Horloger
Horloger examina les différents outils que l'homme sortait de sa besace. Des outils simples, mais bien finis; ils avaient certainement longtemps servis, et, moyennant un bon affûtage, ils resserviraient encore longtemps. L'acier semblait de bonne qualité; il était dur, mais pas cassant.
Le bûcheron a écrit:
Bon, ben c'est mes outils d'travail, qui ont, comme qui dirait, grand besoin d'êt' affutés! On m'a parlé d'vous, notre mairesse, en fait! J'suis installé d'puis peu, j'connois pas tout l'monde! J'suis pas ben riche, mais je paierai c'qui faut!
Horloger sourit; un affûtage ne coûtait guère. Il dit à l'homme:
"Ne vous en faites pas; ce n'est pas cher, de faire affûter les outils. Et comme vous m'en amenez plusieurs, je vous ferai un prix."
L'homme écouta plus attentivement.
"Voyons, il y a deux haches, et deux serpettes; pour affûter une hache, c'est 5 écus; une serpette, 3...allons, donnez-moi 13 écus, ça ira pour le tout! Par contre, il faut me les laisser toute la journée!"
L'homme acquiesça, et donna l'argent à Horlo, qui le mit dans sa bourse en cuir.
Le bûcheron a écrit:
V'la! c'est tout! j'suis point pressé! mais j'aim'rais ben qu'ça soit fait pour la fin d'la journée...enfin si c'est possible! j'veux pas abuser de vot'temps!
"Aucun souci; laissez-les moi, et passez les prendre ce soir, elles seront prêtes!"
L'homme lui serra la main, et sortit.Horlo lança le feu dans sa forge, puis il prit sa pierre à affûter, qu'il rangeait dans une corne de boeuf évidée, et la trempa dans l'eau. Puis, d'un geste de va et vient sur le tranchant, de part et d'autre, il rectifia le fil de la hache, vérifiant de temps à autre l'affûtage, et posant son pouce dessus, perpendiculairement, et en tâtant le fil. La hache avait été sérieusement émoussée, et il dut passer du temps afin de lui faire retrouver son tranchant d'antan. Lorsque ce fut terminé, il posa la lame dans les braises, et la laissa chauffer un petit peu. Il la sortit, et passa dessus un pain de cire; celle-ci se mit à fumer dans un grésillement. Cela protègerait l'acier de la rouille. Il fit de même pour les autres outils; et, lorsque ce fut terminé, il laissa le feu de la forge s'éteindre, puis posa les outils affûtés sur l'établi. Il les donnerait au bûcheron quand celui-ci reviendrait.
Il remit son tablier de cuir contre la porte, vérifia que la forge s'éteignait, et ouvrit la porte. Le soleil d'après-midi jouait avec les nuages, et la journée, qui avait été maussade en matinée, tendait à s'améliorer.