Syuzanna.
« Un drame est vite arrivé, allons nous coucher. Mais la nuit, moi jamais je ne dors » **
La nuit était tombée plus vite que prévue. La saison sombre était en effet bel et bien sur eux, songea Syuzanna sans en éprouver aucune forme de plaisir. Si elle aimait l'Automne, elle était en revanche assez frustrée de la rapidité presque insolente avec laquelle la nuit succédait au jour. Les voyages se terminaient toujours sous l'astre lunaire, ce qui n'était pas très pratique les nuits de ciel couvert, pour éviter les anfractuosités des chemins.
C'était l'une de ces nuits-là qu'eut lieu l'incident. L'Ecossaise venait d'arriver à la Rochelle, trempée jusqu'aux os, les cheveux plaqués sur son cou et contre ses joues. Sa tunique verte était si bien humide, qu'elle ne laissait en rien inconnues ses formes pourtant peu développées. Ses braies froides lui brûlaient les cuisses. Aucune partie de son corps n'avait été épargnée par le déluge.
La porte de la taverne où logeait sa cousine fut poussée sans guère de douceur, et le battant de bois claqua contre le mur. De mauvaise humeur, la rousse ne s'attarda pas dans l'encadrement de la porte. Elle se dirigea droit vers Sybelle qui, sèche et pimpante, offrait le spectacle parfait d'une vie loin de la pluie.
- En route, lança-t-elle sans même un salut.
Pourquoi repartir si tôt ? Pourquoi ne pas attendre le lendemain ? Elle-même l'ignorait. Son humeur était à ce point mauvaise qu'elle avait l'étrange envie de l'accentuer plus encore. Elle n'aurait pas pu supporter de s'assoir tranquillement, de boire, de manger et de dormir. Non, il lui fallait la pluie, le vent et la bise glacée pour la calmer, aussi bizarre que cela puisse paraitre puisque c'était précisément ces éléments-là qui l'avaient rendus furieuse.
Sans plus attendre, elle s'empara du poignet menu de sa cousine, et la tira vers elle, l'entrainant au dehors avec vigueur. Ce qu'elle désirait la laissait pour le moins indifférente. Elle avait « souffert », sa cousine devait en ressentir les néfastes effets ! Ou elle ne s'appellait plus Syuzanna NicDouggal !
Comble de mauvaise fortune, elle n'avait pas pris son cheval. Au moment du départ en effet, elle se sentait d'humeur folâtre et l'avait laissé à Sarlat, à la disposition de Manu.
- Dépêchons ! Je voudrais bien être de retour à Saintes avant la mi-journée de demain !
Syuzanna, emportée par sa colère et son élan, quitta la ville plus vite qu'il ne fallait de temps pour dire « scotch whisky », et fut bientôt parvenue hors des remparts. Là seulement, elle relâcha sa cousine. Et comme elle était le seul exutoire qu'elle avait sous la main, elle se fit un devoir de l'enguirlander comme un sapin de Noël.
- Tu n'aurais donc pas pu m'attendre devant les portes ? Tu te rends compte du temps précieux que tu nous as fait perdre ?
Comme en harmonie avec son humeur, le ciel se gorgea de noirs nuages, et la pluie se mit à tomber à torrents. Le vent fut soudain de la partie, et les branches de l'arbre solitaire furent mises à très dure épreuve.
- Nous pourrions être en chemin depuis déjà une demi-heure ! Tu veux aller à Pau ou pas, par les Dieux !
L'une des branches, vide de vie depuis longtemps déjà, ne résista pas aux intempéries. Elle céda proprement et simplement. La malchance - ou le destin, ou encore la volonté des Dieux - voulut que Syuzanna se trouvât précisément sur la trajectoire en diagonale, de sa chute. La jeune femme, trop occupée à s'en prendre à Sybelle, ne vit pas l'incident venir.
Il y eut un CRAC sonore, écoeurant, lorsque le bois frappa avec une violence assez inouïe, le crâne de sa victime écossaise. Celle-ci resta un instant pétrifiée, debout encore, les yeux grands ouverts. Puis en douceur, elle s'effondra au sol. Et le silence retomba bientôt. Ne restèrent que le sifflement aïgu du vent, le grondement du tonnerre, et le martèlement de la pluie sur le sol de la campagne poitevine.
* extrait du film d'animation « Rango »
** « Stéréo » - BB Brunes
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- Episode 1 : La branche
La nuit était tombée plus vite que prévue. La saison sombre était en effet bel et bien sur eux, songea Syuzanna sans en éprouver aucune forme de plaisir. Si elle aimait l'Automne, elle était en revanche assez frustrée de la rapidité presque insolente avec laquelle la nuit succédait au jour. Les voyages se terminaient toujours sous l'astre lunaire, ce qui n'était pas très pratique les nuits de ciel couvert, pour éviter les anfractuosités des chemins.
C'était l'une de ces nuits-là qu'eut lieu l'incident. L'Ecossaise venait d'arriver à la Rochelle, trempée jusqu'aux os, les cheveux plaqués sur son cou et contre ses joues. Sa tunique verte était si bien humide, qu'elle ne laissait en rien inconnues ses formes pourtant peu développées. Ses braies froides lui brûlaient les cuisses. Aucune partie de son corps n'avait été épargnée par le déluge.
La porte de la taverne où logeait sa cousine fut poussée sans guère de douceur, et le battant de bois claqua contre le mur. De mauvaise humeur, la rousse ne s'attarda pas dans l'encadrement de la porte. Elle se dirigea droit vers Sybelle qui, sèche et pimpante, offrait le spectacle parfait d'une vie loin de la pluie.
- En route, lança-t-elle sans même un salut.
Pourquoi repartir si tôt ? Pourquoi ne pas attendre le lendemain ? Elle-même l'ignorait. Son humeur était à ce point mauvaise qu'elle avait l'étrange envie de l'accentuer plus encore. Elle n'aurait pas pu supporter de s'assoir tranquillement, de boire, de manger et de dormir. Non, il lui fallait la pluie, le vent et la bise glacée pour la calmer, aussi bizarre que cela puisse paraitre puisque c'était précisément ces éléments-là qui l'avaient rendus furieuse.
Sans plus attendre, elle s'empara du poignet menu de sa cousine, et la tira vers elle, l'entrainant au dehors avec vigueur. Ce qu'elle désirait la laissait pour le moins indifférente. Elle avait « souffert », sa cousine devait en ressentir les néfastes effets ! Ou elle ne s'appellait plus Syuzanna NicDouggal !
Comble de mauvaise fortune, elle n'avait pas pris son cheval. Au moment du départ en effet, elle se sentait d'humeur folâtre et l'avait laissé à Sarlat, à la disposition de Manu.
- Dépêchons ! Je voudrais bien être de retour à Saintes avant la mi-journée de demain !
Syuzanna, emportée par sa colère et son élan, quitta la ville plus vite qu'il ne fallait de temps pour dire « scotch whisky », et fut bientôt parvenue hors des remparts. Là seulement, elle relâcha sa cousine. Et comme elle était le seul exutoire qu'elle avait sous la main, elle se fit un devoir de l'enguirlander comme un sapin de Noël.
- Tu n'aurais donc pas pu m'attendre devant les portes ? Tu te rends compte du temps précieux que tu nous as fait perdre ?
Comme en harmonie avec son humeur, le ciel se gorgea de noirs nuages, et la pluie se mit à tomber à torrents. Le vent fut soudain de la partie, et les branches de l'arbre solitaire furent mises à très dure épreuve.
- Nous pourrions être en chemin depuis déjà une demi-heure ! Tu veux aller à Pau ou pas, par les Dieux !
L'une des branches, vide de vie depuis longtemps déjà, ne résista pas aux intempéries. Elle céda proprement et simplement. La malchance - ou le destin, ou encore la volonté des Dieux - voulut que Syuzanna se trouvât précisément sur la trajectoire en diagonale, de sa chute. La jeune femme, trop occupée à s'en prendre à Sybelle, ne vit pas l'incident venir.
Il y eut un CRAC sonore, écoeurant, lorsque le bois frappa avec une violence assez inouïe, le crâne de sa victime écossaise. Celle-ci resta un instant pétrifiée, debout encore, les yeux grands ouverts. Puis en douceur, elle s'effondra au sol. Et le silence retomba bientôt. Ne restèrent que le sifflement aïgu du vent, le grondement du tonnerre, et le martèlement de la pluie sur le sol de la campagne poitevine.
* extrait du film d'animation « Rango »
** « Stéréo » - BB Brunes
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