Enjoy
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[Dans l'arrière-cour d'un bouge, à Saumur]
Une foule de vauriens, du bruit, beaucoup de bruit. Un homme tient les paris, le combat du jour, la belle furette contre deux types. L'un après l'autre, c'est ce qu'elle avait décidé. N'ayant peur de rien, ni de personne. Makto savait aligner trois gus en même temps voire plus. Du moins, elle l'avait déjà vu faire mais elle, jamais. Juste du un contre un, faut dire qu'elle n'était pas aussi douée, aussi forte. Son art était encore perfectible.
L'arène a une odeur de fange et de transpiration, il y a au sol des flaques de sang provenant des précédentes altercations. Mais aussi des crachats verdâtres parsèment le sol et inspirent une mine de dégoût à la belle. Saluant son premier adversaire d'un signe de tête, elle se met en position "miroir", jambe gauche précédent la droite, les mains ouvertes levées droit, l'oeil vif. Elle entre dans un moment de haute concentration, comme lorsqu'elle médite. Rien ne peut l'atteindre, les hurlements, les encouragements envers les locaux se font silence en son esprit. C'est ainsi que lui a appris son Maître. Le premier gredin a la mine maladive, le teint blafard, le corps squelettique. Ce n'est pas un habitué, sans doute un mendiant qui a trouvé la lice plus lucrative que de tendre les mains vers les nobles ou les bourgeois. Enjoy le regarde sans le sous-estimer, un mauvais coup est si vite arrivé.
J'suis prêt chienne !
Un haussement de sourcil à la suite de ce propos. Le duel sera rapide, elle sait déjà d'avance comment cela va se dérouler. Des invectives se font de plus en plus pressantes et elle ne compte donc pas s'éterniser ici. Il manquerait plus que les badauds venant au spectacle ne soient pas satisfaits et qu'ils en viennent à la molester. Elle ne se sent pas en sécurité, pour le coup.
Prête !
Si Makto savait comment elle gagne sa vie, il en serait fortement déçu. Mais son amour propre ne lui fera jamais foutre un seul orteil dans une mine ou à labourer les champs. Elle ne vit que pour la baston, et le sang. Les molaires qui volent, les échanges violents. Son ennemi ne se fait pas prier, comme convenu. Il lance un coup de poing des plus désordonné dans sa direction. L'homme est plus bruyant que dangereux et sa force toute relative, à en juger sa condition physique. Le coup est dévié d'un revers de main, puis s'en suit un blocage de l'avant bras contre la poitrine du soiffard, l'oeil mettant moins de temps que l'action à prendre conscience de ce qu'il arrive, elle en profite pour porter un coup de poing au plexus, suivi de son coude plongeant impactant au même endroit, enfin tranchant de la menotte affûtée par les assauts répétés sur le bois, sur la carotide. Elle se saisit ensuite de l'impétueux au niveau des épaules et le termine avec un coup de genoux dans les parties génitales. Il tombe alors lentement au sol, premier affrontement achevé, au suivant...
En l'occurrence, ce dernier est entraîné et vient souvent. Rageur, impulsif, il ne retient pas ses coups. Et la furette devra se faire prudente pour arriver à toucher la bourse qui lui est promise. Le corps athlétique, la posture droite, les poings fermés durs comme le roc. Pour emporter la victoire, il faudra fragiliser, puis casser.
Rebelote, prise de position.
Me battre face à une femme, on aura tout vu. J'devrai me servir que d'une main pour ne pas trop te désavantager ! Ahahaha !
Considérant, qu'il est prêt, elle lâche juste dans un soupir.
Oh, la ferme...
Il s'élance en furie, gauche, droite. La premère est parée, la seconde touche. Directement dans la mâchoire de la mustélide, la faisant reculer. Un grognement sourd se fait entendre. Tandis que l'autre affiche un sourire édenté. Nouvel assaut mais cette fois-ci, elle esquive, puis bloque la main droite ayant frôlée son visage, de ses doigts agiles, elle tient fermement le poignet, le faisant remonter jusqu'à craquer. Le vantard hurle de douleur, tandis qu'elle, s'en amuse. Sans attendre, c'est à son tour d'attaquer, un pas en avant tenant toujours le bras du "futur" malheureux, le coude Enjilien suit l'axe de l'avant bras du péquenot jusqu'à finir sa course dans une gorge martyrisée pour la peine. Ne lui laissant aucun répit, elle enchaîne avec de multiples dextre, senestre en pleine face et un ultime coup partant du bas, au menton, par achever son oeuvre dans la pointe du nez, déplaçant au passage la cloison nasale. Le gus s'écroule, résultat, poignet, nez cassés, lèvre ouverte, langue sectionnée dû au claquement des dents, dont une d'entre elles, s'est fait la malle en passant...
La foule est furieuse. Aussi, elle se jette sur la mise sans attendre, récupère son bien et les salue bien bas. Jusqu'à la prochaine taverne, de quoi se rassasier et boire une ou deux chopines. Elle garde un méchant bleu sur le visage et les phalanges endolories. Encore une fois, elle s'en sort bien.
[Saumur encore et toujours, sous un pont]
Elle soigne ses blessures comme elle a appris à le faire durant son séjour en pleine nature. Mettant une bouchée de pain de temps à autre sous ses ratiches étonnement blanches et saines. Elle avait tout d'une bellâtre, si bien que son destin aurait pu être tout autre. Du genre, à se trouver un beau parti et finir ses jours dans le luxe et l'or. Mais son rapport avec les hommes était des plus étranges, elle s'en servait soit pour s'amuser, soit pour se divertir. Les deux termes pourtant si proches, synonymes même, ont une définition différente selon elle. L'un signifie prendre du plaisir à allumer la gente masculine, même si elle reste définitivement vierge, son attitude peut faire penser tout le contraire, cela dit. L'autre quant elle, lance des piques ou se bastonne contre ou avec eux. On pourrait croire que c'est un vrai garçon manqué, mais en réalité, elle était bien plus féminine qu'elle pouvait le laisser croire. Même si ce négligeant exagérément. On pouvait souvent l'entendre pleurer, une fois la nuit tombée. Mais maintenant, tout ceci devait changer car...
Citation:
Maître,
Je vous demande pardon. J'ai. Je suis une mauvaise fille. Je parle mal aux gens, manque de patience avec les enfants et me fais passer pour celle que je ne suis pas. Ou du moins celle que je ne devrais plus être. Vous m'avez tant enseigné, je ne puis que me remettre à vos préceptes et votre sagesse. Mais depuis mon retour à la civilisation, les choses sont si étranges. J'ai fait de nombreuses connaissances à Craon, elles me manquent. J'ai aussi découvert une de mes cousines à Saumur. En passant d'une ville à l'autre, j'ai changé. Vous étiez si fier de moi, Craonnaise, vous seriez déçu en me voyant Saumuroise. Hier encore, si sociable, enjouée, je suis désormais irrespectueuse et aigrie. Je vais partir pour un long périple dont je ne reviendrai peut être pas, prenez soin de vous Maître.
Enjoy,
Je vous demande pardon. J'ai. Je suis une mauvaise fille. Je parle mal aux gens, manque de patience avec les enfants et me fais passer pour celle que je ne suis pas. Ou du moins celle que je ne devrais plus être. Vous m'avez tant enseigné, je ne puis que me remettre à vos préceptes et votre sagesse. Mais depuis mon retour à la civilisation, les choses sont si étranges. J'ai fait de nombreuses connaissances à Craon, elles me manquent. J'ai aussi découvert une de mes cousines à Saumur. En passant d'une ville à l'autre, j'ai changé. Vous étiez si fier de moi, Craonnaise, vous seriez déçu en me voyant Saumuroise. Hier encore, si sociable, enjouée, je suis désormais irrespectueuse et aigrie. Je vais partir pour un long périple dont je ne reviendrai peut être pas, prenez soin de vous Maître.
Enjoy,
Les mots choisis étaient simples. le vieillard ne savait pas lire et se faisait faire la lecture par une bonne femme qu'il avait rencontré. En attendant une réponse, elle s'en retourna auprès de sa nouvelle "bande". Retenant qu'à La Flèche, elle avait été sauvage, à Craon, elle-même, à Angers, allumeuse et à Saumur, dure, méchante...
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