercles se formèrent tout autour sans que l'intrus n'altère longtemps la quiétude du lieu, bien que provoquant subrepticement le murmure des ondines, plus qu'un simple clapotis à ses oreilles.
Misère, dépouillée entre Lodève et Millau!...
Qu'allait-elle répondre à son tad?
Elle avait quitté la sécurité des deux lances la vieille à peine et déjà il s'inquiétait, visiblement à juste raison, de la savoir repartir seule...
Sa lettre lui était parvenue au petit matin, juste après qu'elle ne soit allé signaler trois brigands sévissant dans les parages. Faute d'avoir trouvé un zélé sergent, le maire en personne avait su trouver sa missive, abandonnée là, sur un poussiéreux bureau de la maréchaussée locale, et prit la peine de lui demander quelques précisions.
Au moins lui restait-il en plus de la vie, son nécessaire d'écriture, quelques précieux trésors, uniquement dignes de l'être aux yeux d'une enfant, et s'il lui fallait "sucer des cailloux" jusqu'au lendemain, s'en accommoderait-elle avec dignité.
Pour l'heure, lui restait-il assez d'énergie pour remplir ses devoirs, et c'est de sa plus belle plume qu'elle s'y attela.


Citation:

Demat sire,

Souhaitant écourter ce qui représente déjà un bien long voyage pour une bretonne de onze ans, j'ai volontairement choisit une autre direction que celle prise par mes compagnons.
Bien mal m'en a pris puisque cette nuit entre Lodève et Millau j'ai dû abandonner 9 écus, 6 miches de pain et 2 maïs à trois compères qui n'ont heureusement blessé que ma fierté pour parvenir à accomplir leur larcin.
Deux femmes et un homme dont la langue m'est inconnue. Cheveux blond ou châtains très clairs remontés en chignon, braies bordeaux, bouclier et bâton pour la première, chevelure rousse coupée aux épaules arborant toque noire et rose parme à l'oreille, col blanc, chemise, braie, bas et bottes noires, bouclier épée et lanterne à son côté pour la seconde. Quant à l'homme, qui semblait être très proche de la première : cheveux châtain foncé, chemise et bottes noires, braies bordeaux, bouclier et épée.
Si je me suis résignée à avouer cette mésaventure c'est d'avantage pour qu'elle serve aux forces de la maréchaussée, comme d'avertissement aux autres voyageurs, que dans l'espoir d'une quelconque réparation.
Puisse mon témoignage vous être utile, je jeûnerais quant à moi ce jour, espérant mériter par mon travail de quoi me nourrir demain.

Trugarez pour votre sollicitude,

Adenora



Après avoir confié son courrier à un gras pigeon et tandis qu'elle songeait à la manière d'annoncer ses déboirs à son papa adoptif, un autre emplumé vint, déjà, lui apporter nouvelle réponse, ainsi qu'un inespéré présent.
Lors,c'est arborant un jolie sourire, qu'elle décida d'écrire à celui qui lui avait offert sa tendresse en plus d'une famille.


Citation:

Demat mon très cher Tadounet,

Hélas la bonne étoile que tu souhaitais me prêter n'aura su me trouver cette nuit, alors que je croisais trois personnes aux intentions mauvaises...
Imagine ta petite blonde, toute fière d'avoir avec agilité évité l'empoignade, s'apercevant qu'ils avaient été encore plus prompts à lui dérober écus et nourriture!
Ils sont repartis, riant sans doute de mes malheurs, plus que célébrant leur maigre butin.

Mais sois vite rassuré, nul doute qu'elle se soit finalement manifesté au travers de la générosité du maire de Millau, qui par quelques écus confiés me permettra de manger à ma faim dès ce jour.
Seule ma fierté fut dans cette histoire, légèrement, blessée, je me volerais donc moi même si j'y dépensais encore quelconque douleur ou même n'y accordais d'avantage d'importance qu'à une simple anecdote que je pourrais vouloir te conter.
J'espère désormais trouver du travail pour rembourser mon bienfaiteur, chose peu aisée au vu des rares offres que j'ai d'ors déjà raté et de la fermeture de la mine...

Je me remettrais en route dès que possible et tâcherais de vous écrire tour à tour, afin de vous donner quelques nouvelles. A votre charge et par cette première lettre à la tienne, de les partager, car il me faudra économiser le vélin que j'utilise pour ne pas venir à en manquer.

Je t'embrasse bien fort,

Ta petite Ade


D'un bon agile elle se releva, ragea rapidement ses petites affaires, puis repartit en direction de la ville en sautillant, de nouveau légère et insouciante.
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Adenora
Il voyage plus vite celui qui voyage seul.
Rudyard Kipling

[Rodez]

Longtemps la veille elle avait hésité à reprendre la route. Le maire s'était montré généreux après cette mauvaise rencontre qui l'avait laissée démunie, et puisqu'il lui avait assuré au terme de leur correspondance ne point désirer quelconque dédommagement, l'ennui comme le fait qu'elle n'ait trouvé aucune activité ni même compagnie, l'avait décidé à repartir sans plus tarder de cette ville un peu trop calme à son goût.
Jusqu'à Lodève elle s'était appliqué à suivre les instructions de leurs meneurs, sans jamais rechigner, attentive et fiable. Dans une taverne, Idana n'avait d'ailleurs pas manqué de faire joyeusement remarquer que si tout les membres de la troupe avaient imité le comportement d'Eliotte et de la blondinette, il y aurait eu moins d'étourderies ou contre temps... L'image qui s'imposa à elle lui arracha un petit rire cristallin.
En fait il n'y en avait pas eu tant, peut-être avait-elle voulu les flatter un peu. Ils étaient partis à quatorze de Rohan et étaient arrivés le même nombre pour le mariage de l'amie de Doo, avec même un jour d'avance... Soit, dans les premiers jours deux des leurs s'étaient volatilisés, remplacés presque aussitôt, et il y avait bien eu quelques cafouillages. Mais juste assez pour se constituer d'amusantes anecdotes, qui rejoindraient dans leurs mémoires rencontres et situations parfois cocasses, vécues durant ce périple qui ne s’achèverait pas avant de long mois encore pour la plupart d'entre eux.
La petite rouquine, qui se languissait surement tout autant de Breizh, avait bien parlé de la suivre, mais à dire vrai Adenora était un peu soulagé qu'elle ne se soit pas décidé aussi vite : d'une part parce qu'elle n'aurait manqué de vouloir endosser la responsabilité d'Eli, bien qu'elles soient sensiblement du même âge, et que n'oublions pas que sitôt avait-elle quitté le groupe qu'on l'avait détroussé, et puis peut être un peu égoïstement : voyager seule lui permettrait de ne tenir compte que de ses envies, d'avancer à son rythme.
D'ailleurs l'idée de pouvoir gagner Villefranche au petit matin commençait à lui paraître des plus séduisantes, bien qu'elle ferait peut être mieux de penser à répondre à la nouvelle lettre de son tad avant de refaire son sac.


hummm, je verrais bien!
S'écria t-elle, avant de démarrer une course folle en direction du quartier des tavernes.

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Adenora
[Villefranche de Rouergue]

Adossée presque amoureusement contre un arbre la petite blonde rêvassait.
Elle songeait à Morwenna, fille de druidesse, son amie, bien que celle-ci soit d'au moins cinq ans sa cadette et qu'elle la trouva parfois un peu étrange.
Après la cérémonie de Sant-Yust, les deux enfants avaient rapidement cherché à se revoir, et lors si leurs singularités autant que leurs différences avaient paru évidentes, en rien n'avaient-elles exclu leur complémentarité certaine.
Où se trouvait-elle? Que faisait-elle en cet instant, pensait-elle un peu à elle?
La gamine soupira, arborant la mine contrite de celle qui se sait en faute.
A la mesure de tout ce temps passé, Adenora fut bien en peine de comprendre pourquoi elle avait tant tardé à lui écrire. Décidée à réparer cette coupable négligence, s'est armée d'une plume qu'elle s'y essaya.


Citation:

Ma chère Morwenna,

Je ne sais si quelqu'un d'autre que moi te l'aura appris ou si tu l'a ressenti, mais voilà plus d'un mois déjà que j'ai quitté Breizh, afin d'accompagner famille et amis dans un long périple auquel j'ai décidé de mettre fin, pour ma part, il y à quelques jours à peine.
Même s'il a été dur pour moi de les quitter à Lodève, autant que de me sentir responsable de l'inquiétude de mon cher papa adoptif, l'idée de n'en être pas même à la moitié du voyage aura suffit à me convaincre qu'il était grand temps de rebrousser chemin.

Je crois que je n'avais d'ailleurs pas réalisé jusqu'à lors combien le temps avait filé depuis ma visite en ta demeure.
Il me semble qu'hier encore tu me disais que je parlais "dès fois comme les grands", et que j'essayais de m'en défendre, un peu. Mais j'ai bien dû grandir, encore et sans y prendre garde, puisque me voilà seule, un peu effrayée mais surtout grisée par le souffle de l'aventure qui me porte.

A quelques brigands, j'ai bien dû abandonner en route ma maigre bourse et mes réserves de nourriture, mais je n'ai eu à en souffrir, grâce à la générosité d'un maire. Me voilà à présent à Villefranche de Rouergue où je resterais peut être quelques jours, avant de faire plus longue halte en Guyenne.

Et toi, sais tu désormais écouter les arbres? Crois-tu toujours que les grands sont des méchants?
J'espère que tu te portes bien et que tu pardonneras ma négligence en m'envoyant bien vite de tes nouvelles.

A galon mon amie,

Adenora



Puis elle prit un nouveau feuillet, caressant sa joue des bardes de la plume avant de la laisser courir de nouveau sur un ton qu'elle espéra joyeux bien que désinvolte, destiné à rassurer, au moins un peu .
Citation:

Mon cher tad,

Me voilà arrivée sans nouveaux encombres à Villefranche.
Adossée à un arbre je songe à mon amitié pour la fille de Lallie, la petite Morwenna que j'irais sans doute visiter à Vannes en rentrant chez nous, et puis à tout ce tracas que je t'occasionne par cette belle échappée qui me ramène peu à peu vers la Bretagne.

Bien sûr j'éviterais, autant que faire se peu, de prendre des risques, et comme je ne transporte plus grand chose, j'aurais d'autant moins de scrupules à abandonner écus ou pain rassi, à quelconque maraud que je ne saurais agilement déjouer.

J'espère que votre voyage se poursuit agréablement et que vous profitez de chaque moment passé tous ensemble.
Salut bien tout nos amis de ma part, surtout Eliotte qui m'en veut peut être un peu d'être partie sans avoir insisté pour qu'elle me suive...

Je t'embrasse bien fort, Ida et Matéo aussi!

Ton Ade



La petite rangea ses missives avant de retourner en ville, afin de les faire parvenir sans plus attendre, à leurs destinataires.
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