Theolenn
Vers 18h la lumière commença à manquer. Theolenn posa le livre sur le bras du gros fauteuil où elle était installée et se leva. Tout dans l'âtre était prêt pour débuter un feu et les bûches rangées sur le côté de la cheminée lui permettraient de ne plus devoir sortir avant le lendemain.
Le briquet qu'elle frappa produisit une belle étincelle, du premier coup, et la pièce s'anima en quelques minutes. Puis ce fut le tour des deux lampes à huile et de quelques bougies.
Un bruit de grattage sur la porte, discret mais efficace, la fit sourire.
Toujours à l'heure, Dharma attendait patiemment de l'autre côté. Joyeuse, elle faisait aller la queue. C'était un de ses moments préférés dans ces journées savoyardes, celui d'aller s'étendre sur une couverture placée spécialement pour elle tout à côté du foyer. La vieille chienne grise aimait la chaleur.
Leur rencontre s'était faite pendant l'été, entre Foix et Carcassonne. Des journées de marche en parallèle avaient eu l'effet d'un apprivoisement mutuel. Un soir, un déclic avait scellé leur amitié qui avait toutes les chances d'être éternelle.
Le chalet était fait de gros rondins assemblés en une sorte de puzzle géant. Aucun clou n'avait servi à sa construction.
Il n'était pas grand mais comprenait quand même une agréable chambre sous le toit, dotée d'une terrasse avec panorama sur la vallée de Chambéry, et d'une armoire basse semi-circulaire qui permettait de nombreux rangements. Au rez-de-chaussée, une pièce à vivre qui contenait deux fauteuils, l'un devant la cheminée et l'autre dos à la fenêtre, une table massive entourée de 4 chaises totalement différentes entr'elles mais dont la facture était également à son goût, un gros buffet, un plus petit d'angle et cette monumentale cheminée centrale en grosses pierres grises et inégales, qui lui plaisait tant et avait énormément contribué à l'achat compulsif des lieux. Dans un coin, cachés par un mur plus fin en trompe l'il, une bassine en bois et quelques contenants transformaient l'endroit en une petite salle d'eau rudimentaire.
En réchauffant un reste de ragoût de la veille, elle se remémora les quelques semaines qui venaient de s'écouler. Cette soudaine décision de retour dans la vie sociale après deux ans d'abstinence complète. Les anecdotes liées aux premiers contacts autochtones, un peu maladroits mais si sympathiques. Les journées passées à enseigner ou à suivre des cours aussi passionnants que variés et surtout, surtout, la gentillesse de toutes celles et ceux qui avaient croisé son chemin, sans aucune exception. Tout cela l'avait grandement aidée à prendre enfin le chemin de la guérison, le chemin d'un futur dont les contours, quoiqu'encore très flous, lui redonnaient le goût de survivre aux troubles du passé.
Et tout ça parce que la Savoie avait une bibliothèque qui possédait un livre d'Aristote, rédigé en grec, intitulé: "Métaphysique Alpha".
Comme quoi, on n'est jamais au bout des surprises que la vie nous réserve...
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Le briquet qu'elle frappa produisit une belle étincelle, du premier coup, et la pièce s'anima en quelques minutes. Puis ce fut le tour des deux lampes à huile et de quelques bougies.
Un bruit de grattage sur la porte, discret mais efficace, la fit sourire.
Toujours à l'heure, Dharma attendait patiemment de l'autre côté. Joyeuse, elle faisait aller la queue. C'était un de ses moments préférés dans ces journées savoyardes, celui d'aller s'étendre sur une couverture placée spécialement pour elle tout à côté du foyer. La vieille chienne grise aimait la chaleur.
Leur rencontre s'était faite pendant l'été, entre Foix et Carcassonne. Des journées de marche en parallèle avaient eu l'effet d'un apprivoisement mutuel. Un soir, un déclic avait scellé leur amitié qui avait toutes les chances d'être éternelle.
Le chalet était fait de gros rondins assemblés en une sorte de puzzle géant. Aucun clou n'avait servi à sa construction.
Il n'était pas grand mais comprenait quand même une agréable chambre sous le toit, dotée d'une terrasse avec panorama sur la vallée de Chambéry, et d'une armoire basse semi-circulaire qui permettait de nombreux rangements. Au rez-de-chaussée, une pièce à vivre qui contenait deux fauteuils, l'un devant la cheminée et l'autre dos à la fenêtre, une table massive entourée de 4 chaises totalement différentes entr'elles mais dont la facture était également à son goût, un gros buffet, un plus petit d'angle et cette monumentale cheminée centrale en grosses pierres grises et inégales, qui lui plaisait tant et avait énormément contribué à l'achat compulsif des lieux. Dans un coin, cachés par un mur plus fin en trompe l'il, une bassine en bois et quelques contenants transformaient l'endroit en une petite salle d'eau rudimentaire.
En réchauffant un reste de ragoût de la veille, elle se remémora les quelques semaines qui venaient de s'écouler. Cette soudaine décision de retour dans la vie sociale après deux ans d'abstinence complète. Les anecdotes liées aux premiers contacts autochtones, un peu maladroits mais si sympathiques. Les journées passées à enseigner ou à suivre des cours aussi passionnants que variés et surtout, surtout, la gentillesse de toutes celles et ceux qui avaient croisé son chemin, sans aucune exception. Tout cela l'avait grandement aidée à prendre enfin le chemin de la guérison, le chemin d'un futur dont les contours, quoiqu'encore très flous, lui redonnaient le goût de survivre aux troubles du passé.
Et tout ça parce que la Savoie avait une bibliothèque qui possédait un livre d'Aristote, rédigé en grec, intitulé: "Métaphysique Alpha".
Comme quoi, on n'est jamais au bout des surprises que la vie nous réserve...
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