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Découverte d'une soeur.

[RP] Deux femmes et un tonneau

Caitriona
[Suite de ''Herboristerie aux mille plantes'', plus tard le même jour]

Le reste du trajet jusqu'à la petite maison des nouveaux parents se fit en silence. Sans doute chacune redoutait de trouver un cadavre dans la couche de paille... Lorsque Caitríona poussa la porte, elle eut un mouvement de recul. L'odeur était écoeurante: la pièce surchauffée rendait l'air humide et lourd d'une odeur de sueur mêlée à celle, plus âcre, du sang qui commençait à cailler. Le père était assis sur un banc dans l'unique pièce de l'habitation, l'enfant dans les bras. Sans doute que ce petit être se retrouverait sur le parvis d'une église dans les heures qui allaient suivre.

-Grâce au Très-Haut! Catherine, vous avez amené votre soeur avec vous! Constance n'arrête pas de saigner, elle ne répond pas quand je lui parle... Faites quelque chose!


L'interpellée allait clarifier et expliquer que son accompagnatrice était en fait une inconnue qui avait eu la générosité venir l'aider alors qu'elle ne savait plus que faire. Mais un regard en direction de la jeune mère l'empêcha de répondre. Elle alla plutôt directement à son chevet.

L'épouse, le teint gris, était allongée sur le paillasse. L'image qu'elle rendait était celle d'un pantin désarticulé, avec ses jambes toujours écartées et son regard fixe. On ne l'avait pas lavée, pas plus qu'on avait remplacé les linges souillés servant à absorber le sang qui s'écoulait depuis la fin de la délivrance.

Elle respirait toujours, mais était brûlante. Elle avait presque cessé de saigner cependant. Mais rien ne laissait voir que la poche avait été expulsée.

Le regard inquiet de la sage-femme en herbe se tourna vers celui de l'autre rousse.


- Que faire? Lui donner du romarin? Cela la ferait saigner à nouveau et encore beaucoup plus qu'avant. Lui redonner du lait de pavot? Faire venir un prêtre?

Coup d'oeil rapide en direction du mari.

-Tu veux aller quérir le curé?

[...]

Le soleil avait disparu derrière l'horizon. La ville de Paris s'endormait tranquillement.

Les deux jeunes femmes avaient quitté le domicile du couple à l'arrivée du prêtre. Il n'y avait plus rien à faire pour la pauvre femme, sauf recommander son âme au Très-Haut. Le jeune homme, trop jeune pour être veuf, avait quand même tenu à payer. Quelques écus et un lièvre. Il n'avait pas versé une larme. Après tout, la mort était quelque chose de familier. Chacun ou presque avait perdu une mère, un père, un frère ou une soeur. Constance était jeune, petite et malingre. Elle veillerait sur son enfant du haut du Paradis Solaire.

En sortant de la maisonnette, Caitríona s'adossa à un mur quelques instants pour reprendre ses esprits. La mort, quoique fréquente dans son métier, la troublait toujours.

Elle secoua ses tresses et offrit un sourire à sa compagne.


-Tu viens? Tha feum agam air deoch.*

Et elle se remit à trotter, remontant la venelle en direction de l'auberge dans laquelle elle logeait depuis son arrivée à Paris. Dans la salle enfumée où quelques piliers de comptoir buvaient joyeusement, l'Écossaise repéra une table dans un coin près de l'âtre. Elle y entraîna la NicDouggal.

_____
*J'ai besoin d'un verre.
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Syuzanna.
L'état de la pauvre mère arrache une grimace à l'Ecossaise. Ses yeux vitreux n'accueillent déjà plus la lumière de la vie. Combien de temps lui reste-t-il ? Une, deux heures ? Impuissante - et détestant l'être - Syu ne peut que se ranger à l'avis de sa consoeur herboriste. Un prêtre... Même si elle eut volontiers préféré recommander son âme aux dieux, pour sa part. Ce qu'elle fait en silence, avant de sortir de la maisonnette. Nul doute que l'enfant suivra le même chemin que sa mère. L'homme sera ainsi libre de contrainte, et elle ne lui donne pas une saison pour se trouver une nouvelle épouse, plus robuste, toute prête à lui donner une nombreuse progéniture.

L'instant de silence, une fois à l'extérieur, lui donne l'occasion de contempler la capitale. La lente descente du Soleil a chassé les parisiens des ruelles, leur faisant préférer le confort de leur demeure ou l'animation des tavernes.
A l'invite de la rousse à ses côtés, Syu ne peut qu'hocher la tête. Voir les gens mourir n'est pas un spectacle nouveau pour elle, loin de là. Mais voir une femme rendre l'âme en donnant la vie, c'est bien autre chose que voir un ennemi tomber sur le champ de bataille. Et cela ne peut que la renvoyer à la fin de sa propre mère. Avait-elle été ainsi durant les trois jours suivants la naissance de sa fille ?

- 'S toigh *, répond-t-elle enfin en la suivant dans le dédale des rues de Paris, puis, à l'auberge choisie par sa compagne.

L'endroit est riant, chaleureux. Le contraire parfait de celui qu'elle vient de quitter. De quoi chasser de son esprit le spectacle auquel elle vient d'assister. Levant une main, elle commande, non sans hurler pour se faire entendre, deux bières agrémentées de scotch whisky. Les mélanges n'ont pas que du mauvais, et plus c'est fort, plus ça a de chance de lui plaire.
Prenant place en face de Caitríona, Syu, calant un talon sur un barreau de sa chaise, observe l'inconnue aux traits pourtant étrangement familiers. Qu'est-ce qui peut bien ammener une Ecossaise dans ces contrées éloignées ? Sans être bannie de ses terres, bien entendu...


- Alors, dis-moi... Qu'est-ce qui t'ammène dans ce pays ?

* Avec plaisir
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Caitriona
À peine le premier godet eut-il été commandé que déjà son interlocutrice la questionnait. Question triviale bien sûr, sans doute qu'aucune arrière pensée était dissimulée derrière cette interrogation. La jeune femme prit une gorgée de bière puis marqua une pause, le temps de mettre de l'ordre dans ses pensées. Pourquoi avait-elle quitté sa lande natale pour s'expatrier chez les Francs? Elle aurait pu mentir, dire qu'elle était là pour s'installer, qu'elle avait été engagée par un seigneur qui l'avait congédiée peu de temps au par-avant, mais à quoi bon?

-Hé bien... Ma famille était plutôt fortunée.

Elle appuya bien sur le mot était.

-Pendant trois ans mon père m'a envoyée comme pensionnaire dans un couvent d'Orléans. C'est d'ailleurs là-bas que j'ai appris le français.

Pour expliquer convenablement les raisons de sa présence ici, il lui fallait faire le récit de sa vie. Chose qui était plutôt ennuyeuse pour quiconque l'entendrait. L'égocentrisme ne figurait pas au haut de la liste de ses multiples défaut. La rouquine poursuivit néanmoins après avoir pris une autre gorgée.

-Finalement l'on me ramena en Écosse, ma famille n'ayant plus les moyens de payer pour mon entretiens là-bas. L'hiver de 58 avait été rude, et une bonne partie du bétail était mort. Une bonne partie de notre fortune avec lui. C'était sans parler de la laine qui était de mauvaise qualité, alors elle fut vendue à un prix ridicule. Lorsque je suis revenue, je me souviens qu'il faisait très froid dans la maison. Qu'elle était fort vide aussi. La tourbe ne brûlait que la nuit, l'eau gelait quand même dans les brocs et la plupart des domestiques avaient été congédiés.

Les sourcils se froncèrent légèrement. La suite de l'histoire était plutôt rocambolesque et Caitríona se doutait que la jeune femme croirait qu'elle avait inventé quelques éléments.

- Alors que j'étais incapable de m'endormir à cause du froid, j'ai surpris une discussion entre mes parents. Mon père n'était pas mon vrai père. J'avais, parait-il, été engendrée par un MacDouggal. Le chef de leur clan, selon ce que j'appris.

Elle expliqua que son père lui avait ordonnée de se rendre au castel et de demander des comptes à celui qui avait engrossé sa mère. Elle devrait se dire indigente, sans protection paternelle. Supplier pour avoir un peu de pitié.

-Mais j'ignorais qu'il y avait eu une guerre de succession, ou quelque chose de semblable. C'est courant chez nous, les guerres intestines n'est-ce pas? Lorsque je me montrai devant lui, il s'offusqua d'abord d'être confondu avec heum...

Légère hésitation sur le prénom. Syuzanna ne lui avait-elle pas dit que son propre père se nommait ainsi?

-William. Enfin, l'ancien chef. Mais il se montra clément. Sans enfant et encore le pouvoir fragile il me prit comme pupille. Délestant mes parents d'une charge plutôt lourde qu'est celle d'une pucelle à marier. Il me maria d'ailleurs quelques semaines plus tard à l'un de ses lairds lorsque ce dernier se montra un peu trop indépendant. J'ai eu de la chance, mon mari était un homme bon. Ou du moins, meilleur que certains. Il mourût lors d'une bataille quelques mois après notre union, me laissant la totalité de ses biens. C'est en vendant le domaine que j'ai pu m'embarquer pour le royaume de France. La traversée n'est pas donnée...

La chope de bière est vidée d'une traite puis la main menue vient enserrer le gobelet de whiskey.

-Au castel, on me parlait parfois d'une jeune fille. Si c'est vraiment avec William que ma mère -Aristote ait son âme- a forniqué, nous sommes parentes. Un destin tragique qu'a eu cette pauvre créature. Chassée par l'usurpateur, elle a disparu. D'aucun disent qu'elle s'est expatriée en France.

Un léger sourire.

-C'est un peu idiot, n'est-ce pas? Je ne me souvient plus de son prénom... Mais puisque je connais son existence ainsi que le nom de son clan, je me dis que peut-être un jour je tomberai dessus. Peut-être est-elle morte, qui sait? Toujours est-il que la vie sur les routes m'enchante. Alors je crois bien rester ici quelques temps.

Un signe est fait à une fille de salle.

-Même chose.

Et elle montra deux doigts, signifiant de les resservir toutes deux.

-Et puis j'aimerais pouvoir découvrir la France autrement que depuis les murs épais d'un couvent. Ils sont drôles les Francs, avec leur parler bien à eux, distinct dans chaque région.

Le godet de whiskey est vidé alors qu'il venait tout juste d'être posé sur la table. Caitríona s'essuya les lèvres du revers de la manche.

-Pas aussi bon que celui fait dans ma vallée, mais pas mauvais! Mais je parle, je parle et toi, qu'est-ce qui t'amène par ici? C'est un long périple que de descendre des hautes terres jusque chez les Angles pour ensuite s'embarquer en direction de la France. Tu devais avoir une bonne raison.


Elle regardait Syuzanna par-dessus son verre. Étrange coïncidence de trouver quelqu'un qui parle sa langue et qui partage des traits communs.

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Syuzanna.
Elle l'écoute attentivement, sirotant sa bière améliorée. Entendre parler de l'Ecosse par une compatriote est tellement plaisant, songe-t-elle. Les vertes vallées, les lacs glacés, l'air frais fouettant le visage... Et cette sensation de liberté, malgré les contraintes, qu'elle avait perdu en arrivant en France...
Puis aux descriptions de quasi dénument dans laquelle vivait sa famille, succède autre chose. L'autre chose. Le nom.
Il semble que le reste du monde se soit effacer. Les bruits lui paraissent comme étouffés. Un léger bourdonnement, agaçant de surcroit. Sa mâchoire tombe, et pour un peu, on aurait pu entendre les mandibules grincer. William MacDouggal ? Mais c'est son... Non, non, il lui faut réfléchir. Pourtant, la jeune femme avait bien précisé qu'il s'agissait du Chef de Clan. Et son propre Oncle lui avait bien raconté quelque chose comme ça. Un soir de beuverie... Sans conséquence, avait-il ajouté. Sans conséquence ? C'était bien un homme, ça, encore !
D'un trait, elle descend le reste de sa chope, et cul sec, elle fait subir le même sort à sa jumelle qui arrive sur la table. Réfléchir, réfléchir... Mais il est un temps pour penser et un autre pour parler. Et le second est venu.


- Comme je te l'ai dit, William MacDouggal était mon père. Et il était Chef de Clan.

Elle s'interompt, consciente que les prochains mots vont probablement changer sa vie, et celle de Caitríona, à jamais.

- Père a eu... Une très brève, et unique aventure, alors que j'avais deux ans. En 1442. C'est Aonghas, le frère de Mère, qui m'a dit cela, un soir...

Même si à l'époque, il avait employé les mots « petite déception mais rien de fâcheux », pour décrire les ébats de son beau-frère. Mais pas de précipitation ! Il y a peut-être un autre Chef de Clan nommé William MacDouggal ? Très, très, très peu probable... Mais tout de même, songe-t-elle. D'abord s'assurer, avant de s'emballer.

- Je m'appelle Syuzanna NicDouggal, fille de William Douggal, Chef du Clan MacDouggal. Mon père fut trahi par le frère de feue son épouse ma mère, et il perdit la vie en Août 1458. J'ai été banni par le nouveau Chef. Et je me suis réfugiée en France, par hasard, parce qu'un bateau partait là-bas.

Elle la regarde, suit le contour de sa mâchoire des yeux, explore chacun de ses traits.

- Quelle est... Quelle est ton année de naissance, Caitríona ?
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Caitriona
Les verres vides s'alignaient, s'empilaient, étaient lancés par dessus l'épaule, se retrouvaient sur le sol aux planches mal jointes. Caitríona avait parlé un peu trop longtemps à son goût, reprenant son souffle de temps à autres, prenant parfois de courtes pauses pour rassembler ses souvenirs et formuler ses pensées. Elle avait beaucoup parlé parce qu'il lui était évidemment plus facile de s'exprimer dans sa langue maternelle. Et c'est avec un plaisir non dissimulé qu'elle écouta son interlocutrice lui répondre.

Les mots qu'elle entendait prirent soudain tout leur sens. Ce n'était plus seulement un enchaînement de sons agréables pour l'oreille. Le père de sa compagne avait eu une aventure avec une jeune femme, il y avait une quinzaine d'années de cela.

«Bah... Il n'y a pas de raison d'en faire tout une histoire. Un homme a ses besoins. Quand une poule se trouve au bon endroit au bon moment c'est ce qui se passe. Voilà tout.» Songea-t-elle.

Puis, Syuzanna lui expliqua brièvement l'histoire de la succession. William trahi puis occis. Son oncle qui occupait maintenant la place de chef.

L'idée ne fit pas tout de suite son chemin dans l'esprit fatigué et légèrement ralenti par l'alcool ingéré, elle répondit machinalement à la dernière question.

-Décembre 42. Pourquoi?

Les sourcils cuivrés se haussèrent et elle se leva pour aller au comptoir. Diversion pour prendre le temps d'assimiler l'information. La jeune femme avait presque oublié qu'elle cherchait quelqu'un. L'idée que cet individu puisse être assis là, à quelques pas d'elle... Peut-être était-ce une coïncidence. Il y avait tellement d'Alasdair MacDonald, de Ranall MacClerggy et de William MacDouggal... Mais un hasard aussi parfait?

Caitr­iona retourna à la table avec une cruche de grès pesante dans les mains. Elle adressa un léger sourire à sa compagne, observant ses traits l'air de rien. Les cheveux, la forme du visage... Sans être frappante, la ressemblance était pourtant là.

La petite rousse reprit place en face de l'autre, posant la cruche entre elles.

-Que fait-on maintenant?

La situation était étrange, un peu inconfortable. Et la jeune femme était ravie qu'en ce moment personne ne pouvait saisir le sujet de leur conversation.

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Syuzanna.
Décembre 1442. Cette histoire commence à devenir improbable. Sans conséquence avait bien dit son Oncle. Cela implique-t-il la naissance d'une fille, sa prétendue absence de conséquence ? Elle serre les poings sous la table, sentant monter une vague de fureur. Sans conséquence.
Réouvrant les paupières, elle détaille sans plus se gêner, la jeune femme en face d'elle. La forme du visage, la courbure du nez, l'ourlure des lèvres... Mais quelles sont réellement les chances de se trouver une demi-soeur au croisement d'une rue parisienne ? La probabilité qu'elle pousse la porte de la même herboristerie ? La France est si grande ! Le monde est si vaste ! Cela semble impossible. Impossible. Et pourtant. Les dates concordent. La ressemblance est là. Même les noms sont les mêmes.

Que fait-on maintenant ? Excellente question. Se regarder dans le blanc des yeux ne mènera pas bien loin. Se séparer comme ça est inenvisageable.
Une soeur. Qu'est-ce qu'une soeur ? Une amie à jamais avec soi. Une oreille, un coeur, et une foule de conseils. Des éclats de rire, des cris de colère. Une partie de soi que l'on découvre peu à peu. Une présence féminine, pour elle qui ne sait pas vraiment ce que c'est.
Que fait-on maintenant ? Il lui faut répondre à cette question.


- Je... N'en ai aucune idée.

Se passant une main sur le visage, elle reprend.

- Si mon père... Si mon père est également le tien...

Le prononcer à voix haute à quelque chose de surréaliste. De fou, d'improbable. Mauvais rêve ou cauchemar merveilleux ?

- Nous devrions sans doute... Apprendre à nous connaître ?

Elle agite la main, canalisant ainsi son agitation intérieure. Une soeur ? Discrètement elle se pince l'intérieur du bras, s'assurant de la réalité de ce qu'elle est en train de vivre.

- Peut-être pourrais-tu venir chez moi ? Ou moi chez toi ?

Toute à son incrédulité, elle parle sans trop réfléchir. Elle ne sait pas encore si le fait qu'elle ait très probablement une soeur la réjouit ou non. Elle n'arrive pas très bien à réaliser.

- Que... Que veux-tu faire, toi ?
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Caitriona
Des rebondissements dignes d'un théâtre d'été. Il ne manquerait plus que la mère de Caitriona ait donné le jour à un jumeau caché et ce serait le point culminant du ridicule. Retrouver une soeur dans le fond d'une venelle boueuse de la capitale française était plus qu'improbable. À croire qu'Aristote s'ennuyait cette journée là et avait décidé de se divertir un peu en manipulant le destin des deux rouquines.

La plus jeune des deux était maintenant absorbée dans quelque réflexion. Unique enfant de la maisonnée, elle ignorait comment se comporter avec un frère ou une soeur. S'entendraient-elles? Et puis que feraient-elles? De brèves salutations et chacune repartirait vivre de son côté? Improbable.

-Apprendre à nous connaître, oui.

Le débit s'accéléra.

-Déjà, nous partageons le même intérêt pour le scotch. Rassurant. Et puis, et puis... Ha oui, les herbes, et et voilà.

C'était tout ce qu'elle connaissait de sa soeur pour l'instant. Une passion pour l'alcool et une connaissance sommaire des herbes médicinales. C'était mieux que rien... Du temps, il leur faudrait du temps. Machinalement, elle répondit à la question.

-Ma petite maison poitevine n'est pas très confortable... Et trop petite pour loger plus d'une personne.

La cruche de bière est inclinée au dessus d'un des godets, le remplissant à nouveau.

-Peut-être que... Enfin, peut-être que je pourrais te visiter. Histoire d'apprendre à nous connaître... Et j'ai quelque chose qui t'appartient, je crois.

En effet, bien enterré dans son potager se trouvait une petite cassette de bois travaillé renfermant divers objets. Des broches, des bagues et une somme plutôt rondelette dans une bourse de cuir. Il s'agissait là d'une partie des objets que lui avait laissé son tuteur. Lorsque Caitriona s'était découvert une soeur et surtout lorsqu'elle avait appris la façon avec laquelle celle-ci avait été traitée, elle s'était promis de la retrouver et de lui remettre -en partie du moins- l'héritage dont on l'avait privée. À défaut d'avoir une terre, au moins elle aurait quelques souvenirs de leur terre natale. Naïve jeunesse... Et si elle ne l'avait pas retrouvée? Sans doute le contenu de la cassette eut été dépensé.

-Je heum, j'habite à Niort pour le moment... Et je demeure à ta disposition, si tu as besoin de quoi que ce soit...

Une ébauche de sourire se forme et une nouvelle gorgée de bière forte est avalée.

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Syuzanna.
Et Syu de pousser un profond, très profond soupir de soulagement. Apprendre à se connaître. Oui, c'est décidément la meilleure des choses à faire. Comme elle, Caitríona sait-elle se battre ? Aime-t-elle chasser ? A-t-elle hérité du caractère fort des MacDouggal ? Aime t'elle les chevaux ? Est-elle têtue, franche, directe ? Abhorre-t-elle le mensonge, comme elle, et son père avant elle ? Quelle fut son enfance ? Mais toutes ces questions trouveront réponses plus tard. Pour l'instant il faut prévoir où se retrouver.

- Eh bien... Ma maison, sans être immense, peut largement t'accueillir. Il y a une partie réservée à l'herboristerie.

Et la seconde suivante, elle repousse les chopes vides, décale la cruche, et étale sur la table une carte du pays.

- Niort... Voilà. Ce n'est qu'à six jours de Sarlat.

Elle relève le nez, les index posés sur les deux villes. La suite ? Elle coule toute seule. Si elle est sa soeur, ce qui devient de plus en plus probable - et la question de savoir combien elle a de frères et de soeurs se balladant dans la nature n'est pas sans l'effleurer - elle doit être présente.

- Je te propose de venir à Sarlat, avant le 20 août. Pourquoi cette date ? Parce que c'est celui de mes épousailles. Et si tu ne trouves pas cela un peu rapide, je serai ravie de te compter avec moi. Si tu le veux, je pourrai venir te chercher disons... Au début du mois d'août, à mi-chemin. A Angoulême par exemple.

Quand elle est lancée, difficile de l'arrêter. Et si elle se plonge d'ors et déjà dans l'organisation d'une possible escorte, c'est plus pour éviter de penser au fait incroyable qu'elle se trouve soudain dotée d'une soeur, que pour le plaisir de tout plannifier.
Relevant le nez, soudain gênée de se lancer dans une telle entreprise sans même avoir consulté sa cadette.


- Enfin, je propose. A toi de voir ce que tu désires faire. Ou ne pas faire.

Un léger sourire accompagne cette remarque, avant qu'elle n'avale cul-sec, une énième chope.
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Caitriona


La tête commençait à lui tourner et la chaleur lui envahissait le corps en entier. Le discours se faisait plus lent, plus décousu, moins compréhensible. L'ivresse s'était emparée de la jeune femme qui affichait désormais un sourire niais, accentuant ses fossettes.

-Je suis... RA-VIE que nous nous entendions pour nous revoir. Franchement enchantée. Sarlat, dis-tu? Hum... Je heu, je pourrais m'y rendre, ouaip.

La main blanche se tend pour attraper un godet et le remplir à nouveau.

-Cela dit, j'préfère pâs voyâger toute, toute , toute seule. Héhé. Je sais me défendre hein!

Elle se leva et prit une position défensive, prêter à taper le bandit imaginaire.

-Mais!

Elle se rassit.

-J'suis qu'une faible femme! Si cela te convient, peut-être pourrais-tu me rejoindre à Niort? Je pourrais te loger une journée et nous reprendrons la route après...


Quelques instants plus tard, un message fit son chemin dans le brouillard de son esprit plus que ralenti maintenant par le nombre incalculable de chopines avalées. Une noce? Elle hocha frénétiquement la tête.


-Oui, bien sûr que je viens. Cela me ferait grand plaisir, oui !

Le sourire s'élargit puis la rouquine héla pour qu'on leur serve à nouveau à boire, manquant de tomber alors qu'elle se retournait pour faire un signe à une des filles de salle.

-Fille, à boire! Allez, plus vite que ça!

De nouveau son attention se porte sur sa soeur.

-Ma chère je viens de noter une différence majeure entre toi et moi. Tu te tiens droite comme un i, avec un flegme tout britannique alors que nous avons bu la même quantité... Moi, je commence à être un tout petit petit peu, imbibée! 'Ai besoin d'entraînement! Héhé... Mais, mais plus sérieusement. Quand nous retrouvons-nous?


[Cheffe Aldraien
Retrait du HRP, cf Règles d'Or. Bon jeu.]

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Syuzanna.
A la dernière remarque de Caitríona, la rousse ne peut s'empêcher d'éclater de rire. Un rire sonnant étrange. Un peu trop lent peut-être ? L'effet de l'alcool se fait enfin sentir. Le choc de découvrir qu'elle a une soeur l'a comme qui dirait rendu insensible momentanément aux dommages de la bière améliorée. Mais la pression vient de se relâcher, et les brumes agréables de l'ivresse lui emplissent l'esprit.

- Pour sûr que je viendrais te chercher, lance-t-elle en souriant largement.

Réfléchissant, ou plutôt, tentant de réfléchir, elle parvient néanmoins à fixer suffisament son esprit pour répondre clairement :

- Je partirai le 6 du mois d'août. J'irai à cheval, pour aller plus vite. Nous arriverons le 15 à Sarlat. Cela te va-t-il ?

Sa soeur. Elle n'en revient toujours pas. S'enfilant un... un combientième de verre ? elle n'en a aucune idée !, elle contemple Caitríona. Son opulente chevelure rousse, comme la sienne. Une soeur. Que fait-on avec une soeur ? Sait-elle chasser ? Si elle ignore cet art, elle pourra le lui enseigner. Et tant d'autres choses à partager ! De savoir à l'échanger ! De moments futurs à imaginer ! De discussions passionnées ! De fûts à vider !
Une soeur. L'histoire de leur père à lui raconter. L'histoire d'une vie. Elle lui décoche un sourire en coin.


- Attends ma venue aux premières lueurs du dixième jour. A l'aube, regarde à l'est. *

Hochant gravement la tête, elle s'empare de sa chope de nouveau pleine - par quel miracle ? - et bascule la tête en arrière, avalant une large lampée.



* "Attendez ma venue aux premières lueurs du 5e jour. À l’aube, regardez à l’est." - Le Seigneur des Anneaux : Les Deux Tours. {Gandalf}

[Cheffe Aldraien
Idem qu'au dessus. Bon jeu.]

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