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Les fantômes n'existent pas, ce ne sont que des sursis.

Volkmar
Agenouillé, en pleine nature, le reître priait. Les yeux clos, il ne se demandait plus si ce combat en valait la peine. C'était bien trop tard pour de telles pensées, qui ne l'avaient, d'ailleurs, qu'à peine effleuré. Les mains sur la garde de sa lame, "Sable", qui l'accompagnait dans tous ses combats depuis le Poitou d'où il était parti, il recommandait son âme à Deos, conscient que malgré tous ses avantages, il risquait toujours de ne pas se relever d'un mauvais coup. Conscient que pour noyer son épée dans le sang d'un autre, fusse-t-il un papiste, il allait risquer tout son bien et sa fortune. Mais sans regret. Sans remord.
Elle était sienne désormais, et son nom de rouquine lui était aussi cher que le sien propre. Elle était sienne et il n'aurait rien laissé se mettre en travers, quand bien même l'exubérance n'ait pas été son point fort.
Elle était sienne, et il priait autant pour elle que pour lui même, en cette heure d'avant la nuit. D'un murmure qui ne pouvait troubler la paix des feuilles et le sommeil des troncs, élancés vers le ciel dans une supplique au Divin qui n'avait de commun avec celle de l'homme que leur destinataire.


"Par le secours de Ta grâce, Seigneur,
Accorde en Ton éternelle bienveillance,
L'affranchissement des opprimés,
La délivrance des condamnés,
L'apaisement des affligés.

Accorde Seigneur, en Ton éternelle bienveillance,
La santé à Tes fidèles,
Le pardon aux égarés,
L’accueil aux repentis,
L'allégresse aux justes,

Aux démunis ce dont ils ont besoin,
Une route tracée pour ceux qui s’égarent,
Le retour des bannis, le souvenir des disparus,
Miséricorde et clémence pour toutes les créatures !

Que nous soyons agréables à Ta majesté,
Par Ta bienveillance et Ta grâce,
Maintenant et en tout temps
Et dans les siècles des siècles."


Quand il se releva, le ciel était grisé par la tombée du soir, rougi par les derniers feux du soleil qui risquait de ne jamais revoir le lendemain le visage et les yeux brillants d'un homme sur la terre, un homme parmi les autres, mais unique, comme tous.
Il n'avait gardé que son épée, laissant l'écu à sa place dans la pièce qui où il avait posé ses quartiers. Son épée, et une broigne légère, qui ne pourrait qu'atténuer un coup, mais n'empêcherait en rien l'autre de le tuer par un autre bien ajusté. De ce genre de duel, il avait retenu qu'il valait mieux privilégier la légèreté et l'agilité.
Le Rouge raccrocha sa ceinture, arrangea la suspension de son baudrier, et d'un pas alerte, gagna le champ, où se réglerait le contentieux. Il y faisait déjà sombre, entre chiens et loups sans y faire nuit encore.
A espérer que quelqu'un amènerait des torches.
En attendant, il attendrait la fin.
La fin de l'attente.

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Scath_la_grande
[Un jour Dieu créa Musteile et se dit qu’il venait de faire une belle boulette !]


Immobile dans l’air crépusculaire, où la course lente du jour s’achève dans un éclat blafard.
Hiératique coquelicot planté dans ce champ, qui porte la flamboyance en chevelure, et le noir huguenot en velours contre sa peau, une mante sombre doublée d’une fourrure non ostentatoire qui n’est là que pour réchauffer ses épaules en ce mi-septembre, la rouquine patiente en se rongeant sang et ongles.
Mille fois elle maudit la langue trop pendue d’une vipère qui se revêt de peau d’agnelle, qui par une inadvertance mal intentionnée, logea dans le creux de l’oreille poitevine le nom du provençal qui lui fait tant battre le cœur.
Nombres prières furent égrenées en ce jorn pour qu’aucuns ne se navrent gravement dans ce vain croisement de fers.
Le visage blême se tourne à celui qui veut bien supporter son humeur acariâtre durant le duel, Humbert qu’elle affectionne tout à plein d’une amitié forte qui ne put jamais allé au-delà.


« Il serait bien qu’un se désiste… »

Elle le dit sans y croire, un peu pour s’en convaincre, serrant son bras contre son flan. Le savoyard sera son témoin à elle, au cas où…
Complexe bestiole rousse qui ne supporterait pas de laisser en vie celui qui aurait laminé l’autre.
Plutôt vivre dans le deuil.
Une ombre vermeille se profile et la poitrine bat son plein, un sur les deux, il n’y a plus qu’à attendre l’occitan, son accompagnant et l’Irlandais qu’elle aurait mieux de s’abstenir de proposer comme témoin.
Mais allez donc lui dire qu'elle est la reyne de la mauvaise idée, elle niera…

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Saanne
Le savoyard s'était retrouvé embrigadé dans une affaire dont il était presque parfaitement étranger.
Si ce n'est la Musteile, dont il suivait de près ou de loin les pérégrinations, et un irlandais qui devait être aussi lié que lui à l'objet de ce duel, rien ne l'aurait convaincu à venir traîner dans un champ autre que le sien à la tombée du jorn d'hui... Il se serait bien plutôt campé aux Mammes, ou tout autre troquet.

Ses atours guerriers troqués contre un costume de respectable citadin, il ne s'était encombré que de son épée bâtarde pendant au ceinturon, de son large chapeau de cuir porté sur l'avant au dessus de ses sourcils broussailleux.
Humbert se tenait donc au bras de la flamboyante dame de Bertix, mesurant l'humeur maussade de cette dernière qu'il avait appris à pratiquer au fil de temps.

Tant de mois passé au loin de Montauban... la troupe frondeuse s'en était revenue avec son lot de réjouissances, pour certains, d'afflictions pour d'autres. La survenue d'un tel conflit était au fond inéluctable et le brun sentait quelques remords de n'en prendre acte qu'au dernier moment, dans le regard tourmentée de sa plus proche amie.



« Il serait bien qu’un se désiste… » 


Il ne répondit qu'en resserrant l'étreinte sur le bras la de rousse, et portant son regard au loin pour voir si personne ne pointait le bout son nez.

Il est de ces instants qui pèsent de tout leur poids sur les âmes, qu'en bon croyant, ils les poussent à se retrancher dans la prière et la résignation. Humbert reconnut ce sentiment qui planait avant l'entame d'une bataille, ou dans ces nuits de veille aux abords d'une bâtisse en ruine en Touraine, et que seul le dénouement apaise...

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Salveo
Si l'amour rend aveugle, il peut aussi partiellement vous rendre fou. Quelle autre explication à ce règlement de compte, hormis une cécité de passion ?
Non pas que le Louvelle fusse un partisan de l'amour extraverti, mais porté face à une situation désarmante : elle repartait, et sans lui. Cruel constat qui rendait toutes autres actions de sa part vaines et peu crédibles.
Défier le promis de Scath en duel, l'amener à abandonner sa main : un plan simple hélas basé sur un pur rapport de force, le miracle est toujours permis.


Traversant la ville, le Provençal - suivi par Avyd de Louvelle, batard de Perturabo et cousin irremplaçable, pour l'occasion son témoin à l'évènement - éclaira bientôt la lice et ses trois occupants d'un revers de flamme.


- Salveo de Louvelle.
Et sont présents Volkmar, Von Frayner et un inconnu à son bras. Tous les participants sont là.

Il logea sa torche brûlante dans le sol, repoussant l'obscurité aux bords du champs.


- Un Louvelle pour juger un Louvelle : Avyd sera mon témoin.

L'éternelle gloire familiale - très souvent exagérée - en guise de dernière invitée.

Armure légère en cuir bouilli, colorée d'un grossier dauphin, seule venait briller sa médaille d'Aristote.


- Nous combattrons à armes égales. Puisque tu es sans bouclier, je t'affronterai dépourvu du mien.

L'occitan se positionne lentement, l'épée au fourreau, détaillant son adversaire qui maintenant semble plus robuste qu'hier assis dans sa taverne.
Enfin, son dernier regard est pour la rousse, sillonnant son visage, à l'attente d'une quelconque réaction, qui tarde à venir selon lui.

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Niria_helene
A cette heure là, Niria, délicate poupée haute comme trois pommes, aurait logiquement du être en train de rêvasser dans les bras de Morphée.
Au chaud au fond de son lit, en sécurité derrière les murs de l'Alabrena ...

Elle aurait du.

Mais c'était sans compter sur la curiosité grandissante de la demoiselle, qui du haut de ses sept printemps, ne perdait plus désormais une occasion d'échapper à la surveillance, tantôt de sa nourrice, tantôt du Vieux Georges chargé de pallier sa sécurité, pour aller découvrir le monde extérieur.

Ces jours ci, la tâche était facilité par l'absence de la Comtesse maîtresse des lieux, partie, à ce qu'on disait "Se retirer spirituellement".

Ce soir ne ferait pas exception assurément, et ayant entendu courir une rumeur sur une rencontre nocturne entre l'amoureux de la jolie Dame Rousse et un inconnu, c'est en silence qu'elle a suivi la Belette, bien décidée à assister à cette "rencontre", dont bien sûr elle n'a aucune idée des tenants et encore moins des aboutissants.

Voilà donc notre demoiselle, tout de sombre vêtue, capeline remontée sur ses boucles brunes, à l'affût derrière une vieille souche. Ses grands yeux bleus plissés pour tenter d'y voir clair, alors que le jour est en train de mourir à l'horizon, la mini Dénéré est au spectacle, totalement inconsciente quant à la suite des évènements.

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© Crokie.
Finn
L’Irlandais s’était laissé tirer de son troquet en bordure de Tarn malgré lui pour une affaire dont il n’avait cure, il fallait bien l’avouer. La trombine des mauvais jours se présenta donc comme requis au ras des pâquerettes dans un champs déserté par ses paysans pour une confrontation nocturne. Il n’était pas là pour ferrailler, bien au contraire, la vêture légère, aux cuissards de plate près, aussi nu qu’un Humbert sans son pudique couvre-chef. L’épais gambison de teinte claire flanqué de l’habituelle bâtarde s’approcha du cercle lumineux formé par la torche pour en saluer les papillons de nuit qui gravitaient autour, prêts à s’y brûler.

A première vue, il n’était pas en avance et les protagonistes semblaient déjà se préparer à se prémunir de leurs gardes. Approchant l’Easóg* en col de parpaillot bordée du franc camarade Humbert, son regard inquisiteur les dévisagea dans la pénombre avec la candeur des retardataires.


- « Qu’attend-on ? »

Assuré de son bon droit, il s’attarda sur celle qui d’aventure le rejoindrait peut-être une nouvelle fois pour goûter son malt à la brune. Du moins l’espérait-il secrètement, la convoitise se devinant sous la broussailleuse toison grisonnante qui lui rongeait la mâchoire.


*Belette

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Gnia
La torpeur n'est permanente que lorsque l'on se meurt.
Comme à l'accoutumée Agnès trouvait toujours l'étincelle pour rallumer le nécessaire brasier aux tréfonds d'une âme en cendres.
Et ce soir, il s'agissait d'un Vieux Georges affolé et d'une nourrice en pleurs ayant trouvé lit vide et froid en lieu et place d'une petite tête brune assoupie.

La malepeste soit les enfants !
Toujours imprévisibles, jamais là où on les attend, porteurs d'inquiétudes à égalité avec les joies.
Quoique la définition présente ne s'applique pas exclusivement aux enfants.

Sortant de son ermitage de solitude avinée, la Saint Just s'était extirpée de son âtre presque froide, piquée par l'aiguillon d'une colère sans éclat mâtinée d'inquiétude. Une des mouches que l'on avait dispersé en ville à la recherche de la mini Dénéré avait crû la loger hors des murs non loin de ce qui servait de champ de lice.
Ce fut donc la direction que la Comtessa fit prendre à sa monture.

Ombre lointaine juchée sur une faible hauteur, cavalière encapuchonnée drapée de noir sur fond de couchant, vision éthérée aux allures fantomatiques, prenant la mesure du spectacle qui n'allait point tarder à se jouer sous ses yeux.
Quelques silhouettes découpées par les rayons du soleil couchant et que la distance ne lui permettait pas de reconnaitre, et une plus petite, non loin, comme embusquée.

Un soupir, et les talons frôlèrent les flancs de la monture pour se rapprocher de la frêle silhouette, sans même un regard pour les protagonistes plantés là, ne cherchant même pas à les reconnaitre. Un duel se préparait visiblement et il n'était pas question de se mêler à affaire qui ne la concernait pas.
A quelques toises de la petite ombre noire accroupie derrière une souche et tournant le dos à la cavalière, Agnès demanda, sans élever le ton, la voix visiblement lasse.


Damoiselle de Dénéré, peut-on savoir quelle morbide curiosité à satisfaire vous fait manquer votre heure de coucher ?


[HRP : edit pour correction d'un mot qui voulait rien dire.]
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Avyd
Une missive lui était parvenu lors de ces dernières journées ensoleillées d'été. Une missive claire et concise à laquelle il répondit avec satisfaction, comment aurait-il pu refuser un tel honneur ? Ce serait donc un Louvelle qui témoignerait d'un autre.

Le bâtard fut ponctuel. Ainsi ils traversèrent tout deux la calme cité des saules, relativement éclairée par un crépuscule en fin de course. Ils furent silencieux durant cette courte marche, ne sachant trop que dire, Avyd préférait se taire. Malgré le moment que l'on pouvait qualifier de dramatique, les sentiments et autres gestes affectueux n'étaient guère sa tasse de thé. C'était d'ailleurs un trait assez caractéristique chez les Louvelle.

Ils arrivèrent au lieu-dit. Le Louvelle balaya du regard les quelques personnes présentes. Nombreux étaient les visages qui lui était inconnu. D'autres commençaient à lui être plus familier. A un pied derrière son cousin, il le laissa s'occuper des cordialités.


-"Un Louvelle pour juger un Louvelle : Avyd sera mon témoin."

Les regards se tournent brièvement vers le bâtard auxquels les yeux de celui-ci répondent avec dédain. Le moment ne prêtait guère à un sourire et il sentait bien renaître dans ce duel les tensions d'une époque désormais caduque.
Méfiant, le Louvelle zieute l'adversaire du cousin pour vérifier que celui-ci ne cache guère une quelconque arme pouvant l'avantager. Mais Salveo lance les hostilités et le bâtard se résout à reculer de quelques pas, en se cantonnant à son rôle d'observateur.
D'apparence calme, il n'en demeurait pas moins aux aguets, se préparant, main sur son pommeau, à intervenir si tout débordement se présentait à l'improviste.
Volkmar
Et le marbre rouge s'anima. Calme, serein, il dégaina sa lame, assura sa main droite dessus, porta sa main gauche en renfort. Campé sur ses pieds, position de garde, stabilité..
Pas de bouclier, c'est l'assurance qu'à la moindre esquive ou parade ratée, le coup porte. Et l'absence d'une armure complète digne de ce nom entraînerait des blessures, à coup sûr. Alors s'il est inévitable que la tension s'empare du combat, il ne s'agit pas de se précipiter. D'abord jauger l'adversaire. Le Louvelle, il l'a gardé sous les yeux un moment, il ne l'a pas jugé expert en l'art du combat, mais tout homme peut réserver ses surprises. C'est son unique centre d'intérêt en cet instant. Même la belette pour qui il se bat est désormais à des lieues de son esprit focalisé sur la seule personne d'un papiste occitan. Dire que l'ancien Poitevin a lui même un papiste Irlandais comme témoin est une farce.. D'autant plus dérisoire que s'il savait déjà que Finn lui même avait des vues sur la belette, c'est lui qu'il achèverait le premier plutôt qu'un Salveo déjà dépassé par le destin et le temps.
Approche. Tester l'adversaire. Toujours en garde. Légère attaque sur l'épaule gauche, facilement parée. Ce n'est pas encore vraiment commencé.
"Qu'attend-on ?"
Pensées en écho aux paroles d'un défroqué. Alors ? On attend toujours de ne plus attendre, mais d'attente en attente, la fin ne change jamais puisqu'elle n'existe jamais vraiment.
Même si tout commençait pour de vrai, on ne ferait plus qu'attendre la fin du combat.
Même si le Louvelle était défait, on n'aurait qu'à attendre un nouveau duel, un nouvel honneur absurde à venger peut-être ?

Pourtant, il le faut bien. Et le premier vrai coup, mal anticipé par l'adversaire peut-être, l'effleure, sans l'entamer, mise en garde contre l'avenir. Un pas de côté, une épée mal assurée en travers a sûrement sauvé la première mise.
La seconde attaque prend à nouveau le parti de l'épaule, mais prestement, le reître déjoue la garde de l'occitan et se porte à sa hanche.
Le premier sang pour lui. Quelques gouttes dans le vent, sur sa lame, le flanc est entamé. Il recule d'un pas, presque certain que l'autre sera un instant désarçonné par ce coup.
C'est pourtant lui qui reprend l'initiative, et les coups suivant sont flous. Au moins l'un paré par le moustachu qui lui évite ce qui aurait été au mieux une vilaine estafilade, mais aurait pu se prouver bien pire. Le suivant heurte la lame du sudiste, et dans un tintement sourd de métal agressé, l'offensive bouillonnante du chevalier réformé est stoppée, réduite à un nouveau retrait.
Observation, de nouveau.
Quelques coups, un peu de pression, du mouvement.
Le couple tourne, danse tantôt rapproché, tantôt au loin. Dans le noir, les obstacles sont atténués, masqués, confus. Le Louvelle trébuche, un coup le cueille au mollet, le sang coule de nouveau.

De cette première mitan, le poitevin reste maître, alors qu'il bat en retraite pour laisser souffler le Louvelle... Et souffler lui même. A ce rythme, la fatigue pourrait venir plus vite que prévu. Faudrait-il héler l'adversaire, déjà bien entamé ?


"Eh, Salveo ! Faudra-t-il que je vous embroche pour que vous rendiez la main ?"


La pique est lancée.. Mais le gibier acculé est blessé est toujours plus dangereux lorsqu'il ne peut fuir. Et pour la première fois, le Poitevin s'autorise un regard à sa Rousse.
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Matalena
Les pommes, c'est bon. Ça se conserve longtemps, même depuis l'Anjou, dans un sac de voyage. Ça rassasie la faim et la soif en même temps. Non vraiment, les pommes c'est génial.

Comme c'est mignon, comme c'est touchant.
Parce que les qualificatifs d'héroïque ou valeureux sont réservés pour les vrais combats : une bonne vieille guerre par exemple, la défense de sa foi, et autres variétés du genre. Malgré sa robe actuelle de petite noblesse, il y avait une chose face à laquelle la rude réformée fronçait toujours le nez : l'esprit chevaleresque. Le truc inutile, tout de formes et d'apparat, par lequel de grands hommes aimaient s'écharper entre eux pour un mot de travers. Que de pertes pour le service de la couronne. Mais soit, on se défoule comme on peut après une longue période d'inertie.

Croquant dans sa pomme, et s'essuyant le menton sur sa manche. Quand on cherche un synonyme, on apprend que le nom latin de pomme c'est Malus pumila, très bien trouvé, la suite nous dira pourquoi.

A c't'heure, l'encapuchonnée se trouvait juchée sur son anglois de canasson, ses minces jambes dépassant tant bien que mal de chaque côté du massif poitrail. L'aspect pratique de la chose : bredouille en la cité, quelques commères l'avait dirigée vers le champ où, semble-t-il, tous ses compagnons avaient eu l'excellente idée de se regrouper. Une pierre, trois (disons quatre) coups, joli lancer. Repoussant sa pelisse sur la masse bouclée de sa mauresque chevelure, elle plissa les yeux jusqu'à distinguer ses potes en rang d'oignons, zieutant avec plus ou moins de drame aux coins des yeux le combat en court.

Finissant de ronger son fruit, elle jeta le trognon avant d'en tirer une autre de sa poche, l'essuyant sur le tissu de sa cuisse pour la faire briller. Claquant la langue contre son palais, la dame des Bassauges poussa son canasson vers la barrière et ses supporters, d'invisible se faisant inloupable, et de lancer un...


Ben alors, pauv'pomme, tu les laisses faire ? Ça t'amuses ?

Depuis son perchoir, vraisemblablement à l'attention de la rousse. Puis, un léger sourire aux encoignures, elle leva le bras et catapulta sa pomme de toutes ses forces en direction de la tempe du rouge. C'est dur, une pomme, surtout en cette saison.
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Musteile
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« Aimer, c'est acheter par le dédain par les pleurs, de farouches regards par des soupirs déchirants, la joie éphémère d'un moment par vingt nuits de veille, de fatigue et d'ennui.
En cas de conquête, votre triomphe peut être un malheur ; en cas d'échecs, une pénible souffrance est votre conquête.
À coup sûr, c'est la folie achetée au prix de la raison, ou c'est la raison vaincue par la folie. »
- William Shakespeare



Le cœur lui tambourine fort dans le creux de son sein, si violemment il se débat ce saignant là que ça lui fait mal et lui colle la tripe aux bords des lèvres.
Trop d’amants dans le même carré de champ.
Des futurs, des passés, des présents, des potentiels.
Des chimères sentimentales, des moments d’égarements, des possibilités d’un soir ou plus et même ceux dont le lien est si fort que le charnel en est subsidiaire.

Les lèvres se pincent, le Rouge se fait observer sans ambages du haut de sa complexe contrariété de mustélidé, elle opine que le combat est loin de l’équité. Pour avoir vu la bête tirer l’épée à la chaude, elle le sait expert dans l’art de manier le fer. Implacable dans son geste. Le Louvelle quant à lui fraichement remis de ses intempéries et dolences, elle n’est pas assurée de la vaillance de son bras et ne l’a jamais vu défourailler.
La fauve œillade se baille tendre sur l’occitan fraichement arrivé en meute de loup, de l’or terni et du sombre pour couronner ces têtes-là.
Les pupilles en velours s’exilent jusqu’aux siennes, épousant l’homme d’un regard qu’elle n’offre guère aux autres.
Elle est son coquelicot. Il est son cueilleur.

A l’Irlandais paré de nonchalance, elle donne du museau hermétique, resserrant son bras sur Humbert.
Le fer ne tardera pas à se croiser, et il n’est plus l’heure de s’appesantir sur des désirs coupables.


« Seigneur ! Fais miséricorde à mon âme, plaise à toi que je n’en perde aucun… »

Vaines folies qui s’animent sous les yeux de la muse à la belligérance, froissement des lames qui strie l’obscurité encore chicaneuse de sons aigus.
Premier sang pour le Louvelle et premier frisson pour la Bertrix qui malgré l’impavide image de sa face sent de tous ses muscles tressaillir, le palpitant à la cogne dans la cage glacée.
Le bras se raffermit et devient étau pour le pauvre huguenot. Dieu que ce duel lui déplait, perdre l’un ou l’autre la met dans la situation de crainte lui prouante son humaine condition, celle de céder aux sentiments et tentations.
Accalmie. Regards des rouges qui se tâtent avant qu’une voix connue ne dérange un coquelicot planté dans un champ d’hommes.


« Toujours à faire des entrées remarquées à c’que je vois ! Ferme donc voir ton sottisier… »

Le ton est cassant, Belette est déjà assez dans les emmerdes comme ça sans que ne vienne se poser sur cette affaire l’œil sévère de son austère pasteur.
Puis une pomme s’en mêla, dieu qu’elles volent bas cette année.
C’est sournois comme fruit, moi j’vous l’dis.


« … et arrête de jouer avec la bouffe, c’est péché Tudieu ! »

Hausse une épaule et lui offre un accueil d'humeur froidureuse.

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