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[RP] Dans ton Antre cloître la Folie qui te guette...

Grimoald
    [Une petite cave abandonnée dans l'un de ces faubourgs miteux de la capitale limousine...]

- « Adèle n'est pas morte, Maman.

Une petite cave abandonnée dans l'un de ces faubourgs miteux de la capitale limousine.
L'on y accédait pour l'heure par une sorte de soupirail dont les barreaux avaient été si rongés par le temps et la rouille qu'ils n'étaient déjà plus depuis bien des lustres.
C'était là, dans ces faubourgs où règne la puanteur et les ivrognes, que le jeune Grimoald avait repéré ce soupirail et cette petite cave désaffectée par une belle après-midi de Juillet.
Ces crises n'étaient point passées. Des crises, il y en avait moins qu'en Touraine. Mais des crises, il y en avait, encore et toujours.
Jusqu'à présent, il n'y en avait eu qu'une seule. Mais à coup sûr, il y en aura encore.


- « Aujourd'hui, c'est Dimanche, tu sais. Je me suis fait propre. J'ai même brosser mes cheveux... Tout seul !

La Colère, c'est ainsi qu'il La nommait. La Colère qui autrefois ne faisait que l'assombrir.
La Colère qui, à présent, pouvait par moment le rendre comme Fou.
Il lui fallait un repaire, un refuge.
A Tours, durant sa petite fugue, il en avait un : cette taverne malfamée qu'il appelait « La Ciguë ».
Mais ici, à Limoges, il n'en avait pas de repaire. Il n'avait aucun refuge.
Un refuge, voilà bien ce qu'il lui fallait contre les crises, contre la Colère, contre cette Colère qui à présent le rendait Fou.
Un refuge contre la Folie. Un refuge pour Elle, un refuge pour qu'Elle puisse s'exprimer, un refuge pour qu'Elle se libère à l'abri des regards.


- « Oh ! Eh puis, Curé ou pas... J'irai à la messe ! Je ne sais où il se trouve, s'il est absent ou s'il n'a encore cuvé son vin de la dernière messe, mais... Pardon, Maman...

Ce refuge, ce sera son refuge : refuge contre la Folie, contre l'Angoisse de cet enfant meurtri.
Ce refuge, ce sera son refuge : refuge pour la Vengeance d'un homme en devenir qui émerge doucement en lui, refuge pour un petit vengeur...
Grimoald, c'était l' éternelle Enfance et l'Innocence. Grimoald, c'était la Souffrance et la Vengeance.
La Folie... Comment avait-il pour Lui échappé si longtemps ?
La Folie arrivait doucement, mais lentement. Elle était là, presque imperceptible. Mais elle était bien là, telle une vipère cachée sous un rocher...


- « Tu sais, je ne suis pas Seul, Maman. Victoire et Madame Aldraien s'occupent bien de moi. Je ne suis pas toujours très sage... Je fais même beaucoup de bêtises.
Oh ! Je t'en prie, n'aie pas honte de moi. Tes amies, là-haut, elles doivent sûrement dire que je suis insupportable. Moi je ne les aime pas. Elles sont pas belles et elles pincent les joues ! ... Pardon, Maman...


Cette cave abandonnée, cette antre lugubre à l'abri des regards et des oreilles indiscrètes... ce sera son repaire.
C'est là-bas qu'il ira lorsque viendra, à l'avenir, la Colère.
Cette cave abandonnée, nul autre que lui-même n'en aura, pour l'heure, connaissance.
Il ira seul, car sa Folie naissante, il la savait dangereuse.
Du mal aux Chiens, ceux-là même qui ont volé son cœur pur, son cœur d'Avant.


-« Tu sais, Maman... Si je fais encore des bêtises, j'ai peur qu'elles s'en aillent, qu'elles ne veuillent plus de moi. Je ne veux plus être tout seul, Maman. J'ai peur, parfois.

Mais du mal, il ne veut pas, il ne veut plus en faire à ceux qu'il aime, à ceux pour qui il éprouve une profonde reconnaissance, un amour d'Enfant.
Est-ce simplement par crainte de faire souffrir quelques êtres qui lui sont chers ? Non, il y a autre chose encore.
Sans doute est-ce également par cette crainte plus terrible encore. Cette Angoisse, cette Angoisse qui pouvait le renforcer dans sa Folie.
Cette Angoisse, c'était la peur que ces êtres chers ne finissent par l'abandonner.


- « Tu me manque, Maman... Tu me manque tous les jours. Je voulais pas que tu partes, moi. Je... Pardonne-moi, Maman. Je t'en prie... Pardonne-moi.
Les Autres, ils disent que ce n'est pas de ma faute si tu es morte. Moi je sais bien que c'est des Mensonges.

_________________
Grimoald
    [Le Dimanche suivant...]

Un petit voyage en terres auvergnates, quelques rencontres, quelques bêtises... On se fait gourmander... La Colère passe, non sans quelques traces.
La douleur, la douleur apaise. La douleur fascine. La douleur que l'on se fait à soi-même... Elle fait comme du bien.
C'est étrange, c'est étrange mais c'est bon. C'est bon, mais c'est une bêtise. C'est une bêtise, et pourtant, ça fait du bien... C'est étrange.
La douleur peut faire mal, la douleur peut être abominable, abominablement atroce, lente, atrocement atroce, atrocement lente.
La douleur, elle peut ne jamais s'arrêter. La douleur, elle ne vous lâche jamais. Cela, le jeune Grimoald le sait.
De la torture, du fer et de la lame... sous son minois d'Ange et ses répliques enfantines, le jeune Grimoald en a fait l'amère expérience.
Il a vu, il a vécut... Ils l'ont brisé, il a changé.


- « Maman ! Adèle est ici ! Elle est arrivée !

Il était aux anges, il était tout excité. Il l'avait cru morte, il n'en était rien. Pourquoi lui avait-on menti à ce propos ? Il l'ignorait.
Pour l'heure, peu importait. Des choses à se dire, à se raconter, ils en auront des tas.
Pour l'heure, place à la félicité. Pour l'heure, place aux embrassades, place aux retrouvailles.


- « Viens !

Il faisait les cent pas en jetant quelques coups d’œil au soupirail.
Il martelait le plancher à moitié pourri par endroit et craquelant sous la paille qui le recouvrait.
Les murs ruisselaient lorsque la pluie tombait. De la mousse et quelques jeunes pousses leur servaient de décor.
Sur une vieille table rustique rongée par les mites, quelques éclats de verres ensanglantés côtoyaient vélins vierges et noircit entremêlés.
Dans un coin de la pièce, comme une sorte de petite cheminée dans laquelle bouillonnait une marmite toute cabossée et solidement recouverte.
La marmite, étrangement, remuait et poussait de petits cris stridents. De petits cris presque imperceptible... Et pourtant...
Quelque chose, dans cette marmite bouillonnante, au-dessus des brindilles crépitantes, tentait de se débattre, d'échapper à son funeste sort.


- « Tu sais, Maman... Aujourd'hui, je n'ai pas fait de bêtise. J'ai été sage et je n'ai pas fait de colère. Je deviens grand, tu vois.


Tout sourire, il était heureux... Ce Dimanche était merveilleux. Ce Dimanche, tout allait pour le mieux.
Tout sourire, il lançait à nouveau ses azurs pétillantes vers le soupirail par lequel entrait un peu de la lumière du jour.
Tout sourire, il posait ses mains sur ses genoux, assis sur cette vieille malle... Une vieille malle qui elle aussi, semblait grouillante de vie.


- « Je t'assure que ce n'est pas haut ! Il suffit de te laisser glisser !
_________________
Nille
[Dimanche, Minuit]


La jeune rouquine était arrivée la veille, et n'avait eu le temps de faire qu'un rapide tour en taverne, ce fut le Dimanche que Nille y passa le plus de temps.
Pourquoi ? Son Cousin, voilà la cause.
Des mois qu'elle ne l'avait vu, depuis la fugue de celui-ci d'ailleurs.
Quand elle le vit en taverne, cela fut une renaissance, tout ses souvenirs d'enfance remontèrent.
Elle fut heureuse, au début. Bien vite la question du mariage vint s'imposer.
Elle était en âge de se marier, elle avait une petite dote qu'elle avait elle même acquise.
Il leur fallait un prétendant qui correspondait aux attentes de sa famille dont elle apprenait l'existence, et les critères étaient rigoureux.
Pas de Sang Pourpre, ni de petits commerçants, encore moins d'artistes, pas de brigands ou de voleurs, ni d'hommes d'armes, les nobles à éviter, histoire de pas mélanger deux mondes différents.
Le choix était déjà largement réduit après ces quelques critères.

Au bout de quelques heures de cette discussion animée, Grim et elle avait convenus que c'était son Cousin même qu'elle épouserait.
C'est vrai, qui mieux qu'un Lefebvre pour une Lefebvre selon le Cousin lui même.
Mais à dire vrai, la Rouquine n'était pas très enchantée d'avoir à se marier avec son Cousin, même si elle l'adorait, même si elle voulait rester avec lui pour toujours.
La Chose. C'était ça qui la rebutait, d'avoir à se dénuder devant son Cousin et se donner corps et âme à lui.
Elle ne voulait pas ça. Certes elle s'était préparer mentalement à offrir son corps à un homme, mais pas Cet homme là.
Car quoi qu'on en dise Grim était un homme désormais.

Il lui avait donné rendez-vous avant de partir à l'aventure, comme toujours.
Il lui avait fait régulièrement le même sermon lorsqu'ils étaient enfants.

Alors elle attendit, il vint la trouver et elle lui sourit chaleureusement, comme autrefois.
Elle le suivit dans le dédale de rues menant à l'Antre de son Cousin.
Il fallait rentrer par un soupirail, mais avec une robe corsetée la chose était moins aisée.
Elle fini par rentrer, et découvrit avec horreur la "Maison" de son Cousin.


- Cousin comment fais-tu pour vivre ici ?
C'est sale ! Il y a des ... CAFAAAAAARDS !


Elle avait grimpé sur le meuble le plus proche pour laisser passer les petites bêtes puis descendit de son perchoir toute hésitante.

- Tu dors sur de la paille Cousin ? Hmmmm ...

Elle rassembla la paille dans un seul et même coin, ils pourraient ainsi dormir sur un matelas sommaire.
Décidément c'était la maison des horreurs ici.
Elle vit la marmite, quelle charmante intention ! Il avait fait un .... Rat ?
Oui, un Rat, la réponse à cette intention ne tarda pas.


- UN RAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAT !

Elle devint comme folle, dans cet environnement qui ne sied guerre à une jeune femme.
Grimoald
Elle l'avait suivi. Oui, elle était venu. Elle était là, sa cousine Adèle était bien là.
On lui avait menti... Pourquoi lui avait-on menti ? Elle n'était pas morte. Elle était bien là... Il l'attendait. Ses lettres, mélangées à celle de la Vipère, gisaient là sur la table.
Pourquoi lui avait-on menti ? Les Lefebvre... En voilà une famille bien étrange...
Une rencontre... Premiers échanges, premiers contacts depuis si longtemps. Découvertes... Oui, on se découvre aussi.
On découvre quelques secrets inavouable. Elle aussi a vu, elle aussi a vécut.
Une année... Ce n'est rien, et pourtant, cela suffit pour vous changer. Une année, et plus jamais nous ne serons les mêmes.


- « Hihi ! Ne te coince pas ! On aurait l'air fin pour sortir de ce trou !


Il riait, il était heureux. Heureux de retrouver un être cher.
Ce n'était pas seulement sa Cousine... C'était comme sa soeur ! Oui, c'était une soeur !
Peut-être était-ce cela qui le dérangeait dans cette idée d’épousailles. Le Mariage n'impliquait-il pas la Chose Interdite ?
Non ! Les Héritiers doivent pouvoir se faire autrement ! Oui ! On peut toujours faire autrement !
Et c'est là que sa cousine eut une réaction qu'il n'avait pas prévu...
Pour lui, cette petite cave était un défouloir, un petit monde, une zone de non-droit, une zone de totale liberté.
Ici, étrangement, à l'abri des regards, il était bien. Ces murs, l'obscurité, tout ce qui jonchait les sol...
Ces rats, ces mites, ces cafards, cette paille, ces murs moisissant...
C'était son repaire, c'était son intérieur... C'était Lui !


- « Rhôôôô ! Ce n'est rien ! Allez ! Viens ! Écoute !

Il levait son petit index en l'air. Il voulait que sa cousine entende les petits couinements qui s’échappaient de la marmite en piteux état...
... Et rit aux larmes en l'entendant crier au Rat !
Dans son Antre, quelque chose dans ses prunelle manquait. Il y avait cette innocence, cette innocence enfantine... Une innocence maladive.
Il y avait aussi cette insouciance. Cette insouciance qui luisait comme un bravade. Qui bravait-il ? Personne... Tout le monde ? Qui sait...
C'était comme s'il n'entendait, ou ne comprenait, les interrogations qu'elle pourrait avoir.
Pourquoi l'avait-il amené ici ? Il voulait partager. Il voulait partager son Antre, il voulait partager avec sa cousine un peu de cette Folie qui le guette.


- « Ah ! Il est bientôt prêt ! Tu vois... Là, il bouge encore. Ensuite, il arrête... Il crie juste. A la fin...
Il fait des bonds, des grand bonds ! Et puis ensuite, il est prêt. Il est mort.


Était-ce un petit haussement des épaules ? Le fait est qu'il ne semblait pas plus perturber que cela....
Le voilà qui lançait ses azurs pétillantes sur le mur, sautillant dans la petite pièce obscures.. en s'écriant...


- « Maman ! Maman ! Regarde ! C'est Adèle ! Elle est là ! Elle n'est pas morte, Maman ! Regarde ! C'est elle ! C'est Adèle !

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Grimoald
    [Plus tard... Une soirée comme tant d'autres... Ou presque !]

Lueur d'une chandelle.
Une vieille toile, sans cadre, maintes fois repliée, au mur de l'Antre sombre.
Une jeune femme aux cheveux blonds soyeux, les yeux tendre d'une mère, un nourrisson chétif dans les bras...


- «  Ne me regarde pas comme ça !

C'était une soirée comme il y en eût tant ces derniers temps. Une soirée si ordinaire en ce lourd mois d'Août limousin. Une soirée ordinaire parsemée de caprices, bien qu'ils se faisaient plus rares ; Une soirée ordinaire où les deux gardes veillaient au grain, surveillant le jeune Grimoald qui semblait, par moment, de plus en plus souvent, s'assagir à tel point que la morosité s'emparait peu à peu de sa petite bouille d'ange qui de jour en jour se creusait, de ce corps rongé, mutilé, à la maigreur qui de jour en jour se faisait toujours plus inquiétante, de jeune adolescent pré-pubère ; une soirée ordinaire qui, à n'en point douter, sera la dernière. Oui, cette soirée ordinaire, ce sera la der' des der', car l'on ne sème sans conséquences les deux gardes de celle qu'il nommait, respectueusement et affectueusement « Madame Aldraien ».

Quelques pas... la Douleur qui revient, le Mal qui vous ronge.
Quelques larmes... larmes de Tristesse, larmes de Désespoir, larmes de Colère.
Un cri...


- «  Moi j'y croyais ! J'y croyais... J'y croyais...

Un drôle de mois qu'est le mois d'Août. Il y a ces beaux jours sans nuages aucuns. Il a ces doux jours où la chaleur à la fois moite et piquante semble endormir l'âme tout comme elle apaise, quand viennent quelques éclaircies, la douce, parfois la rude, Folie qui nous guette. Bien sûr, il n'y a point que les beaux jours au mois d'Août. Non, bien sûr que non. Non, car aux douces éclaircies qui embaument précèdent toujours quelques violents orages.

Quelques paquets sur la table.
De l'eau qui frémit, des petits cris de lutte.
Une bouteille qui se brise.


- « Tais-toi ! Arrête ! Je ne veux plus te voir ! Vas t-en ! Je te déteste ! Vas t-en ! Arrête !

N'est-ce point si étrange ces orages du mois d'Août ? Le ciel si bleu devient le théâtre de quelques violentes disputes qui éclatent, faisant vibrer la terre, faisant craquer les arbres, déchirant le ciel noir, entre quelques vieux nuages à la proue tant effrayante qu'imposante, à l'allure sévère, en grand deuil. Ils sont là, si près de nous, si loin, si haut pourtant. Ils sont là, ils grondent, ils libèrent sur les champs comme sur les pavés crasseux de la ville des torrents de pluie qui s'abattent, des heures durant sur les toits qu'ils inondent, sur les corps qu'ils détrempent, sur les cœurs qu'ils grisent, qu'ils épuisent aussi, parfois. L’éclaircie qui embaume est aussi bien vite chassée par le ciel tout de sable : ce ciel qui gronde, ce ciel qui n'embaume plus, ce ciel qui abat. Un tel ciel est, à l'inverse de son ami le ciel qui flamboie, propice à la douce, à la rude, Folie qui nous guette. Nous guette-elle tous ? Peut-être bien...
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Margaut_de_roanne


Limoges : chambre de Margaut deux jours après les évènements.

Ma chambre me semble beaucoup trop étroite en l’instant, tant que j’en suffoque. Je ne sais depuis combien de temps je suis levée, tout ce que je sais c’est que je me sens vide. Une faible lumière filtre par ma fenêtre. Il est très tôt l’aube à peine pointe le bout de son nez. Ma bouche pâteuse me rappelle que j’ai soif c’est donc d’un pas nonchalant que je m’approche de mon chevet sur lequel se trouve une carafe d’eau. Lentement je verse le liquide dans un verre que je porte à ma bouche en une moue boudeuse. Ce visage est mien depuis la veille, depuis que j’ai pris conscience des évènements qui se sont déroulés il y a deux jours. Evènements au combien marquant, car bien que je sois habituée aux bêtises, je n’avais encore point vécu une telle soirée. J’ai, ô combien, envie d’aller retrouver Victoire pour tout lui expliquer, pour vider ma tête, mon cœur et mon âme, j’en ai tant besoin et pourtant je ne le peux.

Une promesse est une promesse, jamais je n’ai rompu un tel sacrement et même si ma raison me pousse à vouloir le faire je m’y refuse. Je laisse mes émeraudes se poser sur mon écritoire, les vélins posés sur l’extrémité droite me tentent, alors que ma plume placée en son centre retient mon regard. J’avais promis de ne rien dire il est vrai, mais je n’avais point promis de ne pas l’écrire. Ainsi vient d’émerger en ma tête la solution à tous mes maux. Il me suffisait de laisser ma main glisser sur le vélin et mon esprit se répandre sur le papier pour me délivrer de ma souffrance.

Je me dirige vers la table sur laquelle je dépose mon verre puis m’empare d’un vélin et de ma plume. Quelques secondes plus tard mon écriture penchée et fine laisse apparaitre les premiers mots :


Citation:
Le .. de l’an 14..

Ma tendre amie,

En ce jour, une bien mauvaise journée commence pour moi. Tu sais aussi bien que moi, que je ne suis pas toujours facile à vivre et que j’ai parfois fort mauvais caractère. Mais ce que je suis réellement peu de gens le savent. Toi, Ma Victoire tu le sais, tu connais mes faiblesses, tu connais ma susceptibilité, ma fragilité et mon sentimentalisme exacerbé. Tu sais aussi que je ne peux rien te cacher et que j’ai trouvé en toi ma confidente. Ce que je vais écrire, j’ai promis de ne jamais en parler, mais j’ai besoin de le faire alors je le grave sur le vélin. Ne dis t’on pas : écrire, c’est hurler en silence.

Je hurle ma Victoire, de toute mes forces, mais personnes ne m’entend, je suis marquée surement à jamais de cette soirée, dans cette cave. Pourquoi y suis-je allée ? Pourquoi ne me suis-je pas montrée plus dure ? Pourquoi ai-je cédé ? Je ne sais toujours pas répondre à ces questions. Mais, je sais aujourd’hui que ce que j’ai fait est mal.

Il y a deux jours, Eamon et moi-même nous trouvions dans une taverne, pour une fin de soirée comme tant d’autres. Une tisane pour moi, quelques paroles échangées, de toute façon je n’ai pas besoin de le préciser puisque tu t’y trouvais également. Tu sais aussi qu’Eamon avait bu plus que d’accoutumée, malgré mes réflexions et mon désaccords. Je ne sais, peut-être avait-il quelque chose à fêter ? Toujours est-il que d’énervement j’avais pris la décision de quitter la taverne, ce que tu avais bien compris, entrainant dans mon sillage mon crapal que je refusais d’abandonner à sa beuverie.

Alors que nous nous trouvions non loin de la taverne à nous chamailler, comme nous le faisons parfois, j’aperçus une masse qui me rappelait quelqu’un. Pour cause, il s’agissait de Grim qui avançait d’une manière, fort étrange, vers un lieu où je n’avais jamais mis les pieds. Poussée par ma curiosité légendaire et mon besoin de me trouver loin d’Eamon sur l’instant, je décidai de suivre Grim.

Petite précision, si mes souvenirs sont bons. Il me semble avoir dit à Eamon de rentrer sans moi que je le rejoindrais, je ne sais pas expliquer pourquoi il s’est retrouvé plus tard dans cette cave.

Je disais donc que j’avais suivi Grim qui s’engouffrait sous un soupirail. Etonnée, je me précipitai à sa suite. (Je m’en mords les doigts Victoire, quand j’y songe j’aurais mieux fait de rentrer avec Eamon tout de suite). J’arrivai dans cette cave où il s’y trouvait déjà et là je le surpris. Il était différent, comme possédé. (Je sais Victoire que tout ceci peut paraitre étrange, mais je t’assure que c’est vraiment l’impression que j’eus en l’instant. Aujourd’hui avec le recul, il me semble que je ne me trompais point.) Une possession point comme on en entend parler. Il entendait des voix et surtout il devait voir quelqu’un puisque je le surpris entrain de parler, de répondre … à une toile. (Je t’assure Victoire je ne suis pas folle, fin je crois, mais Grim parlait réellement à une toile. Même encore maintenant en te l’écrivant un frisson me parcourt l’échine, j’ai peur, si tu savais, peur de ne plus jamais le voir de la même manière).

Je m’avançai, néanmoins, vers lui lorsque le bruit d’un objet qui se brise au sol me fit sursauter. Je ne savais pas de quoi il s’agissait, ce n’est que plus tard lorsque je fus en face de Grim que je vis ce que je pensais être des éclats de verre. Ce bruit de cassure m’extirpa un cri de terreur, la cave était malgré tout fort sombre, et j’avais grand mal à discerner ce que mes émeraudes parvenaient à saisir. Ce bruit me figea et me glaça le sang. C’est à ce moment que Grim se tourna vers moi. (Je ne suis même pas sure de cela, peut être était-il déjà vers moi. Je dis cela parce qu’il ne semblait pas avoir fait attention à ma présence avant que je ne hurle).

Il me dévisageait, certainement, en tout cas moi je le faisais. Je le regardais comme une bête curieuse sans savoir ce que je devais faire. (J’étais tiraillée Victoire, tiraillé entre mon désir de fuir au plus vite et mon amitié sans faille qui me poussait à vouloir l’aider. Comme tu t’en doutes, mon cœur pris le dessus sur ma raison). Je restai donc clouée sur place, et cherchai de longues minutes ce que j’allais dire. Pendant ce temps tout ne fut que silence, il me semblait étonnement calme.

Je finis par me ressaisir, un tant soit peu, et doucement je tendis une main vers lui tout en lui disant :


- Grim !!! C’est moi, Margaut, tout va bien ? Je ne sais pas où nous sommes, je t’ai vu venir et je voulais te parler ? Tu as cassé quoi ? A qui tu parles ?

(Tu sais Victoire, je grave sur ce vélin mes propos tels qu’ils ont été dis ce jour là, je me rappelle de tous, tous ce que j’ai dit comme si je me trouvais encore dans cette cave en l’instant).

Je me sentais vraiment très mal à l’aise, je n’avais pas compris ce qui se tramait, car si je l’avais su, j’aurais fait demi-tour. Mais sur le moment j’étais comme paralysée, hypnotisée par cet ami que je ne reconnaissais plus. J’espérais qu’il allait tout m’expliquer et que tout rentrerait dans l’ordre aussi vite. Je l’espérais seulement …


Je n’avais relevé la tête de mon écritoire jusqu’à maintenant, lorsque mes pupilles se posent sur ma fenêtre, je suis étonnée de voir le soleil déjà haut dans le ciel. J’ai écrit depuis plusieurs heures sans même m’en rendre compte. Je laisse tomber ma plume sur l’écritoire, attrape mon verre et bois une longue gorgée. Je me relève, m’avance vers ma fenêtre que j’ouvre afin de prendre un peu l’air. J’inspire profondément avant de la refermer et de m’approcher de mon lit. Il est temps de me préparer, déjà, j’ai sauté le petit déjeuner, mon estomac gargouille il est surement l’heure du déjeuner. Je reprendrai mon écrit un peu plus tard.

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Eamon_de_treviere


La redondance de la banalité est source de morosité.

En clair, depuis notre retour de la guerre de la Fronde... je m'ennuie !

Limoges m'ennuie, l'inactivité m'ennuie, les gens parfois même m'ennuient. La seule qui arrive à me dérider est bien entendu ma Grenouille adorée. Mais quand elle n'est pas là... Je m'ennuie.

Aussi, pour essayer de tromper cet ennui, je fréquente les tavernes limougeudes. Et, croyez-le ou non, juste dans l'espoir de tromper cet ennui.
Après, bin, des fois les tournées se suivent et se ressemblent... et à mesure que j'avance en âge et en expérience tavernière, force m'est de constater que, côté résistance à la bibine, j'ai hérité d'une étonnante capacité à ingurgiter les breuvages les plus variés avec un minimum de séquelles quant à mon intégrité intellectuelle.
Dame, c'est que l'ascendance irlandaise comporte sans aucun doute des gènes d'ivrognerie patentée et l'expression :"Boire plus que de raison" est pour moi un non-sens.
Cela dit, par respect pour Margaut et mon éducation, jamais je ne dépasse des limites incongrues et, le Très Haut soit loué, je garde assez de lucidité pour savoir m'arrêter avant que de rouler sous les tables. Evitant ainsi de me donner honteusement en spectacle et surtout de provoquer le courroux et la honte de ma Promise.

Tout cela pour dire que la seule distraction de Limoges est la veillée en Taverne en compagnie de voyageurs dont les récits souvent, me plongent dans une grande mélancolie. Les voyages, l'action, la guerre même me manquent.

D'autre part l'oisiveté me ronge et j'enrage de ne pouvoir recommencer élevage et boutique : mes champs muratais ne se vendent pas, je ne peux donc songer à m'installer ici à mon grand ennui.

Dès lors, j'essaie de tuer cet ennui en multipliant mes présences dans ces lieux de perdition (si peu ^^) que sont les tavernes.

Les voyageurs et les limougeauds ne sont point ladres et il faut bien souvent assurer la vidange de moultes chopines alignées comme de bons petits soldats sur les tables, sous l'oeil réprobateur de ma Promise et de sa marraine, Victoire.
La Baronne, par contre - dont on ne sait jamais si elle est totalement à jeun - semble perpétuellement assoiffée et n'hésite jamais à combler les vides chopinesques.

Boire pour oublier ?... Certes non ! Même si je m'ennuie ferme, je n'ai rien à vouloir oublier et la boisson n'est pour moi, en aucun cas, un exutoire, un refuge. C'est simplement un moyen convivial de s'intégrer à une société locale, puisque, un jour, j'en ferai citoyennement partie.
Boire n'est rien d'autre qu'un geste convivial, un partage.
C'est ainsi que mes ancêtres irlandais concevaient la vie communautaire villageoise et s'il arrivait que l'on s'enivre, c'était principalement lors de fêtes ou d'événements marquants tels que mariages, retour de raids victorieux, etc...

Ce soir là, comme de coutume les conversations sont variées et, quoi que souvent futiles, demeurent sur le ton de la bonne humeur, le tout copieusement arrosé. Les habitués sont là, comme de coutume. La Rousse Baronne, truculente et ma foi, fort attachante, Messer Louis Arthur, homme d'esprit et agréable parleur, Victoire, amie fidèle et son fiancé Tug... ami cher, ma Grenouille bien évidemment et notre nain attachant : l'ineffable Grimoald !
D'autres vont et viennent et les tournées se suivent et se ressemblent.

Dans l'euphorie qui commence à m'envahir, je ne réalise que tardivement le départ de Grim, trop occupé à participer aux conversations vespérales.
Mais, soudain, prenant conscience d'une torpeur inaccoutumée, je réalise que je dois avoir, ce soir, dépassé quelque peu les limites de ma capacité à encaisser la succession effrénée des chopines. La tête un peu engourdie, je prends conscience que ma Margaut n'apprécie pas du tout mon état, à en juger par ses remarques excédées et son regard sombre... ouille, ouille, ouille Eamon...

- Messire de Trévière, vous n'êtes pas dans un état conforme à la bienséance, j'aimerais assez que vous déposiez cette chope et que vous me suiviez !... La compagnie d'un Prince me suffit amplement, mais je n'apprécie guère celle d'un ivrogne ! Aussi, je vous prie de m'accompagner, l'air frais de la nuit ne peut que vous faire du bien.

VLAM !...Le couperet du bourreau de Roanne vient de s'abattre sur ma nuque fragile ! La sentence est sans appel... il me faut obtempérer.
L'oreille basse, la queue entre les jambes, je m'exécute et, après avoir bredouillé un "La bonne nuitée *hic*à tous"... je suis ma Grenouille d'un pas lourd et hésitant. Non, je ne titube pas, mais il s'en faut de peu.

Et, de fait, la fraicheur nocture dissipe un peu la torpeur éthylique qui, jusqu'ici s'emparait sournoisement de mon esprit embué et permit à mes neurones de capter le message courroucé de ma Douce :


- Eamon de Trévière... que vos ancêtres soient des ivrognes invétérés ne vous autorise pas à les imiter, même si vous pensez faire ainsi honneur à leur mémoire !... Pensez à moi un peu... et surtout à notre réputation ! Car si votre comportement arrivait aux oreilles de qui vous savez...

Elle ne termina pas sa phrase, laissant ainsi planer une menace qui me laissa un peu échaudé. Evidemment, elle avait mille fois raison et je n'avais qu'une seule excuse... bien mince il est vrai :


- Ma douce... je suis désolé... j... je ... Je m'ennuie tellement ici...


Et je baissai la tête, un peu honteux, incapable de justifier davantage mon comportement un peu insouciant. Elle dut comprendre en partie mes états d'âme, si bien que, d'une voix moins courroucée, mais ferme cependant elle ajouta :


- Rentrez et allez déssouler... Mais surtout, par égard pour moi, ne vous mettez plus jamais dans des états pareils...


Et elle tourna les talons sans autre forme de procès me laissant pantois et un peu ridicule, reconnaissons-le.

Est-ce la vigueur de la jeunesse ou une faculté de récupération propre à ma personnalité, ou encore avais-je reçu un éclair de lucidité asséné par ses paroles ? Toujours est-il que je réalisai que Margaut prenait une direction qui ne la mènerait que dans les quartiers sordides de Limoges. Persuadé que seule sa colère à mon encontre avait altéré son sens de l'orientation, je me décidai à la suivre, la ratrapper et la remettre dans la bonne direction. Même si elle ne souhaitait pas la présence d'un Prince Crapal enivré, je ne pouvais la laisser s'enfoncer dans les bas quartiers de Limoges sans craindre pour elle.


Elle marchait vite et semblait vouloir se dissimuler. Ce comportement m'intrigua davantage et je décidai de la suivre de loin sans pour autant la perdre de vue.
C'est alors que, à la faveur de la lune montante, j'aperçus "l'autre" silhouette !

GRIM !

Margaut se dissimulait aux regards de Grim qu'elle suivait furtivement.

Mais bon sang où allaient-ils ainsi ? Et pourquoi se cacher ?

Je n'avais pas encore recouvré toutes mes facultés et la tête vide et lourde, je les suivais, machinalement, instinctivement, essayant de ne pas me faire repérer, la main sur la poignée de ma bâtarde, prêt, malgré tout, à toute éventualité.

Il me fallut cependant m'adosser à une façade, la tête me tourna un instant. Quelques gouttes de sueur perlaient à mon front dus sans doute aux efforts consentis pour tenter de retrouver ma lucidité habituelle.
Mais, lorsque je repris conscience, Grim et Margaut avaient tous deux disparu !

Je me frottai les yeux... Allons, ils ne doivent pas être bien loin ! Je m'avançai prestement, et tant pis pour la discrétion, Margaut pouvait être en danger.
Mais, j'eus beau écarquiller les yeux, tendre l'oreillle, tous les sens aux aguets : Rien !... Volatilisés... évanouis !

Cela tenait du prodige.

Il n'était pas possible que tous deux disparaissent en si peu de temps. Une seule possibilité... ils avaient dû entrer dans une de ces masures branlantes, quasi abandonnées, dans un état de délabrement sinistre.

Mais que diable venaient-ils faire en ce lieu morbide ??

Je ne pouvais imaginer un rendez-vous galant. La fidélité de Margaut ne faisait pour moi aucun doute. Je ne pouvais que supposer que, ma Promise, poussée par une curiosité exacerbée, avait suivi Grim dans les dédales de ces ruelles souvent mal famées etje craignais pour eux.

Je fis enfin demi-tour et lentement refis le chemin inverse.

Soudain, alors que j'allais me retrouver à l'endroit où je les avais perdu de vue, j'entendis des murmures ponctués par le bruit d'un objet qui se brise.
Et c'est alors que j'aperçus une faible lueur sourdant d'un soupirail tout proche.

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Grimoald
    « ...
    Sous la pâle clarté d'un flambeau vacillant,
    Un crâne devant moi, j'admirais le Néant.
    J'admirais cette image aux pénétrants mystères
    Qui figurent la Mort et les douleurs amères...

Il y a des soirs où tout s'écroule.
Il y a des soirs où plus rien n'a de sens.
Il y a des soirs où tous vos rêves, tous vos espoirs, où tout ce que vous vouliez garder, tout ce que vous vouliez retenir encore un peu, tout ce que vous ne vouliez, tout ce que vous ne deviez, pas perdre défile sous votre nez, sous vos yeux embrumés, sous votre regard un peu terne, un peu absent, un peu hagard.


- « Nous jouerons, Maman... J'irai !

De ces soirs propices à La Colère, à la Folie qui le ronge, ce soir-là serait de loin le plus rude.
Il le savait, il avait tout prévu. Ce soir devait être le dernier. Ce soir, il devait en finir avec La Colère.
Ce soir, il Lui avait donner rendez-vous. Ce soir, il devait en découdre avec Elle.
Mais ce soir, une invitée surprise répondait à l'appel.
Depuis quand était-elle ici ? Comment avait-elle su ? Comment avait-elle pu le trouver ? Qui d'autre savait ?
Un cri.
Pas un de ces cris qui viennent quand vient La Colère. Non, ce cri-là, il le reconnaissait, c'était le cri de la Précieuse, le cri de sa tortionnaire.
Non, ce cri était différent. Ce cri était... réel !


    « ...
    Non c'est une folie, un repentir qui passe
    Comme un éclair mortel qui traverse l'espace
    On a peur et tremblant qu'il vienne jusqu'à soi
    On se cache il n'est plus ainsi que notre émoi
    Ce Crâne que j'ador sera toujours le même
    C'est la mort figurée en un tragique emblème
    Qu'on a peur d'admirer tant il est effrayant...

Un sourire chaleureux à l'encontre de Margaut. L'attendait-il ? S'adressait-il vraiment à elle ?
Ses prunelles qui se pose sur elle, qui soutiennent ses émeraudes qui le dévisagent, semblent pourtant si vides.
Elles sont là, elles se fondent dans celles de l'amie, et pourtant, elles semblent si vides : vides de sens, vides d'attention, vides de tout intérêt, vides de toute lueur.
Un silence. Long silence. Silence pensant. Silence qui enfin se rompt.
Grim' ! C'est lui..
C'est elle, c'est Margaut.


- « Juliette !

Où sommes-nous ? Un pas en arrière.
Lui parler. Parler à qui ? Parler de quoi ? Il penche la tête, fronce doucement les sourcils.
Il la regarde toujours sans la voir vraiment. Il la regarde un peu sans la regarder. Il la regarde un peu drôlement.
Méfiant ? Non, pas vraiment. Étonné ? Un peu. Comme on regarderait... une Folle délirante ? On dirait.
Ce qu'il vient de brise ? Sa dextre lève doucement l'éclat de verre. Fin, luisant, coupant comme une lame bien aiguisée.
A qui parle t-il ? Et de désigner, lentement, de sa senestre au petit doigt manquant étrangement molle, la toile un peu usée, clouée aux murs humides.
Et de coller son petit index bien maigre tout contre ses lèvres devenues trop grises...


- « Shhhht.... Maman va nous punir !

S'adressait-il à Margaut ? à Juliette ? A une autre dont il n'avait encore cité le nom ? S'adressait-il seulement à quelqu'un ?
Le fait est qu'il regardait son amie. Du moins, ses azurs sans vie semblaient la regarder.
Ses lèvres semblaient même lui sourire. Un de ces sourires complices qui précèdent les bêtises.
Oui, c'était un de ces sourires qui se moquent des conséquences... Un de ces sourires qui ne demande qu'à jouer.
Et de remonter doucement sa manche, et de caresser les profondes et plus anciennes lignes laissées par le fer rouge.
Et de frotter tout doucement les petites entailles encore un peu rouge... Et de sourire, et d'inspirer profondément...
Et de se saisir de l'éclat plus fermement encore, et parcourir le même chemin... Mordant, cette fois.
Et l'éclat qui se chargeait, au fil de son parcours, de son sang.
Et ce sourire satisfait, et ses paupière qui se referme, et ce petit nez retroussé qui inspire lentement... Soulagé.


- « A toi !

Et de tendre à son amie l'éclat de verre sanguinolent.
Le tendait-il à Elle, à Margaut ? Peut-être. Non. A Juliette ? C'est à elle qu'il s'est adressé tantôt.
Il le tend à une amie, à une complice, à une personne qu'il connait, qu'il apprécie, visiblement.
Il le tend à une complice, susceptible de partager avec lui cet élan de Folie.
Il sourit, comme si tout cela n'était qu'un jeu stupide. Comme si rien de tout cela n'était vraiment réel.
Comme si tout cela n'était qu'un rêve...


    « ...
    Le crâne parle encor et je veux l'écouter
    A cette longue étude il faut m'intéresser
    Je veux savoir aussi au-delà de cette ombre
    Ce qui vit et respire en la demeure sombre
    Que le tombeau nous cache et que savent les morts
    Je veux savoir aussi si nos tristes remords
    Trouvent un aliment dans la source profonde
    Qui coule sous la terre où règne un autre monde... *

* Honoré Harmand (1883-1952), in La Folie Du Poète.
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