Afficher le menu
Information and comments (0)
<<   1, 2, 3, 4   >   >>

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Ouvert - La Dentelière-Maison de Haute Couture Epicée

Charlyelle
Let's go !*


Il y a un temps pour tout. L'Hydrique Hyvresse en était terminée, du moins, il en était ainsi, bien que rien ne pourrait changer ce que l'Ecossaise est. Ce n'est pas parce que l'on clot un chapitre de sa vie, le sera t'il seulement jamais d'ailleurs. Après l'orage, surviendra le beau temps.
Il a tellement plu sur ses mémoires, sur ses réalités que l’érosion a emporté sur son sillage les plus prometteurs des arbustes, les autres à force d’être élagués en sont réduits à mourir ou du mieux à lui rappeler qu’ils furent un jour hauts et beaux, ne lui laissant qu’un vague souvenir de leurs frondaisons .
Ses traversées seront-elles toujours tissées de chimères? Semblables à des funambules, elle erre sur de drôles d’hauteurs avec pour seul vertige cet attrait de la terre. Et revient à nouveau le big control. Big brother is not dead, he was only taking a nap. Combien de redditions aura t'elle encore à signer? Et toi, mère, terre,pendant encore combien de temps verras-tu ton ventre meurtri revivre des accouchements à rebours à chaque fois qu’un de tes enfants aura parlé, aura osé.

Demain, le soleil brillera toujours, demain, demain… alors que Charlyelle aspire tant à vivre, à conjuguer sur un autre mode que celui des silences et résignations. L’automne s’est installé et l’air est de plus en plus frais. Les dernières fleurs sont chose du passé. Les feuillus si éclatants de leur vraies couleurs seront bientôt des squelettes figés que seul le vent fera frémir. Puis, la première neige les drapera d’une majestuosité éphémère avant que le soleil ne les dénude à nouveau. Et l’hiver viendra s’installer pour quelques mois. Et elle se remettra à espérer le printemps, à s’émerveiller à l’apparition des premiers bourgeons.
Il faut bien des automnes et des hivers pour que reviennent les printemps et les étés. La belle brune a toujours besoin de se fixer un but pour continuer. Elle échaffaude des plans pour le plaisir de se maintenir dans l’expectative. Mal faite,elle est une inguérissable optimiste. Et sur la route, plusieurs visages, plusieurs histoires. Nous pensons à raison ou à tort que nos sentiers peuvent nous mener loin ou encore nous projeter ailleurs, disait le sage.Quand tu seras grande, tu parcoureras des contrées encore inexplorées, disait la voix d'Ilug dans ses souvenirs. Tu feras attention à ne pas mélanger récits et géographie, tu feras surtout attention à ne pas te laisser subjuguer par les diamants des sommets de montagnes. Un diamant n’est qu’une pierre, fruit du labeur des sans visages que d’autres vendent au prix fort. Jamais, ne t’attarde à la beauté apparente, scrute et creuse en toi.

Une ruelle, perdue dans le quartier de l’oubli. Sous le seul lampadaire, viennent se rencontrer les nostalgiques avant de disparaître dans l’obscurité de la nuit. La rue est sans cesse balayée par les vents. Les sables amnésiques la recouvrent lorsque gronde l’oubli. Les gens du quartier l’ont surnommée ainsi à cause des souvenirs ensevelis sous les attaques répétées des vents temporels. L’oubli n’est pas une faculté donnée à tous. Certains reviennent le soir guetter les fantômes de leurs jours heureux.La nostalgie n’est jamais difficile a reconnaître. Maladroitement, cette dernière tente de cacher le désarroi qui la ronge et la nourrit. Un air de dignité sur un fond de tristesse résignée.Il n’est pas un jour où ne viennent des êtres à la recherche du bonheur égaré. Luttant contres les vents de l’intolérence, ils s’affairent à reconstruire le temps d’un regard des châteaux de poussière. Ils restent là des heures durant à observer, le regard mort, cette rue pourtant bien ordinaire.
Et lorsque passe un sourire, ils ne manquent pas de verser une larme. Le sol de la rue regorge de rivières nommées amertume, de sources maquillées d’amour. Et les marées n’en finissent pas de balayer ces demeures luttant contre les omissions de l’existence.

Bientôt, il sera minuit. L’heure de toutes les folies, de tous les interdits. Elle semblera hésiter et pensera que tout ceci relève de l’onirique, qu’elle ne voudra plus rêver. Elle dira qu’elle est lasse de survoler les mêmes tours, les mêmes regards, les mêmes murs. Elle aura juste envie d’envoyer balader tout ça. Il est minuit et les âmes se terrent. A travers les persiennes de leurs coeurs emmitouflées, les êtres jugent. Elle dit que la vie est une sorte de théâtre à ciel ouvert où l’improvisation est de rigueur. Que nous sommes semblables à ces roches que les incessants fracas du temps finissent par éroder. Que ce serait puéril que de résister à la flamme qui brûle en soi. Le bonheur élude ceux qui le recherchent ardemment. Les zones de grisaille s’estompent et au loin scintille une étincelle. L’horizon des uns fait le malheur des autres semble dire son regard. Sur cette grande piste qu’est notre éphémère passage, les corps s’attisent, les esprits dansent. Ce qu’on pensait hier être unique est aujourd’hui insipide. La dague qui, aujourd’hui, lacère nos chairs ne sera qu’un léger frémissement demain. L’on pense avec tort ou avec raison que rien ne se défait et encore moins puisse être refait. Elle se parle du titan tapi en elle qui excise ses moindres fantasmes. Elle est enfant du vent que nul n’arrivait à maîtriser et encore moins emprisonner. La Pallikare est ce sud, ce nord, cet est et cet ouest, ou encore ces vents qui feraient claquer les persiennes closes. Radeaux tissés de rêves, elle traverse l’océan qu’est devenu l’impasse de l’oubli. Bientôt, la tempête se lèvera, mais qu’importe il y a si longtemps qu'elle a cessé d’exister.

Non,l'Embrummée n'est pas devenue sage pour autant. C’est certainement l’automne, bein non pas la saison, mais l’automne le vrai, celui qui s’installe insidieusement sans vous avertir. Ce sont les murs qui poussent dans la vallée, c’est le fleuve qui ne charrie plus grand chose. Envie de lâcher mon fou, mais personne avec qui parler ou délirer. Puis, panne d’inspiration. Mince, pourquoi muse n’aurait-il pas de masculin!Parce que parfois, il suffit de se taire. Il suffit de vivre, d’assumer et de s’assumer, tout simplement. Il y a eu des visages, des amitiés rares. Suffit de fermer les yeux et laisser le parfum des souvenirs remonter et charrier ces moments de complicité.

Il y aura des souvenirs; il y aura des projets. Alors qu'elle pensait avoir tourné la page, voilà qu'elle s'’embarque vers d’autres horizons professionnels. Comme d’habitude,elle se retrouve confrontée à ses démons. Qu’importe, ils font partie d'elle et elle a dépassé le stade de décortiquer. Que sera sera, il suffit de laisser la vague nous emporter et si le courant se fait fort, nager autrement afin de ne pas se noyer.

Aujourd'hui j'ai rendez-vous avec demain.

La main est posée sur le clanche, prête à pénétrer cette antre qu'elle vient de s'offrir. Ex Dentelière Hydrique, elle est la Dentelière épicée. Ce n'est que derrière cette porte qu'elle ne mettra en accord les plus belles notes et fragences de ce renouveau qu'elle s'offre.


* Allons y

Modification de la balise présente dans le nom de topic.
"[RP ouvert]" devient "[RP] Ouvert "
{Amaterasu}
Charlyelle
Sentir le soleil chaud et la brise légère sur sa peau, les odeurs d'épices, d'humus ou embruns salé. Tout cela lui manquait. Et elle venait de trouver le lieu idéal ou recréer cette atmosphère qui lui est si propre, la Pallikare.
Elle qui venait d'une terre au-delà des océans, une terre de gloire et de conquête pour certains, une terre de pays et d'harmonie pour d'autres. Là-bas les destins se font et se défont, se croisent et s'entremêlent.
Et elle...Elle qui avait fait le choix de vivre ici, contrariant les projets que son père avait pour elle. Elle eut soudain l'envie qui vînt l'effleurer de retourner à sa patrie, dut-elle affronter tous ces démons en elle pour n'en revoir qu'une portion. Il faut dire aussi que cet homme persifleur lui enjoignait méchamment l'idée de retourner chez elle. La jeune femme s'était retenue in-extrêmis de l'estourbir en taverne. Il ne valait mieux pas que celui-ci l'approche de trop près désormais, car ses jours n'en serait qu'alors comptés. Et la jeune femme avait une mémoire infaillible. Elle tapota brièvement le pommeau de sa dague d'un revers de main pensif et se mit à chantonner dans sa langue paternelle. Son épée large, quant à elle, pendait tout de même à sa hanche, dans un fourreau simple en bois cerclé de métal. Peut-être avait-elle quitte l'Hydre, mais elle n'en restait pas moins dangereuse la bougresse, si ce n'était plus qu'auparavant encore. C'était un chant exotique, porté par une voix sensuelle et rauque. Une voix de guerrière, une voix de femme, une voix de Dentelière.


"-- ... Acht vi jikmadator cayosin, jaka jaci ocuir wer cycle di ro sulta. "*

Pauvre homme, ce Languedocien aurait du s'abstenir de menacer la belle brune.
L'air qui emplissait les ruelles de la cité était lourd. Pas de brise pour charrier l'odeur des épices des échoppes des quartiers riches, en surplomb, ni de vent pour balayer les relents d'urine sèche. Rien que des miasmes de caniveaux, et de bière éventée.

"- Wer boja shilta ti qe nurauthot".**

Là voila dans la pièce. Six hautes colonnes, décorées de marbrures, semblaient monter la garde d'une table ronde. Ceci était la pièce principale mais derrière le rideau pourpre, s'évasait un petit corridor qui menait à un boudoir qui lui même dégageait un petit bureau. Et c'est ici que la Dentelière a décidé d'entreposer ce qui n'est pas politiquement correct à l'oeil nu. Si certains jouent avec les poisons, elle, ne l'oublions pas est Dentelière, habituée certes à jouer avec la mort régulièrement, mais c'est pour la vie qu'elle se bat et qu'elle travaille son don. Aussi, ce sont des petites fioles aux diverses teintes qui sont disposées là : certaines aux noms barbares de chez elle. Bulbes de danseuse, pétales de mukamue, feuilles de kériandre, feuilles d'algue noire, d'anlyprâne, pollen de jonali, feuilles de sirvane. Toutes ces potions avaient la particularité d'agir tels des anti-poisons ou d'en ralentir les effets pour certains, prolongeant ainsi les souffrances.
Bien entendu l'endroit était calfeutré et pas à la vue du chaland. C'était un peu son antre secrète. Et dans la pièce principale, c'est tout autre chose qui attirerait l'oeil du client. Les épices plus particulièrement et les secrets médicinaux de la Dentelière qu'elle est. Chirurgien aux doigts fins et experts, Maître-herboriste, ovate, matrone à ses heures, la brune recèle encore quelques mystères qu'elle garde farouchement.

Les fenêtres étaient ornées de rideaux vermeils aux bords couleur or et le sol en parquet a été lustré. Endroit lumineux pour la Dentelière hydriquement épicée. Assise et penchée au dessus de son bureau, se saisissant de sa plume à calligraphie, égouttant le surplus d’encre sur le rebord du flacon dans lequel elle venait de la tremper, pour ensuite griffonner quelques mots sur le papier qui occupait le centre de son bureau, magnifiquement ouvragé dans de l’ébène. Cela faisait des semaines qu'elle laissait le paternel sans nouvelles et elle s'était laissé dire ce jour qu'il en prenait ombrage. Simple devoir de fille à père. Rien de plus, c'est ce dont elle tentait de se persuader. En ayant terminé elle tendit le vélin à Ilug qui s'inclina sobrement sans néanmoins s'abstenir de se taire.


- Voilà qui est bien Pallikari, c'est à croire que le Sud l'emporte sur le Nord et qu'il vous fait retrouver quelque raison.

"- Tsss Ilug tais toi avant que je ne changes d'avis ! Et en premier lieu je n'ai encore rien accepté que ce soit bien clair !"

Négliger la douleur. Incarner les espérances. Elle était douée pour cela.

* ... s'appuyant sur une lame brisée, maintenant il voit le cycle de la fin éternelle.
** le passé ne peut pas être défait.
Charlyelle
Non mais ça n'allait pas du tout que cela ! Le paternel qui s'était mis en route aux dernières nouvelles. Enfin, qui avait mis les voiles plutôt et qui naviguait, bien décidé à faire monter sa fille de gré ou de force sur son foutu raffiot afin de l'embarquer avec lui là-bas dans les îles du Nord. Guerroyer qu'il disait. Mais elle s'en cogne de leur guerre, elle n'a pas envie d'y aller. Et puis elle le connait le vieux, c'est encore une de ses excuses à la noix pour tenter de l'amadouer, et surtout, surtout, de la manipuler à sa guise.
Non chez eux une femme ne monte pas sur un trône. Par contre ça peut pondre un héritier qui Lui y grimpera forcément. Elle a compris Charlyelle où voulait en venir son père. Et elle a décidé que non ça n'allait pas se passer comme il l'entendait lui. Elle aurait du le tuer quand elle en a eu l'occasion ! Mais pourquoi donc ne l'a t'elle pas achevé à ce moment là !!!

"- Kach'eri* !! Mais plutôt crever que d'aller épouser un de vos hommes ! Tous des ordures, des bons à rien, des râclures! parlent même pas la même langue que moi pour la plupart !"

Furieuse. Assurément oui, elle l'était. Les brumes avaient pris l'éclat ouragan. Et jamais, jamais elle ne le suivrait de son plein gré. Il faudrait qu'il l'assomme, qu'il la drogue où pire encore qu'il la tue pour qu'il puisse la plier à sa volonté. C'est qu'elle a de la résistance la Dentellière. Mais elle sait aussi qu'avec Vlad, il faut qu'elle joue rusé. Qu'elle la joue finement. Ce n'est pas en lui rentrant dans le lard qu'elle aura gain de cause.

"- Et puis même que vous arriveriez à vos fins, je connais les simples qui feront que ma panse restera vide de tout héritier ! Dusse-je m'intoxiquer, je vous jure, que je ne vous pondrais pas le coq du siècle !"

Et faudrait déjà que le mâle dominant que son père comptait lui destiner dès qu'il aurait remis la main sur elle ait tout loisir de la coincer. Ce qui était sans compter sur les onces de malignité et de perversité de la brune, dans ce domaine là.

Ilug est auprès d'elle, toujours aussi magnanime. Il l'écoute le vieil homme, hochant la tête. Lui qui l'accompagne depuis sa toute prime enfance n'est pas toujours d'accord avec son souverain, et notamment sur les décisions prises concernant le futur de son élève. Mais qui est-il, vieux Sage pour tenter de contrer les décisions de cet homme qui est persuadé de bien faire, lui qui n'a pas connu sa fille enfant mais ne l'a découverte que sur le tard.
Evidemment qu'Ilug connait la Dentellière comme personne, et il se retrouve le cul entre deux chaises. Car il n'est pas non plus sans connaitre que les chats ne font pas des chiens et que les relations entre le père et la fille sont extrêmement tendues.
Aucune mère ou femme au milieu pour tenter de faire tampon entre les deux. L'homme dans toute sa splendeur et sa connerie humaine, homme qui veut maintenant jouer son rôle de père alors qu'il n'a pas su le faire dans le passé. Et forcément en face, la gamine blessée, meurtrie par ce qu'elle considère avec quelque raison il ne peut le nier, à un abandon pur et simple. Et une tentative de rachat maladroit et autoritaire.
Et lui, pauvre hère, pris entre l'obéissance qu'il voue à son maître et cette affection presque paternelle pour sa part qu'il a développé depuis toutes ces années pour sa Pallikari.

- Vous devriez bientôt voir vos caisses d'épices** livrées. J'ai appris que les navires étaient en mer, et ne devraient donc plus tarder d'arriver. Imaginez ! Sentez les arômes qui vont très bientôt titiller vos sens et vos narines ma Pallikari ! Poivre, safran, cardamome, cannelle, gingembre ! Pensez donc à tout ce que vous allez pouvoir faire avec !

Il regarde les embrumées se faire rêveuses et ravies alors qu'il tourne et vire autour d'elle, faisant des gestes éloquents de la main. Il sait combien elle est dans son élément. Et c'est donc le moment de lui apprendre le reste. Peut-être que cela passera telle une étoile filante dans le firmament.

- Votre père est à la barre de l'un des navires.

"- QU...QUOIIIII ?!!!!"


Ou comment être ravie de la nouvelle. Elle en hurle d'une liesse certaine.

*fais chier !
**Les épices jouent un rôle dans la civilisation depuis plus de 5000 ans. Elles ont été utilisées non seulement pour ajouter de la saveur à la nourriture, mais aussi comme aide pour améliorer le goût des plats de viandes dont la fraîcheur laissait à désirer.
Considérés comme ayant également des vertus médicinales, voir même magiques, les épices pouvaient servir à la préparation de produits de beauté et jouaient également un rôle social. Leur rareté et leur coût d'acquisition élevé leur donna une valeur comparable à l'or. En l’an 408, Alaric 1er, roi des Wisigoths a exigé une rançon de plus d’une tonne de poivre (denrée précieuse, le poivre servait même de monnaie pour acquérir terres et châteaux).
À une époque où l’habit fait le moine, montrer à ses hôtes sa richesse en servant une cuisine épicée devient de bon ton. On accommode donc les mets avec des épices venues d'orient et mises à la mode par les croisés (girofle, safran, cannelle, gingembre, cardamome, poivre) et aussi avec des oranges et des citrons dont le jus était utilisé pour parfumer certaines sauces. Les épices fortes communes (thym, laurier, ail, oignon, échalote, persil, ciboulette) aromatisaient les nombreux plats en sauce : au vin, au vinaigre ou au verjus (jus de raisin vert). L'abondance des épices fortes dans tous les plats s'explique également par l'absence d'excitants en dehors du vin et des alcools.
Charlyelle
La "Pearly Gate". Charlyelle ne décolérait toujours pas après avoir lu la missive paternelle du jour. Même si l'expression l'avait fait sourire intérieurement, il n'était pas question qu'Ilug s'aperçoive que son horrible princier de père avait réussi à percer une brèche en cette journée. Aussi, s'approche t'elle de son vieux hencher et les ourlées viennent se coller à l'esgourde de l'Ancien.

"- Tu ne lui a pas dit où nous nous trouvions actuellement n'est-ce pas Ilug ?

- Non. Je ne me le permettrais pas sans votre accord Ma Demoiselle. Mentalement le vieil homme monologue.
Je lui ai seulement fait part de quelques renseignements lui permettant par recoupement de vite vous localiser.

Evidemment, Charlyelle ne peut se douter de cela. La jeune femme est plutôt de bonne humeur ce jour. Puisque les épices sont en route, elle n'a pas d'inquiétude plus avant à avoir. Car tout est question d'organisation dans ses opérations commerciales et de toute évidence, la Brune a de qui tenir. Et la Hanse paternelle n'est pas des dernières les plus investies. Digne représentante en est-elle dans ces contrées bien qu'elle ne l'étale nullement sur la place publique. Toute en discrétion Charlyelle. Si son père et ses hommes s'étaient spécialisés dans le commerce des équidés, des armes et des fourrures, elle avait pris la relève connaissant sur le bout des ongles les perlées, les pierres précieuses et les épices. Principalement tout cela avait essence dans son art : chirurgie, médecine, contre-poisons, simples et autres botaniques. Alchimiste à ses heures l'Ecossaise. Sous l'égide d'Ilug et elle venait de trouver le moyen de s'assurer le silence ad-vitam -tout du moins, le croyait-elle, car la belle brune sous-estimait manifestement le pouvoir de son père sur son hencher-de celui-ci. Le prenant alors par la main, les brumes joyeuses, elle l'entraîne avec elle, empruntant un escalier presque dérobé qui descendait au sous-sol. Y pénétrant, elle souffle à Ilug, un air ravi se jouant sur son fin visage.

"- Regarde. Rien que pour toi !"

Comment s'octroyer les faveurs et le mutisme de celui qui veillait sur elle depuis sa naissance. Il ne pouvait donc que lui être loyal. Et ainsi elle avait un moyen de pression sur lui afin qu'il y réfléchisse à deux fois avant que d'aller jacasser auprès de son souverain.
La jeune femme s'est accoudée au mur et laisse ses houles enrober la pièce. L'endroit était bien évidemment dissimulé au regard des curieux. Il possédait l'indispensable en l'état : une cheminée. Divers manuscrits étaient déposés sur les étagères. Elle avait même fait préparer une alcove avec couche et baquet. Le top du top pour le vieil homme qui se refusait de tout temps à pénétrer dans sa roulotte pour autre chose que la servir. Et puisque la jeune femme venait d'intégrer la Mesnie des Blackney elle avait trouvé l'excuse idéale pour qu'il ne puisse refuser.

"- Ton coin à toi Ilug ! Tu vas pouvoir me surveiller tout en pratiquant ce que tu aimes le plus à faire et tu pourras donc m'inculquer cette théorie que tu as survolé dans ton enseignement. La pratique Ilug, rien de tel !"

Un air sérieux sur le fier petit visage. Histoire de masquer cette affection particulière qu'elle lui porte. Pour que le vieil homme puisse s'adonner à son Grand Oeuvre, la Pallikari avait fait installer un athanor. Fourneau alchimique chauffé impérativement au bois ou à l'huile lui avait enseigné Ilug. Jamais au charbon, seuls les charlatans se servaient de ce matériau là. En forme de tour, il avait un regard ménagé dans sa paroi, afin d'observer l'aludel, quand la matière première commençait à subir ses changements. Cornue ovoïte soit faite de terre cuite, de cristal ou comme ici, en l'occurrence de verre. Il était clos par un sceau d'Hermès.
Et comble du bonheur. Non loin elle avait fait livrer dans le plus grand secret un pélican. Simple outil de distillation à la musique étrange et envoûtante. Pinces, tisonniers, marteaux, soufflets de toutes sortes, faits de grès, métal, cuivre et verre accompagnait le tout. Un clepsydre trônait également dans la pièce. Ilug pourrait ainsi mesurer le temps à sa guise.

Le Grand Oeuvre est une activité sacrée, basée sur le rythme des saisons et pouvait s'avérer dangereuse même pour les initiés.

M.erde. Elle jurerait qu'elle vient de voir une larme perler sur le visage du vieil homme. Et on détourne le regard, feignant d'embrasser de nouveau la pièce.
La voix rauque de la Dentellière a un accent plus accrocheur encore que d'habitude. 'Tain c'est qu'elle nous en ferait une mini crise de sentimentalisme.


"- Même mon père ne t'a jamais offert un tel spectacle."

Tiens te le toi pour dit Ilug. Tu as compris que je viens d'acheter ton silence. Non. Bien sûr que non tu n'oseras pas, tu sauras tenir tête à Vlad toi aussi maintenant. Elle oublie aisément Charlyelle, qui est le souverain et l'emprise qu'il peut avoir sur ses sujets. Elle est sa fille elle, mais n'ayant jamais vécu auprès de lui, elle a une méconnaissance totale de la chose.
Elle frappe doucement dans ses mains.

" Bien, bien. Je te laisse donc à ton oeuvre et je m'en vais continuer la mienne là-haut".

C'est que bien qu'elle attende la livraison de ses épices, la Dentellière a ses Précieuses, son trésor à installer. Son fond de commerce c'est les épices. Mais elle réserve une infime partie de ses Précieuses à la vente également. Bien que ce ne soit pas n'importe qui qui puisse s'offrir ces pierres là. Et encore, elle compte bien trier la clientèle sur le volet. Drastique, dure en affaire Charlyelle mais surtout pas folle. Une infime partie seulement. Le reste lui sert dans l'art qu'elle pratique. Elle en détient aujourd'hui les secrets et le savoir, savamment distillés par Ilug depuis de longues années.

Quant au seul à qui elle ait offert l'une de ses Précieuses perlées, elle est persuadé qu'il n'a aucune idée de ce qu'il possède entre les mains. Ni que la Soumise Amante n'a pas besoin d'être près du Maitre pour le protéger. Même de loin elle oeuvre. Il n'en sait rien bien sur Judas Gabryel. Et pourtant.

Remontée à l'étage, elle s'agenouille près d'une malle qu'elle ouvre. Et les mains plongent à l'intérieur de l'antre sacrée aux si diverses propriétés.
Ein.sam
Des chausses usées foulaient les pavés que la plupart de la foule claquaient de leurs bottes cirées. Les belles toilettes en étoffes luxueuses se doublaient poliment dans les halles et les capes de bonne manufacture traînaient à terre. Au milieu de tout cela, une personne emmitouflée dans un cache-misère tentait de se frayer un chemin. A première vue, il n'était pas aisé de définir le sexe de cette errante mais tous jugèrent que sa place n'était pas ici-lieu. Les regards pesants sur elle et les reproches de voir un gueux mendier dans les belles rues n'avaient pas l'air de la blesser plus que cela. L'Androgyne longeait les échoppes, s'aidant des enseignes pour comprendre le commerce des multiples bâtisses. Car oui, en plus d'avoir l'air misérable, la garçonne était analphabète.

Les dessins des devantures se succédèrent sans qu'aucuns d'eux ne correspondent à ce que la Solitaire cherchait. Cette dernière commençait vraiment à douter de sa présence ici qu'en enfin, elle entendit des badauds parler d'épices. Laissant traîner ses oreilles à leurs propos, elle put localiser le magasin avant qu'ils ne la surprennent à épier. Esquivant maladroitement les ruades, les écrasements d'orteils ou les malencontreux coups de bottes, la masculine arriva enfin à destination.

En poussant l'huis, une forte odeur épicée embauma l'air, il n'y avait plus de doute possible. L'errante referma la porte derrière elle et huma à plein poumons les diverses fragrances entremêlées. Ses ébènes perçantes observèrent la salle: celle-ci était joliment décorée de gravures, la présence de marbre et le parquet lustré prouvaient que ce lieu était assez opulent même si chacun savait qu'il regorgeait de richesses rien qu'au parfum entêtant.

N'osant faire un pas de plus, la Brune se racla la gorge avant d'annoncer sa présence de sa voix rauque à l'accent occitan:


Bonjour...Il y a quelqu'un?
_________________
Charlyelle
L'installation de la Brune des îles Nordiques au fin fond du Sud n'était bien sûr pas anodine. Car elle savait que son paternel chercherait tout d'abord à la retrouver dans tout lieu qui se rapprocherait de ses cultures Celtiques. Mais pas que. La Dentellière savait fort bien que Montpellier disposait d'un arsenal. Et qui dit arsenal, dit navires de tous horizons. Et pour son commerce si particulier, cela ne pouvait que séduire la Pearly Gate. D'aucun sur place se méfiait d'elle comme la peste. Car elle trainait avec elle sa sulfureuse réputation d'Hydrique. Et même lorsqu'une Dentellière hydrique raccroche un passé quelque peu mouvementé, il y a toujours vile langue pour dépecer et se croire plus finaude. Mais Charlyelle s'en cognait et cela ne l'empêchait nullement de mener sa petite vie comme elle l'entendait.
Pas de princier père sur le dos, du moins, à l'heure actuelle. Il était bien trop occupé par ses activités marino-militaires et s'amusait à la bataille navale made in île du Nord. Pendant ce temps, les Balkans lui foutait une paix royale également et elle avait enfin l'impression de sentir le noeud coulant se défaire lentement le long de sa gorge.
C'est tout du moins ce que la brune pensait là tout de suite, et elle n'avait aucune idée de ce que son géniteur lui réservait comme nouveau coup tordu. L'aurait-elle su d'ailleurs que l'on ne saurait trop savoir de quelle manière elle aurait réagi.
Pas d'homme non plus qui interfère dans sa vie quotidienne. Elle s'en tenait soigneusement à l'écart, ceux qui osaient s'y aventurer rebroussaient vite chemin. Son Maître-amant, dont elle est persuadée dur comme fer qu'il est Mainois, ne s'inquiétait pas de sa personne et elle en faisait tout autant. Quant on vous le dit qu'il n'y a pas meilleure maîtresse qu'elle.

Elle venait de recevoir les premières cargaisons d'épices. Acheminées tout droit celles ci des cales de quelques caraques et naves italiennes. Venise, Gênes, Pise. Leur utilisation culinaire se confondaient avec leurs propriété médicinales et la Dentellière avait pris soin de leur réserver places adéquates en son échoppe. Il y avait même un coin plus retiré réservés aux épices de chambre. Ceux là mêmes qui étaient prisés et des avocats et des juges. Mais sa clientèle pour ces épices là relevait bien plus des avocats qui savaient pourquoi ils venaient en faire acquisition.
Depuis le début de la matinée, les lieux regorgeaient donc d'odeurs plus entêtantes les unes que les autres. Gingembre, cardamome, cannelle, girofle, graine de paradis, poivre long, aspic, poivre rond, fleur de cannelle, safran, noix muguette, feuilles de laurier, garingal, mastic, tores, cumin, sucre, amandes, aulx, oignons, ciboules, escaloignes avaient trouvés belle exposition. Plus loin, les diverses herbes et les pierres précieuses n'étaient pas en reste non plus. Néanmoins, si les lieux se faisaient discrets depuis venelle, c'est qu'elle le souhaitait ainsi. Afin de ne pas trop attirer d'yeux trop fouineurs sur ses activités et encore moins les hommes de son paternel.

Bonjour...Il y a quelqu'un?

Penchée au dessus de l'une des jarres, elle avait senti une présence avant même que d'entendre parler. Un léger courant d'air traitre et cet instinct qui ne la quitte jamais.
Les embruns grisés Nordiques se lèvent sur un vague accent qui commence à devenir familier dans ses esgourdes.

"- Je suis là".

Accent rauque nordique en écho.
Ein.sam
La vagabonde se repéra au son de la voix pour s'avancer dans la boutique. Elle avait l'ouïe fine, la Brune et cela n'était qu'une aptitude parmi tant d'autres qu'elle possédait. Ses pas étaient lents mais pas incertains, la garçonne prenait le temps de balayer la salle de ses ébènes perçantes avant qu'elles ne se posent définitivement dans le dos de son interlocutrice.

Et dire que la Solitaire avait fait tout ce long chemin pour une poignée de condiments. La récompense du concours ne valait surement pas le quart des lieues parcourus et entre vous et moi, la garçonne se fichait royal d'un premier prix de cuisine. Ce voyage permettait à l'Androgyne d'échapper quelques temps à son quotidien monotone.Elle pouvait ainsi se changer les idées et découvrir de nouveaux horizons, pourquoi pas faire d'intéressantes rencontres en route aussi?

Pour le moment, la masculine se trouvait au milieu des Halles de la Capitale avec une modeste requête:


Voilà, je cherche des épices pour relever mes plats de viandes...J'aurai besoin de sucre, de feuilles de laurier, de clous de girofles et de poivre...Pourrais-je avoir aussi les prix du cumin et de la cannelle, s'il vous plait?

Bien que ce ne soit pas dans ses habitudes de se montrer trop courtoise, l'errante surveillait grandement son verbe. Sa présence était déjà inopportune en ces lieux, il fallait pas en plus qu'elle se fasse remarquer de trop.
_________________
Charlyelle
Une paire d'yeux qu'elle sent posée dans son dos et la Celtique se retourne, détaillant rapidement ce qui semble être une jeune..personne. Difficile de jauger s'il s'agit d'un Il ou d'un Elle aux premiers abords.

Voilà, je cherche des épices pour relever mes plats de viandes...J'aurai besoin de sucre, de feuilles de laurier, de clous de girofles et de poivre...Pourrais-je avoir aussi les prix du cumin et de la cannelle, s'il vous plait?

Le transport de la marchandise par bateau sur l’Océan Indien jusqu’en Egypte et en Syrie, le déchargement sur l’isthme de Suez et le passage jusqu’à Alexandrie, l’embarquement jusqu’à Venise, enfin le pénible voyage par les Alpes jusqu’aux marchés d’Europe centrale et septentrionale, n'est pas sans conséquence sur les prix que l'Ecossaise pratique à la vente de ses Précieux. En raison de leur prix élevé, les épices sont devenues les symboles du statut de la classe dominante, les insignes de son pouvoir, que l’on expose et que l’on engloutit ensuite. La mesure ou la démesure qui préside à leur consommation permet d’apprécier le rang social de l’hôte. Plus le poivre sollicite les muqueuses des commensaux, plus le maître de maison forcera le respect.

"- Maniguette ou graines de paradis pour le poivre. Bien moins onéreux que le poivre long ou le poivre rond. Une poignée de clou de girofles vaut le prix d'un mouton et d'un demi-boeuf. La canelle possède un arôme puissant et vaut bien dans le triple d'un poing de clou de girofles."

Sa clientèle du jour aurait-elle voulu se faire remarquer qu'elle ne s'y serait pas prise autrement. L'Hydrique hyvresse est toujours là, tapie dans le tréfonds des chairs et de la conscience de l'Ecossaise. On ne la lui fait pas. Soit cet énergumène est envoyé par l'un de ses riches mécènes ou noble, soit les intentions sont purement autres. Elle ne se laisse pas gruger par une mine, une tenue, ou un parler la Brune. Elle-même trop joueuse de ce qui peut être fallacieux argument et trompeur au possible.

"- C'est banquet royal chez vous ? Je vous prépare tout ça dans des nouets peut-être ? Et l'poivre, combien de grains je vous mets ?"

Les lippes se fendent d'un étirement un brin goguenard. La bonne affaire que voilà ! Bien trop poli pour être honnête.
Ein.sam
La Dentellière fit face à la vagabonde et cette dernière put l'observer. Soit cette commerçante était bien trop méfiante de la venue de l'errante -comme le reste des Halles-, soit il y avait un autre prétexte pour percevoir tant de garde en elle. Qu'importe, cette personne avait un petit je-ne-sais-quoi qui la démarquait des autres magasiniers...Surement ces prix qui fit pâlir la Solitaire.

Un mouton et un demi-boeuf pour quelques clous de girofles?! réalisa dans sa tête l'Androgyne dont le visage était tiraillé entre l'étonnement et la gêne. Ce n'était pas la fortune qu'elle possédait sur elle et la garçonne ne comptait pas faire demi-tour les mains vides. Un court instant de reflexion pour digérer la somme. Sam rétorqua:


Feriez-vous le prix à la tête du client?

Il était certain que les tarifs restaient en travers de la gorge de la pauvrette et cette dernière tentait vainement de trouver une solution rapide et "courtoise".

Hum...Avant d'emballer, j'aimerai connaitre la somme d'une tige de laurier et d'une bourse de sucre, s'il vous plait...

Retardant un peu l'échéance, l'errante scrutait la disposition des jarres. Avec beaucoup d'agilité, elle aurait pu les atteindre mais entre la misérable et le trésor se trouvait la Celtique. Un mauvais pressentiment faisait craindre l'Occitane vis à vis de la marchande: quelque chose ne semblait pas clair en elle et il valait mieux se méfier. Une autre idée lui vint alors en tête...
_________________
Charlyelle
Ronde des affects, corruption des âmes.

Elle ne lâche pas sa "cliente" de ses embrumées. C'est que si d'extèrieur, son échoppe ne paie pas de mine, c'en est bien différent à l'intérieur. Une héritière princière qui s'amuse à faire du commerce, forcément, cela laisse quelques traces. Même si elle reste d'une discrétion légitime sur ses origines. Et quand cette dentellière là s'en sort de l'Hydre, le mélange est détonnant.

Ce n'est pas tant ses épices qu'elle surveille que ce qui est entreposé dans le fond de la pièce.
Cétaient des coupes d’onyx arrondies, autour desquelles rampaient des queues de dragons, tandis que les têtes et les corps de ces animaux fantastiques, se dressant en face l’un de l’autre, étendaient leurs ailes azurées tout étoilées d’or, et, la gueule ouverte comme des chimères, se menaçaient avec leurs yeux de rubis.
C’étaient des aiguières d’agate au pied desquelles s’enroulait un feston de lierre qui, remontant en forme d’anse, s’arrondissait bien au-dessus de son orifice, cachant au milieu de ses feuilles d’émeraude quelque merveilleux oiseau des tropiques tout habillé d’émail, et qui semblait vivre et prêt à chanter.
C’étaient des urnes de lapis-lazuli dans lesquelles se penchaient, comme pour boire, deux lézards si habilement ciselés qu’on eût cru voir les reflets changeants de leur cuirasse d’or, et qu’on eût pu penser qu’au moindre bruit ils allaient fuir et se réfugier dans quelque gerçure de la muraille. C’étaient encore des calices, des ostensoirs, des médailles de bronze, d’argent, d’or ; tout cela émaillé de pierres précieuses, comme si, à cette époque, les rubis, les topazes, les escarboucles et les diamants se trouvaient en fouillant le sable des rivières, ou en soulevant la poussière des chemins ; c’étaient enfin des nymphes, des naïades, des dieux, des déesses, tout un Olympe resplendissant, mêlé à des crucifix, à des croix, à des calvaires ; des Mater dolorosa et des Vénus, des Christs et des Apollons, des Jupiters lançant la foudre, et des Jéhovahs créant le monde ; et tout cela, non seulement habilement exécuté, mais poétiquement conçu, non seulement admirable comme bijoux à orner le boudoir d’une femme, mais splendide comme chefs-d’oeuvre à immortaliser le règne d’un roi.

De sa dextre, nonchalamment, la brune jouait finement du pommeau de sa dague. Le dernier rigolo qui avait tenté de s'en prendre à elle, dans les pavés de Paris avait terminé dans un caniveau. Un autre s'était vu planté un coup de dague, derrière la clavicule, au bas du cou, dans l'intervalle du sternum à l'épaule. Il était mort quelques secondes plus tard. Pour la dentellière qui pratiquait cet art si particulier, cela n'était que d'une simplicité enfantine.

Feriez-vous le prix à la tête du client ? Hum...Avant d'emballer, j'aimerai connaitre la somme d'une tige de laurier et d'une bourse de sucre, s'il vous plait...

"- Cela peut se faire. Dites-moi donc de combien votre bourse dispose."

Droite et bien prise dans sa fine taille, elle portait sa tête avec une dignité et une grâce féline qui tenait à la fois de la chatte et de la panthère, mais elle en avait aussi et les bonds inattendus et les appétits meurtriers. Mais en l'occurrence, elle avait cette intuition, que la personne qui avait poussé la porte de son antre, semblait elle, venir pour une raison bien précise.

Elle allait en avoir le coeur net.
Ein.sam
La vagabonde n'était pas à son avantage même si quelques possibilités s'offraient à elle. Malgré le doute qui régnait en son intérieur, l'apparence restait implacable. Celle de la marchande aussi d'ailleurs: droite, fière, élégante et même armée... Les doigts se muaient avec habilité sur le pommeau d'une dague, ce qui extirpa un rictus de nervosité mêlée à une once d'amusement. Maintenant la Solitaire était certaine de ne pas être la bienvenue. Son sombre regard balaya les luxueuses marchandises avant de fixer à nouveau la Dentellière. Légèrement effrontée ou plutôt inconsciente, l'errante s'exclama d'un ton joueur:

Voilà une belle arme que vous avez là...La dégaineriez-vous pour moi, humble client...? Ma bourse est pleine si c'est ce que vous craignez.

Sur ces paroles, la garçonne ouvrit son cache-misère et décrocha l’aumônière de sa ceinture. Cette dernière était bien ronde et pesait dans la main, il devait facilement avoir de quoi acheter deux boeufs mais elle espérait s'en tirer pour moins dans ces achats. Une fois, la bourse dans le champ de vision de la commerçante, l'Androgyne reprit:

Je n'étais pas au courant que les marchands accueillaient leur clientèle de la sorte... Cela rajoute une touche de piquant, je dois bien l'avouer...

L'errante échappa un petit rire avant de poursuivre, nonchalante:

Une commerçante avisée pour des produits onéreux, quoi de plus logique, n'est-ce pas? Est-ce le fruit d'un long et dur labeur que cette échoppe ou...?

La Brune laissa sa phrase en suspens, ne voulant s'aventurer trop loin dans ces provocations. Sam n’était pas là pour ça et surtout n'oubliait pas la lame présente ni ne sous-estimait sa détentrice. Elle sentait bien que la Celtique cachait quelque chose mais quel était ce présentiment si étrange ? Secouant sa tête d'un geste las, la vagabonde se reprit:

Excusez ma curiosité, Dame. La nervosité sans doute... Comme vous pouvez le constater, je n'ai pas l'habitude de fréquenter ce genre de lieux. Mais ma bourse est garnie, cela vous rassure t-il?

Les ébènes perçantes restaient figées sur la dextre en mouvement, craignant un geste rapide et pourquoi pas fatal ? Fallait-il vraiment tenter l’Irlandaise ?

Désolée de répondre si tardivement mais j'ai eu des obligations IRL. Mon personnage était en tamago ces derniers temps.

_________________
Charlyelle
Ce jour, elle était là. Demain elle serait ailleurs mais aujourd'hui, c'est une commande qu'elle se devait de préparer. Il faudrait qu'elle aille la lui porter et surtout la lui remettre en main propre. Pas le choix, elle n'avait confiance en personne La Dentellière. Et ces dernières semaines n'avaient pas été pour la soumettre à un quelconque autre avis.
Pourquoi avait-elle accepté alors qu'elle s'était promis qu'elle ne voulait plus avoir affaire à ces nobliauds là. Sans doute parce que le demandeur est du lot, celui qui en ressortait. Et qu'elle ne peut lui tenir rigueur à lui du comportement de celle qui lui tient lieu d'épouse.
Et puis pourquoi est-ce à elle aussi qu'il s'est adressé ! Peut-être parce qu'il a un brin confiance en l'Ecossaise. Peut-être simplement parce qu'il n'avait personne d'autre à qui demander. Chose qui serait étonnante tout de même pour le noble qu'il est.

A commencer par lui apporter une sodalite. Car la Dentellière a cette particularité d'être différente des autres. Là où il y a empoisonneuse elle a le don des anti-poison, elle connait la science des plantes mais elle l'adjoint toujours à ce qui fait partie de l'essence de ses aïeux en Ecosse : les pierres. Et la Pearly Gate porte bien son nom faut croire.
Dans le creux de la paume de sa main, repose une partie de ce qu'elle doit livrer. D'un bleu profond, parsemé de teinte de violette et contenant des veines blanches de calcite. Minéral pourtant commun, elle a des effets sur les humeurs et plus particulièrement sur les peurs et les émotions. Et ça chez Enzo, c'est quelque chose de terrible que le seigneur a bien du mal à contrôler, si tant est qu'il arrive à le faire. Ce dont elle doute vu que lorsqu'elle avait quitté Montpelliers, cela faisait plus d'une semaine que suite à ses humeurs, le Seigneur l'évitait et refusait de la voir. Faut dire que l'Ecossaise n'y allait pas de main morte non plus lorsqu'elle se trouvait face à lui. Mais à l'époque, elle travaillait au sein de la mesnie et c'était son rôle que de ne pas l'épargner.
Dans un sachet, bien tassé, c'est de la poudre de lie de vin, de feuilles de myrte et d'amandes amères concassées qui est glissée.

Avant de partir, elle rajoute dans sa besace de quoi faire des cataplasmes : fénu-grec et graine de lin.

Laissant les lieux aux bons soins d'Ilug, l'Ecossaise s'en part livrer sa commande pour le Seigneur.
Charlyelle
La Dentelière Epicée est de retour sur ces lieux qu'elle avait laissé en garde à Ilug. Mais le vieil alchimiste n'est plus, ayant par quelque sort plus ou moins heureux, choisi de l'envolée de son destin.
Et la Dentelière n'a pas eu le coeur de revenir plus tôt surement, dans cette Antre du superficiel et de son autre, royaume des arômes et des senteurs. Du plus coloré au plus empreint de noirceur. Des épices, qui se montrent sur les luxueux étals de la pièce principale qui sert de faire-valoir.
A ce qui se cache dans des pièces plus reculées, et qui ne se vend pas au grand jour, mais qu'elle approvisionne selon la demande. Quelques drogues, poisons et contre-poisons et autres petits bijoux salvateurs de sa composition. L'opium est là quelque part. Mandragore, jusquiame et autres substances dépendantes, se cachent dans les lieux.

Elle le cache son Art la Dentelière, et ne le dispense pas à tout vent. Nul gaspillage, nulle vantardise, tout du bouche à oreille et toujours avec cette discrétion qui la caractérise.

L'atelier d'alchimie, bien caché dans les entrailles des lieux va reprendre vie sous la main experte de celle qui n' a pas son pareil pour ne jamais démasquer ce qui ne doit l'être.

Aujourd'hui, c'est de l'or rouge qui coule entre les doigts Dentelés, le safran se fait ornement pour les enlumineurs ou les moines qui ont pour tradition d'user de cette colle à base de blancs d'oeufs dorés au safran.
Cet or rouge dont le colorant possède nombreuses subtilités.
La Dentelière les connait, en use et en abuse, et certains se bousculent pour obtenir l'épic é rougeoyant qui se fait luxe et désiré.
Il est beau. Il est bon. Il est onéreux et cela contribue à remplir ses bourses qu'elle n'a pourtant pas vides. Loin de là, même.

Le safran, cette plante millénaire dont la qualité dépend, tel un bon crû, de sa provenance. Epice de légende parmi tant d'autre dont les arômes et les saveurs s'exhalent dans la pièce découverte.
Il attire autant le teinturier, que le médecin, que le maitre-queu, que l'enlumineur. Du huileux au spirituel, il attire toute sorte de clientèle.

Son dernier caprice : le jouet que son princier paternel doit lui faire livrer ces prochaines semaines. Elle préfèrerait qu'il le lui amène lui-même, afin, pour une fois dans sa vie, une exquise et délicieuse Unique, pouvoir l'assommer de son emprise et jouir de cet ascendant qu'elle prendra alors sur lui.
Cet homme qu'elle hait et qu'elle aime pourtant au-delà de toute raison. Parce que de père, elle n'en aura jamais qu'un seul.

Mais là où d'autre la verront bien née, Charlyelle ne fait que fuir l'inévitable. Ce qui vient toujours la rattrapper au moment où elle s'y attend le moins.

Héritière princière qui se voile la face mais la princesse des bas-fonds elle, s'assume particulièrement mieux. Les charges sont différentes et l'esprit n'a de cesse que d'être en perpétuelle contradiction entre devoir et liberté.

L'hermétisme est devenu synonyme de secret et de mystère, et la Dentelière en porte les stygmates. Peu nombreux sont ceux qui arrivent à l'approcher, elle se fait souvent insaisissable. Aussi discrète qu'une ombre. Autant pour échapper à la tyrannie paternelle que pour se préserver d'un monde auquel elle ne croit plus.

La boutique est tranquille, à l'abri des regards indiscrets.

Seuls les initiés en poussent la porte et trouveront ce qu'ils viennent chercher.

Parfois quelques curieux mais ceux-là sont vite raccompagnés aux portes avec courtoisie par la maîtresse des lieux.

Elle est ainsi la si particulière Dentelière, qui fut dentelée et façonnée par un prince et une druidesse.
Elle en porte les stygmates et nul ne peut savoir ce qui l'attend en passant ces portes.
Soren
      « Danse avec les loups »


La pièce est plongée dans le noir le plus total. Pas un rayon de lumière n'arrive à percer les ténèbres de la nuit, et ce ne sont pas les étoiles qui scintillent sur la voute céleste qui y changent quoi que ce soit. Ce soir, la lune fait sa timide. Seul le halo de la lampe-tempête d'un passant égaré parvient de temps à autre jusqu'à mes prunelles, révélant ainsi les volutes de fumée qui dispersent des fragrances de lavande et de sauge. Dehors le frimas de l'hiver laisse déjà une fine pellicule de givre sur les rebords de la fenêtre, sur le pavé de la chaussée. Au loin, un corbeau sans doute égaré peste contre les rigueurs de la météo. La cloche d'une église sonne les matines. Paris s'est endormie...ou presque. Je tire une bouffée sur ma pipe, faisant rougeoyer les feuilles et les graines que je fume. J'aime cette odeur. J'aime cette sensation qui s'empare de ma bouche, qui descend le long de ma gorge et qui se diffuse ensuite dans mes poumons. L'odeur est enivrante, presqu'autant que celle de la bière. Ce mince voile de fumée me donne l'impression de pouvoir mieux dissimuler mes pensées. J'ai pris l'habitude de fumer pendant ce long voyage qui amena à ma guérison : Guyenne, Poitou, Touraine, Maine, Bretagne...Des interrogations, des doutes, des certitudes. Les doutes ont été levés, les certitudes se sont envolés en fumée comme cette feuille de sauge ce soir. "Tu es dangereux parce que tu es imprévisible". Quelqu'un un jour m'a dit ceci. Qui? Aucune idée. Mes souvenirs ne valent rien mais si je suis si imprévisible, c'est sans doute parce que celui qui tire sur les fils de ma destinée l'est tout autant.

Qu'est-ce que je fais ici? Dans cette pièce, seul, à attendre? Pourquoi suis-je venu? Pourquoi ai-je répondu à cette étrange invitation anonyme? L'appât de l'imprévu, des problèmes, voilà ce qui a motivé mon geste. je ne suis bien que dans le tumulte, dans l'oeil du Maelström. Les ennuis, je ne les attire pas: je les recherche. Qui m'a écrit? Et pourquoi? Je n'ai rien d'autre à faire qu'à tenter de trouver une réponse à ces deux questions. Qui m'a convié ici? Et dans quel but? L'écriture sur la missive était soignée, élégante. Une personne de qualité que son auteur, de bonne éducation, qui sait que l'on doit barrer le O de Søren. Il a dit qu'il voulait me parler de vieilles histoires? Que je serais sans doute heureux et surpris de le revoir. Est-il une de ces chimères sortie tout droit de ces fragments de souvenirs délétères qui parsèment mon esprit ça et là? Un ennemi personnel? Une personne que j'aurais offusqué pendant ma vie en Périgord-Angoumois? Un frisson parcourt mon échine. Le froid s'infiltre par la moindre interstice, emprisonnant la pièce entre ses griffes acérées et glacées. J'espère au moins qu'il ne m'a pas fait venir ici pour faire une expérience scientifique sur la résistance des danois au froid humide de Paris.

Des craquements. Des marches de bois se plaignent. Ma visite qui grimpe les escaliers? Instinctivement, ma main se porte à la hauteur de ma ceinture. Oui, il est là.et il glisse bien dans son fourreau. Pour autant, il doit encore rester là. Pas tant que je n'en sais pas plus. Ça y est, mon hôte est arrivé à l'étage. Le silence a repris ses droits mais pas pour longtemps. Un cliquetis métallique ténu se fait entendre à l'extérieur. Une clé est enfoncée dans une serrure. Clic-clac. Elle tourne. La porte grince sur ses gonds. Je tente bien de plisser les yeux. En vain. Ma poitrine monte et descend à un rythme plus soutenu. Si seulement ce n'était pas la nouvelle lune... Un autre grincement...La porte qui se referme. Je porte à nouveau la pipe à mes lèvres, en tirant une nouvelle bouffée. L'heure est arrivée.


- Bonsoir! Vous m'attendiez? Je suis venu.
_________________
Charlyelle
Nuit de Crystal

Quelque part, dans Paris, sous la neige.


Il commençait à faire froid, et à peine avais-je sorti la tête de mon arisaidh que j'avais tiré pour me couvrir les cheveux, que des légers tourbillons de neige froide et glacée venait me coller aux cils, le nez, ma bouche et me pénétraient dans le cou.
Tout est blanc, lumineux et enneigé, rien nulle part que lumière trouble et neige. Le vent hurla frénétiquement et une grande envolée de neige se déversa sur les pans de ma pelisse d'hermine.
Un corbeau qui tournoie et fait siffler son aile, poursuivi par mon harfang, tout à son élément dans cette neige qui tourbillonne.
Petits flocons formés de cristaux assez denses et aussi fins qu'une poussière, que le vent accumulait.
Paris gercé par le froid. Image d'une violence latente et silencieuse. Paris engourdi dans une torpeur hivernale.
Et je suis là, Dentelière. Devant cette porte dérobée que seul Ilug et moi-même empruntions pour entrer dans les lieux. Simple porte de bois forgé qui me permet d'entrer, en silence, dans l'antre que j'avais offerte il y a plus d'une année maintenant à celui qui a désormais disparu. Ce guide, ce grand-père.

Alchimie est le maître mot dans cet endroit. Le ventre de cet immeuble que j'ai racheté et qui abrite, là-haut, mon commerce, mes secrets, ma contrebande, mes richesses.

Toujours est-il que l'endroit subit le joug de quelque puissance qui tient sous son charme quiconque pénètre dans les lieux, et qui les fait marcher dans une éternelle rêverie au milieu des différentes merveilles que je peux proposer.

Ici dans le ventre de l'immeuble, j'aime à me cacher. Eprouver comme une jouissance pendant que je suis chaudement tapie dans le coin de cette cheminée qui emplît la pièce d'une lueur de rouge pâle qui s'échappe d'un pétillant feu de bois. Mais malgré la chaleur, il y a bien longtemps que mon âme et mon coeur ne sont recouverts que par la glace, le gel, la froidure.

Mon apparence du jour était plutôt en harmonie avec la Sauvageonne que je suis. La pelisse glisse le long de mes épaules pour tomber au sol sans même que je ne me penche pour la ramasser. Je portes un mélange de mode ancienne et moderne pour l'époque, subtil mix and match d'ornement en pur or jaune que ma grand-mère m'a envoyé tout récemment des Highlands. Un séduisant corsage lacé du vieux temps, accouplé à un jupon court des plus provocants afin de mettre en évidence mon cou de pied et surtout ce qui l'ornait et faisait la fierté familiale : la perle noire.
En l'occurrence, à peine entré dans les lieux, j'avais envoyé valdinguer mes bottes, gardant mes pieds nus, cheville simplement ornée de cette richesse familiale des Balkans. Chainette d'or rehaussée de ces fameuses pierres noires d'une valeur inestimable. Ce qui pour un observateur averti était sans nul doute le signe qu'il avait devant lui une personne d'un haut rang. Mais nul ici ne prêtait attention à ce genre de détails, et nul ne connaissait la valeur de ce que je porte à même la peau.

Ici étaient entreposés quelques trésors qui se revendraient à un fort bon prix. Des rangées de vaisselle d'étain resplendissante alignées sur un long dressoir, dans un coin, un gros paquet de laine tout prêt à être filé. Dans un autre, un amas de tiretaine, tout nouvellement sorti du métier. Des épis de blé de Turquie et des cordons de pommes et de pêches séchées se suspendaient en riants festons le long des murs. Se mêlant au clinquant des cosses de poivre rouge et une porte laissée entrebaillée permettait de découvrir une partie de l'atelier d'alchimiste qui se trouvait là. Chaises à pieds fourchus et tables d'acajou sombre brillaient comme des miroirs, des chenêts avec la pelle et les pincettes, leurs accessoires obligés.

Le silence fut alors interrompu par quelques bruits qui me parurent étranges. Pied nus, lanterne ornée de sa bougie en main, j' entreprends alors de grimper l'escalier en colimaçon qui emmène à l'étage supérieur.
Cependant que je progressais lentement, ma dextre plongeait sous mon jupon, pour en retirer cachée à hauteur de hanche, cette dague que je manies comme personne.

La cloche venait de sonner matine.

Une haute silhouette apparut soudain dans mon champ de vision. Stature masculine blonde, de dos.

Mon sang se fige dans mes veines. Cette silhouette me semblait sortir d'un passé que j' occultais avec hargne. Cette allure me semblait vaguement familière. Son port de tête, sa façon de se tenir, sa taille aussi. Il était grand.

Je sens mon coeur de glace se broyer tout à coup. Non. Ce n'était pas lui. Ce n'était qu'une vague ressemblance, rien de plus.

La main qui tient la lanterne tremble et le reflet de la lumière se répercute alors sur les murs de la pièce dans laquelle je n'ai pas encore pénétré, plantée que je suis au haut de cet escalier, à me croire victime de la plus machiavélique des hallucinations.

Ce n'est pas lui. C'est impossible.

Je m'en étais finalement presque persuadée lorsqu'il se tourna légèrement sur le côté, de sorte que je pouvais désormais le voir de profil.

- Bonsoir! Vous m'attendiez? Je suis venu.

Mon coeur, pétrifié dans la glace depuis ce jour maudit, manqua se broyer lorsque je reconnais de manière certaine cet accent Danois. J'y avait passé quelques semaines l'été dernier, et la sonorité m'en était devenu, si elle ne l'était déjà auparavant, familière.

Je ne l'aperçus que l'espace d'une seconde avant que ma main tremblante ne laisse alors échapper la lanterne qui s'explose au sol en un fracas assourdissant.

Cet homme m'était totalement inconnu. Mais nul doute qu'il s'agissait d'un Nordique. Maëlstrom d'émotions contraires qui viennent alors me titiller. Colère, douleur, regret, amertume bouillaient à cet instant précis en moi. Même si cet inconnu n'y était strictement pour rien.

Il avait contre lui d'être de cette race, de celle dont j'avais jadis juré ne plus approcher, avant que mon père, dans un élan de sadique torture lorsque je lui avais raconté, l'été dernier, une partie de cette histoire qui me rongeait, ne m'oblige à fouler les terres du Danemark.
La petite île de Rügen pour commencer. Terminus à Helsingør.
Un calvaire que j'avais du vivre en silence. Les Danois étaient plutôt accueilllants en leurs terres.

Oui mais voilà. Pour la Dentelière que je suis, être Danois, c'est être un problème. Et plutôt du genre épineux. Et je ne me suis pas gênée pour balancer à mon père que de toute manière il était ridicule qu'il pense à une alliance entre le Danemark et la Principauté de Valahia. Parce qu'il était résolument connu par tous - surtout par mon esprit totalement affolé -, que les rois Danois se sont toujours historiquement alliés avec des perdants. Mon père n'est pas un perdant, quiconque le connait sait pertinemment que cet homme est cruel, machiavélique et qu'il n'aime pas perdre.

Puis un Danois, c'est intelligent, c'est rusé et habile. Et ça apporte la poisse.J'en ai fait les frais une fois. Et voilà que ce soir, je me retrouve pieds nus, au milieu d'éclats de verres brisés, dans une obscurité la plus complète.

Dague en main alors que la colère glaciale qui m'anime, distille étrangement en moi ce goût d'uisge beatha, mon breuvage nourricier tout droit venu de ma terre maternelle d'Ecosse.

Et voix aux accents d'Am Monadh* se fait entendre. Aussi neutre que possible afin de ne pas laisser paraitre les divers sentiments qui m'assaillent.


"- Que fait un inconnu des Terres du Nord, chez moi, au beau milieu de la nuit ? Qui êtes-vous ? "


~Crystallize - Lindsey Stirling~

* le mont Grampian
See the RP information <<   1, 2, 3, 4   >   >>
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)