[Cadet Sergueï arrive gaiement
Qui na ni promesse ni serment
Cest inutile pour les putrelles
Que direz-vous dCadet Sergueï : Ah ! Ah ! Ah ! mais vraiment,
Cadet Sergueï est un tourment.
Laîné Niko est déjà là
A la belle à tendu son bras
Il soutient donc la sauterelle
Qui a couru et qui chancelle : Ah ! Ah ! Ah ! mais vraiment,
Laîné Niko est scélérat.
Cadet Sergueï admire la scène
Le poing droit vissé à son aine
Il admire la dextre fraternelle
Qui sabat fort et qui malmène : Ah ! Ah ! Ah ! mais vraiment,
Cadet Sergueï sémerveille.
Laîné Niko a vite mâté
La fière révolte qui a couvé
A larbre très tôt se heurte celle
Qui nsera bientôt plus la même : Ah ! Ah ! Ah ! mais vraiment,
Laîné Niko assure drôlement.]*
Il les a donc rejoints, le Prince Léonin. Le pas mesuré, tombant, non hâté, il sest frayé un passage à lherbe haute que la belle a déjà légèrement couchée dans sa course. Les yeux rivés à la scène qui se trame devant eux, un sourire appréciateur étirant ses lèvres fraternelles et admiratives, il mire la maîtrise quà son aîné de la fluette. La petite a lair inerte un temps ; peut-être est-ce la surprise de ce que Nikolaï na pas lair disposé à lui venir en aide. Le sourire sétend, comme il réalise quelle a vraiment dû croire quil la sauverait. Ode, tu as peur, Sergueï tinquiète ? Tu nimagines pas ce que va te faire le Roi.
Bien vite, dailleurs, la jeune rousse a le droit à une démonstration, ou du moins une esquisse de ce qui lattend. A lincrédulité première succède bientôt un accès de colère, de révolte, de
furie toute féminine, comprenez vaine, inutile, et fastidieuse.
Elle a griffé, la petite chatte ; lacéré de ses serres, le faucon femelle. Nest-ce pas un audacieux signe du destin ? Elle a semblé signer de ses ongles la tragique ironie de son prochain sort fâcheux. La fauconnerie, métaphore très à propos, nest-il pas ? Nikolaï et son frère sadonnent en ce moment-même à cet art noble consistant à élever et à conduire un rapace dompté. La femelle a prouvé, par son audace à déchirer la peau, quelle était rapace ; la lourde main fraternelle a démontré, elle, quelle était dompteuse. Lépervier cadet a rabattu la proie à laigle royal : la chasse est à peine ouverte que déjà loiseau blessé crie à sa survie. Les deux techniques sont mêlées ; elle a eu le droit au haut vol, ce « vol au leurre » quand Sergueï a fondu verticalement sur elle, la surprenant dans son sommeil, et au bas vol, ce « vol au poing » avec Nikolaï, quand celui-ci a maintenu loiseau de sa main. Et en plus ils sont imaginatifs, ils varient : que demande le peuple ?
Il est quelque chose de grisant dans la chasse ; la traque déjà a amusé Sergueï. Pister lanimal claudiquant sest révélé presque un jeu denfant à lil aguerri, la capture sest faite plus jouissive encore, quand bien même elle fut un peu gâchée par la facilité. Mais ne négligeons pas la peine des slaves : ce petit oiseau-là vaut sûrement son pesant dor.
Le plus risible a peut-être dû être les mots
Savez-vous que lon dit dun faucon quil « réclame », quand il crie ? Finalement, les deux blondins ne vont lui donner que ce quelle na pas osé formuler dans les mots, mais a très bien transcrit dans les gestes ; trop de fois la langue sest-elle permis de fourcher, tant de fois le corps a-t-il tenté - volontairement, selon Sergueï, forcément -, dattiser les sens masculins.
Abnégation, abnégation
Don de soi
Magnanimité
Fort bien, fort bien, les grands curs des deux Apollons sattèleront à répondre à lappel rouquin ; elle veut que ce soit sauvage ? Quà cela ne tienne ! Quil en soit ainsi amen.
Les larmes quelle verse sont autant de petites rainures qui, si on suit leur cheminement, mènent à la mâchoire puis la gorge, puis
Ah, la la
la mignonne ira-t-elle jusquà jouer leffarouchée, en sus de tout ? Il avance, il observe ; limpertinente crache au visage du roi, tente un coup déloyal
La main mise de son aîné rend notre cadet plutôt admiratif, et celui-ci éclate dun rire franc, dautant quelle ose un ordre
Elle est mignonne. La tête tirée en arrière par la rampe puissante du Tigre donne à voir à un Sergueï un visage délicieusement contraint et le soupir daise du lion dêtre exhalé entre ses lèvres.
Satisfait, il savoure la vision enchanteresse ; lequel des deux sera Stupre, lequel sera Luxure ? Grand dilemme nest-il pas ? Mais déjà, le corps malingre est soulevé, rudement plaqué à lécorce noueuse et ah, le délice certainement très douloureuse ; la main sabat par deux fois en travers du charmant minois
Cen est trop pour un Serg qui brûle déjà de ce quil observe depuis un bon moment déjà. Il franchit la maigre distance qui le sépare de son tigre de frère, et bientôt pose sa main sur son épaule, comme lazur détaille avec délectation le corps chétif malmené devant lui.
De sa main libre, le Lion vient sans égard aucun saisir le menton de la jeune femme, et cest dune voix doucereuse quil sadresse à son frère, sans quitter du regard la rouquine :
- Il ne faut pas la casser tout de suite, nest-ce pas ? Tu men laisses un ptit bout ?
Le sourire est étendu, plus long encore, et Sergueï dapostropher Ode :
- Ce nest pas très gentil, de cracher au visage des gens, tu sais ?
Un ricanement plus tard, les doigts enserrent le menton malingre, le pouce caresse la lèvre fendue** par les coups Nikolaïen, et Sergueï de forcer un baiser sans douceur, plaquant au passage la tête dode contre larbre, qui la déjà meurtrie, mais qui au final, sera bien plus tendre que les deux chênes massifs qui lui font face
- Pas gentil du tout, même.
*Ré-adaptation toute personnelle de Cadet Roussel
**Vu avec Jd Ode.
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