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[RP] La demoiselle devient une dame

Actarius
Le premier, le Vicomte pénétra dans la grande salle du Tournel. Depuis des années, elle n'avait pas vraiment changé. Y étaient passés nombre de proches, s'y étaient succédé les sujets aux doléances multiples. Des partages de terres, des vols, des histoires de dot, des réparations, des demandes d'aide, d'écus, des propositions de vente, des espoirs, des déceptions. La grande salle de la forteresse avait connu bien des émotions, mais le sentiment le plus fidèle à ces lieux demeurait la solennité, la puissance inspirées par ces épais murs de schiste. Ils témoignaient du prestige des barons d'antan, de leur souci de préserver cette haute vallée sauvage sur laquelle veillait le Castel avec la bienveillante arrogance de ses imprenables murailles grises.

La salle avait également connu les scènes de famille, les rares repas partagés. Nanelle, Enimie, Thibert, Henriet, tous y avaient passé du temps, s’y étaient amusés, ensemble. Le silence qui pesait sur le Vicomte était le leur, celui qu’ils lui avaient imposé en s’éteignant trop tôt. Amputé de son épouse, éventré de sa descendance, il ne restait de famille proche au Mendois que la jeune Mélisende, sa fille adoptive, issue du premier mariage de feue son épouse. C'était à la fois agréable et douloureux de la voir s'épanouir au fil du temps. Car à chaque jour qui passait elle lui rappelait la perte de ses propres enfants, ceux qui auraient perpétué son nom, elle lui rappelait sa jeune Enimie, son aînée, qui sans nul doute l'aurait comblé de fierté. Il n'en laissait rien paraître de ces sentiments contradictoires et se contentait d'afficher son attachement, sans effusion.

Mais ce Ve jour d'octobre serait différent sous bien des aspects. Il allait montrer lors de la cérémonie qui se déroulerait bientôt toute sa confiance. Avec l'oeil orgueilleux, il avait assisté à l'épanouissement de la demoiselle, ses premiers pas au sein de l'ordre royal de la Licorne, sa prise en main tumultueuse de l'université, sa volonté d'y mettre de l'ordre. Elle suivait son chemin sans avoir eu à bénéficier des avantages qu'auraient pu lui offrir la condition de son père d'adoption, elle le suivait avec humilité et avec dévouement. Elle portait en elle l'amour de sa terre et il était plus que temps de lui donner l'occasion d'avancer un peu plus vite, de lui faire don d'une situation en adéquation avec les valeurs qui étaient siennes et d'espérer aussi, car ce présent ne serait pas totalement désintéressé, lui rappeler ces valeurs et la détourner par le serment de certaines amitiés qui déplaisaient au plus haut point à son père. Un père qui se tenait droit dans la salle, attendant la venue des trois personnes qui assisteraient à ce petit événement.

Mais la première entrée fut celle d'un serviteur qui amenait de quoi se sustenter. Une grande cruche d'eau citronnée fut ainsi déposée sur la table avec quelques verres vénitiens qui s'emplirent bientôt. Un second valet pénétra dans la pièce, chargé d'un plat. Sur celui-ci trônaient de nombreux petits pâtés de viande, fruit de la chasse. Aussi discrète que se voulait la petite réunion, le Vicomte n'aurait renoncé pour rien au monde à son souci de prouver une nouvelle fois son sens de l'hospitalité. D'autant plus que parmi les trois personnes attendues se trouverait la belle de son coeur.

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Lacoquelicot


    Eulaliiiiiie !!!!

    Les bruits de pas d’une enfant au galop résonnèrent entre les murs épais du castel du Tournel. Tôt ce matin-là, une rousse minuscule traversa la bâtisse, l’air paniqué. Dans ses bras et sur son dos, un lot de robe de belle facture, origine de tous ces maux. Le lièvre poursuit sa route, en criant de sa voix aiguë le nom de la couturière du Pair de France. En descendant une volées de marche, la silhouette manque même de chaviré dans sa précipitation, la vision obstruée par son précieux contenu. L’incident est évité de justesse grâce à un rebond fort peu gracieux. Un peu lourd même. Dieu merci, personne ne l’a vu. Et ce moment de honte restera secret. Le marathon continue cependant, jusqu’à se terminer devant une porte en chêne qu’un poing chahute plus pour la forme que par réelle nécessité de s’annoncer.

    Liiie… ! J’ai… Son souffle peine à reprendre un rythme régulier. Pour l’anoblissement. Soucis !

    Le fatras de fripes est déposé au pied de l’artiste, tant dis que les mirettes de l’enfant pose un regard plein de dépit sur l’origine du problème. C’est un scandale, une honte, une ignominie. Elle veut mourir au moins ! La robe qu’elle porte a été faite il y a quelques temps mais pas assez pour ne plus lui aller… Devant la Fleur, la couturière observe, l’air perplexe, sans trop savoir où se situe le fameux souci. L’enfant retient un soupire et désigne les fronces sur sa poitrine absente.

    Là !! J’ai refait le bandage trois fois, et ça ne veut pas partir !!

    Au bout de l’index de la jeune fille quatre indélogeables plis ont pris place au milieu de son buste. Signe d’une étoffe bien trop sollicitée. Naissance d’une poitrine qui n’est absolument pas désirée. Pas aujourd’hui, pas dans cette robe. Jamais. Être enfant, c’est vachement mieux pour le moment. Un sourire en coin se logea insidieusement sur le minois de l’artisan qui comprit alors l’affolement de la maigre protégée. La couturière expliqua d’une voix calme une histoire de contenu qu’elle ne pouvait changer contrairement au contenant pour lequel son talent suffirait. Froncement, de sourcils cette fois. L’enfant ne compris pas tellement l’histoire, contrairement au coup de menton pour lui désigner le paravent. La robe fut rapidement ôtée à l’abri des regards indiscrets et en quelques coups d’aiguilles, Eulalie fit des miracles. Comme souvent ! Une heure avait passée tout de même, la micro cérémonie n’allait pas tarder à débuter. Un dernier regard admire la tenue dans le reflet du miroir. L’esprit est apaisé, et la Fleur quelques peu rassurée de voir l’inévitable changement repoussé encore pour quelques temps. L’incident est vite oublié, mis de côté pour ne plus y penser. Ella est encore une enfant, il n’est toujours pas temps de lui confier responsabilité, mari et enfant… Ouf ! Après avoir remercié de toute sa joie et d’un baiser, sa sauveteuse magicienne, la mini-rousse du Tournel s’en alla à pas lent, rejoindre la grande salle ou se tiendrai l’évènement. En route l’esprit s’attarda quelques peu sur les raisons de sa présence. Si Actarius était suzerain, Melissende vassale et Montjoie reyne d’armes. Qu’était-elle, elle ? Spectatrice ? Potiche ? Témoin ? Un peu des trois sans doute. On ne pouvait pas dire que Melissende et Ella étaient vraiment de grande amies. Sans trop savoir pourquoi, sans raison valable non plus, les deux jeunes filles ne se parlaient pas. Jalouse l’une de l’autre, et l’autre de l’une semblait-il. Si ça se trouve la présence de la protégée importunerait même la fille adoptive, allez savoir. La porte est poussée, pour y découvrir un Actarius droit comme un I. Une révérence et…

    Lo Bonjorn, votre seigneurie.

    Au final qu’importe la raison de sa présence, tant qu'elle avait une belle robe!

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Ingeburge
Ce serait une corvée. C'en était déjà une en fait puisqu'elle avait dû sortir de son havre mendois pour se jeter à nouveau sur les routes. Certes, entre Mende et Le Tournel, il ne devait pas y avoir plus de six lieues, ce ne serait pas cet énième périple qui la fatiguerait plus qu'elle ne l'était déjà. Mais la corvée gagnerait en ennui et en désagrément compte-tenu du fait que ce serait donc au Tournel que la cérémonie d'octroi se tiendrait. L'anoblissement en lui-même ne lui déplaisait pas même si cette dernière quinzaine elle avait sillonné en tous sens le Languedoc, se trouvant une fois à Saint-Didier- en-Velay, une autre à Pégairolles-de-Buèges, la suivante à Montpellier et enfin la dernière en date à Saint-Pons-de-Thomières, tout cela pour assister à pas moins de sept remises de fief. Malgré le caractère immuable des usages, des rites, chaque octroi était différent et elle n'était pas lassée d'assister à des serments réciproques, prenant toujours le même intérêt à écouter les mots consacrés et séculaires. Non, les raisons de son retour à reculons au sein du castel qui depuis sa position au sommet d'un éperon rocheux dominait la vallée du Lot étaient ailleurs, elles tenaient au lieu où elle se rendait et aux personnes dont elle aurait à supporter le voisinage. Il y avait déjà Actarius d'Euphor, ce vicomte du Tournel qui avait le don de la jeter d'un état extrême à l'autre. Sa lassitude lui permettrait-elle de gérer le tourbillon d'émotions contradictoires qui ne manquerait pas de sourdre? Elle l'ignorait tout à fait. Il y avait Le Tournel même où elle n'était retournée depuis les joutes de la Saint-Privat, ce castel et cette valetaille qui semblaient la pousser dans les bras de leur maître. Enfin, il y avait le gynécée. Le terme était peut-être exagéré car il ne s'agissait que de deux jeunes filles dont elle ignorait tout mais voilà, elles n'avaient beau qu'être deux, eussent-elles été davantage que l'effet eût été le même. L'une comme l'autre ne présentaient guère les traits de bachelettes aux yeux indifférents d'une Ingeburge qui avait perçu nettement l'hostilité qui en émanait la seule fois où elle avait était en leur commune compagnie. Ignorant tout à fait – comment du reste aurait-elle pu savoir? – que la paire ne s'entendait guère, elle avait seulement noté l'inimitié ou avait en tous les cas pris le mutisme et le manque de considération du duo à son endroit comme tel. Pourquoi? Elle ne savait pas et au fond, n'en avait rien à faire. Mais voilà, la tournure qu'avait pris son existence lui imposait ces deux présences en ce moment, elle était tout sauf d'humeur à composer avec des tiers.

Le train auxerrois parvint à son but après une lente et prudente ascension vers la première des sept portes qui participaient à l'inviolabilité du nid du Phœnix. On se présenta sans avoir besoin de trop en dire, l'accès fut donné; on s'immobilisa dans la cour et on organisa la descente de la Prinzessin, celle-ci fut guidée dans les couloirs jusqu'à la salle d'apparat théâtre de la fameuse rencontre qui ne lui avait pas laissé le meilleur des souvenirs. Là, s'étant vue débarrassée de son manteau et de ses gants mais conservant son havresac de cuir, elle secoua légèrement la tête pour chasser des pensées qui ne l'aideraient pas à supporter le rendez-vous et quand on l'introduisit, nul n'aurait pu dénoter la fatigue et le déplaisir. Sa garde lombarde demeura à l'extérieur de la pièce. Ses yeux s'accrochèrent bien évidemment à lui, elle ne vit nul autre que lui, cet homme qui depuis plus d'un an maintenant lui faisait une cour assidue si l'on pouvait qualifier ainsi l'entreprise de séduction qui avait dès le début pris la forme une offensive armée et invasive où tous les coups étaient permis. Alors qu'elle s'avançait à pas lents, elle le regarda avec l'intensité de ce regard vide durant cinq secondes, peut-être plus, avant que de ployer gracieusement sa tête voilée et de débiter platement :

— Votre Seigneurie.
Ses prunelles pâles caressèrent le sol le temps de se montrer déférente puis elle le regarda à nouveau. Seulement, il n'était pas question d'eux pour une fois et elle condescendit finalement à intégrer à leur univers le gynécée qui pour sûr se trouvait déjà là, elle n'avait pas besoin de le vérifier. Mais en fait, il n'y en avait qu'une moitié, et pas celle concernée.
— Ma demoiselle.
Deux mots, pas un de plus.

Ses yeux opalescents, après avoir vaguement plané sur la rousse, allèrent s'égarer sur une tenture.

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Oui, oui, j'reviens, faut que je justifie la pastille noi... rose pétant.
Melisende_
La demoiselle d'Euphor était revenue en Languedoc depuis plusieurs mois maintenant. Un retour plutôt calme puis les choses s'étaient enchaînées sans que la jeune fille ne s'en rende vraiment compte. Il y avait tout d'abord eu la fonction de Rectrice qu'elle avait prise après démission de l'ancien Recteur, puis son départ à la Capitale sur demande de son père qui était Coms du Languedoc. Juste avant son départ de Mende elle avait partagé des moments intenses avec un jeune homme guère apprécié par son Père, on pouvait même dire pas apprécié du tout. Mais qu'importe, la Demoiselle, elle, l'appréciait beaucoup, il lui avait fait découvrir un univers qu'elle ne connaissait pas du tout, un partage des sens qu'elle ignorait jusqu'alors possible. Puis ils avaient dû se séparer à leur grand regret, lui restant à Mende et elle faisant route vers la capitale.

Mais les deux jeunes gens n'avaient pu se résoudre à rester séparer, il y avait eu tout d'abord cet échange épistolaire au début timide puis de plus en plus enflammé. Puis leurs retrouvailles à Montpellier avant de se séparer à nouveau. Le jeune homme ne quittait plus les pensées de Mélisende, il lui tardait de pouvoir enfin reprendre la route pour Mende et retrouver cette odeur de cannelle qui le caractérisait. Aurait-il un avenir en commun? Difficile à dire, lui était double baron, promis à une Comtesse. Elle n'était qu'une jeune fille, bâtarde d'un Père de France. Mais qu'importe, tous deux ne voulaient penser qu'à l'instant présent.

C'est pourquoi, elle avait pris la décision de rentrer à Mende, n'était plus vraiment utile à Montpellier. Ce jour-là avec l'aide de Constance, la fidèle Dame de compagnie de sa mère qui était maintenant devenue la sienne, la jeune Rectrice fermait ses dernières malles quand un serviteur lui apporta un pli venant de son père. Elle grimaça en décachetant la missive, qu'allait-il encore lui demandé? devrait-elle à nouveau lui obéir? Un soupir de soulagement lui souleva la poitrine, il lui demandait de le rejoindre au plus vite au Tournel, qu'elle était attendue, que c'était important mais sans bien sure donner plus de précision. Cela ne changerait pas beaucoup ses plans, le tournel n'était qu'à quelques lieues de Mende.

Le cortège quitta donc l'agitation de la capitale pour retrouver le calme de la campagne. Après plusieurs jours de voyage, le pic rocheux du Tournel était enfin en vue. son père, même si n'était pas son père biologique était le seul père qu'elle avait connu. Un père plus qu'absent mais un père. Il était aujourd'hui la seule famille qu'il lui restait. Même s'il n'était pas démonstratif alors qu'elle avait besoin d'affection, il tardait à la jeune fille de se retrouver en sa présence. Après un périple qu'elle avait déjà parcouru de nombreuses fois, elle gagna le coeur de la forteresse après avoir franchi les nombreuses portes.

Joan, le fidèle bras droit de son père vint l'accueillir, lui annonçant que son père l'attendait dans la grande salle. Il brisa l'enthousiasme de la jeune fille en lui précisant qu'il n'était pas seul. Un flot de questions traversa alors son esprit. Qui avait également été convié au Tournel? Pourquoi l'avait-il fait venir? Tout en se posant ses questions, Mélisende se dirigeait vers l'entrée, constance à ses côtés, l'interrogeant du regard, Constance comprit sa détresse.


Mélisende veux-tu que je t'aide à te rafraîchir un peu avant de rejoindre ton Père?

La jeune fille baissa les yeux sur sa robe, elle portait celle-ci depuis leur départ de Montpellier, celle-ci était poussiéreuse, les plis disgracieux. Constance avait raison, elle ne pouvait pas se présenter ainsi devant son père surtout s'il n'était pas seul. Jetant un oeil vers la porte de la grande salle, Mélisende préféra se diriger vers l'escalier qui la conduisit à l'étage où se trouvait sa chambre. Après un peu de toilette et une nouvelle tenue, la demoiselle était prête à rejoindre le Phénix.

Avant d'ouvrir la porte, Mélisende lissa nerveusement les plis de sa robe, réajusta la fibule de sa mère puis remit une mèche rebelle de sa chevelure blonde en place. En entrant dans la pièce, la demoiselle reconnut de suite cette chevelure rousse. Ella, elle aurait dû s'y attendre, cette dernière ne quittait plus le Maître des lieux à son grand désespoir. Puis son regard se posa ensuite sur la personne qui lui tournait le dos, une longue robe noire, une chevelure noire voilée, il ne pouvait s'agir que de la Prinzessin qui elle aussi n'était jamais loin du Vicomte ces derniers temps. Prenant une grande respiration tout en affichant un léger sourire sur son doux visage, la demoiselle s'approcha des personnes présentes. Les saluant l'une après l'autre, après une légère révérence pour la Dame en noire et un sourire sincère pour son père, ne pouvant être plus démonstrative envers lui n'étant pas seul.


Votre Altesse, Père, Ella.

Sans prononcer plus de paroles, son regard émeraude quelque peu interrogatif se posa à nouveau sur son Père.
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Actarius
Un petit signe et le serviteur s'en retourna laissant seul le Mendois dans ce silence qui bientôt serait brisé. La seule question en suspens demeurait de savoir par qui ? La belle, l'implacable Prinzessin, la fraîche et serviable fille adoptive, la souriante et gentille rousse ? La réponse tomba comme un couperet sur le calme apaisant de la grande salle. Ce fut la cadette des trois personnes attendues, la protégée. Elle brilla par une salutation et une référence tout à fait dignes. Assurément, elle progressait. La jeune paysanne avait laissé place à une petite demoiselle touchante par sa naïveté, mais terriblement attachante. Le Phénix se laissa aller à un agréable et paternel sourire. Elle avait demandé plus de présence, plus d'attention, plus de gestes tendres. Si son dernier souhait demeurerait vraisemblablement lettre morte, le Vicomte n'étant que rarement enclin à afficher les penchants de son cœur, hormis peut-être - ô grand paradoxe - avec… celle qui fit justement son apparition.

Cinq secondes, une éternité où les iris de Sienne se fondirent dans les opales adorées. Elles pouvaient bien paraître vides au commun des gens, mais jamais elles ne l’étaient pour lui. Ils y lisaient tant de choses dictées par son propre coeur, s’y perdaient même le plus souvent en décelant une intensité particulière, un sentiment, possibles sources de son imagination. Car ces yeux semblaient le reflet du mystère, d’une âme qui ne s’ouvrait que rarement, qui ne se répandait pas ou si peu. Parfois, il se convainquait qu’il la comprenait, mais la réalité avait à plusieurs reprises démontré le contraire. Il n’en profita pas moins de ces cinq secondes qui s’embrasèrent et partirent en une fumée trop rapidement dissipée par une déférente inclinaison et quatre mots à peine qui trouvèrent en écho cinq autres mots.


Soyez la bienvenue Votre Altesse.

La phrase d’accueil s’estompa dans le léger grincement de la porte. Sa fille… le trio féminin affichait désormais complet. Peu conscient des diverses jalousies, sans toutefois tomber dans la naïveté - car il avait bien remarqué la légère hostilité qu’opposaient et la protégée et la bâtarde à la Prinzessin. Il ne se doutait par contre pas du tout de l’animosité qui régnait entre Mélisende et Ella. En clair, il se tenait comme un homme prêt à être englouti par le tourbillon des indéchiffrables sentiments féminins et qui se retrouverait noyé sans n’avoir rien vu venir. Fut-ce son instinct de survie qui agit alors ? Peut-être, car il ne fut guère long à reprendre la parole. Son regard qui s’était posé avec tendresse sur sa fille revint à la Bourguignonne.

Je pense que nous pouvons commencer.
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Lacoquelicot


    [Notre amour, faute de combattants, de guerres lasses, a déserté le camp. Stanislas]

    " L’Euphor était là, en train de lui sourire, effaçant d’un coup tous les tracas d’une poitrine naissante et autres révolutions adolescentes qui se jouaient en elle. Si heureuse de revoir son protecteur, la jeune fille courut dans ses bras pour lui témoigner toute son affection. Ce tête à tête propice aux témoignages d’amour fut cependant bien vite écourter par l’arrivée de la délicieuse danoise qui sourire aux lèvres, leurs baisa les joues et attendit patiemment en chantonnant l’arrivées de la fille adoptive du maître des lieux. Mélisende, était comme une sœur, une amie inséparable, un modèle pour la jeune Ella. L’on pouvait sentir au travers de la pièce tous l’amour et l’amitié sincère qui unissait ses 4 êtres. C’était beau a voir et dans tous le Tournel, leur joie de vivre rejaillissait rendant plus fertile les cultures et les hivers moins rudes. Auréolant le paysage de multiples arc-en-ciel et papillons multicolores. La vie était un vrai con de fée ! "

    … Ou pas. Car la vérité était tout autre.

    - *Sourire paternel*
    - Ma demoiselle
    - Ella.


    Glaciale.

    Avoir été recueillie par le vicomte était une chance inouïe pour la fillette qui n’avait connu que la ferme jusqu’à lui. Et jamais, au grand jamais, elle n’ira se plaindre d’avoir un endroit confortable pour dormir, des tenues de qualité pour se vêtir et se maintenir au chaud et à manger presque autant qu’elle voulait. Ella n’était pas du genre à cracher dans la soupe, non. Mais après plusieurs mois passée aux côtés du Pair de France, la jeune rousse était forcé de constater un désavantage a cette nouvelle vie qu’on lui avait offert.

    Les nobles ça ne sait pas aimer.

    Nombreuses furent les tentatives - une main glissée sur la sienne, une joue tendue pour une bise bien innocente, quelques paroles dans l’espoir d’une étreinte rassurante - toutes resté lettres muettes ou presque. On ne fait pas ça en public, ce n’est pas correcte lui répondait-on souvent. La notion de public étant pour les nobles quand on est plus que 1 dans une même pièce. La limite était vite franchie, et la Fleur restait donc seule. Une solitude accompagnée par des silhouettes qui demeurait lointaines comme aujourd’hui. Alors dans ces cas-là, l’enfant n’avait qu’un seul recours. L’imagination.

    Alors que la cérémonie allait débuter, les émeraudes de la gamine se posèrent sur les extérieurs. Dans la vallée du lot, un toit de chaume au milieu de champs trahissait l’existence d’une ferme comme celle dans laquelle elle avait grandi. Peut-être qu’il y avait des enfants là-bas, une petite rousse comme elle, vêtue de guenilles et le ventre creux. Les yeux dans le vague et l’esprit bien loin des nobles affaires qui occupent la pièce, la Coquelicot revivait sa vie d’avant - celle où l’on embrassait encore ses joues - sans un mot ni un geste.

    On avait demandé sa présence. Son corps était là. Pour le reste…

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Ingeburge
La porte s'était à nouveau ouverte mais elle n'avait pas tourné la tête, attendant docile qu'on lui signifiât où s'installer. Par exemple. Ou qu'on la délestât de sa charge. Mais on devait avoir beaucoup de choses en tête manifestement puisqu'on la laissait plantée là sans lui indiquer où aller et c'est donc bien droite sur ses deux pieds qu'elle avait répondu des mêmes mots servis à Ella aux salutations de Mélisende qui était donc la personne qui venait d'entrer. L'héroïne du jour était présente, ce qui devait être fait pouvait être enclenché et on signifia que la cérémonie pouvait débuter sans toutefois lui faire savoir où elle pourrait prendre place. Un sourcil délié se haussa quand elle posa son regard froid sur le maître des lieux mais elle ne dit rien, gardant par devers elle des remarques qui n'avaient pas à être formulées. Il n'était qu'un noble parmi d'autres, elle n'était qu'un témoin héraldique et même si Ella savait, même si Mélisende devait se douter, il fallait que la limite restât bien imperméable et elle s'écraserait comme elle ne se le serait jamais permis s'il avait été autre ou s'ils avaient étaient seulement tous les deux. Sauvegarder les apparences, se conformer à des principes qui, elle le savait, l'Euphor n'acceptait pas toujours. Pourtant au-delà du fait qu'elle était toujours debout, elle était aussi irritée de devoir être celle qui révèlerait l'objet du rassemblement, celle qui éventerait ce qu'elle avait compris constituer une surprise.

Ainsi donc, elle fit quelques pas afin de se mettre à ses côtés, mais suffisamment éloignée et en retrait pour tenir la place qui était la sienne et non celle qu'il semblait vouloir lui attribuer. Là, dans un froufroutement soyeux, elle s'accroupit gracieusement, posa ostensiblement son havresac au sol puis se redressa. Et comme c'est debout qu'elle avait salué la jeune Euphor, ce serait toujours debout qu'elle s'adresserait à elle :

— Sa Seigneurie le vicomte du Tournel a signifié à la Hérauderie de France vouloir faire de vous sa vassale. Sa Seigneurie vous demandera formellement si vous souhaitez le devenir et vous serez libre d'y répondre positivement ou non. Si vous l'acceptez, Sa Seigneurie manifestera son consentement et c'est alors que vos mains dans les siennes vous lui assurerez fidélité, aide et soutien armé et conseil. A cela, Sa Seigneurie vous garantira justice et protection et vous bâillera subsistance par la remise d'une terre mouvant du Tournel. Une fois le serment réciproque passé, l'échange sera scellé d'une accolade ou d'un baiser de paix. Je vous présenterai alors les armes de votre fief.

Les usages rappelés, elle recula encore puis indiqua au vicomte :
— Votre Seigneurie, je vous prie.

Dans l'ombre, elle assisterait à l'octroi et n'en ressortirait que lorsque cela s'avèrerait nécessaire.
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Oui, oui, j'reviens, faut que je justifie la pastille noi... rose pétant.
Actarius
Tous debout. Le Mendois avait négligé bien des choses, lui qui se voulait un bon hôte. Pire encore, il ne s'en rendit pas compte, excité qu'il était à la perspective d'offrir un titre à sa fille adoptive, pas même lorsque le havresac fut posé sur le sol. "Mufle !" Sourire aux lèvres, il remercia Montjoie, qui pour la peine aurait mille fois raison d'émettre quelques reproches futurs au sujet de ces négligences manifestes, pour son rappel nécessaire du déroulement de la cérémonie et fit signe à Mélisende d'approcher. On y était, le moment attendu arrivait. Certes, les formes avaient pris des contours pour le moins brouillons, mais en grand naïf un peu bourru et surtout inconscient de cela - tout comme de la grande tension entre les différentes protagonistes d'ailleurs -, le Vicomte ne pouvait s'en formaliser. Dans son ignorance bienheureuse, il rayonnait même, joyeux de partager ce moment avec ces trois dames.

Et ainsi qu'on pouvait s'y attendre en voyant ce faciès radieux, sa voix, plus chaleureuse encore que d'habitude emplit la salle de son soleil occitan.


Demoiselle Mélisende d'Euphor, voulez-vous être tout à fait ma femme ?

La question avait été posée et entraîna avec elle une foule de souvenirs fugaces. Sa toute première allégeance en tant que Seigneur en devenir, puis en tant que Comte du Languedoc, celle d'Elloras ici-même, dans cette salle, celle d'Insanius, celle de Corbeaunoir. Pour la quatrième fois, l'Euphor prenait vassal, mais pour la première il ouvrait une voie nouvelle à un de ses enfants. La future seigneurie, c'était tant une marque de confiance dans le coeur, qu'une dot et l'assurance d'un mariage convenable dans les faits. A tout points de vue, la demoiselle sortirait différente de cette salle. Elle serait dame et devrait par serment loyauté, fidélité et aide à celui qui demeurait, avec ses défauts, son manque de présence, son père d'adoption.
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Melisende_
La Demoiselle avait été accueilli chaleureusement par son père qui semblait heureux de la voir, d'être présent. L'accueil des deux personnes féminines présentes était lui beaucoup plus froid.

Mélisende et Ingeburge s'étaient croisées que très rarement seulement deux voir trois fois tout au plus. Il y avait peu de différence d'âge entre les deux femmes mais elle n'avait jamais fait connaissance. La jeune d'Euphor n'était pas du genre à se lier d'amitié très facilement, elle tenait cela de sa défunte mère, réservée, peut être trop même, la raison pour laquelle la jeune fille se sentait seule. Elle avait pourtant essayé de se rapprocher d'Ella lorsque son père lui avait présenté, mais le souvenir et le manque de sa jeune soeur Enimie était trop présent. Puis ce rapprochement avec son père, le voir proche et protecteur de cette jeune fille alors qu'elle au même âge aurait tout donné pour être aussi proche de son père. Et tout naturellement, du moins pour Mélisende, c'était un sentiment de jalousie qui s'était établi entre elle et la petite Ella.

Ne quittant pas le Phénix du regard, la jeune Rectrice se demandait toujours pourquoi elle avait été invitée dans cette salle. La réponse allait bientôt venir, mais pas de la bouche de son Père. La seule chose que ce dernier fit, c'est un signe pour lui demander de s'approcher, ce qu'elle fit bien entendu.


Je pense que nous pouvons commencer.

Son regard émeraude suivit donc les siennes de son père et se posa sur la Prinzessin.

— Sa Seigneurie le vicomte du Tournel a signifié à la Hérauderie de France vouloir faire de vous sa vassale. Sa Seigneurie vous demandera formellement si vous souhaitez le devenir et vous serez libre d'y répondre positivement ou non. Si vous l'acceptez, Sa Seigneurie manifestera son consentement et c'est alors que vos mains dans les siennes vous lui assurerez fidélité, aide et soutien armé et conseil. A cela, Sa Seigneurie vous garantira justice et protection et vous bâillera subsistance par la remise d'une terre mouvant du Tournel. Une fois le serment réciproque passé, l'échange sera scellé d'une accolade ou d'un baiser de paix. Je vous présenterai alors les armes de votre fief.

Sa vassale, ainsi donc sa présence ainsi que celle du Roy d'Armes prit tout son sens, son père voulait faire d'elle sa vassale, une chose à laquelle elle ne s'attendait pas du tout. Serte elle était la fille d'Actarius d'Euphor, mais pas sa fille légitime, juste une batarde. Fixant à nouveau le magnifique, Mélisende y découvrit une certaine fièreté, de l'amour, ce qu'elle avait toujours recherchée chez ce père trop absent. C'est qu'il avait donc confiance en elle pour faire d'elle sa vassale.

Demoiselle Mélisende d'Euphor, voulez-vous être tout à fait ma femme ?

La jeune fille avait déjà assistée à une cérémonie d'anoblissement étant plus jeune et heureusement sinon cette phrase l'aurait quelque peu déstabilisée voir même choquée venant de son père.

C'est donc avec une certaine fièreté que la demoiselle répondit juste ces quatre mots.


Oui je le veux.

Trop émue pour en ajouter d'autres pour le moment.
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Actarius
Il le faudrait pourtant encore. Le Vicomte, certes pas encore rompu aux usages d'un tel événement, en avait tout de même vécu quelques uns tant dans le rôle du suzerain que du vassal. Cela lui permettait d'avoir une idée de ce qui allait se passer, une idée d'autant plus précise que le Roy d'Armes avait eu la bonté de détailler le déroulement. Il biffa dans son esprit la première étape, la fameuse question rituelle et la réponse prononcée avec une fierté qu'il n'avait pas l'habitude de voir poindre sous le masque habituel de timidité.

Cette découverte, car jamais auparavant il n'avait ressenti de manière si prégnante la résolution de ce caractère réservé, décupla sa propre envie d'honorer cette demoiselle d'un rang, de l'élever au-dessus de la masse, et ce quand bien même la noblesse en Languedoc avait rarement bonne publicité. Mais de cela, il s'en fichait royalement. Un titre, avant d'être un privilège, était un ensemble de devoirs, d'obligations. Elle le verrait bien assez tôt de toute manière.

Sourire aux lèvres, il tendit ses mains vers elle, les paumes défiant le ciel. Le signe était arrivé et avec lui le temps de prononcer le serment d'allégeance.

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Melisende_
Les mains du magnifique se tendirent vers elle, Mélisende posa ses mains dans les siennes. Le regard de la jeune fille remontèrent doucement sur le visage de son père. Il était souriant, il lui faisait confiance, la demoiselle appréciait ce moment de complicité. Elle aurait voulu qu'il dure encore, une telle complicité était si rare.

Mais la cérémonie devait continuer, d'après ce qu'avait expliqué quelques minutes plus tôt la Prinzessin elle devait à présent prêter serment.


Père, je fais le serment de vous être fidèle, de vous apporter aide et conseil à chaque fois que vous le désirerai et ce jusqu'à mon dernier souffle.

C'était un engagement très fort, qu'elle honorerai au mieux pour lui prouver qu'il avait eu raison d'avoir confiance en elle.
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Actarius
Le sourire s'était quelque peu estompé pour laisser place à une moue plus solennelle, car le moment du serment embrassait une symbolique très forte. Il s'agissait d'un instant unique que ce fut la première fois qu'on le prononçait ou la vingtième. Sa valeur demeurait inchangée. Et le Mendois y attachait une très grande valeur, c'était selon lui la base même de la société. Ceci expliquant cela, il répondit avec la dignité dont il était capable.

Ce serment ne sera pas oublié Demoiselle d'Euphor, et en retour je vous promets subsistance, justice et protection pour la Seigneurie de Rocheblave que j'ai décidé de vous octroyer. Montrez-vous bonne avec vos gens, soyez juste, mais ferme aussi lorsqu'il le faudra.

Il approcha alors de sa fille et la prit dans ses bras, non pas comme un père, mais comme un suzerain, car il l'était désormais. Ainsi, leur relation prendrez un nouveau tour, celle de la confiance et du devoir.
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Ingeburge.



Trop occupés à s'entretenir l'un de l'autre, que ce soit pour se déchirer, s'entendre, se quereller, faire la paix, se détester, s'aimer, Ingeburge n'en savait que peu sur Actarius et réciproquement. Il y avait bien eu des éclaircies de lucidité dans le tumulte de leur relation : ils se livraient alors d'une manière bien différente de ce qu'ils étaient et elle en avait d'ailleurs plus révélé que lui qui pourtant était de nature diserte et qui comptait une quinzaine d'années de plus qu'elle, ayant donc davantage matière à s'étendre. Ainsi donc, même si le constat ne plaisait guère au vicomte du Tournel, la marquise de Dourdan tenait pour certain qu'ils étaient l'un pour l'autre de parfaits étrangers, ce qui n'empêchait pas, au grand désarroi de la seconde, qu'ils en oubliassent le monde qui les entouraient lorsqu'ils se trouvaient tous deux en présence. Pourtant, s'il y avait bien une chose qu'elle savait de lui, en dehors de considérations qui pourraient paraître à des tiers totalement subjectives, c'était l'importance qu'il attachait à la famille. Cela, elle l'avait nettement perçu quand à demi-mot il avait évoqué tous ceux qu'il avait perdu : une femme, et des enfants. Mélisende était la dernière survivante, elle était par le sang un lien avec l'épouse disparue, elle était par l'affection l'aînée de frères et sœur bien trop tôt emportés. Et si Ingeburge, en femme sûre de son lignage et de sa lignée et pleine de principes qui exaspéraient tant le Phœnix, ne pouvait concevoir que l'on plaçât autre chose au-dessus du sang, elle savait dans le même temps, pour l'avoir nettement compris, que Mélisende eût été son enfant de chair, Actarius l'eût traitée de la même manière. D'où cet octroi, en vue d'établir la seule fille qui lui restait de la plus honorable des façons.

De le voir si digne et si juste, comme il l'était au plus profond de lui-même par nature et non par acquis, fit retomber son irritation. Certes, elle demeurait sur ses gardes, la réunion comme la dernière qui s'était tenue en ce lieu ressemblant trop furieusement à une réunion de famille pour qu'elle laissât sa vigilance s'endormir, mais elle était plus détendue quand il lui revint d'intervenir. A nouveau elle s'accroupit et alla à la pêche dans son havresac, en fut extrait un morceau d'étoffe renflé. Ensuite, elle alla à la blonde Euphor et s'adressa à elle en ces termes :

— Par la volonté de Sa Seigneurie le vicomte du Tournel, vous voici désormais dame de Rocheblave. Vous porterez ainsi « d'argent, au rocher d'azur mouvant de la pointe, à la molette du même mouvant du chef ».
Les pans de l'étoffe furent écartés afin de dévoiler un oriflamme à son tour déroulé :

Le drapeau aux couleurs imaginées par Aimelina – rendons à Sìarr ce qui appartient à Sìarr – furent remises à l'anoblie, sans quelques mots supplémentaires :
— Puissent ces armes vôtres désormais vous soient un rappel s'il en était besoin dus serment prononcé ce jour d'hui et de l'engagement que vous avez pris.

Et elle se détourna. Table, table, table; c'était tout ce qu'il lui fallait désormais. Gagnant sa place, elle reprit sa besace de cuir et se rendit là où elle pourrait s'asseoir et écrire. Nulle envie d'attendre une invitation du maître de céans, il semblait, bien pris par son émotion paternel, en oublier son habituelle courtoisie. En outre, elle était pressée d'en finir, peu désireuse d'être prise au piège et d'assister à un après qui ne pourrait que la gêner et donc la mettre en de mauvaises dispositions. L'essentiel n'était-il pas que la cérémonie avait eu lieu et qu'elle avait accepté ce voyage en bateau? Lui en demander davantage était bien risqué.

Table, table, table...table. Installation, rédaction, et c'est bon :

Citation:

Actarius a écrit:


A Montjoie,

Humbles et respectueuses salutations !


En notre légitime autorité en la Vicomté du Tournel, ses terres et dépendances, nous avons décidé de faire de Mélisende d'Euphor notre vassale en lui octroyant le titre de Dame de Rocheblave.

Notre fille, bien qu'elle ne partage notre sang, est une demoiselle dévouée et investie. Elle a le caractère effacé et serviable de celle qui fut sa mère. En embrassant une carrière dans la chevalerie de France, elle a fait grand honneur à notre nom. Nous savons qu'un jour, elle deviendra un fier chevalier prêt à embrasser les plus justes causes et à les défendre de sa vie. En prenant la charge de rectrice de l'université du Languedoc, elle a là encore fait notre fierté, elle a répondu à l'amour que nous portons à cette terre et de laquelle notre nom est indissociable.

Elle a pour nous toutes les qualités d'une vassale exemplaire qui nous sera fidèle et loyale, qui nous apportera aide et conseil de tout temps et qui saura se faire aimer de ses sujets et faire fructifier les biens que nous avons décidé de lui offrir.

Pour toutes ses raisons, nous avons décidé qu'elle jouirait de la Seigneurie de Rocheblave, de toutes les demeures, places, châteaux, terres, annexes, dépendances et des neuf dizièmes de la production et des profits de la Seigneurie, le dernier dizième nous revenant en tant que Suzerain légitime.

Que le Très-Haut veille sur vous !


Parce que les écrits, pareils au Phénix, demeurent,

Nous, Actarius d'Euphor, Pair de France, Vicomte du Tournel, Baron de Florac, Seigneur d'Aubemare, signons et apposons notre scel.




    Le cinquième jour d'octobre de l'an de grâce MCDLX, en présence de nous, Ingeburge von Ahlefeldt-Oldenbourg, dite Montjoie, Roi d'Armes de France, Mélisende_ d'Euphor, Mendoise et Rectrice de l'Université du Languedoc, s'est présentée par-devant le noble sieur Actarius d'Euphor, pair de France, vicomte du Tournel, baron de Florac, seigneur d'Aubemare. Ladite Mélisende, désarmée et tête nue, tenant ses mains jointes entre celles dudit vicomte, a fait foi, serment et hommage pour les terres et appartenances qu'elle doit d'icelui dans le vicomté du Tournel, sis en Languedoc, promettant de faire tout ce que bonne et loyale vassale doit et est tenue de faire à son vrai et naturel suzerain; lequel hommage et serment de loyauté le vicomte a reçu de ladite vassale en lui donnant l'accolade.

    En conséquence de quoi, dame Mélisende d'Euphor se voit octroyer le fief de Rocheblave, fief érigé en seigneurie et devient dame de Rocheblave et portera : « d'argent, au rocher d'azur mouvant de la pointe, à la molette du même mouvant du chef », soit, après dessin :




    En témoin desquelles choses, nous, ladite Ingeburge von Ahlefeldt-Oldenbourg, Roi d'Armes de France, avons fait et fait mettre en cire d'or notre sceau à ce présent contreseing au Tournel, le cinquième jour d'octobre de l'an de grâce MCDLX.


















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Actarius_d_euphor
Le temps était venu de briser cette étreinte, l'une des rares entre le père et la fille. Ponctuait-elle un passé de distance ? Ouvrait-elle sur une relation plus forte ? Les réponses n'existaient pas encore, la seule vérité de cet instant était que, quand bien même il s'agissait là d'une accolade vassalique, jamais ils n'avaient été si proches l'un de l'autre. Au-delà du symbole, le Mendois espérait que la marque de confiance ainsi accordée serait une preuve suffisamment tangible de son affection. Un sentiment que ses défauts de père, que son absence avaient sans doute fini par occulté aux yeux de la blonde d'Euphor. Bien entendu, il y avait de la retenue, de la solennité dans ce geste partagé, mais un soupçon de tendresse était apparue et au final, le Phénix se découvrit plus paternel qu'il ne l'avait jamais été.

Il recula d'un pas, mais ses mains demeurèrent sur les frêles épaules de la désormais Dame de Rocheblave. Le regard du Coeur d'Oc se figea sur la fille trop souvent délaissée et d'une voix sentencieuse, ce dernier s'abandonna à un élan précieux de douceur et de reconnaissance.


Je suis fier de toi, ma fille. Reste telle que tu es, l'expérience, l'âge t'apprendront à tempérer tes emportements, à calmer tes rancunes. Garde les valeurs qui sont les tiennes, conserve ta force, car ton nom est le mien et ce seul fait t'attirera quelques inimitiés gratuites en ces terres. Je vais partir bientôt pour un long voyage, tu seras ma voix en Languedoc, tu me représenteras là où je ne pourrais être lorsqu'il le faudra, mais tu as toute ma confiance.

Et il acheva sa tirade prononcée en langue d'oc sur un sourire chaleureux. Arriva alors l'instant de la remise des couleurs, les iris de Sienne s'étaient naturellement reportées vers le Roy d'arme et ainsi surgit la gêne devant le constat terrible de sa négligence. La malheureuse Bourguignonne, condamnée à se baisser, dépourvue ne serait-ce que d'un appui, d'un siège. Il s'en voulut, oh oui, il s'en voulut. Et dès lors que l'acte d'octroi fut scellé, il s'empressa d'approcher de la table tout en invitant la rousse protégée et la vassale à le suivre.

Votre Altesse, je vous remercie infiniment de votre présence et vous présente mes excuses pour la rusticité de cette petite cérémonie. Permettez-moi de vous inviter à ce petit en-cas et, si je puis faire quelque chose pour vous faire oublier cette hospitalité négligée, n'hésitez pas, je me ferais un devoir et un plaisir de vous exaucer.

Que pouvait-il dire de plus ? Il ignorait, il avait parlé franchement sans se départir de la chaleur qui était sienne, sans se dénuder de sa bonhommie coutumière.
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Ingeburge.



La matrice avait été apposée avec suffisamment de fermeté pour que la cire s'imprégnât des symboles qui y avaient été ciselés et suffisamment de délicatesse pour que le sceau ne virât pas au gros pâté doré et dégoulinant. Attablée devant le contreseing, elle relisait celui-ci, à la recherche d'une erreur ou d'un oubli, examinant aussi les armes peintes un peu plus tôt quand elle avait préparer le document qui serait ensuite copié pour être envoyé à la chapelle Saint-Antoine-le-Petit, l'original restant entre les mains de l'intéressée. C'est dans cette ultime étude que la voix chantante du Phœnix la cueillit et elle ne put, tendue comme elle l'était, retenir un tressaillement. Elle ne l'avait pas entendu approcher, absorbée qu'elle était par sa relecture attentive et peut-être persuadée au fond qu'il continuerait à parler à Melisende. Interrompant ce qu'elle était en train de faire, elle leva les yeux vers lui, toute sérieuse, et l'écouta la remercier et s'excuser pour la « rusticité de la cérémonie ». A cela, elle ne répondit rien, estimant simplement que là étaient ses devoirs et qu'il n'y avait donc pas à montrer de gratitude. Quant à l'acte de contrition présenté avec cette chaleur enthousiaste, elle ne revint pas dessus, les mêmes devoirs lui ayant depuis quelque temps enseigné qu'un officier héraldique était par certains aspects un aventurier devant être prêt à tomber n'importe où et à faire face à nombre de situations inconfortables.

Non, elle ne dit rien, s'adressant préférentiellement à celle qui était la seule à compter en cette journée particulière. Plus que jamais, Ingeburge se faisait devoir de demeurer à sa place. Aussi, ouvrant sa reliure présenta-t-elle un vélin à la nouvelle dame de Rocheblave que son paternel suzerain avait invité à approcher, accompagnant la soumission du précieux papier de quelques mots :

— Il vous faudra arborer vos armes, ma demoiselle; aussi ai-je déjà réalisé quelques croquis de ce que vous pourriez porter. Le choix est vôtre, et seulement vôtre et si vous ne deviez rien apprécier, je tâcherai de vous présenter autre chose.
Citation:



Replongeant dans son mutisme, Ingeburge attendit.
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