Judas
-
["- Quel age avez-vous?
- 24 ans.
- Vous êtes mariée?
- De temps en temps."]
Le Client.
- A Judas Von Frayner,
Vous serez sans doute surpris de me lire, pourtant ce n'est pas Moran qui me prie de vous écrire. Bien trop fier pour vous demander ce que je m'apprête à vous demander moi-même, il lui viendrait encore moins à l'esprit de m'envoyer le faire à sa place.
Mais, soucieuse du bonheur de mon frère, je sais, même s'il n'en dit rien, que la perte de sa place de Sénéchal, mais aussi surement la perte d'un ami, l'atteint beaucoup.
Cette lettre pour vous demander de bien vouloir le reprendre auprès de vous et de lui laisser une seconde chance, quoi qu'il ait pu faire.
Dites-moi s'il y a quelque chose que je puisse faire pour vous convaincre, j'aimerais vraiment faire cela pour lui.
Si jamais vous trouvez ma démarche déplacée, je vous prie de ne pas aller vous en plaindre à Moran qui, face à vous, aurait surement honte de mon comportement. Je ne voudrais surtout pas le discréditer vis-à-vis de vous, car il vous tient en haute estime.
Ne voyez là que la démarche d'une soeur qui aime son frère.
Respectueusement,
Zoé Lisreux
Dubitatif. Frayner du fond de son siège n'avait pas eu à relire la missive pour en assimiler le contenu, bien surprenant. Moran avait été congédié au même tire que Rose pour avoir dépassé des limites respectables... Des limites qui protégeaient la réputation de Judas. Etre au service d'un noble requiert une certaine tenue, un sang froid sans faille du moins en public. C'est la perte de ce sang froid qui entraina la perte de sa place de Sénéchal à Moran. Une place grassement payée. Depuis ce soir où Judas avait du intervenir entre les relations dégradées de son sénéchal et de son limier, cette dernière avait su finement revenir en les bonnes grâces du seigneur de Courceriers. Nul besoin d'ajouter que la complicité dépassant jadis le cadre d'une camaraderie entre l'Ibère et Rosalinde avait été un argument supplémentaire à la mesure radicale qu'avait pris le maistre de Petit Bolchen. Possessif, Judas n'acceptait et n'accepterai sans doute jamais que l'on empiète sur ses plates bandes... Et ce même s'il s'agissait d'une catin. Rancunier, l'homme n'était absolument pas près de rendre au Lisreux l'affection qui les avait un jour liés, a moins que...
- Zoé Lisreux,
ainsi donc Moran le fier souffre de ne plus hanter les couloirs de Petit Bolchen. Mafoy, je crains de ne pouvoir apaiser son tourment et d'accéder à ta requête. Vois-tu je l'ai croisé par hasard en Berry voilà de cela quelques jours et réciproquement nous nous sommes purement et simplement ignorés. Je n'ai pas vu là la démonstration de son immense regret. La haute estime s'entretient... Sache donc que ta démarche est vaine bien que touchante, ma soeur en aurait sans doute fait autant pour ma personne. Je ne saurais aller parler de notre affaire à l'intéressé, je crains que nous n'ayons plus rien à nous dire. Plus le temps passe et plus ce qui fut dénoué est difficile à renouer, apprends-le. A moins que. Si tu penses que tu as le pouvoir de rétablir l'âge d'or de ton frère, je n'attends que de voir.
Judas Gabryel Von Frayner.
Conclure un marché avec le seigneur de Courceriers n'était jamais légère affaire. Quoi que.
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Vive le Roy !