Actarius
Les sifflements aigus du balbuzard sestompèrent. Pour un instant, alors, un infime instant, le calme enveloppa le Castel du Tournel. Même dans la grande salle pourtant agitée de vives discussions peu auparavant, le silence sinstalla marquant la préciosité, la rareté de ce moment, où la sauvage vallée du Lot se taisait. La bulle éclata soudainement. Assis sur ce qui sapparentait à un trône, le Seigneur des lieux avait quitté sa posture pensive et regardait désormais lhomme qui lui faisait face. Zo, tonna-t-il sans ménagement dans sa langue doc. Un mot difficilement traduisible qui représentait la volonté davancer, de progresser. Car le temps pressait désormais, le retour en arrière, les errements nétaient plus possible, il fallait poursuivre louvrage déjà commencé et lachever avant le dix-neuvième jour daoût. Une journée, cétait tout ce quil avait à offrir durant cette semaine-là et il comptait bien létendre au maximum pour superviser lavancée des travaux daménagement. Lhomme sinclina respectueusement et quitta la pièce sans se faire prier. Quant au Comte, il demanda à un serviteur de faire venir les trois personnes qui l'avaient accompagné pour cette éphémère étape tourneloise. La première était l'élue de son coeur, la belle Ingeburge qui avait offert un soutien formidable pour la mise en place des réjouissances. La deuxième sa fille adoptive qui aurait un rôle important à jouer durant l'événement. Assurément, on pouvait y décéler une volonté de se rapprocher de la désormais demoiselle, seul vestige d'une famille décimée par la mort. Elle avait l'âge de prendre un époux et les festivités offriraient un moment idéal pour la dévoiler au "monde", au sein duquel le Phénix espérait bien qu'elle trouvât un homme à son goût. La troisième sa protégée, la jeune et pétillante rousse qui ne quittait plus que rarement le sillage du régnant.
L'homme qui venait de quitter la pièce nétait autre que Joan, le fidèle et rusé intendant du domaine. Plus que sceptique sur le délai accordé, celui-ci avait transmis ses réserves en toute franchise, mais il sétait heurté à un mur. LEuphor ne voulait aucun accroc, aucune réserve, il naspirait quà une chose : offrir des festivités qui feraient date et il escomptait bel et bien mettre tout en uvre pour parvenir à ses fins. Ainsi, avait-il balayé les problèmes de manque de main duvre de sa ferme poigne en ordonnant que les gens de Villefort à Florac fussent tous mobilisés pour lévénement et en évoquant des sanctions contre les réticents. Toutes les forces se devaient dêtre réunies pour déboiser et agrandir le champ de verdure qui se transformerait bientôt en village de toiles au pied de la forteresse. Saint-Julien serait au cur de lentreprise, il sagissait de rendre le bourg moins austère, de transformer les demeures réquisitionnées pour accueillir quelques privilégiés en véritables havres de paix, confortables et accueillants. Un soin tout particulier serait pris pour la seule auberge du village. Bientôt, celle-ci passerait à lheure bourguignonne et recevrait la plus précieuse des invitées, la Prinzessin. Elle ne manquerait de rien, elle serait reine en sa demeure provisoire, elle serait impératrice en son domaine et bien plus encore. Car le Phénix ne voulait en aucun cas quelle le crût ingrat, alors quelle avait été dune aide plus que précieuse pour lorganisation. Sans doute cela expliquait-il également lintransigeance du Cur dOc toujours soucieux de la rendre fière de lui.
Lidée quil ne la méritait pas vraiment demeurait lancinante en son esprit. Elle avait la grâce, la beauté et la contenance dune déesse, il avait la maladresse, les traits burinés et lemportement dun rustre. Depuis des mois, il cherchait à lui plaire de toutes les manières possibles et imaginables pour lhomme gauche quil demeurait, mais il échouait trop souvent, se déchirant comme lécume sur la falaise. Oh oui ! Il voulait saisir cette occasion, la surprendre, la satisfaire et ne surtout pas la décevoir. Impression quil portait depuis leurs premiers échanges hors de la maison royale. Assurément, ces festivités revêtaient une importance capitale dans sa poitrine frémissante damour. Son regard balaya un instant la salle vide et il la vit. Souriante, heureuse dêtre là avec lui, près de lui. Une scène douce dun repas partagé, dun moment simple, complice et entier. Sans peur, sans regret, sans remord. Il cligna des yeux et retrouva malgré lui la solitude de cette grande salle trop souvent déserte, trop souvent orpheline de vie et de partage. Il déplia sa silhouette cependant quun sourire triste se dessinait sur son faciès marqué par le temps. Machinalement, ses bras se croisèrent dans son dos et il commença de faire les cent pas en attendant que la porte souvrît. Empli encore de son évasion chimérique, il fut petit à petit ramené à la réalité par lémergence des obligations qui lattendaient. Le Comté pourquoi donc sétait-il engouffré encore dans la brèche du devoir ? Il aurait pu lever définitivement le pied et ne vivre plus que pour elle. Oui, ces festivités étaient capitales. Elles seraient son hommage, ses excuses et sa déclaration. Pour elle. Rien que pour elle.
La porte souvrit
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L'homme qui venait de quitter la pièce nétait autre que Joan, le fidèle et rusé intendant du domaine. Plus que sceptique sur le délai accordé, celui-ci avait transmis ses réserves en toute franchise, mais il sétait heurté à un mur. LEuphor ne voulait aucun accroc, aucune réserve, il naspirait quà une chose : offrir des festivités qui feraient date et il escomptait bel et bien mettre tout en uvre pour parvenir à ses fins. Ainsi, avait-il balayé les problèmes de manque de main duvre de sa ferme poigne en ordonnant que les gens de Villefort à Florac fussent tous mobilisés pour lévénement et en évoquant des sanctions contre les réticents. Toutes les forces se devaient dêtre réunies pour déboiser et agrandir le champ de verdure qui se transformerait bientôt en village de toiles au pied de la forteresse. Saint-Julien serait au cur de lentreprise, il sagissait de rendre le bourg moins austère, de transformer les demeures réquisitionnées pour accueillir quelques privilégiés en véritables havres de paix, confortables et accueillants. Un soin tout particulier serait pris pour la seule auberge du village. Bientôt, celle-ci passerait à lheure bourguignonne et recevrait la plus précieuse des invitées, la Prinzessin. Elle ne manquerait de rien, elle serait reine en sa demeure provisoire, elle serait impératrice en son domaine et bien plus encore. Car le Phénix ne voulait en aucun cas quelle le crût ingrat, alors quelle avait été dune aide plus que précieuse pour lorganisation. Sans doute cela expliquait-il également lintransigeance du Cur dOc toujours soucieux de la rendre fière de lui.
Lidée quil ne la méritait pas vraiment demeurait lancinante en son esprit. Elle avait la grâce, la beauté et la contenance dune déesse, il avait la maladresse, les traits burinés et lemportement dun rustre. Depuis des mois, il cherchait à lui plaire de toutes les manières possibles et imaginables pour lhomme gauche quil demeurait, mais il échouait trop souvent, se déchirant comme lécume sur la falaise. Oh oui ! Il voulait saisir cette occasion, la surprendre, la satisfaire et ne surtout pas la décevoir. Impression quil portait depuis leurs premiers échanges hors de la maison royale. Assurément, ces festivités revêtaient une importance capitale dans sa poitrine frémissante damour. Son regard balaya un instant la salle vide et il la vit. Souriante, heureuse dêtre là avec lui, près de lui. Une scène douce dun repas partagé, dun moment simple, complice et entier. Sans peur, sans regret, sans remord. Il cligna des yeux et retrouva malgré lui la solitude de cette grande salle trop souvent déserte, trop souvent orpheline de vie et de partage. Il déplia sa silhouette cependant quun sourire triste se dessinait sur son faciès marqué par le temps. Machinalement, ses bras se croisèrent dans son dos et il commença de faire les cent pas en attendant que la porte souvrît. Empli encore de son évasion chimérique, il fut petit à petit ramené à la réalité par lémergence des obligations qui lattendaient. Le Comté pourquoi donc sétait-il engouffré encore dans la brèche du devoir ? Il aurait pu lever définitivement le pied et ne vivre plus que pour elle. Oui, ces festivités étaient capitales. Elles seraient son hommage, ses excuses et sa déclaration. Pour elle. Rien que pour elle.
La porte souvrit
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