Isaure.beaumont
« Dans la vengeance et en amour, la femme est plus barbare que l'homme. »
de Friedrich Nietzsche
Dans les rues de Sémur, court une folle rumeur. On y conte qu'une champenoise aurait la rancune tenace. Rassurez-vous, il n'en est rien... A moins que... Ne serait-ce pas elle qui s'avance,là, dans cette sombre ruelle ? Chut, taisons-nous et reprenons depuis le début.
Penchée sur un vélin encore vierge, la plume en l'air et hésitante, Isaure s'interrogeait quant à l'exécution de ses menaces. Etait-ce bien sérieux de dépenser les écus de son époux dans une pareille comédie ? Happée par ses récents souvenirs, les sourcils frémissant à mesure qu'elle revivait ces deux derniers jours, elle n'hésita bientôt plus à abattre la plume, grinçante, sur le papier. Les mots libérateurs furent couchés et elle fut bientôt sûre du bien fondé de sa requête. Oui, à quoi bon servaient les menaces, si on ne les exécutait pas. Elle perdait en crédibilité, et on ne la respecterait bientôt plus. Sourire satisfait aux lèvres, elle fit partir la missive. Le rendez-vous était pris. Elle pourrait dormir sur ses deux oreilles.
Depuis quelques jours, il n'y avait plus personne pour surveiller Isaure à Petit-Bolchen, plus de garde-fou. Libre de ses mouvements, elle régnait en maîtresse absolue sur le domaine, jusqu'à ce que son époux daigne enfin rentrer. Mais il n'y avait rien de réjouissant à devenir son propre chef : seule contre tout (et tous) elle avait désormais une Maison à faire tourner. Attablée au grand bureau de son époux, elle tâchait de décrypter le livre des comptes, d'en comprendre chaque dépense, chaque recette. A cela s'ajoutait le choix du menu pour la semaine, les soldes des domestiques et fermiers à verser, les décisions d'importances à prendre. Et Judas qui n'était pas là. Et Rose qui l'avait quittée. Lasse, elle s'auto-servit l'excuse de l'arrivée imminente de son contact pour justifier son abandon de poste, et le départ de ce bureau lourd de responsabilités.
Dix heures avaient sonné. La nuit était tombée et Isaure attendait, inquiète, dans les écuries désertées, où seuls quelques chevaux somnolaient. Il lui sembla attendre une éternité avant que la silhouette aussi imposante qu'inquiétante se dessine enfin. Ce n'était plus l'heure d'hésiter, la vengeance ne pouvait plus attendre. Les consignes furent données, l'acompte versé. Elle n'admettrait aucune bavure. Elle voulait un travail propre et soigné. Et que rien ne lui échappe. Oui, c'était elle qui tenait les ficelles.
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de Friedrich Nietzsche
Dans les rues de Sémur, court une folle rumeur. On y conte qu'une champenoise aurait la rancune tenace. Rassurez-vous, il n'en est rien... A moins que... Ne serait-ce pas elle qui s'avance,là, dans cette sombre ruelle ? Chut, taisons-nous et reprenons depuis le début.
Penchée sur un vélin encore vierge, la plume en l'air et hésitante, Isaure s'interrogeait quant à l'exécution de ses menaces. Etait-ce bien sérieux de dépenser les écus de son époux dans une pareille comédie ? Happée par ses récents souvenirs, les sourcils frémissant à mesure qu'elle revivait ces deux derniers jours, elle n'hésita bientôt plus à abattre la plume, grinçante, sur le papier. Les mots libérateurs furent couchés et elle fut bientôt sûre du bien fondé de sa requête. Oui, à quoi bon servaient les menaces, si on ne les exécutait pas. Elle perdait en crédibilité, et on ne la respecterait bientôt plus. Sourire satisfait aux lèvres, elle fit partir la missive. Le rendez-vous était pris. Elle pourrait dormir sur ses deux oreilles.
Depuis quelques jours, il n'y avait plus personne pour surveiller Isaure à Petit-Bolchen, plus de garde-fou. Libre de ses mouvements, elle régnait en maîtresse absolue sur le domaine, jusqu'à ce que son époux daigne enfin rentrer. Mais il n'y avait rien de réjouissant à devenir son propre chef : seule contre tout (et tous) elle avait désormais une Maison à faire tourner. Attablée au grand bureau de son époux, elle tâchait de décrypter le livre des comptes, d'en comprendre chaque dépense, chaque recette. A cela s'ajoutait le choix du menu pour la semaine, les soldes des domestiques et fermiers à verser, les décisions d'importances à prendre. Et Judas qui n'était pas là. Et Rose qui l'avait quittée. Lasse, elle s'auto-servit l'excuse de l'arrivée imminente de son contact pour justifier son abandon de poste, et le départ de ce bureau lourd de responsabilités.
Dix heures avaient sonné. La nuit était tombée et Isaure attendait, inquiète, dans les écuries désertées, où seuls quelques chevaux somnolaient. Il lui sembla attendre une éternité avant que la silhouette aussi imposante qu'inquiétante se dessine enfin. Ce n'était plus l'heure d'hésiter, la vengeance ne pouvait plus attendre. Les consignes furent données, l'acompte versé. Elle n'admettrait aucune bavure. Elle voulait un travail propre et soigné. Et que rien ne lui échappe. Oui, c'était elle qui tenait les ficelles.
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