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[RP] Dans les choux.

Finn
[Limoges, à la brune.]


Une chambrette sous les toits en capitale. La faim tenaillait l’Irlandais depuis quelques jours, depuis qu’il avait goûté à un met qui ne parvenait à combler tout à fait l’estomac qui s’était logé dans ses talons. Vautré sur un pageot bourré de paille, les doigts calleux se mirent à courir prestement sur le vélin.



Estimée Baronne,

Je me trouve en cet instant fort marri de n’avoir plus de quoi me sustenter dans mes tiroirs. Par chance, je me suis souvenu de ce punais gratin de choux fleurs qui m’a tant destourbé la dernière fois. En vertu de notre accord et de ton incapacité à rester sobre toute une soirée, je te demande asile. J’espère que tu ne verras aucun inconvénient à ce que nous bâfrions chez toi, je n’ai hélas pas de table en ce provisoire logis que j’occupe.

Merci de me communiquer l’adresse des réjouissances, je me charge des breuvages.

Gaéliquement,
Finn d’Pommières
Seigneur de Cazayous


Après avoir dévalé les marches de l’auberge, le pli passa aux mains d’un garçonnet suffisamment dégourdi pour trouver la demeure de la plus célèbre toison de rouille de la ville.
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Johanara
Malepeste ! Voilà autre chose ! La Baronne froissa la lettre avec un rictus maussade avant de se plonger dans sa comptabilité afin de voir si un « banquet » était envisageable...

Finn s'invitait à ripailler chez elle ! Comme si elle n'avait point assez de bouches à nourrir...Enfin cela était de bonne guerre. Ils avaient joué, elle avait perdu. L'alcoolique notoire qu'elle était, n'avait guère pu se tenir plus de deux soirs sans abuser de la chopine !Enfin c'était surtout de la faute de cette baudruche vérolée de bourgmestre. Louis était entré dans le bouge, le sang avait battu ses tempes et le godet avait apaisé ses pulsions meurtrières.

Les comptes furent vite faits, l'argent compté ou plutôt non compté : les caisses étaient vides !

Un soupir franchit la barrière vermeille de ses lèvres. Résignée, elle défit ses lourdes tresses, laissant ruisseler la cascade de boucles flamboyantes jusqu'à ses hanches, elle se pinça les joues et abaissa quelque peu son corsage de manière à dévoiler le tendre sillon de sa poitrine victorieuse où scintillait un énorme rubis.
Et le maraicher n'y résista guère, hypnotisé par l'éclat grenat de la gemme tout autant que par les émeraudes chatoyantes des mirettes baronnesques qui ne cessaient de papillonner sur les étals.
C'est ainsi que le brave Léopold se retrouva les bras chargés d'une demi-douzaine de choux-fleurs alors que la Baronne bavassait avec la crémière afin de lui extorquer un peu de fromage.
Qu'est ce qu'il ne fallait pas faire pour satisfaire ses convives !


Citation:
Cher ami,
Et moi qui me pensais cuisinière médiocre ! Quand j'aurai mis la clé sous la porte, je pourrais toujours escompter trouver un office de marmiton chez quelque grande famille.
O la charmante perspective d'avenir !
Perspective non moins agréable que de vous recevoir pour le souper. Nous logeons chez le cousin Jehan, je vous envoie une voiture demain aux vêpres.
Prévoyez plusieurs bouteilles, le gratin s'annonce difficile à digérer, le choux-fleur est coriace, il faudra se rincer le gosier.






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Finn
Le jour suivant, aux vêpres tombées, L’Irlandais s’engouffra dans le coche qui lui avait été dépêché. La réponse de la Baronne en main, Finn louait la Sainte Boulasse sans qui rien n’aurait été possible, et à un degré moindre, le bourgmestre. Sous les cahots de l’armature, elle-même soumise aux aspérités de la route, les bouteilles qui garnissaient sa caisse teintaient joyeusement, comme un appel à boiser sans tarder. Supplique de la verrerie à laquelle il céda pour affronter le trac naissant à la perspective de souper chez la Baronne et sa famille de fol dingos.

Mettez-le sur un champ de bataille et il mènera la charge avec le zèle du croisé, mais asseyez-le à noble table pour s’entretenir de billevesées et vous le verrez se tasser au fond de son siège. Sans omettre le risque d’empoisonnement alimentaire. Tout cela promettait soirée épique.

La voiture s’arrêta devant la grille avant qu’il n’ait eu le temps de s’appesantir davantage sur son appréhension et il put découvrir l’étendue de la demeure familiale. Accoutré de son harnois d’acier flambant, l’homme d’arme se planta dans la cour, tête nue, la salade sous le bras et la caisse truffée de bouteilles de son malt irlandais aux solerets.

Aucun signe de la domesticité, l’avait-elle également mise au clou ? Auquel cas il pourrait être preneur, depuis que son manchot d’écuyer avait été lâchement fauché par l’ennemi, le laissant choir. N’osant aller frapper à l’huis de cette bâtisse peuplée d’inconnus, il opta pour écluser la dernière moitié de sa bouteille en tâchant de se garder de la petite bise qui commençait à lui souffler dans les voiles.

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Mathilde_la_blonde



On vint enfin lui ouvrir….

Une blonde… Mathilde, lingère et chambrière de son état. Seize ans, de jolies joues pleines et rubescentes, deux longues tresses dorées, de petits yeux bruns et rieurs. On lui donnerait le bon dieu sans confession.

Sauf que le bon dieu, la Mathilde elle n’en veut pas. La blonde préfère les hommes, tous les hommes. Les nobles comme les gueux, les jeunes comme les vieux, les nains et les lépreux, et même le cocher affreux qui lui a fichu des pellicules plein le décolleté la dernière fois qu’elle a joué à la nourrice avec lui et qui a fini par lui faire un bâtard. Le petit brun au milieu des trois blonds, ceux-là sont du garçon d’ecurie.

Sur sa robe de lin rêche, brodé à même le tissu tendu par les formes plus qu’épanouies de la jeune ribaude, on peut lire : « SEPT D’UN COUP » *.

Hormis que la bonne n’a rien d’un vaillant petit tailleur . Ce serait plutôt une vaillante et grande tailleuse de … NORF!

Bref pas des tapettes à mouches mais bien des damoiseaux qu’elle se tape sans vergogne.

A la vue du vieux seigneur, ses lèvres gourmandes se retroussent comme devant une bonne part de tarte à la crème et sa langue claque contre son palais. Pour sûr elle ne ferait qu’une bouchée du chevalier
.

Si M’sieur veut bien s’donner la peine d’entrer…

Elle l’aide à se dévêtir, jaugeant son adversaire de son œil impudique. Petite proie. Facile à manier.

Du genre qui reste au-dessus, fallait pas l’étouffer non plus. Le combat s’annonçait aisé.

De toute façon elle n’avait pas le temps. Le confesseur l’attendait dans la chapelle et avait promis que cette fois ci ils joueraient avec des cierges
.

Vous v’nez pour la Baronne? Perdez vot ‘temps, z’êtes pas son genre. Elle fait dans le jeune en ce moment. Bon chez moi ou chez vous? Z’avez d’la chance , j’ai plus d’herpès.



*Inspiré de l'histoire du "Vaillant Petit Tailleur" des frères Grimm
Finn
Les deux billes de teinte ébène surmontées de leurs arrêtes arquées ne suffisaient à exprimer toute la perplexité que l’arrivante lui inspirait. Le fausset abondant et le tétin alerte, elle avait tout d’une bordelière prête à soulever sa cotte pour un sou. Ah la gouge, il l’aurait bien fessée !

Son cageot sous le bras, l’Irlandais répondit d’un pas chaloupé à l’invitation, lui passant devant. En se délestant de sa lourde cape de laine écrue sur elle, il se surprit à effleurer cette opulence de la mamelle, cette protubérance grossière qui tendait ses guenilles à outrance. Ses lèvres se tordirent alors en un rictus méprisant sans que son regard ne manque de reluquer à la dérobée l’objet de son frisson. Les paroles qui l’accueillirent ne le firent pas démentir.

Un revers de gantelet menaçant se hissa au-dessus de la drôlesse pour l’enjoindre à obtempérer
.

- « Ohé la vilaine, cesse donc tes boniments et conduis-moi à ta maîtresse ! Non mais qu’est-ce que c’est qu’ce genre ?! », se courrouça le vieux briscard.

Maudite femelle.
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Johanara
La Baronne furetait près de l'office, trépignant, gênant les domestiques, yallant de son commentaire pour tout et pour rien.

Avisant la cuisinière, elle approcha le museau du gratin de choux-fleur qui sortait à peine du four.


Dites donc madame Patmore, vous pensez que le fromage pousse dans les allées du jardin ?? Ou que j'en trouve sous mon édredon le matin au réveil ? Il y a plus de fromage que de légumes ! Allez grattez moi un peu ce plat, on en remettra sur celui de ce soir ! Économie, Madame Patmore, Économie !!

Ah mais que fait ce crétin de Léopold ! A t'on idée de déplacer une plante avec aussi peu de délicatesse !!



La cuisinière soupira d'aise lorsque la Baronne s'éloigna des fourneaux pour houspiller le pauvre valet.

Et de finir par la Mathilde, lorsque Johanara surprit son manège libidineux auprès de son convive.


Tu n'as pas fini de jouer les coureuses de rempart ? Déguerpis fissa avant que je ne décide de te céder à quelque lupanar où tu seras plus à ta place que dans cette honnête maison.

Puis se tournant vers son ami, elle lui offrit un un sourire qui se voulait rassurant :

Soyez le bienvenu Finn. Vous venez de faire la connaissance de ma chambrière, j'espère qu'elle ne vous a point trop importuné. Ma valetaille est pour le moins fantaisiste ! Du moins, j'espère que vous n'aurez pas à vous plaindre de notre cuisinière !
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Finn
Le gantelet se réfugia aussitôt dans le dos de l’Irlandais surpris en flagrant délit, lequel demeura interdit devant l’arrivée de la maîtresse des lieux. Elle vitupéra tant et si fort la domestique qu’il crut qu’il allait en prendre également pour son grade. Au lieu de cela, la Baronne retrouva sa superbe et l’avenance qu’il lui connaissait.

L’Irlandais eut alors tout le loisir de goûter des yeux au met pour lequel il avait fait le déplacement. Une Madone dont les traits finement ciselés auraient pu présager la rigueur mais qui, à rebours, semblait à même de s’embraser à la moindre étincelle, animée d’une passion constante et d’un intérêt sans cesse renouvelé pour qui partageait son quotidien. S’il était fort aisé de se laisser séduire par la silhouette en sablier égrainant le temps au ralenti lorsque l’on avait la mauvaise intuition de s’y perdre ne serait-ce que l’espace d’un battement de cil, on était encore plus assuré de s’enticher de mœurs si intègres et d’un caractère à ce point authentique.


- « Merci Baronne, c’est avec grande joie que je réponds à votre invitation. Si la "cuisinière" est aussi prompte à s'offrir en dessert que la femme de chambre, je ne devrais rien avoir à objecter. », répliqua-t-il en se débarrassant des pièces de métal qui enveloppaient ses paluches à la corde poussiéreuse, regrettant de se présenter dans un état si déplorable.

Admirer la Baronne dans son milieu naturel n’avait rien de franchement déstabilisant. Les petites mains qui gravitaient autour de sa personne semblaient au même titre que son entourage proche ou même que le simple badaud, affairées à la satisfaire. Sans qu’elle ne manque de trouver à y redire de la plus cinglante des manières. Pour autant, n’allons pas croire que Finn lui prêtait l’acrimonie d’une harpie, mais il fallait reconnaître qu’elle avait ses petites humeurs, sa vision inébranlable de ce qui doit être et ne pas être. Peut-être la source d’une admiration naissante et complice qui la dévisageait avec un amusement certain malgré l’austérité de la trombine qui la portait.

Alors qu’il s’écartait du vestibule en sa compagnie pour gagner le cœur du logis, les effluves culinaires qui émanaient des cuisines lui firent hausser le sourcil.

- « Quelle tromperie ! Ce que je vais bâfrer n’aura pas été concocté par vos blanches mains ? », s’étonna-t-il, réalisant que sa raillerie grivoise se portait sur une autre cuisinière que celle qu'aurait pu constituer la Baronne.
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Johanara


Un sourire sibyllin étira les lèvres purpurines de la jeune femme tandis que ses mirettes se voilèrent imperceptiblement. Une question taraudait son esprit. Aurait-il vraiment frappé la blonde Mathilde au visage rond et avenant malgré ses manières cavalières ? Car elle avait surpris la dextre menaçante et le rictus courroucé qui avait déformé le visage anguleux du vieux seigneur. Du moins le côté droit. Celui qu'elle appréciait pour sa bienveillance et sa piété offrait-il un minois plus belliqueux lorsque ses grands yeux verts ne le baignaient pas de leur clarté ?

Johanara ne laissa rien paraître, ses traits doux et apaisés comme souvent en compagnie de l'Irlandais, qui par ses sarcasmes et ses finesses d'esprit parvenait toujours à tempérer ses humeurs fracassantes.

Naïvement, elle eut un charmant rire cristallin lorsqu'il se fit grivois. Mme Patmore la cuisinière, n'était point du genre à se laisser conter fleurette et le flegme irlandais de Finn n'aurait pour sûr aucune emprise sur celle qui avait enterré deux maris, trois fils et plusieurs maîtres de maison.

Et encore moins affublé de la sorte... Car si la Baronne l'admirait pour son aimable caractère et ses dispositions de l'esprit, il en était tout autrement pour sa tournure. Sa tignasse de jais et d’argent paraissait toujours en bataille, assortie à merveille à la broussaille qui lui tenait lieu de barbe.

Quand à cette cape de laine grossière qui semblait avoir attirée à elle toute la poussière de Limoges…

Il aurait fallu qu’il prenne un bon bain, que la lingère s’occupe de ses effets, que le barbier taille tout ce poil sauvage et farouche Et que la Patmore le gave de sucrerie.

Ses joues s’empourprèrent tandis qu’elle s’amusa de ce soudain instinct maternel à l’égard de celui qui était pourtant en âge d’être son géniteur

Un vin fort couteux les attendait au salon. Ce n’est pas parce qu’elle était misérable et miséreuse qu’elle ne savait plus recevoir ! Lorsque le valet déboucha la bouteille, elle lâcha un râle maussade. Ce doux breuvage valait une petite fortune et elle ne s’en séparait que pour impressionner l’Irlandais. Car le gratin de chou-fleur n’y parviendrait certainement point !

Et le fumet vint justement lui titiller les narines…


Bien sûr que non Finn. M’avez-vous bien regardé ? C’est à peine si je sais éplucher un fruit. Cependant j’ai fait un effort pour le… Oh mais verrat lubrique ! Vous parliez de moi tantôt ?

Faussement outrée, le regard brillait d’ire mais la fossette creusée à sa joue semblait rieuse.

A quoi trinquons nous mon ami ? Nos retrouvailles à Limoges ?
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Finn
Une aura de mystère enveloppait les sourires qu’elle lui dispensait avec cette inébranlable indulgence envers le costume grossier qu’il enfilait bien trop souvent. Quel forfait n’aurait-il pas commis pour avoir le droit de sonder cette petite tête si bien faite ? Une question à cent mille pièces.

La gouaille égrillarde du vieux routier trouva bon accueil, ce dont il se sentit soulagé. Malgré cet écart, davantage destiné à évacuer l’agitation que la seule compagnie de la Baronne était en mesure de faire germer sous son cuir tanné, l’Irlandais crut débusquer sur ses traits mignards un élan de franche marrade.

Charmé, il n’en trouva pas les mots pour répliquer et se soustraire à l’ire superficielle derrière laquelle elle se réfugiait. Le corps souple du Gaélique trouva assise confortable à la table où trônaient les réjouissances.

- « Pourquoi pas à vous ? », rectifia-t-il en entrechoquant son godet au sien sans lui laisser le loisir de s’en défendre. « Vous êtes bien tout ce qui retient mon intérêt dans cette ville. »

A la limite de la déshydratation, il entama copieusement le godet offert. Quelle chaleur ! Et quelle odeur... ! De toute évidence, le plat de résistance ne manquerait pas de caractère. S’il fut en partie consolé d’apprendre que la Baronne ne serait pas l’auteur de ce qu’il allait devoir ingérer, ce temps-là était révolu.

- « Dites, vous ne m’avez tout de même pas fait charrier ce cageot de bon malt pour rien ? Le vin n’est pas mauvais mais j’escompte bien vous noyer dans l’ambre ce soir. », grommela-t-il.

Pas mauvais… Quelle idée de servir de la vigne de premier choix à un soudard irlandais ?
C’était confiture aux cochons.

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Johanara
Lorsque le vin fut bu jusqu’à la lie, la belle Baronne enserra la bouteille dans ses bras, pensant aux écus qu’elle venait de claquer en quelques gorgées.

Puis l’ambre coula à flots, au diapason avec les yeux de la belle, si bien que lorsque le gratin fut servi par une Mathilde frétillante, la rouquine semblait déjà bien pompette.


J’espère que ce modeste repas sera à votre convenance…

De son côté, une main délicatement posé dans le creux du dos du vieux seigneur, Mathilde se pencha vers la tablée, alors qu’un sourire lubrique étira ses lèvres rosées.

Z’en voulez un peu, beaucoup ? De la crème ? Mmhh Gourmand… J’sais qu’la…

L’impudente fut interrompue par l’éclat de voix de la Baronne.

Déguerpis maraude ! Graine de catin ! As-tu fini d’importuner mon invité ? Depuis quand fais-tu le service ? Si tu t’avises à pénétrer de nouveau dans cette pièce sans frapper … Je te jure sur Aristote que je transformerai ton crâne en heurtoir

Rougissant un peu la Mathilde partit sans demander son reste non sans avoir laissé traîner ses mamelles dans l’assiette de l’irlandais.

La porte se refermant ainsi derrière elle, Johanara reporta de nouveau son attention vers le chevalier , son sourire s’élargissant perceptiblement lorsqu’il goûta aux mets.


Mangez, vous en avez besoin !

Et la Baronne de goûter le gratin à son tour. Mais tandis qu’elle portait la bouchée fumante à sa bouche amarante, un rampant attira son attention…

Dans le plat, une limace. Et là une autre se baladait dans l’assiette de Finn. La rouquine reposa sa fourchette promptement avant de noyer la seconde fâcheuse par une pleine cuillère de crème
.

Il ne devait pas s’en rendre compte ! Quelle disrâce sur son repas. Avisant un verre de vin, elle le poussa d’un doigt agile vers les braies du pauvre Finn et profita de la confusion pour écraser à coup de louche la vermine non sans pousser un petit cri dégoûté.

Oh pardon… Que je suis… Hiiiiiii…maladroite !
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Finn
Ah ça elle savait recevoir, les soirées de la Baronne sont toujours un succès !
Comment croire à présent qu'elle avait un quelconque lien de parenté avec le taciturne et rébarbatif Maleus?
Après un petit vin médiocre, ils s’attaquaient à l’eau-de-vie d’importation irlandaise dont il se faisait devoir de ne jamais souffrir la pénurie. Une énième lampée du breuvage malté précéda un claquement de langue béat et passablement éméché qui salua le retour de la petite catin de chambrière.


- « Aahhh… » , soupira-t-il d’aisance à la vue des plats.

Eclipsé par l’ombre titanesque des deux affreuses mamelles qu’elle lui servait dans l’écuelle, l’Irlandais se plut à y plonger des prunelles où luisait un vice éthyliquement exacerbé.


- « Hinhin .. ! », ricana-t-il lorsque la généreuse crémière se fit sermonner avec toute la créativité lexicale de sa maîtresse. Non sans lui flatter la croupe d’une claque désinvolte.

La pitance ne fut pas boudée. Il ne prit même pas la peine de sourciller à la remarque sur ses joues désespérément creuses. Avec vigueur il s’empara de bouchées de gruyère fondant et de choux. Ses doigts grossiers portèrent le met jusqu’aux babines affamées qui s’en régalèrent, le temps d’y effleurer la langue du moins. L’Irlandais n’était pas fin gourmet, au contraire, mais il savait reconnaître du torchis, et l’ingestion de celui-ci ne se passerait pas sans heurt. Du plomb ! Une enclume venait de lui choir sur l’estomac et Finn se trahit d’une grimace douloureuse.

Un demi-sourire contrit barra néanmoins son profil dextre alors qu’elle lui versait une copieuse plârée de crème. Le regard tamisé par l’abus de liqueur celtique envoya œillade gourmande à l’adresse de celle qui semblait vouloir poursuivre l’œuvre allégorique de la chambrière et son goût pour la crème. Aguicheuse, il en était sûr !

Ardeur lubrique aussitôt supplantée par l’effroi, la crainte qu'un flux précoce ne soit venu entacher ses braies. Misère, elle ne l'avait même pas encore touché !
Alarmé par l’humidité du tissu, il parvînt à peine à tempérer ses humeurs quand il perçut la teinte carmine de la souillure.


- « Non mais quelle gourde .. ! », s’émut-il abusivement d'un ton grondant en s'écartant avec brusquerie.

Il ignorait tout du sort qu’elle réservait aux « mollusques », et c'était tant mieux. La blessure de l’égo était encore fraîche malgré le malentendu.

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Johanara
C'était un fait. Finn l'Irlandais, baroudeur, la mèche fière et grisonnante tenait moins bien l'alcool qu'une donzelle délicate de 20 ans ca cadette.

Johanara l'enveloppa d'un regard attendri tandis qu'il éructait divers sons incompréhensibles et qu'il faisait honneur à la ripaille.

Pour sûr, il avait goûté le vin et la pitance avec délice !

L'assassinat de la première limace fut un succès. Noyée dans la crème, ni vu ni connu. Comme la lueur lubrique qui éclaira les prunelles sombres du vieux seigneur.

L'attentat visant à écrabouiller la seconde à coup de louche tout en faisant diversion, fut moins triomphant. A mille lieux de se douter des pensées libidineuses qui habitaient son convive, la belle fut estomaquée de l'entendre l'affubler d'un bien déplaisant sobriquet !


Gourde ??? Gourde ??? Je m'échine à lui mijoter de bons petits plats et lui, il me transperce le coeur ! Ah l'ingrat ! Le mufle ! Le butor !

Se saisissant de la louche encore pleine de crème, elle en jeta une bonne plâtrée sur les braies déjà souillées.

Voilà vieille quenouille ! Vous avez une bonne raison de braire !

Mais ce fut bientôt les hululements de la rouquine qui retentirent dans toute la maisonnée. Un rampant s'en donnait à cœur joie, allant, bavant, dans le tendre sillon de sa poitrine opulente.

Hystérique, sous entendu encore plus qu'à l'accoutumée, son jolis minois rubescent par le dégoût provoqué par la limace, elle tourna sur elle même en espérant que le gastéropode lâche prise.


Hiii !!!!!Finn je vous somme de me débarrasser de cette chose gluante ! Hiiiiiiii !!!
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Finn
Quel toupet ! Ses délicats petits doigts au galbe satiné n’avaient pas même effleuré une seule feuille de chou ! Pour le reste, l’Irlandais du reconnaître qu’elle avait vu juste et faire pénitence. Elle l’avait généreusement accueilli chez un autre, en sus de lui bourrer la panse d’une purée de graviers compacte assez bonne pour un vieux corniaud touché de coliques suffisamment sévères pour s’en débarrasser sans y perdre les trippes avec.

Prêt à se confondre en plates excuses comme rarement, elle en remit une couche.
C’était le cas de le dire…

Elle avait balancé la purée !


La rogne inondait la silhouette pétrifiée de l’homme d’arme à lui en sortir par les trous de nez. L’humilier ainsi, sous un toit qui n’était même pas le sien. Certains ne manquaient pas de souffle !

- « Ah vous le prenez ainsi ? Je vais vous en donner moi de votre bouillie qu’on oserait pas servir aux pouilleux en phase terminale de l’Hostel Dieu ! », aboya-t-il , la mirette assassine, alors qu’il brandissait son pavé de chou gratiné avec la ferme intention de le lui faire avaler avec l’écuelle en prime.

Qu’il avait l’air vilain avec son arme létale en main et ses petits yeux de phacochère prêt à charger, mais ça n’était pas une raison pour glapir de la sorte.


- « Mais assez vieille chouette ! Il suffit ! Vous allez ameuter toute la garnison ! », s’alarma le vieux renard.

Puis elle se mit à tournoyer, le teint cramoisi. A croire qu’elle s’essayait à digérer son pavé de plomb sans la colique, sans filet. Audacieuse Baronne…

Réflexion faite, elle s’étouffait. Elle lui avait d’ailleurs confié être particulièrement étroite en dedans. Il devait en aller de même avec la gorge, c’était évident !
Allant vaillant pour la ceinturer et extirper le malheureux obstacle qui obstruait son aviné gosier, elle déclara enfin l’objet de son trouble.


- « Rhaa mais cessez de gesticuler à la fin, on n'y voit goutte… ! », maugréa-t-il en preux chevalier servant avant de s’apercevoir de l’indécente intrusion.

Sans ces cris hystériques lui vrillant le tympan, la situation aurait engendré de sordides fantasmes chez l’ex-novice. Il aurait jalousé la balade suave de l’immonde mollusque dans la gorge délicieusement vallonnée de ce décolleté rebondi.

Au lieu de cela, le ronchonnant Gaélique s’échinait à exécuter la basse besogne de l’en déloger en évitant les coups affolés de la Baronne.


- « Ne sautillez pas, il s’enfonce ..! », beugla-t-il voyant qu’elle sapait son ouvrage.

Pourquoi « il » ? Nul ne le savait, mais les coupables étaient d’ordre masculin ce soir.

Ne tergiversant pas davantage, il immergea une main pleine à la paume rugueuse dans l’intimité cosy de sa gorge plantureuse.


- « ... J’ai la tête ! », se réjouit Finn, au bout de ses peines.
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Johanara
Décidément... Le vieux chevalier semblait capable du meilleur comme du pire....Des plus belles marques d'affection, à la dernière des goujateries !

Le couplet sur la boustifaille infecte, passe encore. Depuis des semaines que toute la mesnie était plongée au cœur de la disette, l'affluence aux latrines avait atteinte son acmé !
Plus personne ne digérait le choux-fleur et la pauvre cuisinière ne savait plus quelle recette inventer pour accommoder le pauvre légume qui deviendrait un symbole de malheur et de misère pour toute une génération de nobles et de domestiques et pour les siècles à venir :

« Comment il a servi du choux-fleur à son banquet ? Quel affront ! Quel crève-la-fam ! »

La Baronne fut moins compréhensive pour la suite.


Hein ? Quoi ? Comment ? Vielle chouette ??? Je vous en ficherai de la chouette, ablette lubrique ! Verrat pernicieux ! On vous met un doigt, vous prenez la main!

Et en parlant de main, il en glissa une bien rugueuse dans le tendre écrin de sa lourde poitrine.

Paf ! Réflexe humain. Tu m'touches, j'te couche ! Depuis des années que personne ne lui avait tâté les tétins, le soufflet partit tout seul.



Pardon, c'était pas voulu ! Allez y doucement m'enfin ! Vous m'assassinez ! Mais attrapez la, je vois sa queue ! Allons empoté !Prenez lui la queue ! N'en profitez pas résidu de courge molle !


Schark ! Défense mammaire face à l'oppresseur. Le tissue moiré déjà tendu par l'opulent poitrail de la madone n'en pouvait supporter plus... La limace passe encore mais cette main qui farfouille !

Hiiiiiiii !!! Cri strident de la rouquine. Le corset fanfaronne, la dentelle carminée se dévoile, les rubans font la farandole !

Et notre baronne de se saisir de ce qu'elle peut pour dissimuler à Finn la vision enchanteresse.

Elle s'empara de la nappe d'un geste brusque envoyant valser, gratin et soupière et avant de se cacher avec.

Adieu choux-fleur !

Et de gémir...


Hiiii je vous déteste.... hiiii c'est un fisco...hiiii ma robe....
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Finn
La « vieille chouette » avait cessé ses hululements gutturaux, laissant un peu de répit à son pauvre cornet assommé par de si gracieuses vocalises pour mieux le régaler de ses fertiles invectives.

Et d’une calotte magistrale.
Aïe...

La joue rougie sous le pelage grisonnant, l’Irlandais poursuivait néanmoins ses efforts dans son corset aux reflets fuyants.

- « Je fais bien ce que.. j’peux !.. », maugréa-t-il, empêtré dans sa gaine.

Quelle galère ! Mais quelle galère !

Fourrageant consciencieusement dans le carcan complexe de sa gorge sans y avoir été convié pour en déloger le mollusque, les coutures cédèrent sous l’action de la patte grossière, non sans une supplique de la porteuse de la riche étoffe. Le poitrail éventré vit alors les prunelles d’ébène s’écarquiller et se refermer pudiquement, fatalement aveuglées par l’éclosion manifeste de deux lourds fruits bien mûrs.

Etait-ce un avant goût du Paradis ? Pour sûr, il était en bonne voie pour le rejoindre après l’avoir ainsi savamment effeuillée !

Dans un fracas assourdissant de vaisselle cassée et de tissu ulcéré, la vue lui revînt, encore hébété par le mirage précédent. Pour ainsi dire, le pis conquérant de la Madone lui demeurerait sans doute à jamais gravé à l’esprit.

La limace à la main, son regard la désigna à la Baronne qu’il n’osait plus approcher.


- « Regardez, je l’ai eue… », relativisa l’Irlandais, un peu couillon.
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