Matalena
Ma passionnée, tant est parfois,
Je ne suis parvenue à vous répondre, dans un premier temps, tant votre missive de prime m'a étonnée, pour ne pas dire perturbée.
En effet, j'ignorais tout à fait que vous eussiez une ainée fille au nombre de vos enfants, vous conseiller sur son éducation m'a donc tout d'abord posé le problème de cette découverte... Mais sans doute avez-vous oublié qui de votre entourage était dans ce secret dalcôve et qui ne l'était point, avec le temps qui passe. Comment vous dire alors ? Je ne sais rien de cette damoiselle. Quel âge a-t-elle, pour commencer ? Quelle est sa confession, et que sait-elle de vous ? Vous êtes-vous connue, si peu que ce soit ? Car de ces paramètres dépendent la technique d'apprentissage la plus adaptée, pour la lecture ou le reste. Sachez quoi qu'il en soit qu'apprendre à autrui, quand on a peu de patiente, est un véritable défis que l'on se lance, tant et plus si des liens affectifs existent : ils nous poussent malgré nous à être plus exigeants encore. Le meilleur conseil que je puisse vous donner est donc celui-ci : faites en sorte de n'attendre rien d'elle, être là simplement, comme une aide, un appui, et lui laisser faire le chemin vers la connaissance et vers vous. Car, je n'en doute pas, ces séances privatives seront sans doute aussi l'occasion de contacts privilégier. Ne vous enfermez pas dans vos rôles ordinaires, tachez d'être vous, comme vous le faites quand vous laissez au placard la dureté que vous portez si bien.
Concernant votre débat de cur... Soyons francs, j'avais le sentiment que vous attendiez de moi une validation de votre envie réciproque de séparation. Ce que je me refuse à faire. Vous savez bien, concernant les textes, que les relations hors mariage y sont condamnables, je ne vous l'apprend pas, qu'y a-t-il de plus à dire ? Vos choix ont été fait, il n'y a plus qu'à agir, un domaine qui doit vous parler davantage que les torsions d'âme sous le regard de Deos. Hors donc, car en effet cette phase me concerne également : que faire de Lonàn. Loin de moi l'idée de partir dans un vaste débat des droits respectifs de la mère ou du père naturels, je n'y entend goutte, et ça n'est point mon domaine. Soyons pragmatiques : J'attends.
J'attends de Finn de Pommières qu'il trouve épouse, que celle-ci soit de noble naissance, démontre suffisamment d'esprit pour l'élever ainsi qu'il doit l'être. J'entends par là dans la lecture, la connaissance, mais aussi la formation au combat, à l'équitation, aux belles manières de façade comme à la ruse de survie. Signifiez-lui de ne point gaspiller mon précieux temps en me présentant une godiche écervelée à grande bouche qui serait incapable d'accepter le fruit d'une autre femme comme le sien propre.
J'attends de Finn de Pommières qu'il présente un domaine fort, bien tenu et prospère où Lonàn grandira jusqu'à ses treize ans, âge où il sera à même d'être envoyé en apprentissage pour le métier qui lui siera le mieux.
J'attends de Finn de Pommières qu'il présente sa conception de son rôle vis à vis de son héritier, et ses projets pour lui.
Par ailleurs, s'il répond au préalable à toutes ces conditions, il sera amené à vivre en mon domaine le temps qu'il faudra pour que Lonàn accepte de le quitter et partir avec lui. Ce qui n'est pas gagné.
J'attends de vous, Agnès de Saint-Just, exactement les mêmes attitudes. Si réellement vous souhaitez prendre auprès de l'enfant la place de mère qui est la votre, il vous faudra tout autant réfléchir à la place que vous lui pourriez donner, à l'éducation que vous lui pourriez fournir, et apprendre à le connaitre.
Si chacun de vous présente ces pré-requis, et au moment où cela sera fait, je ne doute pas qu'un chemin sera parcouru qui vous amènera à envisager d'autres solutions que celles qui apparaissent dans l'immédiat.
Vous trouviez vos mots trop épanchés, qu'en est-il donc de ce pavé dans la marre ?
J'espère que vous comprendrez qu'il n'est pas dans mes objectifs de jouer les empêcheuse de tourner en rond et mettre des bâtons dans les roues de qui que se soit. Je veux simplement protéger l'enfant qui m'a été confié, que cela soi ou non contre vous. Son intérêt m'importe au delà de père et mère. Ne voyez point non plus dans ces directives une façon de le garder auprès de ma famille : tel n'est point le cas, et j'attendais cet instant sans douter qu'il viendrait. Maintenant que nous y sommes, soyez à votre guise ou non les parents que vous eussiez du être, et je m'en détacherai.
Voilà ce qu'il en est de nous.
Portez-vous bien,
MLA.
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