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[RP] Personne ne m'attaque impunément !

Eusaias
Bourgogne, Seignelay plus précisément.


Les cervidés logeant dans les bois entourant Seignelay furent très tôt le matin troublés dans leur quiétude. Une lance complète de bourguignons aux couleurs sang et noir se mouvait dans la forêt. L’homme de tête était à cheval et en armure complète. Le bec de passereau était relevé afin que le visage du rapace bourguignon puisse respirer plus facilement sous le bassinet. Chevauchant derrière lui se tenait un porte-étendard montrant bien haut Salamandre et Corbeau, l’épée au flanc. Plus en arrière venait deux lanciers qui eux étaient à pied et accompagnés de trois archers, tous aux couleurs des Blanc Combaz et Saint Just.

Arrivant non loin des grilles de Seignelay le Balbuzard leva le bras pour faire arrêter sa troupe. Le soleil pointait à peine son nez quand l’étendard tonna dans son cor.


Archers en rang, arc au poing, préparez flèches !

Le Seigneur de guerre se redressa sur son cheval.

Lancier deux pas en avant. Au moindre mouvement agressif percez de vos lances tous nos ennemis.

D’un geste impétueux il fit tonner une seconde fois afin de s’assurer que tout Seignelay sache qu’il était là. La bécasse bretonne devait savoir impérativement qu’il ne plaisantait pas et que son époux était cherché dans toute la région pour être battu à mort.

Le bourguignon talonna son destrier et suivi de son écuyer il se mit aux portes du domaine. Non, il ne venait pas donner l’assaut avec une poignée d’homme, mais délivrer un message à sa demi-captive.
_________________
Blanche_
C'était quoi ce bruit ?

Non pas qu'elle soit lève-tard, il était tout de même très tôt. Et la veille elle s'était couchée tard. Voire tôt. Ce qu'elle finirait par payer tôt ou tard. Même tôt.
Elles avaient beaucoup parlé avec Della, et Dieu savait à quel point elles en avaient besoin. Blanche, en tous cas, en avait réellement besoin. Le contact de la duchesse lui manquait.

C'était quoi ce bruit ?
Silence.
Haletante, sa respiration aurait eu de quoi la faire sourire ; si elle n'était pas prise, instinctivement, par une espèce de sursaut plein de peur et d'adrénaline. Comme une bête épiée. La nature la replongeait, par le bruit d'un cor, le bruit d'une petite troupe d'hommes en avancement, en plein cœur de cette situation où elle, proie, ne daignait trop être mise. Comme une bête épiée, traquée, surveillée, poursuivie...
Elle se redressa, auparavant penchée et occupée à la rédaction d'une lettre pour son mari. Le souffle court, gorge rafraichie par le petit matin - mais néanmoins rouge de cette indisposition, elle attendit. Le sang battait à ses tempes ainsi que l'agacement. Elle gronda. Et, dans la silencieuse chambre, les secondes s’égrainèrent doucement. J'ai peut être rêvé. J'ai peut être rêvé... Elle avait rêvé, rien ne venait. Ni cris, ni boulets de canon -n'avait-il pas dit, guerre?- ni hurlement, ni quoi que ce soit, allons, elle avait rêvé. C'était tant mieux.
Soupir satisfait, une vague inquiétude.
Avait-elle aussi rêvé les évènements de la veille? Lorsque, dans l'après-midi, tout avait été à ce point vite, et s'était enchainé? Avait-elle rêvé?
C'était vanité de se croire au centre de ce monde-là.

Le cor sonna une seconde fois.
Et, l'effroi la prenant, dans cette chambre où elle pouvait se permettre de ne plus être aussi digne, devenant plus rouge que la colère et la fureur réunie, mais de peur animée, elle se releva brusquement, plongeant la plume avec maladresse dans l'encrier.
Elle tâcha le vélin, ainsi que le bout de ses doigts.

C'était la défection.
Sur la table, s'imbibant d'encre noire, les mots à Astaroth disparaissaient. "Faites attention..." En ultime et unique supplique. On ne savait pas ce dont Eusaias était capable, on ne savait pas pourquoi il le faisait non plus, ni avec qui, quand, combien de temps, on n'était même plus sûre exactement de la véracité des dires de la veille, car enfin, il aurait pu mentir ce souvenir, et n'être que totalement faux?
Tout cela ne reposait que sur un énorme quiproquo. Elle avait rêvé la moitié des mots, quasiment avec certitude, pourquoi tout ce tapage, on ne chasse pas au petit matin, si?!

Elle sortit de sa chambre après s'être assurée que son apparence ne trahirait rien.
Mais, au creux de son ventre où les doigts avaient griffé dans l'angoisse, gisait les empreintes fébriles de ses deux doigts.
Noires. Comme un tablier.
Elle descendit avec lenteur les marches de l'escalier. Elle avait un peu peur.
Une brise aurait suffi à la faire s'envoler.


C'était quoi ce bruit?

_________________
Della
Kéri ? Hmmm...les vendanges ne sont pas encore terminées, vous n'allez pas chasser aujourd'hui et risquer de gâcher une partie des récoltes !?
Faites taire ce cor et renvoyez vos chasseurs !
Grumph.


C'est sur un "grumph" que la Bourguignonne se retourna, tirant bien fort la couverture sur elle, jusqu'aux oreilles, maudissant silencieusement les idées saugrenues de son époux.

Oh et puisque vous serez debout, descendez donc aux cuisines et dites qu'on m'apporte à manger, j'ai faim.
Un sourire béat sur les lèvres, la Duchesse repartait déjà dans son rêve lorsque le cor sonna à nouveau.

Rhooo ! Rhaaaaaaaaa ! Kéri, faites quelque chose !
Agacée, cette fois, elle s'était assise au milieu de la couche et en soupirant, elle rejeta la chaude couverture pour se lever, et en chemise, se diriger vers la fenêtre.
Le nez passé entre les étoffes, elle plissa un peu les yeux pour mieux voir ce qu'il se passait sous ses fenêtres, au pied des dix-sept tours de Seignelay.
Ne voyant justement rien du tout à cause des cursives, elle ouvrit la fenêtre et avança sur le balcon où elle se pencha légèrement, tenant le mieux qu'elle pouvait sa chemise fermée autour de son cou.
Il fallut quelques minutes et plusieurs battements de cils pour qu'elle reconnaisse les étendards.
Mais qu'est-ce qu'il fiche ? Pensa-t-elle alors. Cet homme est fou ?

Le vent mêlait ses cheveux déjà bien embrouillés par la nuit et elle avait froid.
Très contrariée, elle s'adressa à Eusaias.


Holà mon ami !
Es-tu devenu follet ?
Tu veux donner l'assaut à Seignelay ?
M'enfin, tu sais bien que tu y es le bienvenu...pas besoin de sortir les armes !

Allez...je fais descendre le pont levis et on mange un bout.
C'est que j'ai faim, moi !

_________________

- Et vot'blason, Duchesse ?
- J'sais pas, demandez à mon époux.
Keridil
Vous m'faites...

La suite fut étouffée par l'arrachage de couverture. Dieu qu'il dormait comme un bébé Keri Keri, loin des soucis, dans la cambrousse bourguignonne, avec Della chérie portant la vie et Clément adoré gazouillant quelques pièces plus loin. Des vacances : il n'aspirait plus qu'à la paix. Et bon sang il avait fallu qu'on le réveille.
C'est Della qui avait réveillé son époux, ronchonne et mauvaise langue. Le cor, lui, s'était contenté de l'empêcher de se rendormir, jusqu'à ce que la Baronne de Seignelay se mette à râler de plus belle. Alors, considérant qu'il était trop tard pour estimer pouvoir dormir tranquille, Chartres imita sa femme, se relevant au milieu de la couche et soupirant.

Quoi ? Quoi et quoi ? Je ronfle ? J'y peux rien ! Rolahooo !

Il allait se recoucher quand elle se mit à hurler à la fenêtre. Matinée à la con. Il y a des jours sans, celui là commençait vachement bien. Du coup, l'Amahir se lève, les yeux encore dans le vague, se grattant le bas du dos, et baillant au corneille.

Décidément, vous faites ch...

Cette fois, ce ne fut pas la couverture qui étouffa la vulgaire suite, ce fut la vue d'une troupe amassée au bas des tours. Et fichtre qu'il fait froid, en chemise, sur un balcon perché.
Soupir et re-soupir.

Non mais non.
Bouillon ça suffit maintenant ! Vous allez pas assiéger toutes les forteresses où j'ai plaisir à dormir ! Allez vous coucher aussi, il est tard ! Tôt !

Puis il avisa Della d'un air blasé.

Non mais c'est vrai quoi.

Puis s'en alla se cacher sous la lourde couverture du lit conjugal.

Vous me ramènerez des restes, tiens.

Pas fou, il avait bien entendu qu'il s'allait agir de manger, de même qu'il avait bien compris qu'Eusaias devant Seignelay n'était qu'une foutue boutade. De mauvais goût, toutefois.
_________________
Jeune retraité.
Eusaias
Quelqu’un là haut ! Donne de la voie crétin !

Avait-il grogné à son porte-étendard. Pour accentuer le tout il avait tiré son épée et assené un coup du plat de la lame sur le casque de l’homme. Le Bourguignon avait le faciès d’un rapace mais bien l’emportement et la férocité d’un lion. Colérique à souhait il avait donné un second coup sur la ferraille de son homme qui cherchait ses mots.

L’homme décontenancé d’être dans l’œil de la tempête qu’était le bourguignon se lança :


Par ordre du roi Blanc Combaz, nous déclarons la chasse au Marquis Gondomar ouverte. Le puissant royaume de Bouillon, le comté du Lavedan, les vicomtés de Digoine et Bapaume, les baronnies de Desvres et de Mâlain, La seigneurie de Seuri déclarent sur ordre du roi la guerre au marquisat de Gondomar !

Il avala sa salive et reprit :

Si d’ici trois jours, la marquise n’a pas fait amende honorable et ne s’est pas constituée prisonnière auprès du puissant et hardi roi de Bouillon, guerre sera menée contre la Castille.

Un troisième coup d’épée stoppa l’homme dans sa tirade.

Abruti et pourquoi n’irions nous pas non plus attaquer le Portugal et l’Aragon pendant que tu y es ? En plus c’est Della, crétin !

Et au Balbuzard de se dresser sur les étriers :

Je suis ni fol ni dément ! Je ne suis point en guerre contre vous mon amie. Mais je me dois d’informer votre hôte que mes troupes sont en marche pour chez elle et ont ordre d’abattre tout ce qui ressemble à de l’ibère, de près comme de loin. Bientôt le marquisat de Gondomar ne sera plus qu'une terre dévastée, un royaume de désolations et de souffrances.

Le sourire de l’animal se fit grand et il se tourna vers l’arrière voir si ses hommes étaient toujours aussi fiers. Il fut satisfait et pu se retourner vers Della.

Sinon nous n'avons pas besoin de manger belle enfant, nous avons englouti œuf dur, oignon et lard. Mais mes chiens ont faim eux… Je vais leur donner de la nourriture castillane.

Il tourna le bec vers le soleil pour réchauffer son visage.

La journée va être belle, vous avez commencé vos vendanges j'espère ?!

Keridil pointa son museau et ronchonna. C’était bien la première fois qu’Eusaias le voyait râler. Même quand le balbuzard avait assiégé Orléans alors que Keridil y était duc celui-ci n’avait pas autant grogner… Celui-ci tournait déjà le dos au bourguignon quand Eusaias se permit.

Kéridil, cesse de grogner comme une matrone on dirait ta belle mère !

Un petit ricanement de hyène fit secouer l’armure du balbuzard avant que celui-ci ne reprenne pour Della.

Il est toujours ainsi le matin ? Vous devez pas bien vous appliquer la nuit pour qu'il soit si ronchon ! Mettez y plus de conviction mon amie !

Sur un ton moins plaisantin :

Vous me livrez la bretonne et je m'en vais...

Sinon j'espère que vous aimez les réveils très matinaux et aux cors. Avait-il terminé pour lui.
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Blanche_
Oups.
Elle avait dévalé les escaliers et était arrivée en bas, d'où elle attendait Della. Tout ce remue-ménage, qui lui parvenait amoindri par l'épaisseur des murs, avait don de la mettre très mal à l'aise. Se rongeant les sangs, ou à défauts, les doigts, elle attendait dos à une tapisserie, sans sentir le contact froid des pierres derrière elle, et sans considérer non plus, qu'il eût été plus opportun de s'asseoir sur l'un des bancs dressé à cet usage. Les coffres attendaient tous qu'elle s'y posa.
Mais elle trépignait trop pour pouvoir s'y asseoir.


Guerre?! Il y va un peu fort !

Elle croisa les bras et crispa les poings. Fort heureusement, tout ce vacarme n'avait pas, semble-t'il, réveillé les enfants. On lui épargnait la présence innocente de trois malheureuses âmes pendant que ce malotru semait le trouble jusque dans son périple salvateur! Car c'était cela, un voyage pour sa santé. Un parcours pour la survie future en Castille, que ce trou-du-cul foutait en l'air pour deux trois pacotilles, un verre mal versé et un ton qui montait. Un goujat. Un traitre !
Elle fit trois pas en avant, deux dans un autre sens. Visiblement agacée. N'entendait-elle pas des pas en haut? Peut être que les seigneurs étaient réveillés. Oh, comme cela était gênant...!

Gardant contenance, elle attendit que quelqu'un vienne à elle. Della, un valet, quelqu'un. Elle espérait que cela ne serait pas Kéridil, devant lequel elle aurait eu du mal à justifier ce tapage.
Mais au cas où, elle s'assit et prit une posture sobre et sereine, mains sur les genoux, sans bouger d'un cil.
Eusaias avait beau hurler, elle ne bronchait pas.

Ou pas encore.

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Della
Moi, j'ai faim !

Les lèvres pincées et le regard sombre, la Bourguignonne tapa le poing sur le rebord en pierre.


Crénom, il ne sera pas dit que tu m'empêches de manger, espèce de...de...de moineau ! Et laisse Blanche tranquille, elle ne t'a rien fait, elle est mon hôte et je t'interdis de toucher un seul de ses cheveux !
Namého, il allait savoir ce qu'il en coûtait de contrarier une Della affamée et enceinte.
Se levant sur la pointe de ses pieds pour être certaine que Eusaias la voyait bien, elle reprit en direction du sol :
Quant à son époux, j'ignore où il se trouve et je m'en moque bien !
En réalité, la mort du marquis l'aurait bien arrangée, car alors, peut-être, Blanche serait revenue pour toujours en France, auprès d'elle.
Mais pour l'heure, la Duchesse se contenta de tourner les talons et de rentrer dans la chambre où le Prince Charmant semblait s'être rendormi.
Elle se vêtit rapidement d'une cotte et jeta une étole de laine sur ses épaules.
Puis, elle descendit les marches, croisa Anahis qui s'inquiétait de savoir ce qu'il se passait. Elle renvoya celle-ci auprès de Clément, agacée et arriva enfin en bas de l'escalier où elle trouva Blanche.


Tu l'as entendu, toi aussi ?
Le rustre ! Comment ose-t-il venir troubler notre repos ?
Un haussement d'épaule plus tard, Della attrapa la main de son amie qu'elle amena jusqu'aux cuisines où déjà, plusieurs personnes s'activaient autour de tables et de la cheminée.

Elle fit asseoir Blanche à laquelle on offrit un châle bien chaud et s'assit face à elle, en commandant qu'on les serve toutes les deux copieusement.

A un enfant qui grattait une marmite, elle confia la mission d'aller porter message au sieur devant les murs.
L'enfant s'encourut dehors et délivra son message, très fier.


Holà visiteur, la très charmante Duchesse vous invite à sa table. A la cuisine.
Et le gamin d'attendre que le sieur quitte son cheval, passe par la petite porte du pont levis et le suive.

Pendant ce temps, on mangeait, aux cuisines.

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- Et vot'blason, Duchesse ?
- J'sais pas, demandez à mon époux.
Keridil
Et ça hurle, et ça crie, et ça n'arrête pas, et celui qui a dit qu'un oreiller, tout plumeux soit-il, arrête le bruit est un idiot complet. Alors Keridil se tourne et se retourne, il enrage, il commence à avoir faim, puis il entend Della s'habiller et filer.
Discret comme un éléphant dans un couloir, après avoir fait mine de s'être recouché, il se relève, sur la pointe de ses petons engourdis et file vers le balcon, non sans avoir passé une robe de chambre.
Il aurait bien murmuré quelques paroles sympa à Eusaias, mais du haut d'une tour et avec un vent du tonnerre matinal, il est plutôt certain que le balbuzard n'aurait rien entendu. En bas, un foutu laquais venait de l'inviter à manger.
Traître ! Si l'on s'activait dans les cuisines, si la troupe prenait racine sous les fenêtres, Keri Keri ne trouverait jamais le sommeil. Il fila trouver un seau d'eau froide qu'il jeta, comme une commère, sur le valet.


La ferme ! Maraud !

Eusaias ! Tu te démerdes, tu entres, et tu prends Gondomar et dispose ! En silence !


Parce que premièrement, il ne saurait être dit que c'est à Seignelay que l'on aurait relancé une guerre. Et deuxièmement, Blanche, l'Amahir la trouve antipathique. Troisièmement, qu'ils dégagent tous et qu'ils foutent la paix au Duc de Chartres était la seule chose qui importait, quoi que la Fouine, dans le gaz, n'imagina pas un instant le scandale que ferait Della à l'idée que son mari venait de vendre sa meilleure amie pour une heure de sommeil supplémentaire.
Quant savoir ou imaginer ce que pouvait vouloir le Corbeau à la castillane, le brun n'en a strictement rien à faire. Mais sûrement pas grand mal, hein, parce qu'il est gentil, Eusaias.

Ronchon mais persuadé qu'il allait pouvoir se pieuter tranquille, Montpipeau retourne dans sa chambre satisfait, mais cette fois, il le lâche.


'Font tous chier, les bourguignons !
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Jeune retraité.
Eusaias
Nom de dieu qu’on savait s’amuser à Seignelay ! Un rire bien gras s’était élevé du casque du bourguignon et avait traversé le ciel au moment du sceau d’eau. Les malheurs des valets amusaient toujours l’homme au faciès de rapace.

Sang dieu Kéridil ! Della par négligence aurait-elle soufflé dans le pipeau pour que vous soyez énervé, pour ne pas dire gonflé, de la sorte ? Vous feriez mieux de trouver catin pour ces choses-là, vraiment… Ce n'est pas aristotélicien tout cela…. Avec la mère de ses enfants. Enfin, faites comme vous l’entendez, après tout je suis qu’un vil excommunié. Mais regardez après vous êtes tout de mauvais poil ! Vous m’entendez au moins ?

En plus de cela l’Orléanais l’invitait à prendre son butin en même temps que son épouse l’invitait à manger. L’appétit vint donc machinalement avec tout cela. Il mit donc pied-à-terre après avoir rangé « Joie perçante » au fourreau. Un sifflotement guilleret s’échappait des lèvres d’Eusaias alors qu’il défaisait les sangles de son arbalète pour la prendre. Devant l’œil interrogateur de son homme il donna des explications.

Si l’autre bécasse tentait de s’enfuir pendant que je mangeais en charmante compagnie, faut avouer que Della est charmante… Hop ! Paf ! Un carreau dans la jambe je pourrais finir mon repas tranquillement avant d’aller la chercher dans l’herbe.

D’un geste de la tête il désigna un endroit.

Fais monter la garde ici, tout ce qui ne parle pas français ou avec un accent du sud, tire ta lame et tu l’espadonnes. Cent écus et un lopin de terre à celui qui me rapportera la tête et les bijoux de famille du marquis. Moi je vais parlementer.

Et l’armure grinça à travers la forteresse accompagnée des tintements des éperons en or. La douche chansonnette « les dessous de la duchesse » poussée par le balbuzard se stoppa à l’entrée des cuisines.

Alors c’est ici que l'on mange et que l'on y prend prisonnière... Le regard se porta sur Blanche. Ou Maitresse… le regard se porta sur Della. Non car il n’était quand même pas venu pour rien l’animal.
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Blanche_
Blanche, que l'annonce de la chasse lancée contre son mari avait troublé assez pour qu'elle croque encore dans une bonne tartine au beurre, écouta parler Della avant de répondre quoi que ce soit.
L'appétit ne manquait pas à Seignelay, tout comme l'envie de meurtre, et les deux, ma foy, s’accommodaient bien des couteaux à lame courbe ramenés par les gens de Della sur la table. Blanche, d'ailleurs, fit venir à elle un petit de métal clair, propre, et le cala près de son coude.
L'autre, posé contre le bois avec dignité, restait loin de toute trace de nourriture. On ne touchait pas à la tenue qu'elle portait, pas même avec.


Des miettes. Il n'aura que ça de moi : des miettes.


Il arriva.
Blanche passa du rose au blanc, au rose, un peu rouge en haut des pommettes. Et n'était-ce pas le sang qui y battait, doucement? Elle resserra le châle autour de ses épaules. Ne lui laissant à voir de sa peau, que les carrés clairs qui battaient la chamade à ses tempes. Et, juste dessous, l'étau fortifié de ses mâchoires comme un chien à qui l'on aurait interdit l'os. Oh, laissez-moi le mordre, dites, laissez-moi le mordre!


Quel plaisir, lança t'elle en guise d'introduction.
Kéridil venait juste de l'offrir en rançon au Bourguignon, mais elle n'en laissa rien paraître. C'est tout juste si ses lèvres s'étaient pincées. Son propre avenir, de toute façon, si Astaroth venait à se faire tuer... Mais encore fallait-il qu'Eusaias sache viser droit. N'était-il pas ivre? Les bourguignons boivent sans arrêt. Cela pouvait expliquer son allure... Mon Dieu quelle allure. Au moins n'avait-il pas remis ce ridicule collant bleu qui lui moulait l'intégralité des
Seigneur! Ce pouvait-il qu'il lise dans ses pensées? Elle fronça les sourcils. C'était dur de voir, des sourcils blonds, de la peau claire ce qui était le plus troublé, mais enfin, il n'avait pas de collant, c'était déjà ça. Mais ça l'aurait fait rire. La veille déjà, quand il marchait tout se mouvait avec lui et c'était... Il fallait se concentrer. Prendre visage sombre. Car on détestait Eusaias, allons, on le détestait. Sûrement.
Elle pinça les lèvres et fronça les sourcils. Mais ne se permit pas plus de dénigrement.


Je crois que Monsieur de Blanc-Combaz vous fait une proposition déplacée, mon amie.
Je lui dirais bien qu'il n'a aucune chance, mais je crois que cela ne servirait à rien. Il est obsédé par les femmes des autres.


Lancement des hostilités.
Elle savait, pourtant, qu'on ne jouait pas avec sa nourriture !

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Della
A la proposition déplacée d'Eusaias suivie immédiatement de la remarque acerbe de Blanche, Della partit d'un rire joyeux et se poussa un peu pour laisser place à côté d'elle, sur le banc de bois, à son vieil ami. Ainsi au moins, ne serait-il pas tenté d'aller s'asseoir près de celle qu'il avait sans doute promis de faire enrager en y mettant tout l'art dont il était capable.
Car si Della savait qu'elle ne risquait rien du Balbuzard, Blanche, elle, semblait nettement moins assurée du caractère inoffensif de ce dernier.

Venez donc prendre place près de moi, Eusaias !
Et mangez, pardieu ! Seignelay ne manque pas de vivres, et on sait y recevoir !


S'emparant d'un long couteau, Della trancha des morceaux de pain encore tiède et de larges tranches de rôti qu'elle posa sur le tranchoir.
Elle vida trois gobelets de petite bière et attaqua son pain, tranquillement, tout en menant la conversation, un oeil posé sur sa protégée du moment.


Mais dites-moi, Bouillon, pourquoi diantre en voulez-vous autant à Godomar ? Vous aurait-il marché sur les pieds ou roter à la figure ?
Ne me dites pas que ce ne sont que les quelques gouttes de vin que Blanche a renversés sur vous qui vous met dans cet état ! Vous êtes bien moins précieux, d'habitude.


Les gens s'activaient à la cuisine et une délicieuse odeur de soupe commençait à flotter dans l'air.

Souriant, Della poursuivit :
Sacré Eusaias, venir nous faire lever aux aurores...!
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- Et vot'blason, Duchesse ?
- J'sais pas, demandez à mon époux.
Eusaias
MouHAHAHAHA Je convoite la femme des autres… MouHAHAHAHA… Non mais, non mais…. Oui et alors ?

Il prit place alors à côté de Della et réfléchit à ce qu’il pouvait becter, son armure n’étant pas « l’habit » idéal pour ce genre de chose. Il continua quand même sa raillerie.

Non mais Della, vous savez ce qu’on dit : « la femme des copains est sacrée, faut qu’elle y passe ! ». Enfin je trouve Gondomar bien irrespectueuse face à la personne que je suis. Car vous voyez, si elle m’avait fait une courbette digne de ce nom avec un corsage affriolant qui m’aurait laissé mirer ces ploplos on n’en serait pas là !

Le bec survola la table cherchant un gobelet de vin qu’il ne mit pas longtemps à trouver. Après s’en être saisi et en avoir avalé la moitié il reprit.

Godomar le mari va payer pour sa bécasse de femme. Non mais, je viens chez vous hier, je tente de me montrer le plus courtois et le plus avenant possible et cette petite marquise me répond par insultes et menaces. Vous me connaissez Della, ça aurait été un homme, je lui aurai rangé mon gantelet dans les dents de manière à ce qu’il saigne du nez par les oreilles. Mais une femme….

Il trempa un morceau de pain dans son gobelet avant de croquer à pleine dents dedans.

J’ai tenté de trouver un arrangement, je lui ai tendu une main amicale. Elle a refusé de MON amitié ! Je l’avais conviée à passer sept jours chez nous, tous les deux, pour qu’elle apprenne à me connaitre… Elle m’a envoyé sur les roses ! Donc le marquis va servir de repas à mes chiens, la marquise va se faire un peu chahuter par mes hommes avant qu’on regarde si elle est capable de nager dans la Saône avec cinquante kilos de caillasse attachés aux pieds. Je pourrais avoir encore du vin ?
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Blanche_
Elle le savait, que tous les bourguignons étaient des cons!
Et Eusaias en était un extraordinaire spécimen, pensa-t'elle. En lorgnant discrètement la goulue flopée de vin qu'il ingurgitait -était-il ivre déjà?-, elle se tailla un petit bout de pain, et le mâcha doucement. Avec lenteur, même, à la manière d'une réflexion lente qui aurait suivi son alimentation. Était-elle en train de manger? Était-elle en train de préparer une riposte?
Elle lâcha juste, acerbe, ainsi que Della le disait.


Gondomar, Eusaias. On prononce Gondomar. Mais si les langues étrangères sont trop compliquées pour vous, dites simplement votre Excellence. C'est ainsi que l'on dit chez moi.

Elle fut elle-même surprise de cette réaction.
Non pas que le taquiner sur un point de détail sémantique soit d'une totale jouissance, non... Mais elle avait dit "moi". Chez moi. C'était la première fois qu'elle considérait l'îlot d'Arousa comme sa propre terre. A quelques instants près, elle aurait même pu dire ma "patrie". Patrie...
Il y avait de quoi prendre un deuxième bout de pain, qui s'effrita entre ses doigts secs. Et froids. Elle avait les mains terriblement glacées.

Elle le fixa intensément. Imaginant peut être cinq griffures longitudinales sur sa face de bête. Cette idée avait quelque chose de réjouissant, aussi sourit-elle doucement. Il avait réellement un gros nez, fut-elle d'avis de lui dire. Mais elle se retint. A la place, toujours aussi délicieuse :


Vous me faites penser à un gros coq.

Majestueux, le coq, attention.
_________________
Isandre.watelse
Ca hurle ! Dès l'aube en plus...
Isandre adorait sa Dame, mais certains jours, elle trouvait la vie à Seignelay bien agitée.
Après une nuit presque blanche à essayer d'endormir un Clément sur-exité par ses jeux avec son père, voilà que les barons organisaient une scène de ménage au balcon à une heure tout à fait indécente.
Le calme semblant revenu, elle tenta vainement de se rendormir, la tête enfouie dans son oreiller de plumes.
Hélas, il semblait bien que le sommeil soit définitivement parti voir ailleurs.
En grommelant, elle s'extirpa de son lit et s'apprêta rapidement.
Même aux aurores, Dame Della ne supportait pas la négligence.

Une fois prête, elle décida qu'un petit déjeuner effacerait peut être le souvenir de cette courte nuit difficile. Elle imaginait déjà le goût du pain croustillant sortant du four, avec un bon morceau de beurre fondant.

Enveloppée dans un grand châle pour lutter contre le froid qui s'insinuait dans les couloirs, elle poussa la porte de la cuisine pour tomber sur un spectacle qui la laissa pantoise.

Dame Della, déjà attablée, avec Dame Blanche et un inconnu...

Indécise sur le pas de la porte, elle hésitait à retourner dans sa chambre le ventre vide ou à chaparder vite fait une miche pour aller manger tranquille ailleurs, mais cela ne devait pas faire oublier les bonnes manières.

- Oh... Le bonjour Mes Dame, Messire...
Je ne fais que passer, ne vous dérangez pas pour moi...


Voici donc la raison de ce tapage matinal : un visiteur surprise et insomniaque... Etait-ce une heure correcte pour visiter des dames d'ailleurs.
Soupirant, elle se dirigea vers la huche. Tant pis, elle se contenterait du pain de la veille.

_________________
Eusaias
Un gros coq ? Un majestueux et hardis gros coq alors ! D’ailleurs ne dit on pas que le cri du Coq peut effrayer le lion ? Je vais prendre ça pour un compliment. Quand à vous, vous me faites penser à une bécasse ou à une dinde… Mais ça ce n’est pas un compliment ! Bécasse !

- Oh... Le bonjour Mes Dame, Messire...
Je ne fais que passer, ne vous dérangez pas pour moi...


Ah ça c’est certain qu’on ne va pas se dérangez pour vous ! Della donnez moi un peu plus de pain et je voudrais du jambon.

Il ne connaissait pas la jeune fille à qui il venait de répondre, mais il savait comment être désagréable avec elle et ceci lui suffit. Il lui jeta un regard en biais bien appuyé avant de se servir encore un peu de vin. Il en avala une rasade après avoir garder le liquide dans sa bouche un moment.

Le gobelet tonna sur la table quand il percuta avec vigueur le bois. La nourriture c’était comme la guerre ou la violence conjugale, ça mettait le Balbuzard de bonne humeur. De la pointe de sa langue il cherchait à délogé les morceaux de victuailles entre ses dents alors qu’il songeait à un nouveau marché à proposer. La gymnastique de la saliveuse se termina au moment ou il reposa les yeux sur Blanche.


Mais vous me connaissez Della, je suis un homme bon et honnête. Je vais donc laisser le choix à votre amie et à vous-même de faire la paix entre Bouillon et Gondomar. La bécasse devra venir passer une semaine en mes domaines et sera ma partenaire de jeu. Elle n’aura ni le droit de se défiler, ni le droit de refuser mes défis. Moi je m’engage à ne point la toucher, ni la faire toucher. Je m’engage à ne pas la mettre en danger physiquement il va de soit.

Quant à vous ma belle amie, j’ai entendu dire que vous vouliez vous passer de votre vassale qui est par la même occasion ma filleul. Pour une histoire de mariage avec un autre de mes filleuls. Je trouvais pour ma part ce mariage intéressant puis qu’on pouvait lier nos deux maisons par cet anneau. J’aimerai donc savoir ce qui vous pousse à agir ainsi, j’aimerai savoir ce que je peux faire pour vous afin que vous reveniez sur cette bien triste décision. Ce n’est pas une histoire de prestige, puisqu’il est actuellement duc de Bourgogne et sera bientôt Duc de Montréal. Ce n’est pas une histoire de dévouement puisque mon jeune filleul a prouvé que la Bourgogne était la première de ses occupations et à en voir ce qui à été fait il l’a franchement bien menée. Si c’est une question de dot je paierai… mis à part cela je ne vois pas et j’attends donc votre raison.

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