Manuvres d'accostage et derniers préparatifs
Debout devant la barre elle était ses yeux, toujours. Souvent il se tenait derrière elle posant sur ses mains les siennes, lui apprenant ainsi de la navigation les ficelles. Et ils étaient ainsi quand l'Edelweïss commença ses manuvres d'accostage.
Il était cendre, elle était feu, il vivait dans sa nuit, elle regardait pour eux deux. Face à face dans l'intimité, dos à dos face au monde...
Sang de mon Sang, est-ce que tu crois que le Duché aura envoyé quelqu'un nous accueillir ?
Elle sourit en l'entendant, la Guyenne...
Un peu de son passé lui revint en mémoire, les longs mois de désespoir, de deuils et de doutes. Un mariage trop hâté qui s'avéra raté, son poste de conseillère... Les avait-elle conseiller ? Un petit rire s'échappa de ses lèvres, elle doutait fort qu'on les accueille en réalité.
- Je ne pense pas mi cariño, je ne pense pas du tout même, nous verrons bien.
Un soupir plus tard, son esprit vagabonda du côté d'un vieux phare.
- Comme j'aimerai monter dans la vigie voir l'estuaire d'en haut, si je n'avais peur de faire une mauvaise chute en ce moment, je le ferais. Vois-tu j'ai demandé un jour à Dragonet la permission de monter dans son vieux phare pour y voir la Gironde. Cette envie me dévore depuis longtemps à vrai dire, de voir la Guyenne d'en haut.
Elle se tut l'espace d'un instant pour donner des indications sur leur position et puis :
- J'espère qu'il va bien, sa dernière missive remonte à quelques jours déjà et il me manque, j'aurais tant de chose à lui raconter qu'il en aurait les oreilles rebattues et n'aurait qu'une hâte... me renvoyer dans tes pénates !
Un long baiser échangé plus tard, elle filait se changer dans la cabine du capitaine. Ses braies délavées par le sel et sa tunique rouges rejoignirent une vieille malle et elle sortit sa houppelande d'un blanc immaculé qu'elle rehaussa de rouge avec un col couleur passion. Il serait de cendres, elle sera de feu...
Elle le rejoignit sur le pont tandis qu'il donnait quartier libre à l'équipage. Louis Memento leur chaton se pointa à son tour,
pour recevoir surement compliments pensa-t-elle un sourire amusé sur les lèvres.
Non il observait la passerelle et méfiant hésitait quant à ce qu'il devait faire. Doucement il s'en approcha, sauta dessus dès qu'elle fut en place et regarda en direction du quai. Puis allez savoir pourquoi, il en descendit, passa entre leurs jambes en courant et retourna vers les cales, comme s'il avait le diable aux trousses.
Elle décrivit la scène à son géant et éclata de rire.
- Au moins un qui n'est pas pressé de retrouver la terre ferme ! A mon avis il ne nous suivra pas.
Sur les quais un soir de Saint Jean
Les plis s'étaient succédés entre la capitainerie et le palais de l'Ombrière. L'ancienne bordelaise qu'elle était avait félicité le nouveau Duc. L'ancienne conseillère qu'elle avait été savait que la venue d'un Prince royal était un évènement, mais elle doutait que la "Merveille de Bazas" soit au pied de la passerelle à accueillir le frère du Roy.
Cependant, quand elle s'avança ce fut Armenos qu'elle trouva.
- Amiral ? Quelle surprise ! laissa-t-elle s'échapper en foulant le sol, un peu déstabilisée par son inertie.
Elle se trouva un peu en déséquilibre l'espace d'un instant et agrippa le bras de son prince pour ne pas tomber.
- Diantre la terre tangue, avis de tempête en vue ? Sourire amusé aux lèvres, elle retrouva un peu d'aplomb et salua Armenos en lui tendant la main.
- Buenas noches Almirante... Comme je suis heureuse de vous revoir ! Comment vous portez-vous depuis tout ce temps ?_________________