Osfrid
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Les sabots du cheval martelaient le sol des ruelles de Paris. Osfrid était revenu dans cette ville après son départ du Maine et se dirigeait avec nonchalance. Depuis la mort de son père, le danois navait plus vraiment gout à grand-chose et sintéressait rarement à son prochain mais au moins la ville lui offrirait quelques divertissements agréables, du moins aimait-il à le penser. Toutefois, qui disait divertissement, disait écu et Osfrid avait vu ses quelques économies fondre comme neige au soleil.
Le retour au royaume du Danemark navait rien facilité. Il avait fallu affréter un bateau et payer pour son équipage. Sans oublier quil avait fallu revenir et continuer à aller de lavant. Vivre dans ce royaume de France limportait peu finalement toutefois, il ne songeait nullement à retourner sinstaller à Ribe où les souvenirs y étaient encore trop douloureux pour quil songe un instant à y retourner alors il avait tranché. Mais depuis, les choses sétaient envenimées entre lui et ses cousines. Entre lune qui ne répondait pas à ses missives et lautre quil exécrait par excellence, yavait déjà du mal de fait. Donc il ne pouvait plus prétendre à lhospitalité familiale. Et sinstaller dans le Maine navait pas été une idée judicieuse. La marraine de sa petite cousine lavait sommé de museler ses propos sans même le connaitre sous prétexte quelle était amie avec la mère de la petite. Si maintenant il ne pouvait même plus sexprimer Dordinaire, ça ne laurait pas arrêté mais la marraine en question avait menacé de faire le nécessaire pour lempêcher de nuire avait-elle dit. Ne voulant pas infliger ce triste spectacle à Briana pour qui il avait énormément daffection, il avait préféré partir sur les routes.
Oui mais voilà, ça ne dure quun temps cette vie de bohème et bientôt, le danois manqua cruellement dargent. Lhiver sinstallait, il lui fallait trouver logement et activité afin de gagner sa croûte. Ça ne lui faisait franchement pas peur mais encore fallait-il quon embauche le barbare comme ils disaient tous aussi et une idée germa dans son esprit davoir recours à un usurier. Il naimait pas franchement leur méthode mais à la guerre comme à la guerre. Avec un peu de chance, il pourrait le rembourser rapidement.
Osfrid ne se laissant pas abattre rapidement posa quelques questions ici ou là, versa quelques écus lui restant au fond de sa poche après avoir pris une chambre dans une auberge mal fréquentée dun quartier peu recommandable de la ville, tout ceci pour avoir un nom. Et après quelques jours de recherches infructueuses, le nom tomba dans son esgourde. Cette fois-ci, il ne pouvait pas y échapper même avec la meilleure volonté du monde. Et ce fut par un soir où lorage faisait rage quil entra dans la taverne quon lui avait indiqué plus tôt dans la journée.
Un gamin lui avait couru après en début daprès-midi alors que le danois sapprêtait à se rendre dans une auberge, histoire de se tenir chaud alors que le vent sétait levé et fouetté son visage au passage. Le gosse lui avait tendu un bout de vélin avec le nom dune taverne inscrite dessus et lui avait glissé dans le creux de loreille. « Soyez à 9 h ce soir à la taverne du chêne brûlé et prenez place à la table vers la cheminée. On vous y retrouvera ». Et le gamin était reparti comme il était venu, silencieux, vif et sans se retourné. Et la journée était passée sans problème majeure.
Le soir venu, bien en avance, Osfrid avait pris place dans la taverne quon lui avait indiqué, le regard posé sur la porte afin de ne pas louper celui qui entrerait. Mais à quoi sattendre, à qui faire confiance, comment le reconnaitre ? Tant de questions pour aucune réponse. Quà cela ne tienne, commandant un verre dun breuvage quelconque, le moins cher, le danois se mura dans son silence contemplatif, attendant que les minutes fassent place à lheure du rendez-vous.
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