Charlemagne_vf
Citation:
A Arutha de Gisors-Breuil, Baron de Falaise, Seigneur de Hauterive.
Mon ami. Parce que tu l'es n'est-ce pas ? Le seul compagnon de jeu que ne connut jamais ma brève enfance.
Il est loin, ce Louvre où nous humilions ce page qui se prétendait Baron. Je suis sûr que ce n'était qu'un gratte-papier.
Il est plus loin encore ce courrier que nous signâmes pour la Duchesse d'Auxerre. Tu avais l'air petit dans son bureau, mais tu pourras au moins dire que j'y étais.
Que je te délègue mes voix en Bourgogne, le temps de mon voyage, t'a peut-être surpris. C'est que je n'ai nul autre personne digne de ma confiance. J'espère ne pas avoir embarrassé Madame de Railly en t'octroyant un vote supérieur au sien. Mais c'est ma vassale, alors je crois pouvoir décider sans son aval, non ?
J'ai vu Yolanda. Elle n'a plus tant de gras sur les côtes. Je crois que l'incendie de la boutique des Durées va lui faire du bien. Elle pourra marcher, maintenant. Les macarons, ce n'est bon pour personne. D'ailleurs, si tu veux les Madame Royale qu'ils m'ont offerts, je te les enverrai. Moi, je n'en ferai rien.
Tu aimes toujours Yolanda ? Moi, toujours pas. J'ai essayé, pourtant. Mais je ne t'empêche pas de l'aimer. Tu peux. Aimer, c'est ridicule, sache-le, c'est tout. J'ai lu que les passions sont dangereuses. Mère le croyait aussi.
Je me réjouis d'être à nouveau en Bourgogne. J'ai choisi Nevers. Mère avait choisi Chastellux. Grand-Père avait choisi Chablis.
Tu l'as peut-être su, c'est mon Frère Sancte Iohannes qui m'a tout appris. Il ressemble à Père, c'est étrange. Je n'aime pas les bâtards, mais il est admirable. Il est dommage que sont sang soit souillé.
Je l'ai quitté pour le Languedoc, j'y ai retrouvé Franc Claude : c'est un nain. Mon cousin l'appelle Pitchoune. Il est diminué physiquement, et son tuteur s'emploie à en faire une moule : il pêche les grenouilles avec la valetaille !
Je crois que Madame d'Auxerre, chez qui j'ai passé l'été, n'était pas heureuse de l'apprendre. Elle est restée à Nevers.
J'étais heureux que tu me proposes de t'aider pour les Ducales : c'était l'occasion de revenir, et aussi celle de suivre le modèle de Mère. Les Castelmaure ne sauraient quitter trop longtemps la Bourgogne.
Pourquoi as-tu voulu de moi, d'ailleurs ? Parce que je suis riche, peut-être...
Mais peu importe en fait. Tu veux être mon ami ?
Il m'en faut un, et je ne vois nul autre digne de prétendre au titre. J'ai parfois besoin de parler. Je n'aime pas cela, mais il m'arrive des choses nouvelles, et mes gardes sont des rustres, mes gouvernantes des filles, et je crois que Mesdames d'Auxerre et de Railly sont trop vieilles. J'ai donc besoin de toi.
L'acceptes-tu ?
S.A.R. C.d.C.
- Salut.
Mon ami. Parce que tu l'es n'est-ce pas ? Le seul compagnon de jeu que ne connut jamais ma brève enfance.
Il est loin, ce Louvre où nous humilions ce page qui se prétendait Baron. Je suis sûr que ce n'était qu'un gratte-papier.
Il est plus loin encore ce courrier que nous signâmes pour la Duchesse d'Auxerre. Tu avais l'air petit dans son bureau, mais tu pourras au moins dire que j'y étais.
Que je te délègue mes voix en Bourgogne, le temps de mon voyage, t'a peut-être surpris. C'est que je n'ai nul autre personne digne de ma confiance. J'espère ne pas avoir embarrassé Madame de Railly en t'octroyant un vote supérieur au sien. Mais c'est ma vassale, alors je crois pouvoir décider sans son aval, non ?
J'ai vu Yolanda. Elle n'a plus tant de gras sur les côtes. Je crois que l'incendie de la boutique des Durées va lui faire du bien. Elle pourra marcher, maintenant. Les macarons, ce n'est bon pour personne. D'ailleurs, si tu veux les Madame Royale qu'ils m'ont offerts, je te les enverrai. Moi, je n'en ferai rien.
Tu aimes toujours Yolanda ? Moi, toujours pas. J'ai essayé, pourtant. Mais je ne t'empêche pas de l'aimer. Tu peux. Aimer, c'est ridicule, sache-le, c'est tout. J'ai lu que les passions sont dangereuses. Mère le croyait aussi.
Je me réjouis d'être à nouveau en Bourgogne. J'ai choisi Nevers. Mère avait choisi Chastellux. Grand-Père avait choisi Chablis.
Tu l'as peut-être su, c'est mon Frère Sancte Iohannes qui m'a tout appris. Il ressemble à Père, c'est étrange. Je n'aime pas les bâtards, mais il est admirable. Il est dommage que sont sang soit souillé.
Je l'ai quitté pour le Languedoc, j'y ai retrouvé Franc Claude : c'est un nain. Mon cousin l'appelle Pitchoune. Il est diminué physiquement, et son tuteur s'emploie à en faire une moule : il pêche les grenouilles avec la valetaille !
Je crois que Madame d'Auxerre, chez qui j'ai passé l'été, n'était pas heureuse de l'apprendre. Elle est restée à Nevers.
J'étais heureux que tu me proposes de t'aider pour les Ducales : c'était l'occasion de revenir, et aussi celle de suivre le modèle de Mère. Les Castelmaure ne sauraient quitter trop longtemps la Bourgogne.
Pourquoi as-tu voulu de moi, d'ailleurs ? Parce que je suis riche, peut-être...
Mais peu importe en fait. Tu veux être mon ami ?
Il m'en faut un, et je ne vois nul autre digne de prétendre au titre. J'ai parfois besoin de parler. Je n'aime pas cela, mais il m'arrive des choses nouvelles, et mes gardes sont des rustres, mes gouvernantes des filles, et je crois que Mesdames d'Auxerre et de Railly sont trop vieilles. J'ai donc besoin de toi.
L'acceptes-tu ?
S.A.R. C.d.C.
La main diaphane lâcha la plume. C'était bien. Une épreuve que d'écrire quelque chose qui ne fut pas complètement utilitaire et pratique, mais bien.
Le Prince, qui avait une notion plus pratique que sentimentale de la notion d'amitié trouvait aussi important de se doter d'un poto que de vassaux. La procédure était la même : il s'agissait d'un contrat, d'un échange de bons procédés. La dimension de connivence et de complicité lui échappait profondément, bien qu'il avait trouvé en le Baron de Falaise un réel repère.
D'abord une sorte d'esclave, c'était devenu un égal. Orphelin. Héritier. Noble. Héraut. Il avait tout pour plaire. Il n'aurait pu en être autrement.
C'était, en plus, la seule personne au monde, ses laquais exceptés, que le Duc du Nivernais daignait tutoyer. Les serviteurs, il leur assénait le singulier de la seconde personne pour leur rappeler la servitude et sa domination.
Le Gisors-Breuil avait droit à cette familiarité par naturel. Ils s'étaient connus lorsque le Prince avait cinq ans, et entre un Franc Claude trop jeune et trop aimé, et une Yolanda haïe, Arutha avait incarné la balance, l'équilibre, une sorte de normalité.
A Hauterive.
_________________