Della
Citation:
- Kéridil.
Bonjour.
Vous vous portez mieux à ce que je puis déduire de votre dernière missive.
Encore une fois, le Très Haut m'a écoutée et vous Il vous rend des forces ainsi qu'un peu de raison. Un peu...le reste viendra plus tard. Mais nous sommes sur bonne voie. Alléluia !
Ainsi donc vous auriez aimé épouser une faible femme, une de celles qui sont ne l'ombre de leur époux, acquiesçant quand il le faut et accourant au claquement de doigt de celui qui les engrosse année après année. Mais diantre, vous ai-je jamais laissé à penser que j'étais de celles-là qui minaudent pour recevoir de l'attention et qui couinent au moindre cassage d'ongles, qui vous regardent avec des yeux de chat potté pour obtenir leur compliment du soir ? Lorsque vous m'avez connue, ne portais-je déjà pas ma famille à bout de bras, tentant pour tous les moyens de rendre aux Renarts ce qui leur revenait de droit ? N'étais-je pas dans un mouvement politique en même temps que je gravissais les échelons de la Diplomatie de Bourgogne ? Quand donc avez-vous pu me confondre avec une poupée de chiffon ? Ah, vous courriez auprès de votre vassale parce qu'elle avait besoin de protection ! Pauvre petite choutte...quelle chance elle avait, elle, de vous avoir près d'elle ! C'est vrai, pourquoi donc seriez-vous resté ou venu à mes côtés ? On se le demande !
J'aime aussi lire vos mots qui font de moi une profiteuse sans limite. Rappelez-moi pour quelle raison et par quelle porte vous êtes entré au Louvre ? N'était-ce pas parce que vous aviez épousé la vassale de la reine Béatrice et que vous trouvant très au fait des mots, elle vous prit comme secrétaire ? N'est-ce point elle qui fit de vous le Grand Ambassadeur Royal ? Ne me faites pas dire ce que je ne dis pas, vous en aviez toutes les qualités et cette charge était taillée pour vous, mais vous aviez déjà un pied dans la porte, de par votre épouse.
Oui, c'est vrai, vous avez fait certaines choses parce que vous saviez que cela me ferait plaisir. Je ne vous enlève pas vos mérites. Il est vrai que je ne me suis pas souvent ouverte à vous, que je ne vous confiais pas tous mes états d'âme. Pour le faire, encore aurait-il fallu que j'en ai l'occasion ou que j'en ressente le besoin. Ce n'était pas le cas.
J'ai un souvenir très précis d'une tapisserie que je fis voler à travers la pièce et d'un doigt percé par une maudite aiguille. Ce jour-là, avez-vous tenté de me retenir ou m'avez-vous ouvert grand la porte pour que je reparte en Bourgogne ?
Aujourd'hui, vous me détestez ?
Faites donc.
Si cela peut vous aider à rester vivant, haïssez-moi encore. Plus si vous le voulez.
Nous avons tous les deux tracer nos routes, de temps en temps, elles se croisaient pour mieux se séparer encore. En quoi est-ce différent aujourd'hui ? Pourquoi m'ordonnez-vous de rentrer alors que je ne le veux pas ? Quelle mouche vous pique et vous donne le droit subitement d'exiger mon retour ? Est-ce de me savoir en paix qui vous fait enrager ? Est-ce parce que je vous dis que je me sens bien que vous souhaitez que je renonce à cette parenthèse ? Vous n'avez pas besoin de moi, vous n'avez jamais eu besoin de moi, c'est ainsi. Une fois que vous serez revenu à Montpipeau, vos affaires vous retiendront à nouveau et vous oublierez que je ne suis pas là.
Vous voilà à vouloir abattre la cathédrale de Strasbourg ! Mais enfin, Kéridil, reprenez-vous bon sang ! Que vous tiriez la lame aux côtés de l'anti-roi est une chose, que vous deveniez iconoclaste en est une autre !
L'Empire ne vous a rien pris du tout, vous délirez, mon ami. Strasbourg me fait une nouvelle santé, voilà tout !
Rangez votre croisade, Della d'Amahir-Euphor n'est prisonnière de personne. Elle se repose...se re-po-se. Ne pouvez-vous entendre et respecter cela ? Vous vouliez vous reposer, vous ai-je empêché de le faire ? Non ! Vous vouliez partir sur votre petit bateau en emmenant mon fils, vous ai-je empêché de le faire ? Non ! Vous avez voulu rentrer en Orléans pour vous présenter aux élections, vous ai-je empêché de le faire ? Non ! Alors, fichez-moi la paix pour cette fois et envoyez-moi mes enfants !
Je prie pour vous, je prie beaucoup.
Della d'Amahir-Euphor !
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