Linexiv


[Vendredi 24 Août, Chinon]
Quelques jours passés trop vite dans une ville qu’elle n’aimait guère mais prétexter le devoir pour comme excuse serait ridicule. Certes, c’était pour aplanir certaines légères difficultés, au nom de la Touraine parce que cela faisait toujours mieux mais surtout pour sa famille, qu’elle s’était attardée à Chinon. Le règne de Joachim du Val de Loire devait s’ouvrir sur des beaux auspices. Formulation pompeuse déjà mise à mal par les circonstances des élections. Que le Cœur n’ait eu le droit de se présenter, Line n’en démordrait pas, on ne pouvait répandre le chaos et ensuite revenir en chantant.
Non, il ne fallait pas jeter de l’huile sur le feu. Pas une nouvelle fois, ce serait une fois de trop, si inutile, quand l’espérance de nouveaux matins glorieux pouvait transparaître. Là étaient les tenants du discours qu’elle avait tenu à Cartel. Vu le rodage effectué la veille sur sa lieutenante Estainoise et le résultat de celui-ci, Line pouvait s’inquiéter.
Avait-elle été convaincante ? Elle en doutait. Mais quelqu’un qui était certain de n’être qu’un pion de Deos pouvait-il s’amender ? C’était à la fois reconnaitre l’impuissance de l’humanité et faire acte d’humilité mais aussi se croire unique et supérieur aux autres. Paradoxe superbe dont Cartel ne pouvait qu’avoir connaissance. L’homme pouvait-il accepter de s’humilier devant un autre homme ? Peu importait pour lui que la Sainte Église ait reconnu sa majesté Vonafred comme son messager.
Line étouffa un autre soupir, devait-elle remettre Falco à sa condition première de chef de Compagnie ? Soucieux avant tout de la vie des siens au point d’avoir quitté précipitamment la ville à la recherche d’Estainoise ? Dans ce cas là, pourrait-il accepter la proposition du roi tout comme il avait abandonné Eusaias le Frondeur une fois compris que le panache n’était pas blanc mais pédant ?
Que de soucis. Et songer à l’autre tâche qui l’attendait ne lui remontait pas le moral. Elle n’était pas prête de rentrer à Montlouis ni même à Loches où se propageait une étrange rumeur quant au dernier prêche de la bâtarde. « Insoumission contre toutes les formes d’autorité ». A se demander pourquoi elle s’était abaissée à donner ses excuses pour la fin officielle des péchés des archevêques pour cause de force majeure. Pourquoi suivre une autorité spirituelle quelconque si on la jugeait corrompue ?
Elle devrait en parler à Eden. Il fallait annuler tous les procès contre les révoltés, on ne pouvait pas leur reprocher d’aller au bout de leurs idées après tout. Décidément, tout se cassait la gueule pour terminer dans le vulgaire. Si l’Église ne se souciait plus de défendre la Loi, le règne du Sans-Nom approchait.
Et voilà qu’on lui proposait de dégrossir les recrues, de les instruire de leur rôle futur de défenseur de la Touraine, de bien jolis mots qu’il fallait nécessairement traduire par se débrouiller pour qu’ils soient capables d’ajuster quelques pièces de ferrailles, tenir une épée sans se la mettre dans le pied. Même chose avec un arc ou tout objet contendant. Au moins, une chose était sûre, ce n’était pas pour ses compétences mais plus pour son rôle d’ancêtre qu’on avait pensé à elle. A défaut de maîtriser l’art de la guerre comme ses maîtres, elle serait au moins capable de blablater à propos de la grande Touraine d’avant. Peut-être bien qu’elle arrivait à les convaincre de rester ?
Décidément, elle aurait dans tous les cas du pain sur la planche. Au moins, cela lui éviterait de penser à autre chose…
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Quelques jours passés trop vite dans une ville qu’elle n’aimait guère mais prétexter le devoir pour comme excuse serait ridicule. Certes, c’était pour aplanir certaines légères difficultés, au nom de la Touraine parce que cela faisait toujours mieux mais surtout pour sa famille, qu’elle s’était attardée à Chinon. Le règne de Joachim du Val de Loire devait s’ouvrir sur des beaux auspices. Formulation pompeuse déjà mise à mal par les circonstances des élections. Que le Cœur n’ait eu le droit de se présenter, Line n’en démordrait pas, on ne pouvait répandre le chaos et ensuite revenir en chantant.
Non, il ne fallait pas jeter de l’huile sur le feu. Pas une nouvelle fois, ce serait une fois de trop, si inutile, quand l’espérance de nouveaux matins glorieux pouvait transparaître. Là étaient les tenants du discours qu’elle avait tenu à Cartel. Vu le rodage effectué la veille sur sa lieutenante Estainoise et le résultat de celui-ci, Line pouvait s’inquiéter.
Avait-elle été convaincante ? Elle en doutait. Mais quelqu’un qui était certain de n’être qu’un pion de Deos pouvait-il s’amender ? C’était à la fois reconnaitre l’impuissance de l’humanité et faire acte d’humilité mais aussi se croire unique et supérieur aux autres. Paradoxe superbe dont Cartel ne pouvait qu’avoir connaissance. L’homme pouvait-il accepter de s’humilier devant un autre homme ? Peu importait pour lui que la Sainte Église ait reconnu sa majesté Vonafred comme son messager.
Line étouffa un autre soupir, devait-elle remettre Falco à sa condition première de chef de Compagnie ? Soucieux avant tout de la vie des siens au point d’avoir quitté précipitamment la ville à la recherche d’Estainoise ? Dans ce cas là, pourrait-il accepter la proposition du roi tout comme il avait abandonné Eusaias le Frondeur une fois compris que le panache n’était pas blanc mais pédant ?
Que de soucis. Et songer à l’autre tâche qui l’attendait ne lui remontait pas le moral. Elle n’était pas prête de rentrer à Montlouis ni même à Loches où se propageait une étrange rumeur quant au dernier prêche de la bâtarde. « Insoumission contre toutes les formes d’autorité ». A se demander pourquoi elle s’était abaissée à donner ses excuses pour la fin officielle des péchés des archevêques pour cause de force majeure. Pourquoi suivre une autorité spirituelle quelconque si on la jugeait corrompue ?
Elle devrait en parler à Eden. Il fallait annuler tous les procès contre les révoltés, on ne pouvait pas leur reprocher d’aller au bout de leurs idées après tout. Décidément, tout se cassait la gueule pour terminer dans le vulgaire. Si l’Église ne se souciait plus de défendre la Loi, le règne du Sans-Nom approchait.
Et voilà qu’on lui proposait de dégrossir les recrues, de les instruire de leur rôle futur de défenseur de la Touraine, de bien jolis mots qu’il fallait nécessairement traduire par se débrouiller pour qu’ils soient capables d’ajuster quelques pièces de ferrailles, tenir une épée sans se la mettre dans le pied. Même chose avec un arc ou tout objet contendant. Au moins, une chose était sûre, ce n’était pas pour ses compétences mais plus pour son rôle d’ancêtre qu’on avait pensé à elle. A défaut de maîtriser l’art de la guerre comme ses maîtres, elle serait au moins capable de blablater à propos de la grande Touraine d’avant. Peut-être bien qu’elle arrivait à les convaincre de rester ?
Décidément, elle aurait dans tous les cas du pain sur la planche. Au moins, cela lui éviterait de penser à autre chose…
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