Aimbaud
Après son repas du soir, interrompu de façon fort charmante par l'entrée fracassante d'Aimbaud et de son trophée du jour (un cerf mort transpercé par une flèche dans l'oeil qu'il avait poursuivit tout le jour en compagnie de ses gens), Clémence s'était dirigée vers sa chambre avec l'intention de se coucher tôt pour une fois et d'étudier le Livre des Vertus et les écrits des prophètes à la lueur d'une chandelle. Elle avait procédé à ses ablutions, on l'avait changée, peignée, et elle s'était mise au lit, se plongeant directement dans sa lecture afin de ne pas avoir à penser aux manigances amorcées par son époux derrière son dos.
Mais las, sa concentration était réduite à néant, elle ne pouvait décemment le laisser ronfler tranquillement pendant qu'elle avait le cerveau en ébullition à trop copieusement l'insulter en pensées. Alors, elle se précipite dans le couloir, ne prenant pas même la peine d'enfiler des souliers, et, se retenant pour ne pas courir, entre dans la chambre de son époux sans frapper, claque la porte derrière elle et se glisse à ses côtés sous les couvertures.
Il faut qu'on parle.
Ggm.. m'chval ?
Fait Aimbaud, aplatit sur le ventre comme un phoque échoué. Il sort la tête de l'oreiller en sursautant quand la porte claque. Le sommeil était encore léger, m'enfin notre bonhomme était bien parti pour un très gros roupillon. S'écrasant l'oeil dans une paume de main en retenant un bâillement, il articule.
Quez'ouvoulez ?
Elle le regarde, tente de mettre de l'ordre dans ses idées, s'allonge sur le flanc et vient caler sa tête dans le creux de sa main, le bras en équerre. Très sérieusement, le sourcil froncé, elle continue de le fixer.
Vous n'en avez aucune idée ? Il n'y a rien que vous souhaitez évoquer ? Quelque chose dont vous ne m'auriez pas encore parlé mais que vous souhaitez maintenant aborder ?
Mh...
Il se redresse lui aussi pour caler ses épaules dans l'oreiller ramassé contre la tête du lit. La mine est sombre, il le sent bien : c'est soirée chieuse. Il l'observe donc prudemment avec de petits coups d'oeil à son côté.
Si vous parlez du foutoir dans la salle du trône... J'allais arranger ça, mais c'est les gardes qui laissent toujours traîner leurs affaires euh...
Elle se renfrogne : il n'a de toute évidence aucune envie de lui dévoiler ses projets. Elle soupire, et, compatissante, vient poser une main sur son épaule.
Il ne s'agit pas de cela. Mais vous savez, si vous vous décidez à m'en parler tout de suite, je serais moins en colère contre vous.
Aimbaud la regarde avec des yeux comme des billes, ne comprenant pas bien. Pourquoi il a cette impression bizarre qu'elle lui parle comme sa mère ?
Quoi... Il va pas le champ de coquelicots ?
La main sur son épaule, qu'elle avait jusque là délicatement posée, vient le heurter dans un élan colérique. Furieuse, elle hausse le ton.
Vous voulez marier Isaure !
Il ne dit pas "aïe" mais il ouvre la bouche en désignant son épaule, outré qu'elle le tape.
Qui vous a dit ça ?
Elle lui jette un bref coup d'oeil et change de position en venant se caler contre l'oreiller, afin d'avoir à éviter de trop le regarder dans les yeux. Elle est un peu gênée, elle sait qu'elle ne devrait pas, le coupable c'est lui. Mais elle ne peut pas s'en empêcher, elle commence à, inconsciemment, se ronger l'ongle du pouce déjà trop ras.
Ah ! Vous ne niez pas... Pourquoi ne m'en avez-vous pas parlé ? Je suis... très en colère.
Aimbaud est perplexe. Mais comment COMMENT fait-elle pour TOUT savoir ? Elle a des espions. Les servantes qui changent les draps, ou le mec qui époussète les bibelots ? Ou alors elle intercepte les pigeons ? Elle lui donne à boir du serum de vérité pour mieux l'écouter parler en dormant ? SAAAAALE SORCIÈRE ! Bref. Il la regarde de travers, extrêmement méfiant, en cherchant à comprendre le mystère... Puis il abandonne et laisse retomber la tête sur l'oreiller près d'elle.
Rah ! Mais... Pfff. C'est mieux comme cela. Vous m'auriez mis des bâtons dans les roues...
"Des bâtons dans les r... ?" Mais... Elle n'en revient pas et elle fronce le nez, elle se dit qu'elle le verrait bien MORT, là, tout de suite, il en deviendrait immédiatement beaucoup moins agaçant. Furieuse, elle se jette hors du lit, saisit les couvertures et les tire pour les laisser choir sur le sol. T'as froid ? Bien fait !
Et ÇA ! C'est des bâtons dans les roues, peut-être ?
MAIS ARRÊTEZ ! Il s'agrippe aux draps. Ça va pas ?! Vous êtes un peu tarée vous !
Et tandis que l'époux s'étale sur le lit pour tendre les bras jusqu'au sol et ramener ses précieuses couvertures, l'épouse les tire de son côté, bien décidée à l'emme*der jusqu'au bout.
C'est MA cousine ! Vous auriez dû m'en parler !
C'EST UNE GOURDE EN ÂGE DE SE MARIER. POINT.
Dans un élan brusque, il tire plus fort et emporte la fluette sur le matelas. Celle-ci s'y écrase, ce qui n'arrange ab-so-lu-ment pas sa colère. Elle grimpe à nouveau sur le lit et c'est sur son oreiller qu'elle se met à tirer cette fois. L'envoyant au pied du lit, elle lui jette un regard noir.
Vous vouliez vous débarrasser d'elle ! AVOUEZ !
Aimbaud, fulminant au dernier degré, la regarde avec l'envie de l'étouffer. Par réflexe, il saisit le pauvre oreiller resistant encore à la tempête, s'accrochant faiblement à sa place pendant que tout le reste du lit par à vau l'eau, il attrape donc le résistant plein de plumes d'oies, et le balance d'un coup dans la tronche de sa femme.
BON ! Vous allez vous CALMER maintenant.
Clémence reçoit l'oreiller en pleine face et en reste tellement surprise, et outrée, qu'elle ne profère pas un seul son. La bouche ouverte sur une protestation muette, elle l'observe un moment, immobile. Et puis, elle s'assoit, et, prenant appuis sur ses mains, commence à lui donner des coups de pieds dans l'intention de le faire tomber du lit.
SORTEZ D'ICI !
Mais... mais.. Elle est folle. J'ai épousé une folle. Qu'on appelle l'asile... AÏEUH !
Il ne peut pas décemment répliquer...! Après elle va pleurer... Il résiste m'enfin... Il recule, il trouve appui de la paume... dans le vide. Et se casse la tronche en arrière sur le tapis. La jeune femme éclate d'un rire victorieux et se penche au dessus du vide pour contempler son époux en fâcheuse posture.
Bon. Reprenons. Qui est-ce ?
Il se frotte rudement l'arrière de la tête afin d'écraser une douleur qui point, une petite bosse peut-être, plissant les yeux sous l'emprunte d'une grimace.
Grrggnhhiimmmhh... Clémence. Il la fléchette du regard. Sortez de ma chambre.
Et le bougre de se redresser pour la pousser du lit, comme un bulldozer qui ratisse toute la surface du matelas.
Il s'appelle Judas Von Frayeur et il sera parfait pour elle !
Mais...! Qu'il arrête d'oser la toucher comme ça simplement dans le but de l'évincer ! L'oreiller, bon, c'était une chose, mais là, l'envoyer bouler hors du lit comme il en avait l'intention, sans manière aucune... Réflexes aidant, elle parvint à éviter son bourrin de mari mais se retrouva à devoir faire le pied de grue sur le sol recouvert de tapis mais qui n'en restait pas moins glacial.
Je ne sortirai pas.
Elle dansait d'un pied sur l'autre en se frictionnant les bras et en claquant des dents, dans l'espoir qu'il l'autorise à revenir retrouver la chaleur du lit.
Von Frayeur ? Qu'est ce que c'est que ça ?
Chaleur du lit ? Sans couverture ni drap de lin ? GRÂCE À QUI ? Aimbaud reprend la maîtrise de son royaume et la toise un instant à genoux sur la litterie, avant de se pencher pour ramasser les édredons évadés et les ramener à bon port, enfin... les redisposer maladroitement, car il serait bien incapable de tendre proprement un lit de ses draps ! Concentré sur sa tâche, c'est à dire en essayant de trouver le bon sens de disposition des couvertures, et en s'empêtrant dans un tombant de rideau qui n'avait RIEN À FICHE ici, mais que clémence avait détaché dans sa crise de folie furieuse, bref, concentré disai-je, il répondit.
Le Vassal d'Erwelyn, la Saint Fargeau.
Elle continue de sautiller sur place, se disant qu'il n'a vraiment aucune pitié et qu'il pourrait lui proposer de le rejoindre, là, maintenant qu'il a plus ou moins remis en place les couvertures. Il fait froid, très froid, alors elle se rapproche du lit, mine de rien.
On dit pas plutôt ... von Frayner ?
VOUS N'ALLEZ PAS EN PLUS ME REPRENDRE SUR DES QUESTIONS DE VOCABULAIRE !
Mais... mais... mais... Qu'est-ce... ?
Il explose sans raison apparente, complètement agacé, en serrant les poings dans sa grosse colère. Elle le regarde s'énerver tout seul sans comprendre et profite de ce qu'il est distrait par sa colère pour se jeter dans le lit, rabattant d'un mouvement sec les couvertures au dessus de sa tête. De sous les draps, elle lui répond d'une voix étouffée :
Pourquoi vous criez c'est juste que je n'avais pas comPRIS le NOM !
Le jeune marquis observe un instant l'espèce de colline sous les couvertures qui lui parle, et d'une voix très calme, en constatant qu'elle s'invite définitivement dans SON lit :
Non mais vous rêvez, là ?
Elle secoue la tête pour lui signifier que non il ne rêve pas et maintient sa position.
Il faut qu'on DISCUTE !
On AAAA discuté.
Il toise sévèrement la colline de couverture, et l'instant d'après il passe une main sous le drap en vrac, et appuie de l'index pile poil entre deux côtes maigres. Clémence réagit par un brusque mouvement du bassin et sa tête émerge de sous les draps.
Pas ça ! Puis, tentant de remettre de l'ordre dans ses cheveux en désordre, elle reprend. Non mais je ne vous ai pas dit... que je vais faire la tête pendant un long moment. J'estime... Et elle lève un doigt savant. que vous devez me parler de ce genre de choses. Donc, c'est non. Pas de mariage.
Aimbaud lève les yeux au ciel, passionné par ce qu'elle raconte, puis se penche sur elle, une main de chaque côté.
C'est cela oui... Bon, on fait un héritier et vous retournez dans vos appartements.
Dépitée, elle laisse quelques secondes s'écouler, à le regarder par dessous.
Vous êtes... Enfin vous êtes... Vous n'êtes qu'un enfant ! Vous évitez TOUJOURS les discussions !
L'autre de soupirer, désespéré et de se mettre exprès à peser le poids d'un mort sur elle.
Avec vous ça n'est pas discuter ! C'est juste dire OUI, OUI, et encore OUI D'ACCORD !
Elle remue sous lui et tente de le repousser.
Vous me faites MAAAAAAL.
Bien faaaaaaaaait !
Il l'imite avec une voix couinarde en se laissant repousser. De son côté, elle se redresse, décidée à quitter le lit, la pièce, parce que oui, son buté de mari restera campé sur ses positions, absolument pas disposé à discuter de ce qui, pourtant, mérite discussion. Frustrée, en colère, elle s'arrête sur le pas de la porte et lui lance.
Et la prochaine fois, nous parlerons de cette correspondance que vous continuez d'entretenir avec Blanche.
Lui, qui commençait déjà à retrouver une position confortable dans l'oreiller, redresse soudain la tête.
Quoi ?
Elle l'observe un instant, satisfaite de son effet de surprise, et comme elle était entrée, claque la porte derrière elle en criant un dernier.
BONNE NUIT !
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Mais las, sa concentration était réduite à néant, elle ne pouvait décemment le laisser ronfler tranquillement pendant qu'elle avait le cerveau en ébullition à trop copieusement l'insulter en pensées. Alors, elle se précipite dans le couloir, ne prenant pas même la peine d'enfiler des souliers, et, se retenant pour ne pas courir, entre dans la chambre de son époux sans frapper, claque la porte derrière elle et se glisse à ses côtés sous les couvertures.
Il faut qu'on parle.
Ggm.. m'chval ?
Fait Aimbaud, aplatit sur le ventre comme un phoque échoué. Il sort la tête de l'oreiller en sursautant quand la porte claque. Le sommeil était encore léger, m'enfin notre bonhomme était bien parti pour un très gros roupillon. S'écrasant l'oeil dans une paume de main en retenant un bâillement, il articule.
Quez'ouvoulez ?
Elle le regarde, tente de mettre de l'ordre dans ses idées, s'allonge sur le flanc et vient caler sa tête dans le creux de sa main, le bras en équerre. Très sérieusement, le sourcil froncé, elle continue de le fixer.
Vous n'en avez aucune idée ? Il n'y a rien que vous souhaitez évoquer ? Quelque chose dont vous ne m'auriez pas encore parlé mais que vous souhaitez maintenant aborder ?
Mh...
Il se redresse lui aussi pour caler ses épaules dans l'oreiller ramassé contre la tête du lit. La mine est sombre, il le sent bien : c'est soirée chieuse. Il l'observe donc prudemment avec de petits coups d'oeil à son côté.
Si vous parlez du foutoir dans la salle du trône... J'allais arranger ça, mais c'est les gardes qui laissent toujours traîner leurs affaires euh...
Elle se renfrogne : il n'a de toute évidence aucune envie de lui dévoiler ses projets. Elle soupire, et, compatissante, vient poser une main sur son épaule.
Il ne s'agit pas de cela. Mais vous savez, si vous vous décidez à m'en parler tout de suite, je serais moins en colère contre vous.
Aimbaud la regarde avec des yeux comme des billes, ne comprenant pas bien. Pourquoi il a cette impression bizarre qu'elle lui parle comme sa mère ?
Quoi... Il va pas le champ de coquelicots ?
La main sur son épaule, qu'elle avait jusque là délicatement posée, vient le heurter dans un élan colérique. Furieuse, elle hausse le ton.
Vous voulez marier Isaure !
Il ne dit pas "aïe" mais il ouvre la bouche en désignant son épaule, outré qu'elle le tape.
Qui vous a dit ça ?
Elle lui jette un bref coup d'oeil et change de position en venant se caler contre l'oreiller, afin d'avoir à éviter de trop le regarder dans les yeux. Elle est un peu gênée, elle sait qu'elle ne devrait pas, le coupable c'est lui. Mais elle ne peut pas s'en empêcher, elle commence à, inconsciemment, se ronger l'ongle du pouce déjà trop ras.
Ah ! Vous ne niez pas... Pourquoi ne m'en avez-vous pas parlé ? Je suis... très en colère.
Aimbaud est perplexe. Mais comment COMMENT fait-elle pour TOUT savoir ? Elle a des espions. Les servantes qui changent les draps, ou le mec qui époussète les bibelots ? Ou alors elle intercepte les pigeons ? Elle lui donne à boir du serum de vérité pour mieux l'écouter parler en dormant ? SAAAAALE SORCIÈRE ! Bref. Il la regarde de travers, extrêmement méfiant, en cherchant à comprendre le mystère... Puis il abandonne et laisse retomber la tête sur l'oreiller près d'elle.
Rah ! Mais... Pfff. C'est mieux comme cela. Vous m'auriez mis des bâtons dans les roues...
"Des bâtons dans les r... ?" Mais... Elle n'en revient pas et elle fronce le nez, elle se dit qu'elle le verrait bien MORT, là, tout de suite, il en deviendrait immédiatement beaucoup moins agaçant. Furieuse, elle se jette hors du lit, saisit les couvertures et les tire pour les laisser choir sur le sol. T'as froid ? Bien fait !
Et ÇA ! C'est des bâtons dans les roues, peut-être ?
MAIS ARRÊTEZ ! Il s'agrippe aux draps. Ça va pas ?! Vous êtes un peu tarée vous !
Et tandis que l'époux s'étale sur le lit pour tendre les bras jusqu'au sol et ramener ses précieuses couvertures, l'épouse les tire de son côté, bien décidée à l'emme*der jusqu'au bout.
C'est MA cousine ! Vous auriez dû m'en parler !
C'EST UNE GOURDE EN ÂGE DE SE MARIER. POINT.
Dans un élan brusque, il tire plus fort et emporte la fluette sur le matelas. Celle-ci s'y écrase, ce qui n'arrange ab-so-lu-ment pas sa colère. Elle grimpe à nouveau sur le lit et c'est sur son oreiller qu'elle se met à tirer cette fois. L'envoyant au pied du lit, elle lui jette un regard noir.
Vous vouliez vous débarrasser d'elle ! AVOUEZ !
Aimbaud, fulminant au dernier degré, la regarde avec l'envie de l'étouffer. Par réflexe, il saisit le pauvre oreiller resistant encore à la tempête, s'accrochant faiblement à sa place pendant que tout le reste du lit par à vau l'eau, il attrape donc le résistant plein de plumes d'oies, et le balance d'un coup dans la tronche de sa femme.
BON ! Vous allez vous CALMER maintenant.
Clémence reçoit l'oreiller en pleine face et en reste tellement surprise, et outrée, qu'elle ne profère pas un seul son. La bouche ouverte sur une protestation muette, elle l'observe un moment, immobile. Et puis, elle s'assoit, et, prenant appuis sur ses mains, commence à lui donner des coups de pieds dans l'intention de le faire tomber du lit.
SORTEZ D'ICI !
Mais... mais.. Elle est folle. J'ai épousé une folle. Qu'on appelle l'asile... AÏEUH !
Il ne peut pas décemment répliquer...! Après elle va pleurer... Il résiste m'enfin... Il recule, il trouve appui de la paume... dans le vide. Et se casse la tronche en arrière sur le tapis. La jeune femme éclate d'un rire victorieux et se penche au dessus du vide pour contempler son époux en fâcheuse posture.
Bon. Reprenons. Qui est-ce ?
Il se frotte rudement l'arrière de la tête afin d'écraser une douleur qui point, une petite bosse peut-être, plissant les yeux sous l'emprunte d'une grimace.
Grrggnhhiimmmhh... Clémence. Il la fléchette du regard. Sortez de ma chambre.
Et le bougre de se redresser pour la pousser du lit, comme un bulldozer qui ratisse toute la surface du matelas.
Il s'appelle Judas Von Frayeur et il sera parfait pour elle !
Mais...! Qu'il arrête d'oser la toucher comme ça simplement dans le but de l'évincer ! L'oreiller, bon, c'était une chose, mais là, l'envoyer bouler hors du lit comme il en avait l'intention, sans manière aucune... Réflexes aidant, elle parvint à éviter son bourrin de mari mais se retrouva à devoir faire le pied de grue sur le sol recouvert de tapis mais qui n'en restait pas moins glacial.
Je ne sortirai pas.
Elle dansait d'un pied sur l'autre en se frictionnant les bras et en claquant des dents, dans l'espoir qu'il l'autorise à revenir retrouver la chaleur du lit.
Von Frayeur ? Qu'est ce que c'est que ça ?
Chaleur du lit ? Sans couverture ni drap de lin ? GRÂCE À QUI ? Aimbaud reprend la maîtrise de son royaume et la toise un instant à genoux sur la litterie, avant de se pencher pour ramasser les édredons évadés et les ramener à bon port, enfin... les redisposer maladroitement, car il serait bien incapable de tendre proprement un lit de ses draps ! Concentré sur sa tâche, c'est à dire en essayant de trouver le bon sens de disposition des couvertures, et en s'empêtrant dans un tombant de rideau qui n'avait RIEN À FICHE ici, mais que clémence avait détaché dans sa crise de folie furieuse, bref, concentré disai-je, il répondit.
Le Vassal d'Erwelyn, la Saint Fargeau.
Elle continue de sautiller sur place, se disant qu'il n'a vraiment aucune pitié et qu'il pourrait lui proposer de le rejoindre, là, maintenant qu'il a plus ou moins remis en place les couvertures. Il fait froid, très froid, alors elle se rapproche du lit, mine de rien.
On dit pas plutôt ... von Frayner ?
VOUS N'ALLEZ PAS EN PLUS ME REPRENDRE SUR DES QUESTIONS DE VOCABULAIRE !
Mais... mais... mais... Qu'est-ce... ?
Il explose sans raison apparente, complètement agacé, en serrant les poings dans sa grosse colère. Elle le regarde s'énerver tout seul sans comprendre et profite de ce qu'il est distrait par sa colère pour se jeter dans le lit, rabattant d'un mouvement sec les couvertures au dessus de sa tête. De sous les draps, elle lui répond d'une voix étouffée :
Pourquoi vous criez c'est juste que je n'avais pas comPRIS le NOM !
Le jeune marquis observe un instant l'espèce de colline sous les couvertures qui lui parle, et d'une voix très calme, en constatant qu'elle s'invite définitivement dans SON lit :
Non mais vous rêvez, là ?
Elle secoue la tête pour lui signifier que non il ne rêve pas et maintient sa position.
Il faut qu'on DISCUTE !
On AAAA discuté.
Il toise sévèrement la colline de couverture, et l'instant d'après il passe une main sous le drap en vrac, et appuie de l'index pile poil entre deux côtes maigres. Clémence réagit par un brusque mouvement du bassin et sa tête émerge de sous les draps.
Pas ça ! Puis, tentant de remettre de l'ordre dans ses cheveux en désordre, elle reprend. Non mais je ne vous ai pas dit... que je vais faire la tête pendant un long moment. J'estime... Et elle lève un doigt savant. que vous devez me parler de ce genre de choses. Donc, c'est non. Pas de mariage.
Aimbaud lève les yeux au ciel, passionné par ce qu'elle raconte, puis se penche sur elle, une main de chaque côté.
C'est cela oui... Bon, on fait un héritier et vous retournez dans vos appartements.
Dépitée, elle laisse quelques secondes s'écouler, à le regarder par dessous.
Vous êtes... Enfin vous êtes... Vous n'êtes qu'un enfant ! Vous évitez TOUJOURS les discussions !
L'autre de soupirer, désespéré et de se mettre exprès à peser le poids d'un mort sur elle.
Avec vous ça n'est pas discuter ! C'est juste dire OUI, OUI, et encore OUI D'ACCORD !
Elle remue sous lui et tente de le repousser.
Vous me faites MAAAAAAL.
Bien faaaaaaaaait !
Il l'imite avec une voix couinarde en se laissant repousser. De son côté, elle se redresse, décidée à quitter le lit, la pièce, parce que oui, son buté de mari restera campé sur ses positions, absolument pas disposé à discuter de ce qui, pourtant, mérite discussion. Frustrée, en colère, elle s'arrête sur le pas de la porte et lui lance.
Et la prochaine fois, nous parlerons de cette correspondance que vous continuez d'entretenir avec Blanche.
Lui, qui commençait déjà à retrouver une position confortable dans l'oreiller, redresse soudain la tête.
Quoi ?
Elle l'observe un instant, satisfaite de son effet de surprise, et comme elle était entrée, claque la porte derrière elle en criant un dernier.
BONNE NUIT !
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