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[RP]Lettre à une brebis signée d'une patte enfarinée de loup

Scopolie
Je n'avais pas écrit en français depuis de nombreux mois. Quant à écrire dans cette langue barbare dans laquelle je nage et me noie depuis aussi longtemps, cela ne s'est jamais produit. Ils sont incompréhensibles à parler si vite et si fort. Chaque fois que j'en entends deux discuter, j'ai l'impression qu'ils se disputent : leurs grands gestes, l'intonation virulente de leurs phrases, leurs yeux de charognards. Tout le portrait de leurs ancêtres Saxons. Et avec leur sens de l'hospitalité, c'est un miracle s'ils n'ont pas encore mis en place de loi autorisant le massacre des étrangers. Les voies du Seigneur sont impénétrables, mais pas besoin d'avoir étudier au Louvre pour comprendre que le fait d'avoir isoler ces brutes sur leur île est une punition divine.

Au fond, puisque j'avais besoin de me faire oublier par le monde civilisé, j'aurais dû retourner dans la Cour des Miracles. Là-bas, même les pires pervers estropiés me dégoûtent moins que ces nobles gras et benêts qui réclament la condamnation à mort de tout homme soupçonné de brigandage. Soupçonné ? Que dis-je, accusé. Ils sont très forts pour se plaindre. Je suis sûr que le charpentier ne peut même pas tâter les miches de la boulangère d'en face sans que tout le monde le sache.

Il est temps que je quitte Hastings, la bêtise qui se dégage de cette ville portuaire m'étouffe d'avantage que l'odeur de leur poisson. Et puis, je me suis remis de leurs outrages -deux fois condamné à être laissé pour mort sur la place publique, deux fois à souffrir de la bêtise des hommes, à entendre les cris de joie de ces animaux qui ne comprennent rien à la cause supérieure que je sers en prélevant de temps en temps quelques écus dans la bourse de leurs gras bourgeois. Mon regard se porte sur l'horizon où flotte encore le drapeau d'une armée aux portes de la ville. J'entends très régulièrement, au moins une fois par semaine, des gens se plaindre qu'ils ont été brigandé -et pas forcément par des génies du mal ou des brutes épaisses, mais ils racontent quand même qu'ils se sont défendus bec et ongles. Cette armée serait-elle là pour les punir de manière expéditive ? Car une armée aux portes de la ville et immobile depuis un mois ne sert qu'à ça, tuer des passants.

Reste à savoir si ce vaniteux comte a mis ses menaces -en anglais- à exécution et a donné l'ordre que malgré mes cinq procès, l'armée me plante à terre pour de bon. Mais je n'ai pas le choix, aucun bateau battant le drapeau du Royaume de France n'est passé depuis celui qui m'a déposé ici. Je vais devoir remettre mon destin au Très-Haut, aux erreurs administratives et à ma faculté de tromper les benêts en armure. Mais au cas où rien de tout cela ne suffise, je ne veux pas mourir en parfait inconnu. Je veux que mon histoire perdure après mon trépas, même si je préfèrerai ne pas mourir du tout. Armé d'une plume et d'un parchemin, je rappelle à moi un passé si proche à l'échelle de ma vie et qui me semble pourtant si loin de ma nouvelle réalité.


Citation:
A ma chère Sorianne,
A la jeune femme avec sa bâtarde mais sans homme, du moins je l'espère,
A ma dévouée suivante qui est sortie de mon ombre protectrice pour honorer par elle-même le cadeau qu'Il lui a fait,

Comme tu le sais, je suis parti loin du climat hostile de notre Royaume. Mon excommunication a été le coup de grâce pour ma foi envers ces gens qui nous gouvernent mais qui nous oppressent pour leur bien personnel. Ça et tes perpétuelles provocations, tes incessantes attaques contre mon autorité spirituelle, tes remises en cause de mon intégrité. Bref, tu l'auras compris, c'est en partie parce que j'avais l'impression de perdre mon temps avec toi, à essayer de t'aider, que je suis parti. L'autre partie, c'est tous les autres.

Cela fait un moment que je songeais à t'écrire. Je me suis exilé en Angleterre et je m'y sens bien seul, tant parce que je ne comprends pas un traitre mot de ce qu'ils disent tous, que parce que ce Royaume est perverti jusqu'à l'os. L'évêque local m'a interdit de prêcher sous prétexte que je ne lui avais pas demandé, alors que l'idée que j'essayais de transmettre correspondait exactement à celle qu'on trouve dans les livres de leur bibliothèque. Et puis, leur marché n'est pas bien fourni, ce sont les mêmes qui se partagent le pouvoir -du poste de bourgmestre à Comte-. Conséquence de toutes ces causes cumulées, , ils veulent me tuer. C'est pour quoi je t'écris, parce que cette lettre est peut-être la dernière. Quand tu recevras cette lettre, je ne serai peut-être plus de ce monde.

Tu vas te demander ce que j'ai pu faire encore pour m'attirer la haine des gens. Rien de plus que mon devoir envers Lui, tout simplement. Tu le sais, lorsque je veux faire une réprimande, je n'y vais pas par quatre chemins. Et tu sais aussi que les menaces n'ont aucun effet sur moi. Je suis comme Christos, destiné à mourir parce que les Hommes -en particulier ces barbares anglo-saxons- ne sont pas près à recevoir le Message divin. Je n'ai pas peur de la mort, car comme je te l'ai enseigné, ce n'est qu'une porte à franchir pour se retrouver devant Lui. J'y vais le cœur léger, car je n'ai rien à me reprocher, mais j’aurais aimé te revoir, toi et ton enfant, pour qui je prie tous les jours, pour le salut de son âme. J'aurais aimé voir que j'ai été utile pour autre chose que de réprimander et distribuer des pénitences bien méritées.

Si tu t'es écartée de la voie du péché, si tu es devenue sourde à l'appel du Sans-Nom, alors tu seras ma plus belle réussite, Sorianne. Je t'ai aimé et je t'aime encore comme un Père aime sa Fille, obligé de la punir pour son bien. Malgré tout le mal que tu as pu pensé de moi et de mes moyens pour sauver ton âme, j'espère que tu as retenu mes enseignements.

A très bientôt au Paradis Solaire,
Père Scopolie de Carniole


PS : J'espère que Monseigneur Rouletabille est mort et que Craon a été détruit par l'aura lumineuse de l'astre solaire.
PPS : Et que le juge Tancy est mort de la lèpre.
PPPS : Passe le bonjour à ma cousine et à mon Roy.

Adieu.


La lettre fut remise à un coursier grassement payé. Sûrement enverra-t-il la lettre en France par l'intermédiaire d'une mouette. Nous avons les corbeaux, eux les mouettes. Peut-être que ce seront eux qui viendront picorer les restes de mon corps charnel si je me fais étriper tout à l'heure en voulant passer les portes de la ville avec ma charette pleine de presque 4500 écus prélevés en Son nom, du maïs et de la viande pour se nourrir au coin du feu. J'étais sur le point de mourir, et pourtant, je ne regrettai aucune de mes actions. J'étais en paix avec moi-même, et avec Lui ; mais si je me promis que si je m'en sortais, Sorianne aurait une bonne raison de boiter après nos retrouvailles.

Alea jacta est.

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Votez Eusaias
Sorianne
L'après midi touchait doucement à sa fin. Le ciel morne et bas n'incitait décidément pas à mettre le nez dehors, aussi la noiraude avait décidé de se remettre à la couture. Il y avait une éternité qu'elle ne s'y était pas essayé. Non contente d'avoir une activité permettant d'éviter de la faire ruminer des choses non plaisantes, cela lui faisait passer le temps. Assise en travers du large fauteuil qui trônait dans la pièce, devant la cheminée qui crépitait, la langue tirée en signe de concentration intense, So s'attaquait à un point des plus délicats. C'est ce moment là que choisit celui qui frappa à la porte avec force délicatesse...

Relevant la tête, la noiraude fronça les sourcils, n'attendant strictement personne. Doucement, elle s'extirpa de ses coussins et alla à la porte, ne faisant que l’entrebâiller. Et c'était déjà de trop. Qui donc était cet homme qui se tenait là? Pas l'air d'être méchant, mais elle ne l'avait jamais vu.


Le taulier m'a dit que Dame Sorianne était là?
Euh... C'est moi?

Sans chercher plus avant, l'homme lui tendit un pli avant de la saluer du chef et de faire demi tour. Le courrier dans la main, la brune referma la porte, un paquet de questions tournoyant et retourna se poser dans le moelleux du fauteuil. Le pli fut tourné et retourné, cherchant qui pouvait lui écrire. L'écriture lui semblait familière sans qu'elle ne réussisse à mettre un nom sur l'auteur. Et elle l'ouvrit.

Et d'un coup le semblant de calme qu'elle avait retrouvé s'écroula.

Elle ne finit pas les premières lignes, que le courrier fut repoussé au loin par une main devenue tremblante. Machinalement, elle cherchait à s'enfoncer du mieux qu'elle le pouvait dans les coussins de son siège, voulant peut-être par là se faire oublier, se faire petite et s'effacer. Il ne pouvait pas lui avoir écrit, il l'avait chassé, il l'avait rendue à la Lune sans lui laisser une once d'espoir. Recroquevillée, les genoux relevés contre elle, So ne sentait même pas ses mains tirer forts sur ses cheveux qu'elle avait agrippé.

Il lui fallut un temps avant de se remettre des émotions suscitées là. Ce ne fut que bien de longues minutes après, qu'elle se releva et alla ramasser la lettre jetée. Incapable de la lire dans la foulée, se demandant ce qu'il lui voulait, la jeune femme allait et venait, arpentait la pièce de ses pieds nus, essayant de calmer les tremblements qui la parcouraient sans qu'elle ne puisse les contrôler.

Stop. Elle s'arrêta net. Elle avait promis. Il lui fallait souffler, se calmer. Il n'était pas là, n'allait pas surgir derrière elle sans prévenir. Il l'avait chassé et ne voulait plus la voir. Il le lui avait bien dit. Dorénavant, elle était "bien", au calme. Ce n'était pas un courrier qui allait changer ce fait. Baissant le nez, elle vit la lourde bague et souffla de nouveau, se rasseyant avant de reprendre le vélin du Père Scopolie.

En larmes avant la fin, la noiraude ne savait que penser de tout ça. De peine? De soulagement? Était-il mort? Était-elle libérée de son joug? Il lui avait manqué, elle qui s'était retrouvée seule du jour au lendemain. Elle l'avait haï comme jamais elle avait détesté quelqu'un. Et pourtant il avait été là quand elle n'était pas bien.. Même s'il n'était pas étranger à son état. Elle avait pourtant fini par se résoudre...

Sans entrain, elle se leva et alla chercher de quoi rédiger sa réponse. S'il était mort, il ne la recevrait pas. Dans le cas contraire...


Citation:
Mon Père,

Jamais je n'aurai pensé avoir de vos nouvelles.
Je ne sais si vous êtes toujours en vie... Mais si vous le méritez tant, sans doutes que le Très Haut fera un geste pour vous ramener sur Terre.

Soyez sûr que vos enseignements ont payé.
L'alcool me rebute. J'ai dû en boire une fois, afin de supporter avec difficultés, de sombres pensées.

Ma... Fille, n'est plus auprès de moi. Je l'ai confié aux bons soins de son Père. Elle sera bien mieux auprès de lui qu'auprès d'une Mère n'ayant plus tout sa tête. D'hommes il n'y en a pas. Il n'y en aura plus. Les ponts ont été coupés avec le Père de ma "bâtarde" et ils ne se reconstruiront pas.

N'ayez crainte pour mon âme, mon Père... J'arrive à me punir en souvenir de vous. Chaque soir ou presque. Aucun désir, aucun plaisir. Juste une façon de me souvenir de vous. Je crois que vous pouvez être fier de votre œuvre. J'ai bien retenu les leçons que vous m'avez apprises. Vraiment. Je prends soin de penser à vous à chaque fois qu'il me faut faire quelque chose. ...

Peut-être qu'il est donc temps que je sois libre...
Peut-être le temps est-il venu de me féliciter.

Je ne vous ai jamais oublié. Et ne vous oublierai jamais. Le Sans Nom... Je le fuis. Je fuis tout ce qui a trait à lui.


De sa main libre, elle serra la chevalière.

Citation:
Je vous appréciais malgré tout. Vous m'avez chassé.
J'avais rendu les armes, ouvert les yeux peut-être, ou les avais fermé. Et vous m'avez renvoyé, vous m'avez condamné sans me laisser la moindre chance. Vous avez fui votre sort...
Vous m'avez abandonné au même titre que tous ceux qui m'ont laissé.
...
Je veux suivre mon chemin seule. Je pense en être capabe.
...

Le Roy Frondeur a été pardonné. Lui et ceux qui l'ont suivi. Peut-être en est-il de même pour Rome. Même si je n'ai pas vu d'annonce en ce sens.

Monseigneur Rouletabille ne donne plus signe de vie. Personne ne l'a vu depuis de nombreux mois. Par contre Craon retrouve vie grâce à un bourgmestre bretonnant.

Quant à votre cousin et cousine... Je pense qu'ils seraient ravis d'avoir de vos nouvelles en première main, sans relais.

... Merci néanmoins pour avoir cherché à m'aider à votre manière. Mais d'autres cherchent à m'aider d'une autre manière. M'ont fait promettre de ne plus aller à la rencontre de ceux me demandant retour à leur aide. Je n'ai pas à être redevable. Vous m'avez trop pris...

Sorianne.


Un sanglot toutefois. Il lui avait pris tellement... Sans doutes ne s'en rendrait-il jamais compte. Mais elle avait promis. Elle l'avait promis et se devait de couper court. Il lui fallait se refaire. Et n'ayant plus sa fille, il n'aurait plus de point douloureux sur lequel appuyer.

Le courrier fut renvoyé. Malgré tout ce qu'il lui avait fait, elle espérait qu'il n'aurait pas à être jugé et que la Mort ne viendrait pas le prendre. Pas encore. Parce que malgré elle, elle s'était attachée.

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Scopolie
Le hasard, c'est le Très-Haut qui se promène incognito. C'est Lui qui a voulu que je survive à la nuit suivant l'écriture de la lettre. Même si l'armée aux portes de la ville m'avait dans sa liste des personnes indésirables, ils n'ont pas eu l'occasion de la feuilleter : mon accoutrement de moine ou l'heure tardive de mon départ ont fait que je ne les ai pas croisé. Quant aux brigands, s'ils m'ont vu, moi pas. A croire que les rumeurs selon lesquelles les brigands pullulent autour de la capitale sont fausses.

Direction la frontière, donc. Mon projet est simple : m'enrichir autant que possible dans chaque duché de ce pays barbare, pour revenir en France avec assez de moyens financiers pour influencer le cours de l'Histoire et participer à Sa gloire. Rien que ça. Mais avant, je devais répondre à la lettre que j'ai reçu, dont le ton et la conclusion m'ont fortement déplu. Je n'aime pas perdre, même si c'est une perte sans importance dans l'immédiat.


Citation:
Ma fille,

Comme tu peux le constater, je suis toujours en vie. Pourtant, mon cœur s'est arrêté trois fois de battre à la lecture de ta lettre.

La première fois, lorsque tu m'as appris que tu as abandonné ta fille. Toi qui l'aimais tant, toi qui a tant sacrifié pour elle, tu l'as abandonné à son géniteur, ce coureur de jupons, ce géniteur de bâtards ? Que crois-tu qu'il va faire d'elle ? Une noble entourée de faux semblants, trop nourrie et flemmarde. Elle va faire mourir de fin des enfants pour qu'elle, elle puisse manger toujours plus et aussi nourrir ses invités, aussi opulents qu'elle, et avec qui elle participera à des orgies. Tu as livré ta fille à la noblesse décadente, ivre de plaisir, de pouvoir et de richesse. Veux-tu que ta fille soit à l'image de l'homme qui t'a causé tant de misères ? L'homme qui t'a renié lorsqu'il n'a pas pu assouvir ses plus bas instincts de mâle ?

J'ai prié pour cette petite et pour son âme. J'ai essayé de racheter le péché de sa naissance, pour elle et pour sa mère. Et voilà que tu m'annonces que tu l'as livré aux griffes d'une tribu de poudrés et d'enrubannés, orgueilleux au possible, suffisants de leur médiocre quotidien. Ta fille avait donc si peu de valeur à tes yeux ? Tu diras que tu l'as donné à son père pour son bien, pour son avenir, mais quel avenir ? Tu l'as condamné à l'Enfer. Hors de mon joug, point de salut pour elle. Quel autre prêtre osera dire aux nobles que leurs bâtards chéris sont voués à endurer les pires atrocités après leur mort ? Aucun, et surtout pas leurs chapelains.

La seconde fois, lorsque j'ai appris que tu te punis toi-même pour te souvenir de moi. Crois-tu que cela suffit à racheter tes péchés ? Crois-tu qu'un voleur qui se couperait lui-même la main serait un voleur pardonné ? Qui es-tu pour décider de ta propre pénitence ? Une égocentrique. Tu crois que parce que tu as vécu quelques mois auprès de moi, tu connais le fonctionnement du monde spirituel. Orgueilleuse.

Laisse moi te dire, pour ton bien, que toutes les punitions que tu t'infliges ne servent à rien, mis à part te donner un prétexte pour pécher et penser qu'Il est bien injuste de nous obliger à souffrir corps et âme pour atteindre le Paradis. Tu n'es qu'une enfant qui s'est retrouvée avec un outil entre les mains, et tu ne sais pas l'utiliser correctement. Tu fais plus de mal que de bien.

Et le plus terrible, c'est que tu veux être libre, tu veux être félicitée pour cela. Mais tu es libre, mon enfant. Tu l'as toujours été. Le Très-Haut t'a donné, comme tout à chacun, le Libre Arbitre.
Et vois ce que tu en as fait jusqu'à notre rencontre. Tu étais une ivrogne qui collectionnait les amants et condamnait sa progéniture à l'Enfer.
Et vois ce que tu en as fait tandis que j'essayais de t'aider à sauver ton âme et celui de ta fille. Tes menaces, ta méfiance, tes refus de m'obéir mettaient à rude épreuve ma bonne volonté.
Et vois ce que tu en as fait après mon départ que tu as tant réclamé et que tu me reproches maintenant. Tu remplaces tes anciens péchés par d'autres : tu abandonnes ta fille, tu te flagelles pour te pardonner tes fautes, comme un criminel déciderait de sa sentence.
Et tu veux être félicitée pour cela. Comble de l’orgueil. Tu es comme ces régnants qui jappent à la badauderie pour réclamer des terres de retraite après un mandat tout à fait banal et sans intérêt.

La troisième fois, lorsque j'ai aperçu l'emprunte du Sans-Nom dans tes écrits. Ce n'est pas toi qui parle. Tu es manipulée. Qui t'a bercé l'âme de doux mensonges ? Qui t'a fait croire qu'il allait t'aider, que les autres te voulaient du mal ? Tu t'éloignes du monde aristotélicien pour aller te faire serrer dans les bras de la Bête et de ses sbires. Ils te font croire qu'ils t'aident de bonne grâce, sans que tu vois qu'ils s'approprient peu à peu ton âme.

Tu n'as pas à être redevable ? Alors rends au Très-Haut la vie qu'il t'a donné, et voyons si tu ne Lui dois rien, si tu ne dois rien à Ses lieutenants dans ce monde. Car tout ce que j'ai fait, c'est pour ton bien. La preuve que je ne convoitais rien en toi, c'est que je t'ai laissé derrière moi lorsque je me suis rendu compte que je perdais mon temps en essayant de t'aider, et que d'autres méritaient sûrement d'avantage mon aide.

Ressaisis-toi, Sorianne. Des gens utilisent ta tristesse et manipulent ton orgueil contre toi. Le Sans-nom te volera ton âme en te faisant croire que tu te fais du bien. Et cette fois, en toute liberté, tu vas devoir faire un choix. De ce choix découlera l'avenir de ton âme et de celui de ta fille.

Je prierai pour toi, ma fille.
Tendrement,
Père Scopolie de Carniole


PS : Je contacterai ma chère cousine et mon royal cousin lorsque le moment sera venu. En attendant, transmets leur mes meilleurs sentiments.


La lettre fut aussitôt envoyée, délivrant le peu d'espace qu'il y a sur la table pour que je puisse étaler ma carte et prévoir ma prochaine destination. Je ne doutais pas qu'elle répondrait à mon courrier qui va sans doute la troubler. Elle se sent forte et sûre d'elle, elle va vouloir confronter ses arguments aux miens pour conforter son idée qu'elle ne me doit rien. Mais elle me doit tout, y compris la vie. Et le moment venu, je la lui reprendrais s'il le faut. Ce ne sera qu'une regrettable perte dans l'accomplissement de Son œuvre.
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Votez Eusaias
Sorianne
A genoux, la tête dans un seau, les cheveux tenus de côté, d'une main, la noiraude rendait tout ce qu'elle pouvait. A quoi s'était-elle donc attendu? Qu'il la gracie? Qu'il la laisse et la félicite tel qu'elle l'avait demandé dans la réponse à son courrier? ... Oh elle n'avait pas espérer que l'armée dont il parlait, achève son existence, elle n'était pas suffisamment mauvaise pour cela. Mais peut-être aurait-elle dû prier en ce sens finalement...

La main crispée au contenant, le teint pâle, le front moite, et toute frissonnante, la So posa la tête sur son bras, lasse. Pourquoi avait-il fallu qu'il se rappelle à elle, alors qu'elle pensait enfin réussir à se sortir du bourbier dans lequel elle se trouvait engluée? Si le premier courrier avait finit par être remisé dans un coin de sa tête et bien au fond de l'une de ses malles, celui ci avait eut un effet immédiat. Les yeux clos, un gémissement plaintif s'échappa de sa gorge malmenée et la jeune femme se recroquevilla davantage encore.

Il était une promesse qu'elle n'arriverait pas à tenir... Et cela la rongeait littéralement. Pourquoi fallait-il qu'il arrive à lui faire perdre tous ses maigres moyens? Pourquoi n'arrivait-elle pas à lutter contre lui comme elle le ferait avec d'autres? Tout était si confus et contradictoire dans ce qu'elle ressentait, qu'elle ne savait plus du tout quoi penser, ni ce qu'elle devait faire, dire... Elle ne savait qu’acquiescer au final, à ce qu'il pouvait bien lui dire malgré cet embryon de rébellion qui voulait poindre...

A qui se confier? Qui ne la jugerait pas? Qui n'irait pas lui dire qu'elle n'était qu'une misérable imbécile pour oser prendre en compte de simples paroles...? Ils ne savaient pas, ils ne le sauraient pas... Un hoquet, et elle fut de nouveau malade. Rendre sa vie au Très Haut, se tuer pour n'être redevable à personne... Oh comme sa tête tournait...

Ce n'est que le lendemain qu'elle réussit à s'attabler afin de répondre à ce maudit courrier. Le teint encore pâle et le cœur au bord des lèvres, la petite noiraude jouait distraitement de la plume, l'esprit ailleurs. Elle n'utilisait jamais cet ustensile d'habitude Le museau baissé en direction de ce poignet libre de tout cuir, le regard fixait le néant, tandis que mâchoires crispées, le piquant du plumet venait griffer la peau fine, y laissant des marques qui viendraient tenir compagnie à la cicatrice qui y tenait bonne place. Jusqu'à une plus douloureuse qui les autres qui la fit sortir de sa contemplation du vide.

L'esprit perdu eut quelques difficultés à savoir ce qu'il se passait, mais quand So réalisa, elle se mordit la lèvres avant d'attraper la manche de sa chemise et d'appuyer sur son bras abîmé. Elle ferma les yeux, souffla, inspira, essayant de rassembler ses esprits qui semblaient divaguer complétement. Jetant la plume au loin, elle prit le fusain qu'elle utilisait d'habitude et se lança. Mais que dire? Au moins le détromper...


Citation:
Mon Père,

Si vous saviez comme vous pouvez vous tromper sur Colhomban...
Il est bon.
Il m'a rejeté parce que trop de fuite de ma part, non parce qu'il n'a pas pu assouvir ses désirs. Et finalement, la faute ne vient que de moi, il n'a rien fait.
Il est loin de n'avoir de considération que pour les nobles personnes, il est gentil, sincère et aimant. Il sera un bon Père pour sa fille, et lui inculquera les valeurs qu'elle mérite, elle aura le sens de l'honneur de sa famille et je serai heureuse qu'elle lui ressemble.
Il n'est pas coureur de jupons, il n'est pas fainéant. Il est travailleur, il est noble de cœur, d'esprit plus qu'il ne l'est de blason.

Ma fille était tout pour moi, et c'est pour ça que je l'ai confié à quelqu'un qui saura mieux que moi ce qui est bon pour elle. Comment élever une enfant lorsque l'on n'a plus la tête sur les épaules? Je sais que ce choix fut le bon.

Quant à aller trouver à me punir, ce n'est pas pour effacer des péchés que j'aurai pu commettre. Je ne pense pas être suffisamment égocentrique pour les voir de moi même, oh non.
Mais c'est... Une manière de penser à vous. Oui, ça. Chaque soir ou presque, vous preniez... C'est confus, flou, je ne sais pas... Il le fallait, il le faut...

Manipulée... Si vous saviez le nombre de fois où j'ai appelé la Mort à venir... Mais... La promesse que j'ai faite, est celle de vivre, de ne plus être l'ombre que j'étais devenue. Je veux vivre, sourire. Je veux redevenir moi même, ou un semblant de ce que j'étais... Vous voulez me revoir, mais moi je ne préfère pas. Vous m'avez d'ores et déjà condamnée, à quoi bon lutter? Pourquoi n'aurai-je pas droit à un peu de paix de l'esprit, au moins jusqu'à ce que la Mort décide de venir me prendre? Savez vous qu'elle n'a pas daigné m'emporter quand je l'ai croisé? C'est que je ne mérite sans doutes pas ce sort...
Non, sans doutes pas...

Je ne veux pas de votre tendresse...
Votre tendresse est douloureuse...
Votre bonté est chèrement dispensée...
Votre Pardon bien trop lourdement taxé...

Je ne veux pas être jugée...
Je veux être oubliée...

Voir votre Royal cousin n'est pas à l'ordre du jour... Il attendra donc le moment venu...

Sorianne.


La tête posée sur le bras étendu sur la table, la brune se serait presque noyée de chagrin. Comment était-il possible d'en arriver à tout ceci? Même après ces mois de solitude, elle le sentait contre elle, la nuit venue, elle le sentait encore malgré le temps passé. Elle avait beau avoir promis, les rêves ne pardonnaient pas et se fichaient de ce qui avait pu être dit. Ils étaient là, plus réels que jamais, encore plus depuis que le prélat lui avait donné nouvelles.

Devait-elle aller trouver ce Rapace afin de trouver protection? Il semblait l'apprécier malgré tout, peut-être empêcherait-il le curé de s'en prendre de nouveau à elle? Non, non elle ne pouvait pas, ce serait se défendre d'un loup pour aller se coller dans le giron d'un autre. Essuyant ses joues trempées, So attrapa un nouveau vélin pour y griffonner quelques mots, écriture nerveuse et serrée, bien trop appuyée, de trop s’agripper à ce bout de charbon traçant les mots. Appel au secours à un Maure chirurgien, même si le message était sans doutes loin d'être bien clair. Signal de détresse qu'elle se permettait de lancer pour ne pas sombrer... Parce qu'à relire le courrier en provenance d'Angleterre, et à l'idée même que celui qui l'avait écris puisse revenir un jour, l'envie de rendre au Très Haut ce qu'il lui avait offert faisait son chemin dans son esprit maltraité. Elle voulait respecter sa promesse, elle le voulait du fond du cœur... Mais il fallait croire que seule, ce serait impossible...

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Scopolie
Cette lettre, qui n'était au départ qu'une sorte de testament de la part d'un grabataire qui ne voulait pas mourir comme le dernier des mendiants, se transformait peu à peu en un jeu malsain, dont l'enjeu n'était autre que l'âme de Sorianne elle-même. Un jeu d'autant plus amusant pour moi que malgré la distance qui nous sépare, je n'ai pas eu à bouger pour qu'elle y participe. Elle aurait pu tout simplement brûler ma lettre et l'oublier, mais elle est comme un livre ouvert pour moi. Elle est mienne, et personne n'arrivera à me l'enlever. Je ne lui rendrai sa liberté que lorsque j'en aurai fini avec elle, qu'elle sera une poupée de chiffon dont le rembourrage ne tiendra plus que par le caprice de quelques fils.

J'étais attablé dans l'auberge où je louais ma chambre. Ma fortune était cachée là où personne n'irait la chercher, derrière un mur instable de pierres mal arrangées, dans un endroit humide gardé par un molosse affamé : la cave. Le gérant, dont le ventre était gonflé par le péché de gourmandise, semblait avoir l'habitude d'abriter des gens ayant des choses à cacher. Cet endroit discret aménagé sous son établissement en était la preuve, et il n'avait pas eu à réfléchir longtemps pour m'annoncer la somme que je lui devais. J'ai tout de même réussi à négocier un repas offert par l'établissement, que je dégustais lorsqu'un coursier aux couleurs de la région locale m'apporta la lettre que j'attendais. Tant de pleurnicheries m'aurait presque coupé l'appétit tant les mots se bousculaient dans ma tête. Inspiration quand tu nous tiens.


Citation:
Ma fille, sous réserve que tu sois encore digne aristotélicienne à l'heure où tu liras cette lettre, ce dont je doute de plus en plus,

Crois-tu que tu sois bien placée pour juger l'homme que tu as aimé et que tu aimes peut-être encore ? Crois-tu qu'on laisserait un juge décider de la peine à infliger à un membre hors-la-loi de sa famille ou de ses proches ? Te targuerais-tu d'être assez objective dans ton jugement pour me décrire aussi certainement son âme ? Tu es bouffie d’orgueil. Tu es triste qu'il soit parti, alors tu rejettes la faute sur toi et tu fais de lui un saint. J'ignore si ce sont les restes que je n'ai su annihiler au fond de ton âme qui ont germé, ou si ce sont tes amis qui te l'ont insufflé, mais tu me déçois. J’espérais mieux de toi, mais ça n'a l'air d'être que le commencement de ma désillusion.

Je ne te demanderai pas si tu as écrit cette lettre sous la dictée de Lucifer. C'est inutile, je le vois comme le sang sur les mains d'un hérétique du Lion de Juda. Tu es sous l'emprise du Prince-Démon de l'acédie, et tu finiras en Enfer, escaladant le plus haut pic de la Lune pour l'éternité : "Je m’écroulai sur la corniche pour essayer de trouver quelque repos, lorsque j’entendis des pleurs. Je tournai ma tête et vis un vieil homme à la barbe hirsute qui versait de chaudes larmes. Son corps était si sec qu’il en paraissait squelettique. Il me dit: “Je suis Lucifer, Prince de l’Acédie. Sylphaël, Archange du Plaisir, est mon opposé. Celui qui entre en dépression spirituelle, qui reste passif, qui n’a plus goût à la vie, et qui ignore sa propre satisfaction rejoint les rangs de mes damnés, qui jamais n’arrivent à atteindre le soleil”".

Tu ne peux pas ne pas être jugée pour tes actes et tes pensées dans ce monde. Tu ne peux pas être oubliée. Comme nous tous, tu passeras devant Lui, et tu devras répondre de tes péchés, de ton refus de repentance et de ton laisser-aller. Tu pleureras toutes les chaudes larmes de ton corps pour qu'Il te pardonne, car Il est miséricordieux ; mais Il n'est pas idiot. S'Il ne t'a pas encore retiré la vie malgré que tu le réclames, c'est qu'il estime que tu peux encore racheter ton âme. S'il m'a fait souffrir toutes ces mésaventures qui m'ont amené à t'écrire, c'est que je dois encore t'aider. J'ai encore un rôle à jouer dans ta vie. Et pour contrer Ses desseins, le Sans-nom t'a amené de nouveaux amis, ou t'a ramené les anciens, que sais-je. Tu es comme nous tous, l'enjeu d'une partie qui se joue entre deux entités qui nous dépassent, et qui ne se terminera qu'au Jugement Dernier. Je suis le seul à pouvoir te sauver de la damnation éternelle. Alors, toi qui te fait pénitence pour te souvenir de moi, pourquoi refuses-tu mon aide ?

Si tu souffres, c'est parce que le péché est solidement ancré à ton âme, comme l'a été ton péché de luxure à tes entrailles lors de ta grossesse ; comme l'a été ton péché de gourmandise à ton estomac lorsque tu vomissais tout l'alcool ingéré.
Ce n'est pas toi qui souffre, c'est l'emprise du Sans-nom sur toi.
Tes péchés ne sont pas toi, tu peux les renvoyer dans le néant, mais ce sera difficile et douloureux.
Et si tu trouves que mon aide est cher payée, c'est que ton âme a un prix. Or le Très-Haut n'achète pas les âmes, il laisse cette bassesse au Sans-nom.

Transmettre toute mon affection à ma cousine et mon Roy sera ton premier pas vers la Rédemption. C'est la spiritualité du Royaume de France qui est en jeu. A toi de décider ce qui est le plus important : l'âme de ton prochain ou ton petit confort personnel.

Père Scopolie de Carniole


Garder de bonnes relations avec Agnès et son époux faisait parti de mes priorités. Si par un heureux hasard, ou un complot bien orchestré, ils devenaient le nouveau couple royal, je compte bien quitter ma condition de clerc itinérant pour accéder au pouvoir royal. Et si je cherche quelqu'un pour me rendre quelques services en France, je veux pouvoir compter sur Sorianne. Son âme est à moi, pensai-je en plantant mes dents jaunes dans la chair tiède de la cuisse de poulet.
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Sorianne
Prostrée contre un mur, les genoux relevés contre elle, la jeune femme fixait le néant tandis que ses doigts jouaient machinalement avec la chevalière confiée. Les courriers reçus dans l'autre main, So ne savait plus où elle en était. Totalement perdue dans les méandres de cette vie maudite. De part et d'autre, on s'échinait à lui faire penser tout et son contraire, qui croire? Qui suivre? Tellement perdue que se faire son chemin seule lui était impossible.

La lettre du clerc était arrivée après celle du beau chirurgien, aussi la jeune femme ne pouvait que confirmer ce qu'il lui disait. Sous l'emprise des Princes Démons... L'extrait qu'il lui avait écrit ne faisant que le prouver... Acédie... Avarice aussi, pour preuve cette lourde bague pendant à son cou... Pourtant il avait voulu l'aider, elle s'en serait sans doutes sortie si le prêtre n'avait pas donné de ses nouvelles. Naïve, s'était-elle faite berner par les envoyés du Sans Nom? Elle ne voulait le croire.

Relisant distraitement le courrier, elle se mit à trembler à l'imaginer revenir pour continuer son œuvre. Une plainte angoissée. Bien qu'elle ne sache que penser exactement de lui, elle ne voulait pas. Non elle ne voulait pas qu'il revienne dans sa vie, qu'il reprenne ce qu'elle ne voulait pas lui donner, qu'il lui reprenne ce calme qu'elle avait commencé à retrouver.

Ses pensées vaquèrent vers Achim, et les mains se perdirent dans ses cheveux, serrant les mèches brunes avant de les ramener sur son visage et de se bercer doucement. Elle avait refusé ça à Colhomban... Que dirait le Père Scopolie s'il venait à l'apprendre? Se marier avec un homme venu de l'Orient, qu'elle n'avait finalement croisé que peu malgré l'intensité de chaque instant... Mais il serait là, il ne laisserait pas revenir le prélat...

Se dégageant de derrière le rideau soyeux, la noiraude prit appui au mur afin de se relever. Une profonde inspiration accompagna le geste, ne serait-ce que pour contenir le flot salé qui ne demandait qu'à dégringoler le long de ses joues.


Citation:
Mon Père,

Mon âme est perdue.
Le Prince Démon qui est venu à moi se nomme Avarice.
Il m'a laissé la vie et m'a fait promettre d'y être heureuse.
Je ne serai plus sous le joug de Lucifer, même s'il doit s'être penché sur mon épaule depuis quelques mois.


Avait-il cessé de respirer? Son cœur battait-il encore?

Citation:
Je ne suis pas assez courageuse pour demander votre aide... Je n'arriverai pas à me défaire de tous ces péchés qui me collent à la peau. Je ne veux plus souffrir, je suis lasse d'essayer en vain Quand bien même vous useriez d'un gant de crin, ils resteraient sans doutes ancrés bien trop profondément. Et ce, aussi loin que vous pourriez aller, dans les profondeurs de mon être. Je ne veux pas être brisée, ne veux pas n'être qu'un fantôme une fois débarrassée de tout ceci.

Maure sera mon époux. Doux, aimant et protecteur, il m'invite à unir mon âme à la sienne. Nul péché pour ses Dieux. Je brûlerai en Enfer... Tiendrai compagnie à Belzebuth, lui qui a été si bon avec moi, en gage de ma reconnaissance, je le lui dois bien, moi qui n'aurai pas réussi à tenir la promesse faite.


La chevalière serrée dans son poing, la brune étouffa un sanglot. Oh comme elle ne voulait pas penser ce qu'elle écrivait. Mais il fallait se rendre à l'évidence. Son destin était d'ores et déjà tracé, jamais elle n'arriverait à retrouver la Lumière, alors autant s'y préparer. Comment pourrait-elle trouver le Soleil avec tout ce qu'elle s’apprêtait à faire.... Tout ce qu'elle disait...

Citation:
Le Très Haut me chassera comme vous l'avez fait, comme tout le monde l'a fait, pour m'envoyer faire pénitence sur la Lune. Je n'y crois plus, à quoi bon lutter? Peut-être qu'attendre mon sort, résignée, sera la meilleure chose à faire...

Adieu, et je suis désolée...

Votre plus grande déception.


Plié. So attrapa les précédents courriers et déchira sans ménagement, la fin du second qu'elle avait reçu. Il voulait qu'elle passe ses amitiés à sa famille? Elle allait se contenter d'envoyer ce post scriptum qui trônait là. Ne serait-ce point suffisant? Le reste du courrier fut jeté vers l'arrière. Debout face à la table, les poings sur les oreilles, elle croyait presque entendre la voix pleine de reproches du prélat, tout tournait autour d'elle, et Lui qui était là et qui s'en donnait à coeur joie. Finalement tout ce qui tenait place sur le meuble vola dans un grand cri rageux...
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Scopolie
C'était à croire que rien n'aurait pu gâcher une si belle journée. J'avais l'impression que ma peau n'allait pas tarder à craqueler comme une fine couche de glace tellement j'avais froid malgré le feu que j'avais allumé devant moi. Ma robe de bure trouée ne suffisait plus à me tenir un minimum au chaud. Mais je souffre à Sa gloire, alors c'est une souffrance agréable.

Je campais dans une clairière, non loin du chemin où j'avais plus tôt réquisitionné les biens d'une brigande. J'avais reconnu la tête de ce monstre d'avarice lorsque je l'ai croisé, à la recherche d'un marchand aussi rond que sa bourse : les avis de recherche étaient fidèles à l'originale, pour une fois. Jeune et blonde avec un regard peu aimable. Je ne saurais jamais si le fait qu'elle m'observait fixement prédestiner que j'étais sa prochaine victime ou si c'était une hérétique pure et dure. Ce dont je suis sûr, c'est que c'était de la surprise que je pouvais lire dans son regard lorsque je lui assénai le premier coup de crosse. Je ne retiens pas mon coup, pour une fois. Cette brigande ne méritait que ça, et peut-être pire encore ; mais elle ne se défendit pas d'avantage -sa lâcheté n'égalant que son avarice- et me laissa là ses biens. Ou plutôt, ceux qu'elle avait volé pour rassasier son désir de biens matériels au vu de l’hétérogénéité de ceux-ci : du pain, du maïs, de la viande, des carcasses d'animaux, un couteau, une charette, un chapeau et...


J'aurais dû la brûler vive cette sorcière !

... De la neige. Par je ne sais quel artifice, elle arrivait à la conserver de la fonte. C'était encore un signe du Très-Haut : il m'avait envoyé cette ensorceleuse pour que je la corrige. D'un air dégoûté, je jetai cette neige maudite au sol et je m'en allai avec Son offrande. Au moins, pour cette fois, je ne serai pas inquiété par la justice des barbares qui ont le bon goût, malgré leurs esprits corrompus, de pourchasser cette femme.

Le tricorne de la sorcière sur la tête, je dormais du sommeil du juste, sans me demander ce que cette femme est devenue, lorsqu'un pigeon m'apporta une lettre. Tout d'abord surpris, je m'attendais à une lettre de convocation au tribunal. Finalement, je me suis rappelé que j'entretenais une correspondance avec Sorianne, cette douce bergère qui me fait de plus en plus penser à une brebis d'ailleurs. D'un regard endormi, je parcourus rapidement la lettre, à peine curieux de savoir quelles raisons elle a bien pu inventer pour pécher. La lecture du dernier paragraphe fit tomber le chapeau au sol. Mes dents ne claquaient plus, elles étaient serrées à en rendre douloureuses les jointures de ma mâchoire.


La maudite ! m'écriai-je, comme une demande à Lui adresser pour maudire la source de mes tracas, à moins que ce ne soit une constatation.

Cette fois, je ne pris pas le temps de réfléchir à une réponse. La colère réchauffait partiellement mes doigts engourdis, il fallait en profiter.


Citation:
Sorianne,
Toi que je ne considère plus comme ma fille,
Toi que je ne considère plus comme faisant parti de la famille aristotélicienne,
Toi que je considère comme Sa bâtarde, sa fille indigne,

Je suppose que tu es née un dimanche ; je ne vois que cette explication pour justifier le fait que le Très-Haut t'ait créé. Il y a assez d'hérétiques et d'imbéciles dans ce monde, pourquoi te rajouter dans ce joyeux foutoir ? Je doute que ce soit pour mettre mes nerfs à rude épreuve, car auquel cas, c'est réussi. Et je me rappelle maintenant pourquoi je t'ai abandonné à Craon : tu es une cause perdue ! Tu es une âme damnée !

Bien sotte que tu es de croire que tu es plus heureuse sous le regard obscur du Sans-nom ! Ce plaisir que tu prends dans ce monde ne vaut pas les souffrances que tu endureras dans l'autre ! C'est un piège, et toi tu sautes dedans à pieds joints.

Et tu m'apprends en plus que tu veux t'unir devant le Très-Haut avec un hérétique ? Es-tu devenue folle ?! Jamais un prêtre ne célébrera cette union, car l'église serait détruite sur l'instant tant ce sacrilège est ignoble ! Et toi, tu es tout aussi ignoble !

Tu renies ton Créateur, tu craches sur sa miséricorde et sur mon aide. Tu te condamnes aux souffrances de l'Enfer en devenant la pire des hérétiques. Ton âme ne t'appartient plus ! Toi et ta fille irez pourrir en Enfer, pendues par les chevilles au plus haut mont de la Lune ! Et les démons viendront tous les jours de l'éternité se moquer de toi et de ta naïveté. Mais avant ce jour, sache que si je te croise, je t’ôterai moi-même la vie ! Je ne peux pas, en tant que Son serviteur, laisser pareille engeance pourrir les âmes qu'on peut encore sauver !

Aujourd'hui, j'ai croisé une sorcière qui jetait des maléfices aux passants pour leur prendre leurs biens. En tant qu'Inquisiteur, je l'ai accroché par de solides cordages à la table en pierre qui lui servait de table de travail pour préparer ses mixtures. J'ai prié pendant toute la nuit, à la lumière de la Lune, pour que le Sans-nom voit ce que j'ai fait de sa servante. Et lorsque l'astre solaire se montra, je lui ai planté une lame longue comme mon avant-bras dans le ventre, et je l'ai remonté jusqu'à sa gorge, sciant ses côtes comme du bois de mauvaise qualité. Je l'ai écouté rendre son dernier souffle, je l'ai écouté appelé à l'aide son bienfaiteur qui l'avait doté de ses pouvoirs maléfiques. Elle s'est vidé de son sang, et elle s'est étouffé avec. Et malgré ses complaintes, ses promesses de me rendre riche et jeune, j'ai récité des prières pour être sûr que son âme passe en jugement devant Lui.

Ce sort, c'est celui qui t'attend. Profite de ta vie sous l'égide de la créature sans forme, car le Très-Haut m'a demandé de m'occuper de ton cas : la neige de la sorcière a finalement fondu, mais sur ta lettre. C'est un signe. Nous sommes destinés à nous revoir. Et ce jour là, ce sera ta dernière confession. Quant à ton Maure, il subira un sort beaucoup moins enviable.

A Dieu ! Et à bientôt.

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Sorianne
Depuis combien de temps était-elle assise là, à contempler sans la voir, la flamme vacillante de cette bougie qui se consumait pour rien? La noiraude voulait répondre... Sans trouver les mots. Pourquoi se justifier? Pourquoi vouloir justifier l'impensable? Pour se sortir du mauvais pas dans lequel elle s'était mise? Chercher à faire pardonner ces monstruosités qu'elle n'aurait jamais commises alors qu'elle était auprès de lui? Le dissuader de venir la retrouver, de mettre ses menaces à exécution?

Sorianne baissa le nez. Deux mots, seulement deux avaient été écrit depuis qu'elle se tenait là. "Mon Père"... Devait-elle réellement répondre? "La promesse de ne plus regarder en arrière ; de vivre et d'aller vers ceux qui vous donneront sans rien demander en retour" Écouter les conseils d'un clerc dont elle n'avait jamais réellement compris les avides méthodes? Ou ceux d'un Démon, Prince ténébreux au masque d'ivoire? Quel chemin suivre? Soleil? Au risque de ne plus jamais se retrouver, et ce jusqu'à ce que la Mort ne vienne la cueillir... Au risque de servir de poupée à un homme envoyé du Très Haut... Ou Lune... Et vivre dans un semblant de paix... Et Nominoée?

La main de la brune se crispa sur le vélin, le froissant sans ménagement. Col avait un frère curé en Normandie. Il saurait racheter la faute qu'elle n'avait pas commise. Que lui demanderait le Père Scopolie pour son aide? Bien trop cher. Elle avait promis. L'angoisse lui avait étreint le cœur et la respiration s'était faite ardue. Il lui faudrait s'attendre à le revoir. Ce qu'elle voulait chercher à oublier lui reviendrait sans doutes de plein fouet quand il apparaitrait devant elle. Mais elle ne serait plus seule pour lui faire face. La noiraude avait confirmé son intention.

Les yeux rivés de nouveau sur les deux seuls mots qu'elle avait réussi à écrire, So finit par se secouer. Un souffle profond pour chercher à calmer les ardeurs de sa respiration et doucement, non sans hésitations, elle leva le vélin. Il ne fallait plus qu'elle se laisse mener ainsi. Il ne fallait plus qu'elle l'écoute quand bien même elle le craignait comme jamais elle n'avait été effrayée par quelqu'un. Quoi qu'elle fasse, elle ne s'en sortirait jamais, à quoi bon lutter plus avant contre ces travers... Et pourtant elle eut du mal... Un mal fou à porter le feuillet à la flamme de la chandelle.

Mais quand le feu vint lécher et prendre possession de la lettre, la noiraude ne la lâcha plus du regard. Une manière de se libérer de ce joug devenu bien trop lourd pour elle, sans doutes... Et pourtant, les flammes n'effaçaient en rien les menaces qui pesaient maintenant sur ses épaules. Et doucement le vélin était tourné, orientant par la même, le feu qui le rongeait. So ne le lâcha que quand elle sentit la morsure de la chaleur sur ses doigts, le laissant retomber en poussières éparses sur le bois de la table, et le laissant finir de se consumer.


Je le promets.

La promesse fut réitérée, quand bien même celui à qui elle l'avait faite devait être maintenant très loin de là. Au moins la chevalière trônait-elle en bonne place cachée à l'abri de son corsage. La jeune femme ne releva le museau qu'une fois tout le vélin réduit en cendre. La flamme s'éteignit d'elle même. Le regard fut porté aux courriers qu'Il lui avait envoyé, et une ombre passa sur son visage.

Elle mourrait avant qu'il ne se charge de la tuer. Elle s'en fit la promesse. Dut-elle aller réclamer ce fait à Achim, au Diable, ou aux Princes de St Martin. Elle savait qu'elle trouverait quelqu'un pour mettre un terme à cette vie avant qu'Il ne la retouche... Damnée qu'elle était, rien de plus juste que son existence prenne fin dans les bras du Sans Nom.

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Scopolie
Plusieurs jours plus tard, dans la brume matinale des alentours de Southampton.

Ils étaient deux, bien armés et sauvages. J'étais fatigué, armé de ma crosse et à la tête d'un convoi de trois charrettes attachées en file. J'avais pris soin de placer la trentaine de poissons malodorants à la dernière charette, et les deux cents écus sous mon siège. J'étais avare mais pas au point de mettre ma vie en péril pour si peu en me battant contre ce que je pensais être deux brigands. J'avais encore plusieurs milliers d'écus dans ma propriété, j'avais de quoi voir venir et d'autres chemins à explorer.

Tirant légèrement sur les rênes du cheval de trait, je ralentissais mon allure, prêt à négocier ma vie contre des poissons pas frais, un couteau, un chapeau et de la viande faisandée. Sauf que ce que ces hommes voulaient, c'était ma vie. Trop tard, j'aperçus l’étendard du Devon flotter derrière eux. Trop tard, je me rendis compte que le premier homme me jeta à terre, moi un curé mal habillé et mal nourri, tandis que l'autre me rua de coups. Sous le coup de la douleur, je m'évanouis. Je n'avais jamais été résistant à la douleur. Je n'ai jamais eu de capacités physiques avantageuses. Mon domaine à moi, c'est la parole. C'est peut-être pour ça que je parle dans mon sommeil.

Quelques jours plus tard, je sortais de l’hôpital pour mendiants où j'étais resté bloqué, trop convalescent pour en sortir mais trop riche pour être traité comme les autres pensionnaires. Quelques pièces par-ci par-là avaient su éveiller chez les nonnes l'avarice qui se cachait sous des airs de pitié pour un prêtre de leur foi. Si je n'avais pas eu de sous en poche, elle m'aurait laissé dormir avec les lépreux, j'en suis sûr.

Quelques heures plus tard, je sortais d'une auberge où j'avais fait une rencontre surprenante, celle d'un de mes agresseurs qui se révélait être en fait -si j'avais tout compris à son charabia- un homme sympathique, surtout après que je lui ai payé une demi dizaine de chopes, qui m'expliqua les raisons de mon agression. Je rangeai précieusement cette annonce avec celle de mon excommunication.


Citation:
Following recent violent actions across numerous Counties, and appropriate communication and discussion with County authorities, I, HRM King Hezlog Neutrino, by the powers granted to the Monarch through the King's Peace Decree, do declare the following individuals, Scopolie, Espi and Blackw0lf to be Outlaws of England for a period of no less than six months.

By this action, the Outlaws lose all legal rights and privilidges granted under English Law, the armies of England are hereby authorised to place these individuals upon their enemies lists, at the discretion of the individual Army Commander, and the Captains of English ships are authorised to sink any vessels captained, owned or carrying these individuals, at their own discretion. In the case of the latter, opportunity should be given to the captain to return escorted to an English Port to deposit the Outlaws before offensive action is taken.

The list of Outlaws of the Kingdom of England hereby stands as follows:
Ailig_forbes - Until 23rd October 1460
Dod - Until 25th December 1460
Mirën - Until 25th December 1460
Scropine - Until 25th December 1460
Scopolie - Until 10th March 1461
Espi - Until 10th March 1461
Blackw0lf - Until 10th March 1461

Written this day, 10th September, 1460,




Tout comme le sang appelle le sang, l'encre appelle l'encre. Mais j'écrirai plus tard à la régnante du Devon pour lui demander un laisser-passer pour rejoindre le comté voisin qui, je l'espère, regorgera de d'avantage de voyageurs, de richesses et de moins d'armées. Pour l'heure, puisque la situation devenait périlleuse, je devais préparer mon retour. Cela commençait par une lettre à ma cousine.

Courtoisie et autres hypocrisies.


Citation:
Ma très chère cousine,

Je vous écris pour le simple plaisir d'avoir de vos nouvelles et de celles du Royaume de notre famille. Et aussi parce que, dans mon exil sur l'île anglo-saxone, j'ai appris que les élections royales approchées. Et enfin, parce que j'ai un service à vous demander.

Tout d'abord, j'espère que vous vous portez toujours aussi bien que la dernière fois que je vous ai vu, c'est à dire le corps moulé dans des robes somptueuses de la taille de mes draps. Et comment va mon Roi ? A-t-il subi des sanctions suite à la Fronde ? S'est-il remis de sa défaite ? Demande-t-il de mes nouvelles de temps à autre ?Et comment va votre progéniture que je n'ai pas encore eu le soin de baptiser ? D'ailleurs, je ne vous ai toujours pas confessé, il faudra remédier à cela le plus tôt possible. Je suis sûr que vous avez beaucoup de péchés sur l'âme, aussi lourds que votre séant sur le trône. Mais cessons là les taquineries qui peuplaient nos années d'insouciance, parlons de choses sérieuses.

J'imagine que Eusaias est candidat au trône. Si ce n'est pas le cas, il est de votre devoir d'épouse de le motiver et de l'aider du mieux que vous pourrez. Et je compte bien mettre la patte à la tâche : j'ai réuni, grâce à des transactions fructueuses, quelques milliers d'écus. Des écus qui pourraient vous servir à financer votre campagne et à graisser les doigts de quelques électeurs qui auraient du mal à lâcher le nom d'Eusaias dans l'urne.

Bien sûr, je suis toujours en Angleterre. Je ne pourrais pas me déplacer pendant encore une quinzaine de jours -je dois me remettre d'une affreuse maladie que j'ai attrapé, mais je guéris assez vite à force de prières. Aussi, cela vous laisse du temps pour savoir si vous pouvez m'organiser un retour vers la France par bateau. Si vous ne pouvez pas, puisqu'on est jamais mieux servi que par soi-même, et avec l'aide du Très-Haut, je passerai une annonce. Ne me remerciez pas, car vous m'êtes redevable, ce qui m'amène au service que j'ai à vous demander.

Vous vous souvenez de ma servante, une petite brune à l'air timide et coincé, qui me suivait partout ? Bien, cette pécheresse, que je soupçonne d'être sous l'influence démoniaque, m'a causé du tort. Aussi, pendant que je serais sur le bateau, vous userez de votre influence pour la retrouver et pour la capturer. Je m'occuperai de son sort. J'ignore où elle se trouve en ce moment, je sais juste qu'elle s'est liée par le péché à un maure peu recommandable. Ce dernier, vous pouvez en faire ce que vous voulez, tant que je n'ai aucun risque de recroiser le chemin de ce mécréant.

Avec mes salutations distinguées à transmettre à votre époux,
Votre bien-aimé cousin.

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