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[RP] Quand prend la béarnaise.

Theolenn
Theolenn en lâcha son prodigieux grimoire pour regarder, éberluée, la pantomime de son illégitime.
La danse du dindon n’aurait pas fait meilleure farce, elle rit de bon cœur. Puis prenant une voix de baryton :

- Fais pas ta vierge effarouchée mon mignon, coiffe ton chapeau et promenons-nous dans les bois tant que le loup, et sa vesse, y sont encore.

Et baluchons faits, ils partirent bras dessus bras dessous par les vertes collines, les champs nus et les bois de feuillus, rejoindre les résineux et leurs tapis moussus.

Pour une balade, c’en fut une belle, même si de champignon, on ne vit pas le nez d’un, et Pau fit son apparition dans la matinée, celle du lendemain, évidemment. Il avait suffi de suivre le cours du Gave, pas bien difficile en somme. Theolenn avait même songé que par voie d’eau, ce serait plus rapide et moins fatigant mais la tumultuosité de certains passages la convainquit du bien fondé de son renoncement. Jamais Morelius n’aurait survécu à de telles secousses… Il avait l’estomac trop fragile, son droll. (Ne cherchez pas, c’est un néologisme personnel)

Elle n’avait pas envie de taverne, trop bruyante et soumise à des rencontres trop aléatoires, pas envie de masure délabrée, il commençait à faire humide et les cheminées mal débouchées tiraient mal quand elles n’enfumaient pas totalement l’habitacle, les granges étaient souvent trop aérées en cette saison et puis sa bourse lui pesait, elle avait beau l’alléger de mille façons, Bardaf ! Elle piochait et trouvait une vieille bourse de 100 pièces… Pfff… pas simple d’être pauvre !!!

Une location… voilà qui serait parfait.
Or justement, le destin avait décidé de l’aider. La première ferme rencontrée affichait une demande quelque peu étonnante.


Panneau a écrit:
« FERNAND cherche locataires pour menus travaux de ravaudage, brunes, rousses ou blondes : BIENVENUES ! »


Marrant comme on imagine vite n’importe quoi, hein ?

La curiosité fut la plus forte et malgré les bougonnements de Morelius qui ne le sentait pas du tout ce plan-là, Theolenn réussit à l’entraîner dans son sillage.
Quelle ne fut pas leur surprise quand une vieille femme habillée toute en rouge vient leur ouvrir en vacillant…


- Bien le bon jour, Dame … Heu… c’est l’annonce qui disait que peut-être on pourrait…
Ca sentait le lupanar à plein nez, et la belle eut un instant de regret tandis que Morelius ricanait « discrètement » dans son dos.


- C’est l’Fernand qui va s’fendre la poire, allez, venez que j’vous présente ! jacta la vieille en se trémoussant de plaisir dans son antique houppelande toute rapiécée.

- Passe devant, tu veux ? demanda humblement Theolenn au Morelius perclus d’hilarité malsaine.

- Que nenni, assume tes choix ma Prunille des prés ! s’entendit-elle répondre effarée…

Le chemin fut long en temps plus qu’en pas, plein de questionnements troublants et de méandres psychotiques, pour déboucher sur la porte d’une grange où gisait sur un lit de paille fraîche, un magnifique taureau tout déprimé.


- Fernand, mon chou, V’la tes nouveaux locataires !
Le plan est simple, vous lui redonnez goût à la vie et je vous loge à l’œil aussi longtemps que vous … tiendrez
!

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Morelius
Morelius, ayant fini de rire, contemplait accoudé au portillon de l'étable le pauvre bovidé qui semblait en effet fort déprimé. Souvenirs d'enfance lui revinrent en mémoire et tout en soupirant il en fit remarque à Theolenn:

- Dieu qu'il est loin le temps où nous jouions à touche-cougnettes avec le taureau du Berthoux. C'était ensuite à qui monterait le plus vite dans le pommier du Gros Louis... je ne sais pas si j'en serais encore capable...

Et ni une ni deux, il sauta le portillon pour se retrouver dans l'arène avec le fauve, histoire d'impressionner sa belle. Mais la mélancolie s'était bel et bien emparée du Fernand, que l'irruption du bipède ne sembla point troubler. Il lui lança un regard bovin et reprit sa lente rumination.

Décidément, le dernier défi de Theolenn lui seyait fort bien et l’excitait beaucoup plus que courir le champignon ambulant dans la forêt de Pau. Il s’accroupit au flanc de Fernand, et prit forte poignée de sel dans sa besace, qu'il présenta au taureau. L'animal ne daigna même pas le renifler et ne bougea point ; mais Morelius n’aimait guère le regard peu amène que lui lançait le cornu.


– Eh bien, soit. Ne couine pas, grand bœuf malade, aux grands maux les grands remèdes...

Et sans crier gare, Morelius passa derrière l'animal et enfonça son poing en son fondement jusqu'au coude, y lâchant sa poignée de sel ; Fernand poussa un mugissement à glacer le sang, se mit d’un bond sur pattes, rua pour expulser le malotru, puis se retourna pour le charger.

Morelius se retrouva perché sur le lourd râtelier de foin qui courrait le long du mur de l'étable. Le taureau ne pouvait l'atteindre, mais dans sa furie retrouvée il faisait sauter un à un les barreaux de la mangeoire.


- Theolenn, fais quelque chose...
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Theolenn
Ah que fut grande l’envie de répondre à l’appel par un « Assume tes choix mon Pruneau des bois ! »…
Et comme Theolenn aurait aimé que soit inventé dans la seconde un moyen ingénieux d’immortaliser la scène !


- C’est toi qui l’as assaisonné, mon marmiton, ne t’étonnes pas si à défaut de poivre, la moutarde lui est montée au nez…

La vieille maquerelle, elle, était tétanisée mais sous son regard figé par la stupéfaction, on pouvait deviner de la joie et une certaine forme d’émotion. Etait-ce le plaisir de retrouver son taureau sur ses quilles ou celui de voir un godelureau aux cheveux blancs, pendu comme un singe aux barreaux, de moins en moins nombreux, du garde-manger minotaurin ?

Fernand, surpris lui-même par le feu qui lui incendiait le cul, narguait le blanc-bec audacieux en attendant l’heure de lui rendre sa monnaie à défaut de la pièce initiale.
Il voulait jouer ? Il allait apprendre les règles du taureau, pour changer…
La bête progressait à la vitesse d’un barreau toutes les 5 secondes et d’après les rapides calculs de Theolenn, il restait 2 minutes à Morelius … s’il tenait la cadence imposée par le bovin furibond.

Elle réfléchit à toute vitesse mais rien ne venait, pas assez vite en tous cas… et le taureau dans toute la magnificence de sa fureur, gagnait sacrément du chemin !
Dépitée, l’auvergnate, car Theolenn, comme son nom ne l’indique pas, est née à Bourbon, se tourna en dernier recours vers la propriétaire de Fernand, toujours aussi béate d’admiration devant la force déployée par son bellâtre à cornes. C’est alors qu’une véritable idée de génie traversa la zone neuronale du lobe gauche du cerveau de la jeune femme: Rouge !

D’un geste rapide et puissant, elle arracha tout l’avant de la houppelande écarlate et multirapiècée de l’ancienne meneuse de revue, dont le tissu craqua dans un bruit sec. Le plus drôle, si la situation avait permis qu’on prenne le temps de rire un peu, c’est que le côté dos du vêtement tint en place, comme collé à son modèle par la force de l’habitude.


- Pépito mi corazón ? héla l’intrépide à l’intention du Fernando occupé à reluquer les fesses d’un spadassin qui n’en menait guère large….

- Olé !!! fit-elle enfin en envoyant valser le tissu pile-poile sur le museau fumant du quadrupède ulcéré.

Jamais on ne vit, et on ne verrait assurément plus, Morelius plus rapide à la course ; un vrai mustang de compétition !
Passé la barrière, il se laissa choir au sol, le teint totalement conforme au nom qu’il portait : Le Blanc !

Fernand, lui, dansait un gigue aveugle constituée de ruades plus ou moins élégantes visant à le débarrasser de cette chiffonnade qui lui brouillait la vue.
Soudain une détonation diabolique claqua dans l’air. Les trois humains présents au spectacle sursautèrent de concert… avant de se boucher le nez, horrifiés.
Le taureau venait de propulser le contenu de ses intestins en maculant le mur du fond de la grange d’une bouse gigantesque, digne des efforts de mastication d’une bonne semaine au moins ! L’odeur était insupportable, fermentation putride et liquide s’écoulant des matières gluantes qui collaient à la paroi de bois…


- Il était constipé ???Morelius... ? Le sel l’a débouché !!!… ben merdouille…

Morelius riait, mais riait… on se sut jamais si c’était dû au résultat de sa médication sauvage ou au trou de l’aiguille qui avait dû lui chatouiller les côtes quand il était passé au travers, mais il riait, et il riait tant que les deux femmes furent atteintes du même mal. Même le bi-corne en perdit son voile et sa mauvaise humeur pour arborer un air qui ressemblait étrangement à un sourire bovidé.

Theolenn qui ne perdait que rarement le Nord, se tourna vers son hôtesse et reprit la parole :


- Donc… vous nous montrez notre chambre ?
On mange quoi ce soir ?
Vous avez une salle d’eau ?
Est-ce qu’on pourrait voir le …

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Morelius
Sur le vieux plancher depuis longtemps déverni, des rayures d'ombre tombaient du volet de bois aux planches disjointes. Les grains de poussière scintillaient comme de minuscules constellations dans la douceur de la lumière tamisée qui éclairait la pièce. Tout y respirait une tranquillité rurale et simple. Un observateur terre-à-terre eut sans doute songé qu'aucune chambre ne devenait aussi calme par hasard. Les vêtements éparpillés autour du lit lui auraient sans doute donné raison.

Sous les draps rapiécés, un homme grogna et se retourna.


- Debout, fainéant, fit une voix.

La lumière se déversa brusquement par la fenêtre tandis que le volet s'ouvrait d'un coup sec.

Un marmonnement incompréhensible provint du lit, où l'homme avait enfoui la tête sous l'oreiller. Ses longues mèches blanches dépassaient de chaque côté, et ses bras étaient fermement agrippés à la taie.


- Encore un peu…

- Morelius, debout. Il est presque midi.


Une main impitoyable ravit le drap qui recouvrait l'homme. Avec une agilité et une souplesse étonnantes, il entreprit d'essayer de se cacher tout entier sous l'oreiller. Lorsqu'il fut clair qu'il n'y parviendrait pas, il dégagea péniblement la tête des profondeurs du duvet et coula un long regard vers la femme qui s'affairait dans la chambre. Une lueur de regret passa dans ses yeux noirs lorsqu'elle revêtit sa robe de voyage, et il lui décocha un sourire désarmant.

- Tu es belle.

Morelius s'extirpa de la couche en marmonnant, saisit d'une main vague le premier vêtement qui lui tomba sous la main, et se dirigea vers la table où Théolenn disposait quelques victuailles simples mais copieuses. Elle retint un éclat de rire en observant le grand échalas enroulé dans une sorte de vieux mantel de laine fuchsia, sans doute fort seyant sur la propriétaire des lieux il y a un demi-siècle, et secoua la tête en lui tendant un gobelet.

Avec un soupir, l'homme laissa sa tête tomber sur le plateau de la table, les yeux plongés avec une gravité intense dans son gobelet. Il le fixa un moment, puis l'avala à grands traits, et se renversa doucement en arrière.


- Je t'aime, fit-il dans un bâillement.
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Theolenn
Theolenn sentit son cœur se défragmenter sous l’effet de cet aveu si simple et si percutant à la fois.
Elle ne put cacher la partie émergée de son plaisir et laissa échapper un soupir d’aise. Un tout petit, juste de quoi préserver son palpitant de toute explosion amoureuse.
La vie avait été reposante pour eux ces derniers temps, les corps avaient profité d’un état de grâce tant au niveau de leur sécurité que de l’assouvissement de leurs désirs.
Et c’était bon, terriblement bon.

Comme elle n’était pas chienne, Theolenn qui passait de son côté, se fit pardonner l’interruption de sa grasse matinée, en octroyant aux lèvres du Morelius à peine sorti des arcanes du sommeil, un baiser langoureux et solaire. Juste de quoi attiser ses sens et activer son réveil.


- Tu sais que tu me plais encore plus en diva déjantée, Tentatore mio… souffla-t-elle en quittant sa bouche à regret, le sourire taquin et la main tentée de...
Mais non ! Il fallait bouger et s’aérer un peu, quand même !
Elle tartina de beurre frais une large tranche de pain, l’agrémenta d’un morceau de fromage du coin qui fleurait bon… la campagne, et tendit le tout vers la bouche affamée de l’ogre qui se cachait sous la marmotte.

Du côté du pré, Fernand, lui, n’avait pas chômé. Il rattrapait, avec entrain, son retard de calendrier et s’appliquait à renouveler tout le cheptel de sa vieille propriétaire.
D’ailleurs comment en douter ?
A chacune de ses conquêtes, il faisait bénéficier le voisinage conciliant de sa chansonnette, faite de beuglements d’appel suivis de mugissements ravis.
Et l’aïeule émerveillée, elle, ne perdait pas une miette du spectacle, fière et admirative devant cette belle énergie déployée.

Cependant, alors que dans la chambre on mastiquait encore en duo, un léger frottement se fit entendre sous la porte…

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La.poste
Sur le carré de parchemin plié et glissé sous la porte, un nom: à Morelius-le-Blanc !
Et une fois déplié, on pouvait y lire...




Tu crois m’avoir semé, pauvre niais ?
Jamais !!!
Je suis ton ombre, le reflet de ta conscience, ton tourment vaniteux…

Tu crois m’avoir fait peur en tuant une pauvre folle et des laquais de pacotille ?
Je ris !!!
Merci mais le service était gratuit…

Tu crois ta gueuse en sécurité, petit freluquet ?
C’est à toi de voir…

C’est ta dernière chance de payer ta dette.
Ton dernier contrat de scélérat.

Si tu tiens à sa Peau, bouge tes Orteils vers la Mer.
La suite y flotte comme une pustule sur un séant !

C.

PS : Une étoffe à ta fenêtre pendra, ou sang de femelle jaillira…
Morelius
C'était toujours suspect de recevoir une lettre glissée sous la porte d'une demeure où on ne faisait que passer.

En premier lieu, parce que le service postal béarnais distribuait le courrier avec à peu près autant d'efficacité qu'un canon tentant de ranger des miniatures en porcelaine sur une étagère.

En second lieu, parce que si quelqu'un s'estimait de bonne (ou mauvaise) foi lésé dans une affaire du type de celles que Morelius aurait pu régler, il ne manquait jamais cette merveilleuse occasion de venir se plaindre une fois de plus, et raconter comment il avait été spolié au nez et à la barbe de la Loi, et cherchait une vengeance définitive, avec tous les détails, incluant le nombre de poils de barbe.

Il ne restait donc plus que deux possibilités : soit une tentative désespérée de la part de Theolenn d'agrémenter leur quotidien de quelques palpitations aventureuses, soit ça.

Morelius agita le parchemin sous le nez de sa dame, en prenant garde qu'elle ne puisse rien en lire.

Elle respirait l'innocence.

Ce devait donc être ça.

Et ça l'inquiéta.

Il accrocha donc un vieux chiffon à la fenêtre et ils prirent la route d'Orthez.

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Theolenn
Dubitative... c'est le qualificatif qui décrivait le plus parfaitement possible l'état mental de Theolenn sur la route pour Orthez. Morelius avait subitement émis le désir de voir l'océan et elle n'en revenait toujours pas ! Il détestait toute étendue aqueuse à l'humeur par trop imprévisible, tout juste appréciait-il ses habitants, grillés, en sauce ou marinés...

Et puis cette lettre qu'il s'était dépêché de lire en faisant semblant de la lui montrer. Cette lettre trop vite rangée et dont elle n'avait pu saisir que quelques bribes.
Tout cela ne lui inspirait que de la méfiance...

Mais la jeune femme avait un goût prononcé pour l'intrigue et, qu'elle le veuille ou non, son cerveau rôdé aux situations étranges autant que délicates se mit en branle presque malgré elle.

*Ombre, laquais, sécurité, flotte et pustule*... voilà les mots, comme autant d'énigmes, qui tournaient en boucle dans le crâne tourmenté de la belle aux abois.
Tout en marchant d'un bon pas, son esprit tortueux échafaudait les rapprochements les plus improbables qui soient, renforçant par des suppositions des plus farfelues la noirceur de son ignorance quant à l'affaire qui semblait perturber son compagnon.

Et pourtant Morelius donnait le change. Trop. Beaucoup trop !
Il pépiait, faisait le beau pour la faire rire, mimant tour à tour, tantôt un troll grognon privé de sa pitance, ou plus ardu : la toupie vacillante qui rencontre un caillou orgueilleux ... tout un programme ! ... qui n'arrivait pourtant pas à distraire notre Sherlock en braies de son envie de comprendre ce changement inopiné. C'était même tout le contraire !


*Quand il y a de l'ombre, c'est que c'est la nuit... ou qu'on est caché ?
Les laquais, on les a dégommés et bien enterrés, aucune résurrection possible !
La sécurité ... bah... si on nous voulait du mal, pourquoi le prévenir, c'est idiot !!!
Flotte... un bateau ? Si déjà mon drôle est malade comme un pékinois devant un bol de risotto sur une mer aussi calme que la méditerranée en été, je n'ose imaginer ce qu'il risque de rendre à l'Atlantique aux abords de l'hiver ! ... *
Pouah, Theolenn eut une réminiscence visuelle particulièrement précise...
*Quant à la pustule, alors là !!! Mystère et boule de gomme ... *

Puis ses prunelles s'écarquillèrent et son pouls se mit à s'affoler comme celui d'une vierge effarouchée à la vue de son premier loup (mais en moins agréable) :

- La peste !!! Est-ce qu'on fuirait la peste ???

Morelius arrêta net son exercice de jonglerie sur les mots terribles que Theolenn venait de prononcer...

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Le.sylvitroll
L'homme aux longs cheveux blancs eut voulu répondre à l'interrogation bien légitime de sa compagne que le destin ne le lui permit pas. Pas tout de suite.

... Grumph... mayora terebrant, Ohhhhh cré dina boun !!! Es te rustra mao ? Che voul dy nin format chi vourat li firmin ! E mi mam li dicco ben miyor che li, bastar de pouillu !!! ... Grumphhhh...

Un être venu de l'aube des temps surgit du rocher qui marquait le tournant vers la ville. Enorme, large comme une baratte à beurre, poilu de partout, hirsute comme un gueux, pustuleux comme une princesse qui a embrassé le crapaud de trop près, marchant sur deux pieds nus dont les voûtes plantaires, tannées en diable, devaient être plus solides que la meilleure paire de chausses du royaume, doté d'un nez si long qu'un Pinocchio aurait pu y prendre ombrage, et habillé de feuilles d'automne cousues entr'elles par quelques facéties maléfiques dont il valait mieux ignorer l'origine.

La jeune femme en devint muette de stupéfaction, ce qui ne pouvait nuire en rien à l'habituelle quiètude des lieux, et l'homme aux pirouettes devint plus blanc que sa tignasse, ce qui n'arrivait que deux fois l'an : à confesse juste avant la Noël et juste après le banquet du nouvel-an.


... EEEEEEh... ty dira moaï ! Berdinouille à provolone... grumph... Cy la guerderre o pinut te coppava !!! Grumph, grumph ...

Le monstre afficha soudain un air malheureux, ou... quelque chose dans ce sens, une mimique qui eut pu suggérer chez cette bête humanoïde une certaine déconvenue.

Les deux promeneurs interloqués, la main rivée au pommeau de leur arme, le virent les croiser sans même leur jeter le moindre coup d'oeil. Et quand, quelques minutes plus tard, la forêt redevint calme, c'est effarés qu'ils se regardèrent l'un l'autre, n'osant pas plus croire à ce qu'ils avaient vu qu'à une illusion collective. Si peste il y avait, il était bien possible que ce ne soit qu'un moindre mal ...
Theolenn
[L'esprit de Noël...]

L'onde n'est plus au choc. Une paix relative règne sur toute la zone que le regard de la pensive caresse. La neige doit y être pour quelque chose, ou le froid. C'est fou comme tout peut changer en une nuit. Tout le relief qui hier encore donnait du piquant au paysage s'est adouci, aplani, uniformisé, comme si la terre s'était endormie dans le rêve blanc d'un magicien ...
Ne reste que le froid qui s'installe chaque jour davantage, et la poudre aux yeux, illusoire manteau qui émerveille petits et grands jusqu'au printemps. La trêve de Dieu... encore celui-là !

La marée est-elle encore au cœur ?
Ce temps figé dans des arcanes obscurément vides, cette hypothèse d'hypotension, cette impression de flou dérisoire... C'est si désarmant.

Theolenn frissonne quand le premier rayon d'un soleil timide vient toucher son visage trop pâle. Par surprise.
Une cloche au loin annonce une heure matinale pour qui s'y intéresse encore.
Le rocher qui lui sert de poste d'observation et de siège devient peu à peu inconfortable, elle translate son corps de quelques centimètres à peine, juste de quoi éviter l'hématome.
C'est en opérant ce mouvement transitoire de bien-séance qu'elle l'aperçoit : robe noire aux poils mi-courts, corps majestueusement musclé sous le laineux d'hiver, cornes blanches courbées à l'horizontale. Seule la fumée d'eau qui lui sort des naseaux trahit sa présence.

Quelques mètres les séparent mais une curiosité paisible les rapproche. Les yeux de la bête sont en amandes, de longs cils d'ébène les frangent. Le mystère et la confiance aveugle. L'étonnement et l'évidence dans un instant suspendu hors du temps. Aucune animosité, aucune peur. L'heure est à l'analyse réciproque. Entre vivants.

C'est un déserteur. Un libre-penseur. Comme elle. Ont-ils perçu cette essence commune malgré la différence de leurs costumes de chair ? Inconsciemment, peut-être...
Theolenn lui sourit sans savoir si cette grimace par trop humaine a une quelconque signification dans le monde d'un taureau d'arène. Qu'importe.

Des bruits de pas, et d'une lourde chaîne que l'on traîne, écorchent les tympans de la rêveuse au cœur béant. Des hommes asservis à leur tradition de haine cherchent le renégat. Ils suent le reproche et l'envie de punition. La gloriole est une chose sérieuse avec laquelle on ne badine pas !

Mue par un désir sans précédent de sauver l'objet de cette communion tacite qui la touche au-delà de l'éveil, la jeune femme veut prévenir l'animal en sursis mais … il est déjà loin.
Et sur le sol, là où se tenait le minotaure il y a une seconde à peine, aucune trace de sabot, comme si la neige, complice de leur rencontre, voulait en protéger le secret.

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Morelius
[Le bon vieux temps]

Ah, la neige, la froidure, le silence de l'hiver... tout ça rappelait le bon vieux temps à Morelius...

C’était en hiver aussi, le châtelain leur avait envoyé sa milice, qui avait appelé tout le monde sur la place du marché. Morelius avait 12 ans. On lui fit prendre dans un sac en toile des billes. Qui avait des noires devenait soldat, qui des blanches restait à la chaumière. Il aurait juré qu’il n’y avait que des noires, il n’y eut que le fils du curé qui resta chez lui. Y faisait un froid de canard, et c’était la saison des loups. On leur donna des tranchards émoussés et une cote qui allait aux genoux.

C’est la qu'il connut la fine de prune. ça arrache, mais ça réchauffe. Dès le lendemain, il était dans la neige, derrière les chevaux des Messeigneurs. Après trois jours de marche, ou certains perdirent quelques doigts, du fait du gel, vous savez… ils arrivèrent à un pré. Dans ce pré, pas de taureau, mais des teutons. Le teuton ça a aussi des cornes, et ça parle pas la langue. C’est sacrément moche, surtout vu de près avec une hache à la main. Au final, certains d’entre eux revinrent au village. Morelius était de ceux-la. Vu que plusieurs Messeigneurs ne rentrèrent pas, il eut le droit à un cheval, et même on lui apprit à écrire.

C’est grâce à cette campagne bucolique, dans un pré sans taureau, qu'il est qui il est aujourd’hui et que toute cette neige le rend bucolique.

Trop fort le bon vieux temps.

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Theolenn
Le petit matin est tout gris, tout comme le loup qui hurle au loin dans la brume qui se lève lentement.
Theolenn se lève, s'habille, attrape son gros manteau fourré, enfile ses bottes de sept lieues, et à petits pas silencieux rejoint la salle principale de l'auberge pour y petit-déjeuner en révisant.
Morelius, lui, a prévu une longue journée à récolter les céréales magiques du royaume, inutile donc de lui faire perdre la moindre minute de repos. Il en aura plus que besoin car comme "on" dit: A tâche divine, Morphée vous câline !

L'affamée est toute excitée devant sa large tranche de pain beurrée et garnie de confiture de myrtilles. D'une main, elle tente la trempette à l'aveuglette dans un bol de lait fumant qui sent bon le miel des montagnes.
L'exercice n'est pas vraiment concluant au vu de l'état de la table maculée ! La serveuse, derrière son comptoir, la regarde d'un œil noir de haine
« Encore une bourge qui croit que je ne vis que pour nettoyer ses crasses ! ». C'est que, de l'autre main, l'étourdie tient un nouveau manuel acheté mardi passé et qui captive toute son attention :
« Bases d'Arabe pratique » par le professeur Kilian.



C'est pas gagné d'avance … mais rien que pour le plaisir de savoir tracer de si belles lettres, ça doit valoir la peine !
Et puis on ne sait jamais, des fois qu'un jour ils décident d'aller visiter le pays des mille et une nuits …

L'heure tourne et la cloche sonne. Rangement précipité et besace en bandoulière, l'étudiante est pressée. Les places sont chères et comptées.


- Excellente journée à vous ! lance-t-elle gentiment à l'employée de la taverne en franchissant la porte.et Mektoub !

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