Morelius
(Suite de l'aventure commencée sur la gargote languedocienne...)
[Castelnaudary - une auberge pour voyageurs où l'on fait du cassoulet]
Contrairement à la rumeur qu'il propageait lui-même, Morelius nétait ni spécialement fort, ni particulièrement habile. Pour ce qui était de monter sur les toits, de ramper dans les tuyaux daération ou de désamorcer des serrures empoisonnées, il fallait demander à quelquun dautre. Il savait se battre certes, et principalement quand il était question de sauver sa peau. De part ses anciennes relations, il était forcément au courant des divers ragots qui agitaient le monde des malfrats, mais il nétait plus dans le secret des dieux, et ne cherchait surtout pas à y retourner. Ce nétait sûrement pas lhomme le plus intelligent du monde, ni le plus loyal, bref, en dehors des deux ou trois petits talents qui étaient les siens, il était des plus inutiles.
Ce talent, justement, il décida de l'exercer ce soir là en cette auberge de Castelnaudary pendant que Theolenn négociait les chambres pour la nuit. Il s'était dit qu'elle devait sûrement servir de point de passage à toutes sortes de mercenaires, dassassins, de truands, et de gens qui évoluaient gracieusement entre ces trois catégories au gré des circonstances. Cette violente population était réputée pour assidûment fréquenter les estaminets de voyageurs dans le but officiel dy rechercher un commanditaire qui leur donnerait quelque emploi, mais lhonnêteté nous commande toutefois de nous demander dans quelle mesure cet atavisme ne tenait pas plutôt à la présence en ces lieux dalcool, de compagnons de bagarres et de filles de joie, toutes distractions permettant de tuer le temps entre deux épisodes sanglants. Et que cela ne nous détourne pas de la vraie question qui était: y avait-il des joyeux lurons à Castelnaudary ?
Mais revenons à notre protagoniste aux cheveux blancs. Ne se distinguant pas par sa témérité, on pourrait sétonner de le voir accoudé au comptoir parmi les rudes gaillards du cru couturés de cicatrices, les musclés, les tatoués, les braconniers et autres marauds. Devrait-on craindre pour sa santé, à notre homme ? Point du tout, car il est ici comme chez lui, cest son élément. Certes, il est étranger à la ville et na jamais mis les pieds dans cet endroit, mais par quelque savante alchimie, par ses manières, la façon dont il est assis ou lart quil a de tenir sa chope, on jurerait que cest un habitué.
Ah, il en avait entendu, Morelius, des conneries, et cétait là quintervenait son don le plus remarquable : celui de laisser traîner une oreille. Car sil est malaisé de suivre une conversation qui ne vous est pas destinée, il est franchement compliqué disoler la conversation qui vous intéresse dans le fatras des platitudes météorologico-politiques qui constituent le bruit de fond de tout forum tavernier. Eh bien Morelius, il y arrivait.
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[Castelnaudary - une auberge pour voyageurs où l'on fait du cassoulet]
Contrairement à la rumeur qu'il propageait lui-même, Morelius nétait ni spécialement fort, ni particulièrement habile. Pour ce qui était de monter sur les toits, de ramper dans les tuyaux daération ou de désamorcer des serrures empoisonnées, il fallait demander à quelquun dautre. Il savait se battre certes, et principalement quand il était question de sauver sa peau. De part ses anciennes relations, il était forcément au courant des divers ragots qui agitaient le monde des malfrats, mais il nétait plus dans le secret des dieux, et ne cherchait surtout pas à y retourner. Ce nétait sûrement pas lhomme le plus intelligent du monde, ni le plus loyal, bref, en dehors des deux ou trois petits talents qui étaient les siens, il était des plus inutiles.
Ce talent, justement, il décida de l'exercer ce soir là en cette auberge de Castelnaudary pendant que Theolenn négociait les chambres pour la nuit. Il s'était dit qu'elle devait sûrement servir de point de passage à toutes sortes de mercenaires, dassassins, de truands, et de gens qui évoluaient gracieusement entre ces trois catégories au gré des circonstances. Cette violente population était réputée pour assidûment fréquenter les estaminets de voyageurs dans le but officiel dy rechercher un commanditaire qui leur donnerait quelque emploi, mais lhonnêteté nous commande toutefois de nous demander dans quelle mesure cet atavisme ne tenait pas plutôt à la présence en ces lieux dalcool, de compagnons de bagarres et de filles de joie, toutes distractions permettant de tuer le temps entre deux épisodes sanglants. Et que cela ne nous détourne pas de la vraie question qui était: y avait-il des joyeux lurons à Castelnaudary ?
Mais revenons à notre protagoniste aux cheveux blancs. Ne se distinguant pas par sa témérité, on pourrait sétonner de le voir accoudé au comptoir parmi les rudes gaillards du cru couturés de cicatrices, les musclés, les tatoués, les braconniers et autres marauds. Devrait-on craindre pour sa santé, à notre homme ? Point du tout, car il est ici comme chez lui, cest son élément. Certes, il est étranger à la ville et na jamais mis les pieds dans cet endroit, mais par quelque savante alchimie, par ses manières, la façon dont il est assis ou lart quil a de tenir sa chope, on jurerait que cest un habitué.
Ah, il en avait entendu, Morelius, des conneries, et cétait là quintervenait son don le plus remarquable : celui de laisser traîner une oreille. Car sil est malaisé de suivre une conversation qui ne vous est pas destinée, il est franchement compliqué disoler la conversation qui vous intéresse dans le fatras des platitudes météorologico-politiques qui constituent le bruit de fond de tout forum tavernier. Eh bien Morelius, il y arrivait.
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