Mai
Ce matin-là, à Douetum, grognements et râleries ponctuaient régulièrement la vie qui prenait place entre les murs du domaine. Marie était de mauvaise humeur. Et cela au grand damne des valets du Penthièvre qui se devaient de subir sans rien dire les caprices dune blonde angoissée. La frêle bretonne avait commencé à sagiter avant même le lever du soleil. Allongée au côté de son Vicomte elle navait pu sempêcher de tourner et retourner dans la couche pas encore conjugale. Puis, ny pouvant plus, lhermine sétait extrait des couvertures pour aller se préparer, lair boudeur, en grognant sur tout et nimporte quoi. Leau trop chaude, trop froide, trop tiède. Les nuds dans ses cheveux, les plis sur sa robe, le terne de sa peaux, le sobre de ses bijoux, la nourriture sans gout et surtout lincapacité crasse de la valetaille local. Ce matin-là, rien ne convenait à lexigeante marquise pour une seule bonne raison.
Elle angoissait !
Pour une simple et bonne raison. Il y a quelques jours, une lettre à lécriture avait fait son retour dans la correspondance de la Myosotis pour lui annoncer un retour quelle nespérait plus depuis un moment. Dante Tommaso Cereza, «son» italien revenait près delle Le vénitien était venu sinstaller à Cucé, pour repartir presque aussitôt. Cétait il y a un mois à peine. Attiré par les promesses dune demoiselle, le ténébreux taciturne sen était allé en piétinant gaiement les sentiments et l'égo fragile dune hermine vexée. Mais peu importe le passé, aujourdhui il revenait et offrait à la blonde une seconde chance dêtre son amie. Et elle ne voulait pas se rater. Marie prenait la chose très au sérieux. Pas moins de quatre tenues complètes et trois sortes de chignons avaient été essayées dès laube pour savoir ce qui la mettait le plus en valeur. Cétait la bleu. Elle le savait mais elle nen fut convaincue quaprès avoir quand même essayé la pourpre, la verte et blanche en dentelle. Cest ainsi. Quand elle angoisse, Marie nest sûre de rien.
Ce nest quaprès deux bonnes heures dhésitation sur tout et nimporte quoi que la Bretonne grimpa dans le coche afin de parcourir les quelques lieues qui la séparait de Saumur pour rejoindre le ténébreux vénitien. Le trajet lui sembla durer une éternité malgré le court trajet. Le galop des chevaux lui semblait comme ralenti. Et la blonde pesta silencieusement contre les équidés, mâchoires serrées et regard planté dans le paysage en attendant que cela passe. Le point de rendez-vous avait été fixé sur une petite place déglise, à la fois éloigné du centre et facilement accessible lorsquon venait de louest. Ombragé par de grand noisetier, la place connaissait une joyeuse fréquentation dhabitué grâce à un marché et une taverne à la réputation irréprochable. Lendroit serait parfait pour des retrouvailles
La Marquise descendit du convoi et, après un regard appréciateur sur le lieu, la blonde glissa quelques écus dans la main du cocher afin quil dispose de sa journée. Elle ne comptait rien faire que la morale réprime mais lidée quil puisse y avoir un témoin tout droit venu de Douetum lors de cette entrevue la gênait tout de même. La faute sans doute a un passé maritale trop riche en super espions. Marie avait appris la méfiance à légard des hommes quelle aimait. La petit voiture à cheval enfin disparu, la Kem sinstalla sur un banc et attendit, le cur serré, son vénitien préféré. Pourvu quil vienne vite !
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