Linexiv
[Où les jours s'accélèrent à l'insu des gens]
Tours, Line y était toujours, peut-être du côté des remparts, ou alors en dehors des murs, à vouloir entraîner des recrues plus ou moins éthérées parce qu'elle voulait les voir dignes de pavaner devant le Coeur Navré. Fallait dire que l'Ost tourangeau n'était pas au mieux de sa forme, les bannières étaient toujours aussi impeccables, mais l'astiquage valait tenue mortuaire.
Le temps s'était juste trop étiré et l'armée s'était étiolée en même temps que les volontés. La Touraine était panache, grandeur et tradition. Ces années là avaient disparu depuis longtemps, des noms glorieux pour des corps décomposés.
Et puis, qu'importait après tout de respecter ses serments? Les félons sortaient gagnants et pardonnés. Les loyaux humiliés. Triste monde qu'elle ne reconnaissait plus.
Line était à Tours, près d'un terrain d'entrainement, au petit matin ou alors était-ce le soir? Le duc rentrait des terres auvergnates, elle ne se souvenait pas l'avoir vu partir. Ni même revenir? Était-il rentré hier? Le jour même? Demain?
Le temps s'embrouillait et sa seule recrue était morte. Un moment elle était devant elle, à attendre une formation et un instant après, morte, d'une erreur d'interception à dix lieues. Les jours s'écoulaient étrangement.
Le Coeur était venu sur Tours, en avance, en retard? A l'heure? Attendu et surprenant tout le monde à la fois. Ils avaient trouvé un soldat isolé, perdu dans une mission inconnue que nul n'avait comprise. Voulait-il aider l'armée embourbée dans la poussière? Celle-là même qu'un jeune coq avait laissé en péril? Réserviste. Déserteur.
Celle-là même où était morte sa recrue qui était devant elle à Tours mais morte en cambrousse?
Puis il y avait eu la nuit prochaine, ou celle d'avant, Line confondait sûrement. Elle voulait entraîner des recrues. Elle devait les amener sous les remparts parce qu'elle montrer que l'ost existait toujours. Trop de fantômes assurément.
Des marchands ambulants attaqués, étaient-ils armés pour le Coeur pense à l'armée? Le Coeur attendait-il l'armée? Quelle solution était la mieux?
Line ne savait guère. Les nouvelles qui venaient étaient folles. Un lochois. Le Coeur s'était attaqué à un marchand de sa propre ville. Tiraillements, coeur à l'envers.
Un héritier ducal aussi. Et son nourrisson de petite soeur. Le gosse n'était sevré que depuis un an et la cadette tétait encore.... Des marchands mais pas de nourrice? Des marchands mais pas d'escorte? L'incompréhension augmente, la folie avec. Quelle idée avait traversé les prestigieux parents ?
Elle touchait le fond. Trop vite. Ce jour-ci ou déjà le suivant? Line ne savait. Elle était larguée, paumée. Découragée.
L'annonce était signée de son duc. Elle était destinée à Cartel et son nom figurait aussi. Juste au-dessous du capitaine de Compagnie. Le duc s'adressait à Cartel, l'accusait de l'erreur et l'incluait dans laffaire. Et l'insultait. Des formes qui nétaient pas respectées, une préséance oubliée.
Devrait-elle se sentir honorer d'être considérée à l'égale d'un Cartel? Peut-être autrefois, peut-être demain.
Mais là, dans les lignes de Joachim, il n'y avait qu'une insulte. Elle était noble de Touraine, la voilà officiellement chienne de guerre.
Un voile qui se lèvait sur la vie qu'elle avait choisi de mener, sang et os. Une identité révélée.
La missive se voulait rassurante pour le bon peuple, montrant que sa grâce de Touraine n'était point pantin ou isolé en sa tour. Mais elle n'était que maladresses.
Un père devait agir, mais ne jamais s'estimer affolé. Quel intérêt d'y adjoindre des mots si fabuleux? Calligraphie dégradante pour la duchesse de Montrésor, si tant était qu'un bébé puisse l'avoir tracé...
Line était à Tours, hier déjà, demain peut-être. Le jour s'écoulait ou bien était déjà passé. Elle ne savait plus. Chienne de guerre. Le duc rentrera demain ou hier. Il était de sa maison. Quelle importance... Tempérance et bienséance. Ne jamais confondre la chose publique de la privée... Erreur amère, pour elle, il était son suzerain mais elle n'était apparemment plus sa vassale.
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Tours, Line y était toujours, peut-être du côté des remparts, ou alors en dehors des murs, à vouloir entraîner des recrues plus ou moins éthérées parce qu'elle voulait les voir dignes de pavaner devant le Coeur Navré. Fallait dire que l'Ost tourangeau n'était pas au mieux de sa forme, les bannières étaient toujours aussi impeccables, mais l'astiquage valait tenue mortuaire.
Le temps s'était juste trop étiré et l'armée s'était étiolée en même temps que les volontés. La Touraine était panache, grandeur et tradition. Ces années là avaient disparu depuis longtemps, des noms glorieux pour des corps décomposés.
Et puis, qu'importait après tout de respecter ses serments? Les félons sortaient gagnants et pardonnés. Les loyaux humiliés. Triste monde qu'elle ne reconnaissait plus.
Line était à Tours, près d'un terrain d'entrainement, au petit matin ou alors était-ce le soir? Le duc rentrait des terres auvergnates, elle ne se souvenait pas l'avoir vu partir. Ni même revenir? Était-il rentré hier? Le jour même? Demain?
Le temps s'embrouillait et sa seule recrue était morte. Un moment elle était devant elle, à attendre une formation et un instant après, morte, d'une erreur d'interception à dix lieues. Les jours s'écoulaient étrangement.
Le Coeur était venu sur Tours, en avance, en retard? A l'heure? Attendu et surprenant tout le monde à la fois. Ils avaient trouvé un soldat isolé, perdu dans une mission inconnue que nul n'avait comprise. Voulait-il aider l'armée embourbée dans la poussière? Celle-là même qu'un jeune coq avait laissé en péril? Réserviste. Déserteur.
Celle-là même où était morte sa recrue qui était devant elle à Tours mais morte en cambrousse?
Puis il y avait eu la nuit prochaine, ou celle d'avant, Line confondait sûrement. Elle voulait entraîner des recrues. Elle devait les amener sous les remparts parce qu'elle montrer que l'ost existait toujours. Trop de fantômes assurément.
Des marchands ambulants attaqués, étaient-ils armés pour le Coeur pense à l'armée? Le Coeur attendait-il l'armée? Quelle solution était la mieux?
Line ne savait guère. Les nouvelles qui venaient étaient folles. Un lochois. Le Coeur s'était attaqué à un marchand de sa propre ville. Tiraillements, coeur à l'envers.
Un héritier ducal aussi. Et son nourrisson de petite soeur. Le gosse n'était sevré que depuis un an et la cadette tétait encore.... Des marchands mais pas de nourrice? Des marchands mais pas d'escorte? L'incompréhension augmente, la folie avec. Quelle idée avait traversé les prestigieux parents ?
Elle touchait le fond. Trop vite. Ce jour-ci ou déjà le suivant? Line ne savait. Elle était larguée, paumée. Découragée.
L'annonce était signée de son duc. Elle était destinée à Cartel et son nom figurait aussi. Juste au-dessous du capitaine de Compagnie. Le duc s'adressait à Cartel, l'accusait de l'erreur et l'incluait dans laffaire. Et l'insultait. Des formes qui nétaient pas respectées, une préséance oubliée.
Devrait-elle se sentir honorer d'être considérée à l'égale d'un Cartel? Peut-être autrefois, peut-être demain.
Mais là, dans les lignes de Joachim, il n'y avait qu'une insulte. Elle était noble de Touraine, la voilà officiellement chienne de guerre.
Un voile qui se lèvait sur la vie qu'elle avait choisi de mener, sang et os. Une identité révélée.
La missive se voulait rassurante pour le bon peuple, montrant que sa grâce de Touraine n'était point pantin ou isolé en sa tour. Mais elle n'était que maladresses.
Un père devait agir, mais ne jamais s'estimer affolé. Quel intérêt d'y adjoindre des mots si fabuleux? Calligraphie dégradante pour la duchesse de Montrésor, si tant était qu'un bébé puisse l'avoir tracé...
Line était à Tours, hier déjà, demain peut-être. Le jour s'écoulait ou bien était déjà passé. Elle ne savait plus. Chienne de guerre. Le duc rentrera demain ou hier. Il était de sa maison. Quelle importance... Tempérance et bienséance. Ne jamais confondre la chose publique de la privée... Erreur amère, pour elle, il était son suzerain mais elle n'était apparemment plus sa vassale.
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