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[RP] Donne-nous à connaître ce que tu connais.. *

Chabert
    *Prière cathare, extraite du Registre d'Inquisition de Jacques Fournier.

Il avait acheté un nécessaire à écrire, et voilà plusieurs jours, qu'il le regardait d'un air bovin sans jamais vraiment oser s'en servir. Et pourtant, il lui fallait s'y résoudre tant son absence lui apparaissait sinon cruelle, mais au moins douloureuse. Aller si près du but et se retrouver bredouille, jeu diabolique du Destin. La plume fut saisie, et avec elle, une dague pour la tailler un peu plus, histoire de se donner du temps, et enfin, il fallut faire contre mauvaise fortune, bon coeur.

La plume crissa.

Citation:
A Cerdanne d'Anjou, fille de Juan de Mona,

Ne me demande pas pourquoi je t'écris, mainada, même moi, je ne le sais pas. Tu es partie sans savoir, car tu sais si peu de choses en vérité. J'espère que ce coursier te trouvera. Je me serai bien contenté d'un pigeon mais vu les temps troubles que nous traversons, il aurait qu'un soldat crève la dalle pour qu'il le tue et que tu n'aies jamais ce message.

J'ai promis à ton père de te retrouver, et tu es de nouveau partie. Ordalie semble se plaire en Anjou, et le repos n'est pas un luxe pour elle, aussi t'attendrais-je là-bas, en espérant que tu veuilles prendre connaissance de ce qu'a été celui qui t'aimait assez pour te soustraire à sa vie en pensant épargner la tienne. Prends soin de toi, mainada, je t'en voudrais de me faire faillir à ma promesse. Si tu le veux, raconte moi où tu es et ce que tu vois, j'irai voir le Nord un jour, raconte moi donc et mets moi l'eau à la bouche.

Tu m'as dit vouloir poser des questions et n'avoir pas peur de le faire. Pourtant, tu n'as rien demandé, pas l'once d'une requête, pas même un détail ou une grande ligne. Veux-tu réellement savoir qui il était ? J'en doute et pourtant, l'envie me taraude de te parler de lui, de te dire tout ce que je sais. Pas tant pour faire parler la mémoire, mais pour t'offrir ce que tu sembles désirer si ardemment. Quand bien même, il est mort, je t'offre un père, mainada. Oseras-tu le prendre ? Le réclamer ? Je t'attends.

Que Dieu te conduise à bonne fin,

C. de Terme.

_________________
Cerdanne
« …celui qui scrute les cœurs sait à quoi tend l’esprit… »


Le parchemin entre les mains, elle marmonne.
Le coursier, lui, a droit a un repas parce qu’elle a droit de réponse.
Et qu’elle va le prendre immédiatement « Mainada »...
Non mais j’t’en foutrais moi de la Gamine..
Plus elle marmonne, plus elle se calme.
Plus elle relit, plus les mots la piquent aussi surement que ses épines le font. »Mainada »…
Elle sourit, avant de grommeler à nouveau devant cette brèche qui s’ouvre, béante et qui ne demande qu’a être remplie.
L’avantage d’être au loin..
Les mots peuvent s’écrire sans affronter le regard qui les lit.
Le droit de réponse met du temps à revendiquer sa place.
Finalement les maux sont bien plus durs que prévus à trouver le chemin de l’encre.


Citation:

*Papet* Rature…, grattage, sillon sur le parchemin.

A Chabert, vieux fantôme surgit de nulle part…

Ne me demandez non plus pourquoi je vous réponds, Fraire, Paire, je ne sais au fond.
Peut –être votre Dieu, farceur, a décidé de nous en jouer une bonne. Vous et votre promesse, moi et mes manques.

Tout d’abord, sachez qu’au fond je suis contente que l’Anjou vous plaise. Enfin, votre vieille carne a l’air d’apprécier, donc...vous aussi je suppose, par pure amitié pour votre vieille compagne de voyage.
l' Anjou mérite qu’on s’y attarde et qu’on prenne le temps de le connaitre. Sauvage et fou.
Mais si je vous ai un peu cerné, cela peut correspondre à vos attentes. Et les miennes.

Parler…De lui.
Rien que de prononcer le mot »père » m’étouffe.
Tant de temps, tant de chemin.
Savez-vous que lors d’un voyage en Terre espagnole j’ai cherché sa trace. J’aurais tant voulu qu’il m’apprenne, qu’il m’enseigne ce que j’ai tenté d’apprendre seule.

Réclamer…Je suis bien trop fière pour cela.
Vous devriez le savoir, Fraire.
Comment croyez-vous que l’on puisse vivre, par ces temps troublés, autrement que dans la défiance et la méfiance.
Vous avez bien fait de rester sur les terres angevines.
Ici tout est vide, mort, fade. Les bois, eux seuls savent m’apaiser.
Mais vous, vous…Saurez vous attendre, patienter, comprendre.

Il me semble vous voir grogner et l’idée est plaisante.
Quand à placer en vous, ma vie comme je pourrais le faire pour un père, un frère..L’envie ne m’en manque pas.
C’est me l’avouer qui est bien plus difficile.

Je ne vous parlerais pas de Dieu qui vous conduise, mais mes pensées vont vers vous.

Cerdanne

_________________
Chabert
Ils en étaient là, à s'écrire des lettres, laissant de côté, l'animosité première pour se concentrer sur les faits.
Il avait une promesse et il était seul. Elle n'avait plus de père et il était là.

Appuyé contre la selle de la jument, il tenait l'écritoire sur ses genoux, et les mots s'alignaient tandis que l'esprit divaguait loin de là, vers le Nord.
Vers Cerdanne, celle qui l'avait appelé son frère, alors même qu'avant Eulàlia seule le faisait.

Citation:
A Cerdanne d'Anjou, fille de Juan de Mona,

je grogne tellement que tu en serais comblée la meuna mainada.. Pas pour tes propos, pas pour tes mots, mais à l'idée de te savoir loin et ennuyée. Reviens si l'envie t'en prend vraiment, puisque l'on peut vivre sinon dans la foi, puisque tu ne le veux pas, au moins dans la paix.
Si tu voulais, tu pourrais la trouver. Je t'apprendrai.

Je t'apprendrai tant de choses comme il l'a fait pour moi. Veux-tu savoir qui était Juan de Mona ? Il était toi avec des cheveux plus courts et moins de tétons peut être. Je t'apprendrai aussi à aimer ce mot, à comprendre ce qui l'a poussé à faire ce choix.
Je te ferai connaître cet homme que tu n'as pas connu, tant et si bien qu'il te semblera à l'heure où tu réaliseras qu'il est mort, que tu aimais ton père et qu'il te manque. Pas pour te tourmenter, la meuna mainada, mais pour qu'enfin, tu fasses le deuil de ce père.

Ordalie va bien, et à vrai dire, que je crois qu'elle a décidé de faire un sort à tous les chardons aux alentours de la grange. Comme quoi, il y a toujours une bonne chose, puisque chez nous, il n'y en avait plus.
J'aime bien l'Anjou et même si je préfère méditer seul, les gens me sont agréables, tu as décidément bien choisi, alors je resterai et j'attendrai.

J'attendrai que tu reviennes. Que Dieu te conduise à bonne fin la meuna sòrre.

C. de Terme.

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Cerdanne
Une taverne, un coin de table et le silence d’une après-midi ensoleillée. Songeuse, elle relisait sa lettre et souriait aux mots de cet homme qui avait fracassé sa petite vie d’un seul mot. Juan de Mona.
Elle avait beau le répéter sur tout les tons, elle n’arrivait pas a s’y faire. Paradoxalement, elle n’avait au fond d’elle qu’une envie, savoir qui il était.
Les mots, peu à peu noircissait le vélin. Comme pour chasser les pensées qui se bousculaient dans sa tête bien trop pleine de non-dits.



Citation:

A Chabert de Terme, vieux fantôme, vieux fraire s’il en est…

Je suis contente de savoir qu’Ordalie et vous par la même occasion, vous ayez l’envie de rester en Anjou.
Déjà parce que je sais qu’au-delà des apparences ce duché n’est pas seulement terre de fous mais terre de sages.
Et puis parce que l’idée de savoir qu’à mon retour, la grange sera débarrassée enfin de tous ces vieux chardons séchés me plait bien. Au moins les pousses tendres pourront renaitre, joliment bleutés, épines fièrement dressées…

Vous savez...bien souvent j’ai imaginé qu’il viendrait me chercher…Je ne sais si un jour je pourrais oser imaginer que j’ai bel et bien eu un père.

Ici, les jours passent tous pareils, enfin passaient.
Je suis à Bourges là. Une halte sympathique pour une fois.
J’y ai retrouvé un vieil ami.
J’espère pouvoir vous le présenter un jour. Son nom est un de ceux que l’on n’oublie pas. Judas qu’il se nomme.
Et puis d’autres rencontres auxquelles je ne veux envisager d’avenir. Parce que, franchement, y a-t-il un avenir possible lorsqu’on est bâtarde ??

Je vous imagine.
Je vous vois vautré contre votre vieille carne.
L’image est plaisante, rassurante. Je veux bien tenter d’apprendre. Je veux bien essayer. Mais je n’ai pas la docilité de l’enfançon tout juste né.

Vous me manquez au fond fraire…
Prenez soin de vous et de cette Ordalie.
Dieu s’il m’entend…et bien qu’il vous garde.
Cerdanne

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Chabert
Il avait une masse empruntée au charpentier de Saumur et la chemise reposait sur une des mangeoires de la grange. Torse nu, exposant à tous, un corps couvert des cicatrices dont on écope quand on s'entraîne sans demi-mesure contre la première lame de Castille, Chabert de Terme remettait en l'état quelques planches désireuses de se faire la malle, et laissant ainsi à la communauté des rongeurs, le champ libre pour venir dévaster les réserves de foin.

Et pourtant, un coursier vint à sa rencontre et lui tendit une lettre. Nul besoin de s'interroger sur l'expéditeur, qui, hormis elle, irait lui écrire.. Ne restait plus qu'elle dans sa vie.

Citation:
A Cerdanne d'Anjou, fille de Juan de Mona,

J'ai pris sur moi de remettre en état cette grange qui par endroit, tombée en désuétude, rien de mirobolent, quelques planches qui tiennent droit maintenant. Rentreras-tu ? Quand tu le feras, ce sera mieux qu'avant, je pense. J'ai du mal à l'admettre mais je m'ennuie de toi, ma main va mieux, et j'en viens à me demander si la cicatrice s'estompera ou s'il me restera un souvenir de toi en tout temps.

Tu me vois ravi de savoir que tu as retrouvé des connaissances, et si d'aventure, elles revenaient avec toi, je serai heureux de les rencontrer si la chose peut te combler. Je ne te cache pas que je me demande comment un parent peut prendre sur lui pour nommer son fils de la sorte, toutefois, l'habit ne fait pas le moine, et le nom ne fait pas la personne. Quant à ton avenir, mainada, il sera bien ce que tu voudras, et s'il advenait que tu veuilles plus alors nous ferons en sorte de t'offrir ce plus. Tu mérites bien plus que tout autre qu'on te donne ce qui te fera plaisir. Ton père l'aurait voulu ainsi, et je le ferai ainsi.

N'oublie pas de revenir la meuna sòrre, Ordalie manque d'une présence féminine et je crois bien n'avoir pas les mains assez douces quand il est question de la panser ou de la coiffer.

Que Dieu, qui t'entend, n'en doute jamais, te conduise à bonne fin la meuna sòrre.

C.de Terme

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Cerdanne
Les jours succèdent aux jours et l’on n’y peut rien changer. Ils écrasent littéralement Cerdanne, de leur lente et lourde monotonie.
Au point qu’elle en oublie qui elle est .
A ne plus savoir l’heure des rires et l’heure des rêves.
C’est un vent capricieux qui soulève ses jupons, fouette son visage et la force à s’abriter dans une masure délabrée.

Les bois sombres cachent le peu de lumière du jour qui ose passer. Transie, recroquevillée devant un maigre feu qu’elle prend peine à allumer dans la cheminée abandonnée, elle finit par soulever sa besace fatiguée.
Le regard braqué sur les flammes tremblotantes, elle récupère un reste de courage et farfouille encore dans la sacoche de vieux cuir usé.
Les lettres, lues et relues sont posées là… et la jeune femme reste silencieuse un long moment encore, avant de se pencher sur ses maux et laisser parler la plume.



Citation:

A Chabert de Terme, vieux fraire, Puisse t il l’être un peu…


Je suis ravie de savoir que vous remettez un semblant de vie dans ce qui ne ressemblait plus à rien.
Et pour le coup j’ai hâte maintenant de revoir Saumur.
Installez vous donc à votre aise, vous et Ordalie.
Les chardons ne tarderont pas à refleurir, leur couleur bleue est magnifique et je pense que votre vieille compagne appréciera.

Ici, tout va moyen.
Les jours s’effilochent, insipides et solitaires.
Peut être dois je en passer par là pour retrouver l’essentiel.
Si je le retrouve un jour et si je lui laisse une chance de me retenir.

Enfin pour l’heure, j’attends tout bonnement que le vent tourne et me ramène vers l’Anjou.
Le solstice d’été sera Angevin surement.
Je retrouverais là bas l’ami dont je vous ai parlé dans ma dernière lettre. D’ailleurs à ce propos, voudriez vous nous accompagner ?
Judas souhaite visiter la Bretagne et nous sommes cordialement invités. Cela vous permettrait de sortir un peu de Saumur.

Il vous faudra bien vous rappeler de tout, Fraire.
Parce que je sais les mots aux bords de mes lèvres. Ils se répètent. "Parlez-moi de mon Père et apprenez-moi à l’aimer un peu."

Vous me manquez aussi.

Cerdanne

- Une chose m’intrigue tout de même.
Dieu est dans chacune de vos phrases.
Seriez-vous un Curé ?

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Chabert
Un sursaut le réveilla, à moins que ce ne soit le cri au dehors, ou bien la suite logique de son cauchemar. Encore une fois, il avait rêvé d'elle, de ce corps aux membres qui partaient en lambeaux, de ce visage émacié et brillant de sueur. Encore une fois, il avait entendu ses gémissements et ses suppliques de douleur. Encore une fois, et ce, malgré l'alcool ingurgité en masse. La bouche pâteuse, les yeux cireux, il s'extirpa de la grange pour rejoindre la source du vacarme, un coursier, les missives allaient bon train ces derniers temps, mais pas assez à son goût toutefois.

Le messager eut une grimace de dégoût à la vue de l'homme barbu et puant l'alcool plus encore qu'une barrique mise en perce, mais la lettre fut donnée, et le coursier remercié tandis que lui même rentrait dans la grange pour rejoindre l'abreuvoir d'Ordalie et s'asperger d'eau afin de mieux se réveiller. Le début de la lettre l'intrigua, le milieu l'attrista et la fin le fit sourire. Peu de mots, beaucoup de maux, des mots qui inspiraient un peu plus d'émotion. Le nécessaire à écrire fut saisi et bancalement posée sur un ballot de foin et lui même s'appuya dessus pour retenir les vacillements

Citation:
A Cerdanne d'Anjou, fille de Juan de Mona,

Je ne sais pas si Ordalie appréciera la couleur bleue des chardons, à moi, ils rappelleront la couleur de ton regard insolent. Un souvenir de plus quand j'attends ton retour. Est-ce le temps qui veut ça ? Je m'ennuie de ta présence et reste à me morfondre, au moins quand tu étais là, j'avais une raison de sortir, de voir des gens pour te voir, toi, quitte à te taquiner.

J'irai en Bretagne si tu le veux, si tu me permets de rester et de veiller à tes côtés. Je ne sais même pas à quoi m'attendre là-bas, ils ont, paraît-il, un langage barbare, et je n'ai pas interrogé le jeune Brocéliande à ce sujet, je me dis pourtant que nous devons paraître bien barbares nous aussi, quand nous parlons la langue d'Oc, même si, j'aurais tendance en toute objectivité à dire qu'il y a pire que notre langue natale chantante.. Enfin, les étrangers sont toujours étranges là où ils vont et pour ceux qui n'ont pas l'esprit assez large pour voir l'unicité des Enfants du Très-Haut. Par qui donc sommes-nous invités ? J'ai bien compris que nous accompagnons ton ami, mais qui nous invite donc en cette Bretagne qu'il veut visiter ?

Je n'ai, malheureusement pour moi, rien oublié, la meuna mainada.. Mes nuits sont un éternel renouveau de souvenirs que je devrais trier pour t'offrir le meilleur et me purger du pire. La chose n'est pas aisée, et je crains de n'y arriver jamais. Toutefois, ton père n'aura plus de secret pour toi, et tu pourras alors comme tout un chacun raconter comme tu es fière de lui.

Quant à être un curé, ne m'insulte pas, et ne me compare pas à l'engeance de l'église aristotélicienne. Leur dogme est une hérésie.. Si le Seigneur vrai Dieu, avait, au sens propre et principal, créé les ténèbres et le mal, il serait à n'en pas douter la cause et le principe de tout mal, ce qu'il est vain et funeste de penser. Ils ont tort et se pourlèchent de ce mensonge qu'ils assènent à leurs ouailles sous le prétexte fallacieux de leur révéler la vérité. Je ne suis pas curé, et ne suis pas non plus Parfait. Si tu veux tout savoir, je suis un bonhomme. Pas de ceux qui comme à Toulouse prétendent l'être, et se targuent pour certains d'être des Parfaits et pourtant consacrent des unions par le mariage, en parodie abjecte des sacrements de l'Eglise Aristotélicienne. Non, un vrai bonhomme, ou tout du moins, un homme qui croit en sa foi.

Et cet homme prie chaque jour pour que Dieu te conduise à bonne fin et te ramène à lui, la meuna sòrre,

C. de Terme.

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