--Le_gus
Le_Gus s'était mis au boulot séance-tenante. Il avait trait ses quatre vaches, les avait examinées sous toutes les coutures avant de les laisser sortir de l'étable afin qu'elles aillent se remplir la panse de bonne herbe fraîche dans la prairie attenante.
Maintenant, c'était son tour. La crâne toujours aussi douloureux de sa cuite de la veille, l'homme plongea une louche de bois dans son seau rempli de lait et s'accorda sa pause petit-déjeuner assis sur un ballot de paille. Puis il sortit de l'étable un peu requinqué... Direction, la soue aux cochons sitôt qu'il aurait mis son lait à l'abri dans la laiterie... La fabrication du beurre viendrait plus tard. Il fit deux voyages depuis l'étable pour transporter ses seaux de lait tout frais et ressortit de la laiterie.
Nez au vent, il sortit un linge de la poche de ses braies pour s'éponger le front en humant l'air. Les oiseaux chantaient, le temps était au beau... Il ronchonna encore un peu à l'adresse du soleil qui allait lui griller son maïs encore jeune s'il brillait trop fort. Un dernier coup d'oeil aux alentours puis le paysan se dirigea vers la soue de ses cochons... Il lui fallait les nourrir et peut-être bien que la grosse truie aurait enfin mis bas... A cette idée, il pressa le pas.
--Legus
Le_Gus entra précipitamment, poussant la porte qui alla claquer contre le mur. Immédiatement il vit qu'une de ses fenêtres était ouverte : les rayons du soleil commençaient de réchauffer la salle...
Il s'arrêta net, repoussa le chapeau qui protégeait son chef dégarni, se gratta la tête et se mit à grommeler pour lui seul...
" - Rondidjou !! Un chat peut pas ouvrir une fenêtre ! Mon pauv' gars, t'as vraiment trop forcé hier soir ! Elle était pourtant fermée cette fenêtre ! Sinon, je m'en s'rais aperçu tout à l'heure.... Ahem... C'pas normal !"
L'homme au comble de l'incompréhension s'avança machinalement vers le fenestron et en repoussa le battant ramenant la pénombre puis se ravisant, l'ouvre à nouveau et fait de même pour l'autre ouverture encore occultée.
" - Si ya un matou ici je le trouverai ! Engeance du Sans-Nom ! Vla qu'ils savent ouvrir les fenêtres maintenant ! Mordiou de mordiou !! Fils de sorcière !! T'es où sale bête ?!!"
Allant et venant avec rage dans la pièce, furetant et poussant de sa fouche meubles et sièges, le_Gus finit pas marcher sur quelque chose... Baissant les yeux, il poussa une exclamation en découvrant une chausse.
" - Par les dents d'ma fourche !! Quescéqca !!! Ca n'porte pas chausse les chats !!"
L'entendement du bonhomme mis à mal par la gueule de bois qui lui vrillait les tempes finit par fonctionner un peu plus vite ! Il frappa le sol du manche de son outil et se mit à hurler.
" - SORTEZ D'LA !! DEMON OU GARN'MENT ! VOUS M'FAITES PAS PEUR ! RUFFIAN !!! VOLEUR !!! C'EST-Y QU'VOUS VOULEZ M'VOLER ??? PAR MA FOI, J'VOUS LAISS'RAI PAS FAIRE !! MECREANTS !!! SOOOORTEEEEEZZZZ !!!"
Fourche en avant, l'oeil mauvais sous des sourcils broussailleux, la bouche déformée par la rage, rien ne comptait plus pour le vieux que de trouver l'intrus. Il se mit à ouvrir tout ce qui pouvait l'être en continuant de vitupérer...
--Legus
Il s'approchait toujours fourche à la main d'une armoire, la seule qu'il possède d'ailleurs quand les portes s'ouvrirent avec violence et que retentit un cri horrifiant pour le superstitieux qu'il est.
La mine des mauvais jours, la bouché béante de stupéfaction le_Gus n'a que le temps d'éviter d'un coup de fourche la chaise qui s'envole et va s'écraser contre un mur dans un bruit d'enfer faisant résonner sa cervelle déjà bien endolorie par la cuite de la veille. Toujours coit, le paysan regarde son vis-à-vis qui sort une dague et la pointe vers son bide proéminent. Rictus sarcastique.
" - Par les tripes d'Aristote ! C'était donc point ce foutu chat du voisin ! Tu voulais m'voler hein ! Fils du Sans-Nom !! Tu m'fais pas peur avec ton p'tit bout d'ferraille ! "
Le_Gus qui tient toujours la chausse trouvée sur le sol, la lance à la volée en direction de l'intrus masqué puis brandit sa fourche et la pointe d'un geste violent vers lui.
Mais voila qu'une voix enfantine s'élève teintée d'incompréhension et de peur.
Ed, tu fais quoi avec ça?
" - Bou diou d'bou diou !! "
Le sang de l'homme ne fait qu'un tour quand faisant volte-face il découvre la gamine. Son geste est rapide et marqué de colère, il l'attrape par un bras, le visage déformé par une fureur subite.
" - Et en plus vla t'y pas qu'vous embauchez des donzelles pour voler les pauv' gens ! Maroufle !!! J'm'en va vous m'ner au Lieut'nant du village !! Allez hop ! En route !!!"
Sûr de sa bonne foi et tenant un otage Le_Gus ne doute pas un instant dans sa caboche douloureuse qu'il arrivera à ses fins.
" - On aura tout vu ! Vla qu'ils en ont point assez des chemins creux faut qu'ils viennent marauder dans les fermes !! Et file droit toi !!!"
Grand geste de la fourche en direction d'Edwald pour lui faire comprendre qu'il faut sortir.