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[RP ouvert] Marie vaut bien une messe

Else
Woops ! Pour ceux que la chose intéresserait : petit cafouillage dans la coordination, rien de grave, c'est réglé !
Ceci n'est plus un rp d'enterrement, donc.
Mais les squatteurs ne sont pas refoulés à l'entrée non plus, tant que ça colle.



[Samedi à l’aube]


Cucé, pour la dernière fois. Les premiers rayons du soleil n’ont pas encore passé l’horizon, et les vieilles pierres engourdies tremblent dans l’air nocturne. Pas un bruit. Si ! Attendez… Là, derrière cette petite porte. On dirait que quelqu’un donne des coups de pieds…

Le battant s’ouvrit brusquement et claqua contre la muraille. Dans l’embrasure parut alors le dos ployé d’un grand homme brun, large d’épaule, secoué d’un tremblement continu. Paol était de loin l’homme le plus fort des lieux : fils de paysans, il avait crû en taille et en puissance sur les terres de Cesson. A vingt ans, il ne craignait plus rien ni personne. Son monde, c’était sa terre. Sa raison, ses poings. Un petit gars qui irait loin, pour sûr ; peut-être pas en distance, mais dans la vie.
A petits pas maladroit, il sortit de l’ombre, révélant peu à peu la lourde caisse qu'il portait. Son compagnon de labeur le suivait, moins bien bâti, le front suintant de sueur. Ils avaient à peine passé le pas qu'un râle déchira le crépuscule.


- Rha ! Attends, attends… Pose… Pose, j’en peux plus…

Lorsque la caisse toucha le sol, l’homme lâcha un gémissement. Son comparse éclata d’un gros rire. Regard accusateur.

- Moque-toi ! Tout l’monde a point tes muscles, Paol.
- Gast ! Prends donc pas la mouche. Veux-tu êt’ content ? J’admets : elle pèse une vache morte, leur crevée.


Yoann blémit.

- La ferme, siffla-t-il entre ses dents. Si la Kem’ t’entendait…
- La p’tite blonde ? Qu’elle y vienne. J’en fais mon affaire, de ton Attila !
- Tu l’as jamais vue en rogne. Demande à la garde, tu verras.
- La garde, c’est des gonzesses
, rétorqua Paol en haussant les épaules. J’comprends même pas ce que vous avez tous, avec cette enquiquineuse ; pourquoi vous y obéissez, hein ?

Silence têtu.

- On avait un seigneur, et elle est là d’dans, poursuivit le colosse en tapant du plat de la main sur le cercueil. Yoann sursauta. L’autre, c’est personne. Pas plus riche que toi et moi, et pas plus puissante, c’est moi qui te l’dis.
- Et après ? C’tait sa frangine. Des fois… Quand j’la croise dans les couloirs… J’crois voir la Marquise.
- C’est pas un fantôme, corniaud ! Juste une enquiquineuse.
- Et puis Mauny…
- Mauny, il est régent par la volonté de celle-là.
Nouveau coup sur le cercueil, nouveau sursaut. M’est avis qu’la cause est comme qui dirait caduque, comme c'est qu'on dit dans l'grand monde.
- Ah ça ! J'comprends rien à tes histoires. Pis tu m’embrouilles.
- J’te dis l’vrai. Dès d’main, la nobliotte s’ra six pieds sous terre, et même pas sur not' nôtre ! Et ni ton régent, ni ton fantôme traîn'ront plus leurs grolles par ici. Jamais.


Silence.

- Et nous, quoi qu’on d’vient ?

Paol ne répondit pas. Il se pencha pour récupérer le cercueil.



[Samedi, pleine journée]


- Rappelez-moi pourquoi la cérémonie a lieu à Rieux, déjà ?

Elisabeth, regard braqué sur le chemin, ignora superbement la question du vieux domestique. Elle n’avait pas desserré les lèvres depuis leur départ du château. Notez… Jusque là, rien d’inhabituel. Du reste, le vieillard avait profité de ce silence borné pour terminer sa nuit en toute quiétude. Mais depuis une bonne heure qu’il était parfaitement éveillé, le ronron du châssis et le crissement des roues commençaient à l'angoisser.

- Remarquez que ce n’est pas bien grave. Il n’y aura personne.

Sans répondre davantage, la Kermorial tira de son châle un morceau de parchemin couvert de sa petite écriture nerveuse, et le lui tendit. L’ayant parcouru, le vieux Gauvin soupira. Les sœurs Kermorial ne se ressemblaient guère, sauf dans leur propension innée à faire tourner les gens en bourrique. Chacune sa manière, toutes deux efficaces. A Marie le charme capricieux, à Elsa l’honnête brusquerie. La première lui avait fait les quatre cent coup, et voici que la seconde s'amusait à lui infliger tout le reste.

- Vous ne pouvez pas faire afficher cela. On n’invite pas les gens en leur signifiant que leur présence n’est pas souhaitée…
- Ce n’est pas ce que je dis.
- …
- Non.
- « Venez s’il vous sied, ou abstenez-vous, à votre guise. »
- Précisément. Cela ne signifie pas que leur présence m’indispose…
- C’est bien imité.
- … juste que j'en ai rien à cirer.
- …
- …
- …


Et c’est ainsi que Gauvin transmit le suivant message, édulcoré par ses soins, aux crieurs publics :

Citation:
Qu’il soit dit qu’une messe sera prononcée pour Marie de Kermorial, Marquise de Cesson, en l’église Sainte Kyrène de Reoz ce dimanche seize décembre. Quiconque voudrait lui rendre les derniers hommages est libre de s’y trouver.

_________________

(Helen Kazei / Pierre de Ronsard, Je n'ai plus que les os)
Roselalie
[A Rieux ... ]

Assise sur son rocking-chair avec son chat sur les genoux, la vieille pomme était perdue dans ses pensées, les yeux perdus dans les flocons de neige qui tombait derrière la fenêtre. L’Eglise Aristotélicienne, avec un grand E et un grand A avait bien triste figure en ce moment. Entre manque de communication, contagions massive d'endormissement et affaire sombre profondément HoRs Propos, elle se demandait parfois ce qu'elle défendait.

Elle ne doutait pas de la présence divine, Et elle croyait plus que tous au bienfondé du message d'amitié, d'amour et de paix transmis par le livre des Vertus. Elle croyait en Christos et Aristote qui se font fait porte parole de ce message divin. Et elle était prête à ce battre pour le songe d’Aristote de la cité idéal.

Les fidèles... Les fidèles valaient la peine de se donner corps et âme. Avec tous leur défauts, leur imperfections qui les faisait humains. Si le bien et le mal était à la porté de tout être, elle aimait révéler le bien qui sommeil en chacune des âmes qu'elle croisait. Être un guide pour les pêcheurs et leur montrer le chemin des vertus. Voilà bien ce qui animait toute sa vie.

Il y avait Dieu, il y avait les fidèles, mais entre les deux, le maillon semblait usé et rouillé. Voir putride à certain endroit. Et si elle gardait la tête haute sans se soucié des aventure rocambolesque de ses confrère, elle gardait une rage en elle. Parce que souvent les fidèles se retrouvaient otage des manquements de L'EA, Et que souvent les clercs oubliaient que leur premier rôle était d'être un modèle de vertus.

Son regard se pose sur le courrier de Monseigneur Tadeus ouvert sur son bureau et elle soupire tracassé. Son chat la regarde et lui demande :
Elisabeth ne devrait pas être là ? oui, le chat lui parlait régulièrement, du moins elle en avait l'impression.

Elle est en route Mistigris... elle est en route... Et je ne suis pas sur qu'elle aura eu mon courrier à temps. Monseigneur Tadeus s'oppose à la célébration des funérailles à Rieux. Apparemment, Ascelin de Mauny, l'intendant de Cesson à d'autre projets pour le corps de la défunte...

Nouveau soupire un peu plus agacée

tu te rends compte Mystigris !.... j'ai déposé ma demande à Rome il y a presque un mois expliquant le cas et demandant à enterrer cette pauvre femme afin que sa sœur puisse entamer son travail de deuil. Un mois pendant lequel j'ai laissé cette pauvre Elisabeth dans l'attente et la douleur. Attendant un éventuel sursaut de vitalité de mes confères.

Et au bout d'un mois, Quand cette pauvre femme prend la décision de transporter le corps pour avoir enfin des obsèques pour sa sœur, que nous prévoyons cette cérémonie.... un évêque m'interdit de la célébrer, pendant que l'autre me répond qu’Élisabeth peut toujours lui écrire...

Combien de tant leur faut il pour organiser une simple messe !


La vieille caresse son chat et se désole en pensant que la MéSaNge prend le pas sur le Saint Res Parendo.... Que va-t-il advenir de nos royaumes ?....


Entre Rieux et Cessons...

pendant ce temps, sur les routes, un messager chevauchait à la rencontre d’Élisabeth. Il devait lui remettre en urgence le courrier de Rose.



Élisabeth, ma chère enfant,

Je viens de recevoir une nouvelle fort dérangeante. Monseigneur Tadeus, évêque de Nantes, m'interdit de célébrer les funérailles de votre sœur.

Par ailleurs, Monseigneur Verty, évêque de Rennes, vous invite à lui écrire.

Je réalise le grotesque de la situation, et je suis d'autant plus navré que je suis incapable de vous expliquer pourquoi je ne peux célébrer ces funérailles, ni quelle solution est prévu en remplacement.

Je vous invite à prendre contacte avec Ascelin de Mauny, vu qu’apparemment c'est lui qui a pris contacte avec Monseigneur Tadeus pour régler les obsèques de votre sœur. étiez vous au courant ?

Quoi qu'il en soit, je peux célébrer une messe en sa mémoire si vous le désirez.

Que le très haut vous garde,
Ne perdez pas confiance,


Mère Roselalie de Nauériels



Citation:
HRP : libre à JD Else de recevoir ou pas la lettre de Rose avant que le corps soit déplacé. Et si les autres Jd ne sont pas d'accord... qu'ils interviennent en RP avec leur poupée.... parce que les discutions mésanges ne doivent pas primer sur le RP...

_________________

Mère Roselalie de Nauériels, Prêtre, Abesse de Reoz.
Roxannemontfortlaval
Baronnie de Langolen

Il était encore tôt ce matin lorsque les gardes avaient fait entrer un visiteur dans la grand-salle. Krystos avait allumé une bonne flambée mais ce n'était certes pas cela qui avait du échauffer à ce point, les joues de l'homme présent sur les lieux.

Roxanne était descendu d'un pas calme mais non moins rapide, intriguée tout de même par la visite de son ami, à cette heure du début du jour, qui plus est. Et son visage était passé de la stupeur à une vive contrariété à ce qu'Ascelin lui annonça.
Les deux jeunes gens étaient amis depuis l'arrivée du jeune homme en Bretagne et Roxanne n'hésite pas un instant à lui apporter son aide.

La Montfort n'avait pas oublié cette autre Montfort qui avait été l'épouse de son cousin préféré. Et bien qu'elles n'aient jamais été intimement proches, elles avaient un parcours quelque peu similaire, du moins dans ce qui fut leur mariage. Elles s'étaient suivies de peu dans leurs épousailles, mais également dans leurs dissolutions de mariage.
Et Roxanne n'avait pas oublié, que Marie lui avait ouvert les portes de Cesson, lorsqu'elle n'allait pas bien.
Avec le temps, la jeune Montfort avait commencé à comprendre ce que Marie avait pu enduré et c'est avec un chagrin vif et sincère qu'elle avait accueilli la nouvelle de son trépas.

Aussi, elle qui tenait tant à lui rendre un dernier hommage, n'hésite pas à donner son accord à Ascelin.

Celui-ci reparti, elle a tôt fait de faire prévenir ses deux escuyers. Et en attendant leur arrivée, la blonde se prépare. C'est en tenue de Chevalier qu'elle se rendra sur les lieux.

L'heure approche, les grandes aiguilles de l'horloge tournent inéluctablement.

_________________

En deuil de ma Pelote, Dame de Concoret & de Naël d'Artignac, Duc du Tregor et Chevalier de Pontekroaz.
Else
[Sur la route entre Cesson et Rieux]


A la fenêtre de la voiture, le messager observait le visage fermé de la destinataire. Sans doute que le contenu ne lui plaisait pas, à moins que ce ne fut sa trogne habituelle – vu la mine du vioque en face, on devait pas se marrer tous les jours, avec ceux-là. Au reste, c’était égal. Le type ne voulait que son dû. Passant le bras par l’ouverture, il brandit une main impudente juste sous le nez de la Kermorial. Elle le repoussa d’une tape, comme on fait d’un enfant, et désigna le chemin avec un geste vague.

- Attends là. Il y a une réponse.

Tandis que le blondinet disparaissait, Elisabeth croisa le regard accusateur de Gauvin. Un homme bien trop malin, râla-t-elle en pensée, afin de tromper sa gêne naissante ; car en toute franchise, le vieil homme avait toutes les raisons de la morigéner. N’avait-elle pas fait fi de tous les avis du régent ? Ignoré les règles et hiérarchies de l’Église ? Trompé un fidèle serviteur ? Escamoté nuitamment un macchabée ? On conçoit des scrupules pour moins que cela.

Oui oui, vous avez bien compris. Elise avait chouré la dépouille de sa sœur. A sa décharge – parce qu’il faut bien, voyez-vous, que votre ami le narrateur se fasse l’avocat du diable – deux mois au chevet d’une jumelle dépouille nuisent gravement à la santé mentale.

Une fois persuadée que Marie ne réintégrerait pas son corps, Lisa n’avait eu de cesse de la voir mise en terre. Un temps, elle avait approuvé les démarches du régent de Cesson ; mais l’entente cordiale avait rapidement tourné court. C’était trop long. Mauny était un mou. L’évêque de Nantes lambinait. Ne parlons pas même de Rome, que l’affaire ne regardait pas, d’ailleurs. Bref : dès qu’elle croisait le pauvre homme, elle l’agonisait de reproches. La décision devint une idée fixe, l’idée fixe un besoin. Elle engagea l'affaire de son côté. D'où disputes. Incessante. Jusqu'au trop plein. Voilà comment, l’avant-veille, elle avait craqué. Après avoir écrit à la Mère Rose de presser l'affaire, elle s'était assuré le service de deux larbins, et avait convaincu le plus fidèle domestique de Marie de l'accompagner jusqu'à Rieux, à l'insu de toute autre personne. La méthode Kermorial. Bourrin, mais efficace.

... Ou pas, apparemment.

La plume flotta un instant au dessus du vélin, pesant le poids des mots qui voulaient s’en échapper. Dit-on à une religieuse qu’on se fiche pas mal de Monseigneur Tadeus, évêque de Nantes ? Qu’on se contrefout de Monseigneur Verty, évêque de Rennes ? Qu’on n’a que faire de l’Église dans son ensemble, et qu’on vomit cordialement le reste du monde ? … Non. Ca fait pas propre.


Citation:
Ma Mère,

Je sais ce qui est prévu, ce que veut Mauny, et que Rome tarde. Tout ce qui m’importe, à moi, c’est que l’on porte Marie en terre. J’écrirai à Monseigneur Verty si elle le souhaite.


Menteuse.

Citation:
Dites-donc une messe en sa mémoire, le jour prévu, si rien de mieux ne se peut faire. Je me charge du reste.

Le Très Haut vous garde,

Elisabeth Kermorial


- Et vous êtes toujours persuadée que c’est une bonne idée ?

Pas de réponse. Vous aussi, vous sentez le léger froid qui s’installe ?

- Non mais ho, dites…
- Laissez. Je sais ce que je fais.
- J’en doute, voyez-vous. J’en doute.
- Alors doutez en silence.


Et la voiture de poursuivre son voyage, sur les traces du messager parti à fond de train.
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(Helen Kazei / Pierre de Ronsard, Je n'ai plus que les os)
Ftn_andenmarv
[Domaine de ftn, baron de Bretagne le 15 décembre]

Aléjo l'intendant arrivait dans le bureau où travaillait ftn

baron, baron, Jean revient de marché, il a entendu un crieur faire une annonce

une annonce tu m'en diras temps mon ami,
et elle disait quoi cette annonce?


vous savez baron, que vos gens ont pour premier devoir de connaître le nom de vos ami(e)s et vos ennemi(e)s?

en effet, c'est un de leurs devoirs et ...... qu'a t il donc entendu?

ceci baron "Qu’il soit dit qu’une messe sera prononcée pour Marie de Kermorial, Marquise de Cesson, en l’église Sainte Kyrène de Reoz ce dimanche seize décembre. Quiconque voudrait lui rendre les derniers hommages est libre de s’y trouver."

ftn écouta son intendant

en effet, c'est très important,
Marie était quelqu'un que j'appréciais beaucoup

Aléjo...., tu lui donneras 3 ou 4 pièces de plus, pour avoir su ouvrir ses oreilles au bon moment,

il ne faut pas que je traîne, fait préparer ma monture, Juan et Anton' m'accompagneront

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Ascelin
[A Cucé, plusieurs heures après le départ des Kermorial, morte et vive, de Cesson]


Les courriers avec Monseigneur Tadeus s’enchainaient. Le Mauny, à la lueur d’une chandelle presque entièrement consumée, rédigeait une de ces lettres aux formes policées mais dont le contenu était tout aussi ferme qu’aimable. Les premiers rayons d’un jour étonnamment ensoleillé pour la saison commençaient à percer à travers les rideaux d’un tissu de qualité médiocre. Dernier coup de plume sur le parchemin.
Mooonnsiieuuur de Maunyyy ! Monsieur de Mauny !

Et voilà le matériel d’écriture qui dérape sur le papier granuleux pour finalement faire apparaitre un trait maladroitement tracé sur la presque totale largeur du support. Le coude quant à lui heurta avec violence un petit récipient en verre aux trois quarts rempli d’un liquide fluide et sombre. L’encre se reversa alors sur le bureau pour constituer une flaque qui courrait inéluctablement vers le rebord du meuble. C’est ainsi, dans l’inaudible goute à goute de l’encre s’écrasant du bureau jusqu’au parquet que la porte s’ouvrit dans un vacarmecontrastant, comme on en avait rarement entendu depuis plusieurs semaines à Cesson.

Monsieur de Mauny !

Agacé mais également intrigué par cette arrivée précipitée, presque théâtrale, le noble s’efforça de paraitre agréable aux premières heures de la journée.

Oui, Gauvin. La moitié de la Bretagne se repose encore. Il n’était pas utile de la réveiller pour me trouver.

D’ajouter.

D’ailleurs, je vous ai fait quérir depuis un moment et personne au château n’a réussi à vous mettre le grappin dessus. Où étiez-vous ?

D’ajouter encore, sur un ton sarcastique.

La Kermorial aussi a disparue de Cesson. Vous faisiez certainement des bêtises ensemble.

Il sourit avec ironie en regardant le vieil homme. Léger flottement. Quelques secondes s’écoulèrent, deux ou trois à peine. Durant ce laps de temps le sourire ironique laissa place à un regard accusateur. Le même que celui qu’il lançait aux accusés lorsqu’il fut juge. Ces quelques secondes parurent de longues minutes. On aurait pu décrire toute les étapes qui avaient conduit aux changements de traits sur le visage du juriste. Il interrogea alors.

Vous complotiez, Gauvin ?

Ce qui jusque là pouvait encore être une boutade, devint peu à peu un réalité. L’homme d’un certain âge ouvrit la bouche. Aucun son n’en sortit. Un silence de plomb une fois de plus s’installa. Ascelin se leva, raclant la chaise sur le parquet. Il posa les deux mains sur le bureau, prenant soin de ne pas les mettre dans l’encre. Ainsi appuyé, il questionna de nouveau.

Gauvin ?

C’est que… Je connais la Kermorial depuis longtemps, Monsieur.


Laissant échapper un long soupire. Il se laissa tomber dans son fauteuil.

Qu’a-t-elle fait encore ? Elle a hurlé sur mon personnel ? Elle a agressé le garde qui gardait le cercueil ? Elle a…

Mais le Mauny se fit stopper dans son élan. Il était loin du compte, le pauvre.

Elle a volé le corps de la défunte Marquise Monsieur.

Voila, c’était lâché. Il fallait bien le dire à un moment et plus vite c’était fait, plus vite on en terminerait. C’était du moins l’impression que donnait la façon dont l’intendant avait lâché l’information.

Elle a fait quoi ?! Sans attendre de réponse, il continua. Cela fait combien de temps que vous le savez et que vous la couvrez ?

C’est que, je n’ai pas fait que la couvrir, Monsieur. Je l’ai aidé.

Les coudes sur le bureau, le jeune homme laissa tomber sa tête dans ses mains. Inspirant longuement, il se tînt alors droit, la tête relevée.

Où se rend-elle ?

A rieux.

A rieux ? Tout devenait clair dans la tête du baron. La lettre de Tadeus prenait tout son sens. Faites seller quatre chevaux, dont le mien, Gauvin, j’ai à faire.

Le vieil homme acquiesça et tourna les talons.

Attendez, Gauvin. Le jeune baron regarda en direction de la porte et s’écria : MAAARIUS !

Des bruits de pas métalliques et lourds se firent entendre et la porte s’ouvrit. La silhouette d’un garde se dessina alors dans le cadre de la porte.

Je ne puis vous laisser seul, Gauvin. Vous avez trahis ma confiance. Vous le comprenez, je n’en doute pas. Marius sera votre compagnon de tous les instants, jusqu’à mon retour. A ce moment-là, nous aurons à parler vous et moi.

Le regard sévère, il conclut.

Vous pouvez disposer maintenant, Gauvin.



[A Cesson, de longues heures après l’entretien entre Gauvin et Ascelin]


L’entretien avait fait place à une période de tumultes. Ascelin avait, en quatrième vitesse, rallié Langolen afin de quérir l’aide de Roxanne. Il savait que l’amitié qui les liait la contraindrait à accepter de lui rendre ce service. Celle-ci avait fait preuve de compréhension et sans une once d’hésitation avait assuré le baron de sa présence. Sans perdre de temps, le Mauny avait alors fait le chemin inverse pour retourner à Cesson et se préparer lui-même à ce qui n’annonçait être, à ses yeux, une croisade.

Croisade… Le mot était bien choisi après tout. L’affaire était tout aussi religieuse que personnelle. Qui donc pouvait espérer voler un mort impunément ? Qui donc pouvait espérer berner un homme en jouant de sa funèbre tristesse sans réveiller une contre-offensive féroce ? Qui encore pouvait à ce point se jouer des prêtres pour organiser, sans les en avertir, un enterrement clandestin ?

Ils s’étaient énervés, c’est était certain. Pour sûr, leurs points de vue étaient divergents. Sans nul doute, le deuil ne leur avait pas permis d’entretenir une relation cordiale et amicale. Mais en arriver à de tels extrêmes, c’était fort.

Il ajusta sa cuirasse puis resserra d’un cran sa ceinture. Il avait l’épée au fourreau. Pas celle d’apparat, comme à l’accoutumée. Non. Il s’agissait plutôt de celle dont le forgeron avait aiguisé la lame. Allait-il s’en servir ? Il espérait que non. Allait-elle convaincre et choquer suffisamment pour faire cesser la folie de cette femme qui, visiblement aveuglée par le chagrin, avait commis un affront contre le Mauny d'abord, contre feue sa sœur ensuite et surtout.

Il se tenait là, près des écuries de Cucé, attendant impatiemment que le contingent de Roxanne fasse son apparition et qu’ensemble, ils prennent route pour Rieux. Très bientôt, la Kermorial aurait un jour d’avance…

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Roxannemontfortlaval
Langolen-Cucé. Premier arrêt.

Trois cavaliers firent leur apparition, près des écuries couvertes de neige. Les armures étincelantes, épées aux fourreaux. L'un des cavaliers s'avance alors, et ôtant son heaume, le coince sous son bras, tout en retirant son camail. Les dernières lueurs firent briller les longs cheveux d'or. La cape bleue sombre brodée d'argent semblait taillée dans le ciel nocturne et ses yeux d'un gris profond évoquaient un ciel nuageux.

La Montfort avait la fibre familiale et le sens du devoir. Quitte à se mettre quelques personnes de sa famille à dos. Elle ne lâchait jamais rien. Elle pouvait se révéler la bonté incarnée ou la plus douce et tendre des jeunes femmes comme la plus froide et redoutable guerrière lorsque la situation l'exigeait. Mais en tout temps, elle gardait la tête froide et savait ce qu'elle faisait.

Marie. Sa Magnifiscience Marie de Kermorial. Qui fut épouse Montfort. Oh oui son cousin avait souffert. Elle était bien placée pour le savoir. Mais elle savait aussi que Marie n'avait pas non plus été épargnée. Alors quand Ascelin est venu quérir son aide, elle n'a pas hésité.
Sa pensée se tourne vers cette petite fille qu'elle a croisé à quelques reprises. Heureusement qu'Alix ignore ce qui se trame ici ce jour. Elle ne peut s'empêcher de penser à elle.

Il est néanmoins hors de question que la jeune baronne pose ne serait-ce qu'un seul doigt de ses dextres et senestres sur le cercueil. Non. Le seul et unique cercueil qu'elle ait touché est celui de son père. Alors la chevalier a eu l'idée ingénieuse de demander à ses deux escuyers de l'accompagner.

Et c'est ainsi que Theos et Macsen se retrouvent embringués dans le sillage de la Montfort.

Un cortège de Trente pour ramener Marie en sa demeure, ça le fait quand même. Pas sûr que fut un temps elle aurait apprécié. Mais aujourd'hui, escorte de la garde grand-ducale aura t'elle. Roxanne aurait sans doute préféré que ce ne soit pas dans ces circonstances là.

Mais que ne ferait-elle pas pour le Mauny. Et pour Marie. Il serait temps oui qu'elle ait enfin ce qu'elle voulait. Mais pas de la façon dont ce fut fait. Elle n'avait encore jamais du courir après un cercueil dérobé. C'est une première ça.

Ascelin est là qui attend. Eux aussi sont prêts à se mettre en route.

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En deuil de ma Pelote, Dame de Concoret & de Naël d'Artignac, Duc du Tregor et Chevalier de Pontekroaz.
Macsen_pedr
Le second cavalier, n'était qu'un simple écuyer. Mais celui-ci arborait un haubergeon, cette côte de maille en guise d'armure. Il n'était pas bien riche, mais un minimum de protection est toujours bien utile en cas de combat.

Il avait suivit, au côté de son comparse écuyer, son chevalier. Il ne savait pas bien dans quelle histoire il s'embarquait encore. Mais qu'importe, courir après les morts, rare sont ceux qui peuvent raconter ce genre d'histoire. Mais à qui est-ce qu'il raconterait cela ? Sa défunte mère ? Ses chiarts qu'il n'a pas ? Qu'importe, ça lui fera au moins une aventure de plus pour lui et de l'expérience. Que du gain pour ça trogne !
Else
[Entre Cesson et Rieux, une halte cauchemardesque]


- Disparu ? Comment ça, disparu ? On ne disparaît pas comme ça, voyons !

Sauf que si. Elle ne le savait que trop bien, la Kem'. Un jour, on disparaît, comme ça, et il n'y a rien à y faire.

Une heure durant, le cocher et elle cherchèrent Gauvin dans la campagne environnante. En bougonnant, d'abord. Puis inquiète. Puis résolument tremblante. L’idée qu'il fut tombé dans quelque ravin, ou qu'il eut tout bonnement succombé à la vieillesse, là, tout à trac, lui vrillait les tripes. Affection secrète pour le tendre vieillard, fidèle intendant de Marie ? Ou angoisse lancinante face à la mort, qui étendait sa main sur tout son univers ? En un mot comme en cent : elle flippait la race du poney de sa mère. Morte aussi, d’ailleurs. Mais passons.

Soudain, entre deux escapades de sa parano galopante… l’image d’un vieil ami jaillit dans la caboche blonde. Parfaitement, d’un vieil ami. Elle en a, figurez-vous. L’image d’un vieil ami, donc, qui lui avait jadis rapporté l’histoire d’un certain Ockham. Clic, clac. Eurêka ! A tous les coups, le Gauvin, cette vieille charogne quinteuse (notez l’évolution linguistique) avait pris la poudre d’escampette pour tout cafter. Oh le traître. Oh le bougre. Oh l'enfiellé.


- Cocher, appela-t-un d'un ton glacé. On repart.



[Rieux, la sacristie vide – à l'exception des Kermorial morte et vive]


- Il fait beau voir qu’on me reproche d’avoir volé MON corps.
Deviens-tu folle, Kermorial ?

Dans le silence de la sacristie de Reoz, les deux voix sonnaient étrangement : la sonore, haute et distincte, un peu raucie peut-être, et l’intérieure, sournoise et entêtante, inaudible à tout autre qu’une blonde pétrifiée. Jamais encore Elsa ne l’avait entendue. Peut-être même venait-elle de la rêver ? Peut-être n’était-ce rien que l’écho du cauchemar qu’elle fit souvent jadis, lorsqu’une brune enfant au nom de fleur succombait sous ses yeux à un dangereux mal. Mais c’est une autre histoire. Longue. Pénible. Un autre deuil inachevé.

Affaiblie, Lison porta une main à son front. La moiteur sous la pulpe de ses doigts la tranquillisa un peu. Une mauvaise fièvre, une hallucination. La fatigue. Tout, tout, mais pas la folie. Elle ne devenait pas folle. N’est-ce pas ? Et quoi qu'ils en disent tous, elle n'agissait pas en débit du bon sens. Non mais sans blague !

D’abord Gauvin. Maintenant la Mère Rose. C’était donc une manie, chez tous ces gens-là, de se figurer qu’elle avait piqué la dépouille de sa jumelle ! Comme si elle avait besoin de demander à ce type, ce Mauny, ou même à qui que ce soit, la permission de transporter sa chair et son sang ! On rêve en plein jour, non ? non ?


- Non ?

Rha ! Encore. Elle jeta un coup d’œil à la porte, derrière laquelle attendait le cocher. A moins qu’il n’ait filé, lui aussi, grinça-t-elle en silence. M’prend pour une foldingue.

Bon… Vrai, elle avait un peu fait les choses en douce. Mais c’était leur faute, aussi ! A traînasser, à discutailler de Dieu savait quoi, et laisser le précieux corps de sa Marie pourrir sur place dans une boite ! Dans un sursaut de tendresse, elle effleura le bois grossier du cercueil, comme on caresse les pétales d’une fleur. Un myosotis, bien sûr.

- Marie… Je voudrais… Je voudrais…

Erreur système.
La phrase n’a plus de suite. Ou bien : Kermorial ne veut pas la savoir.


- J’les laisserai pas te faire ça.

Correction :

- Me faire ça.

Atténuation :

- Nous faire ça.

La mort n'a pas seulement érigé une frontière infranchissable entre les soeurs Kermorial ; elle a aussi aboli l'équilibre. Tant qu'il existait deux esprits pour deux corps semblables, la gémellité ne posait souci à aucune : la même et l'autre, l'autre et la même se côtoyaient et se complétaient, sans confusion aucune. Inconnu, le désir de ne former qu'un. Pourquoi l'auraient-elles voulu ? Aucune ne manquait à la seconde ; et cette drôle d'altérité était condition de leur complétude. Mais retirez une âme de l'équation... et voilà que la carence s'installe. Reste ce corps vide, ce corps de trop, corps commun qui pourrit sous les yeux de son double, et refuse catégoriquement de reloger la part manquante.

Étonnez-vous, après ça, que la survivante ait les plombs qui fondent.

Dans un recoin sombre et intouchable de sa tête, Kermorial veut avec fureur se débarrasser du redite. En portant en terre la matière morte, peut-être, les choses rentreraient dans l'ordre.
Suum cuique : chaque chose à sa place, sans quoi...

Sans quoi... ?

Un gémissement.

- Marie... Pourquoi m'as-tu abandonnée ?
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(Helen Kazei / Pierre de Ronsard, Je n'ai plus que les os)
Ascelin
[En route pour Rieux, trempé mais décidé]

La pluie tombait drue. Le voyage jusqu’à Rieux, bien que court, s’annonçait des plus inconfortables. A l’odeur de cheval mouillé se mêlait celle de la campagne humide. Le convoi remontait à toute allure les chemins, faisant fi des intempéries qui venaient s’abattre sur le peu de neige qui restait au sol. Ce même sol était maintenant détrempé et donnait naissance à une boue épaisse et collante.

Secoué suivant le rythme du galop, le jeune baron d’une geste vif et assuré, essuya avec le dos de sa main gauche son front, le long duquel dégoulinaient de grosses gouttes de pluie. Les yeux plissés, le nez quelque peu rougi, il regardait droit devant lui et loin, ne pensant qu’à sa prompte arrivée à Rieux. La Kermorial avait de l’avance. Sa seule chance était de remonter sa trace rapidement. Il se raccrochait à l’espoir qu’encombrée par le corps de sa sœur, elle soit contrainte de voyager lentement, peut-être même en carrosse. Si tel était bien le cas, alors il lui restait une chance de parvenir à ses fins et de stopper pareille folie.

Le vent sifflait et le bruit de la pluie s’abattant sur le cuir, sur les armures, sur les feuilles des arbres aussi, était grondant. Malgré cela et malgré les hennissements des chevaux, Ascelin tenta le dialogue avec Roxanne.


J’espère que nous n’aurons pas à user de tes compétences et de celles de tes escyuers, ma chère Roxanne. Je te souhaite une vertu davantage dissuasive qu’autre chose.

D’ajouter.

Sois vraiment remerciée d’avoir accepté de m’accompagner.

Ensuite, le voyage continua, jusqu’à ce qu’enfin ils atteignirent les portes de la ville.


[A Rieux, embrumé par l’incertitude]

Une phase de l’épopée s’achève pour permettre à la suivante de mieux débuter. Il voulait rejoindre Rieux, maintenant il y était. Et puis quoi ? Gauvin avait eu la délicatesse d’enrober l’acte infâme qu’il avait commis dans la franchise de l’aveu, mais cette tentative de repentance tardive avait l’inconvénient de l’avoir tenu éloigné de la Kermorial. Loin d’elle, de ses plans, le peu d’informations fournies par le vieil intendant s’avérait maintenant un lot de consolation bien maigre. Plus de piste, plus d’information, plus rien. Le voilà presque seul à l’entrée d’une ville dans laquelle il n’avait mis les pieds que de rares fois et dans laquelle il n’avait jamais séjourné plus de quelques jours d’affilés.

Il descendit de sa monture. Ses bottes frappèrent le sol avec vigueur pour finalement venir troubler le calme d’une marre de boue qui éclaboussa leur cuir impeccablement ciré. Cela résumait bien l’histoire. Un calme incertain troublé par un acte imprévu, venant éclabousser le train-train du quotidien.

Que faire ? Où aller ? De toute évidence, elle n’avait pas opéré seule. Vous la voyez-vous, porter à elle seule un cercueil dans lequel repose un corps qui devait sérieusement commencer à souffrir des effets du temps ? Non, c’est franchement inenvisageable. Il fallait être plusieurs pour aller vite dans l’accomplissement de la besogne et pour porter la chose. Il fallait être plusieurs aussi pour distraire ou éloigner les gardes de Cucé rencontrés. Plusieurs encore pour préparer le convoi qui s’échapperait du fief. Et cela pouvait être n’importe qui. Il n’était guère nécessaire d’être intelligent, ni même futé. Les hommes de mains s’acquittant des tâches ingrates sont d’ailleurs souvent une belle représentation de la médiocrité humaine. Moins on est érudit, plus on est contrôlable et influençable. Le Très-Haut aime-t-il vraiment tous les hommes ? Il y avait de quoi en douter sérieusement. Enfin… Toujours était-il que les coupables pouvaient arborer le déguisement qui leur plait.

Ascelin regarda à gauche. Peut-être était-ce cet ivrogne qui décuve dans le caniveau ? Regard à droite. Ou peut-être était-ce cette homme aux habits de d’excellente facture qui arpentait avec prudence les rues, regardant avec dédain les quelques malheureux de la vie ? Ce pouvait vraiment être n’importe qui. Il soupira puis leva les yeux au ciel, comme pour chercher aide et réconfort auprès du Tout-Puissant.

Soudain, il se stoppa. Alors qu’il avait levé la tête, son regard se posa sur le sommet du clocher de l’église. Pourquoi n’y avait-il pas pensé plutôt ? A quoi bon chercher la place forte où se retrouveraient les complices du larçin, alors que dérober le corps ne pouvait avoir que pour objet final un enterrement rapide et irréparable ? Il en était sûr, le cadavre, d’une façon ou d’une autre, maintenant ou plus tard, se trouvera forcément en l’église.

Il se tourna alors vers Roxanne, tendant le bras et le doigt en direction de l'édifice religieux.


Le vol d’un cadavre ne plait ni à la justice temporelle, ni à la justice de l’Eglise. Les gredins se feront discrets et il est peu probable que nous croisions un cercueil arpentant fièrement les rues. Du moins pas un cercueil entouré d’hommes louches, et encore moins celui de Marie. Nous devrions donc commencer nos recherches par l’église. Il n'y a que là qu'un cercueil passe inaperçu.

D’ajouter, pas vraiment sûr de lui mais n’ayant d’autres plans en tête.

La Kermorial me reprochait mon inaction. Il y a fort à parier qu’elle cherche à enterrer sa défunte sœur et si elle veut faire les choses rapidement, alors elle a déjà tout prévu avec le clerc local. Si nous ne trouvons pas là-bas le corps, nous trouverons au moins quelques réponses auprès des autorités spirituelles.

Sur ces mots, l’escorte remonta les rues, direction l’église, direction, peut être aussi, du moins le juriste l’espérait, un semblant de piste ou de réponse.
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Else
[Rieux, la porte extérieure de la sacristie]

- Rrrondidjudrondidjudrondidju…

Dans la hiérarchie des pêchés, où place-t-on le blasphème prononcé à la porte d’un clerc ? La pluie est-elle une circonstance atténuante ? La fatigue ? La prise en charge inopinée d’une enveloppe terrestre étrangère, sous les ordres d’une blonde furie ? Et surtout, surtout, on mange quoi, ce soir ? Ces questions taraudaient le pauvre cocher épuisé, tandis qu’il s’affaissait à vue d’œil contre le saint mur.

Aux dernières nouvelles, ils n’étaient pas près de becqueter. La Kem’, dans son inattendue bienveillance, avait rapporté au fidèle assistant – le dernier qu’il lui restât – de quoi casser la croûte sur place. Autant dire qu’il n’était pas question de lui demander un congé. L’auberge, le lit douillet, le brouet chaud, il pouvait faire une croix dessus. Sans mauvais jeu de mot. Bon gré mal gré, il acceptait donc son sort. Ca lui ferait des histoires à raconter à ses enfants, et à ses petits enfants.
Comment j’ai servi de dernière escorte à la Marquise, et comment, au sacrifice de ma personne et de mon estomac, j’ai protégé sa dépouille et la couenne de sa sœur de…

A cette idée, un rire commença de secouer sa solide poitrine... mais se mua rapidement en quinte de toux. Protéger de quoi, hein ? Des chiens errants ? Des gargouilles, peut-être ? De la p’tite mère curé, aux poings gros comme des noix ? Non mais sans blague.

Rien, à vrai dire, ne préparait le brave pécore à ce qu’il découvrit lorsqu’il se mit en tête de se dégourdir les jambes. Passant le coin du bâtiment, quelle ne fut pas sa surprise d’apercevoir des silhouettes en armes se détacher dans la bruine résiduelle. Une… Deux… Trois… Quatre ! Crénom. Quatre gonzes harnachés comme des canassons – ou était-ce l’effet de la pluie, conjuguée à l’épuisement et à une bonne dose de déformation professionnelle ? En tout cas, il se ramenait là du monde qui n’avait rien à y fiche. Allons. Pas de guerre imminente, pas de brigands dans les parages – ou pas dont il aurait eu vent. Des mercenaires ? Mais pour qui ? Pour quoi ? Des étrangers alors ? Rieux, ville carrefour, ouvrait ses portes à bien du monde. Mais on ne vient pas assaillir Breizh, ni même ses villes frontières, à quatre péquenots…

Il allait rebrousser le chemin sans y accorder plus d’importance, lorsqu’il reconnut la silhouette du régent de Cucé.
Bigre.




[Dans la sacristie]


La porte s’ouvrit en grinçant, sortant Lise de sa torpeur. Revenue d’une escapade dans une taverne amie, elle avait cherché le sommeil sur les chaises austères de la sacristie. Non pas qu’on n’y put trouver un semblant de confort ; mais le bois rude convenait mieux à son humeur et aux idées fantasques de sa tête de pioche, un peu abîmée par la veillée mortuaire prolongée. Le moelleux des coussins lui rappelait par trop l’habillage velouté du cercueil.

Elle s’ébroua comme un chat au réveil, et accorda un regard interrogateur au cocher essoufflé.


- J’m’excuse bien d’vous d’mander pardon… Mais y’a M’sieur l’baron qu’est dehors, et qui s’ramène en compagnie. Quatre, qu'ils sont, et pas jouasses, si vous voyez ce que je veux dire. Equipementés, et tout. Pour parler vrai, j’comprends rien de c’quoi qui lui prende. Moi, ça m’fait rien… j’suis à vot’ service, comme c’est qu’j’vous ai dit l’aut’ jour, et j’protégerai c’que j’peux protéger. Mais contre quatre gaillards… J’f’ra pas d’miracles.

Une pointe – que dis-je ! une larmichette de remord vint à Elsbeth, d’avoir cru un instant que ce gazier-ci l’abandonnerait à son tour. Apparemment, ce n’était pas le plan.

- Tu n’auras pas à en faire, va. Reste près d’elle. C’est moi qui sors.

N’allez pas non plus vous imaginer qu’elle le relève de la besogne déplaisante par pure bonté d’âme, hein. Ce serait mal la connaître. D’ailleurs, entre affronter quatre Don Quichotte au crépuscule sous le crachin breton, et végéter dans une sacristie, à la lueur des flambeaux, en compagnie d’un caisson empestant la mort, le cœur du cocher n’aurait pas balancé bien longtemps : il aurait joué les moulins à vent, quitte à y perdre ses ailes, et plus encore. Mais Lizzie se dispensa d’écouter ses protestations, et marcha droit sur la porte principale en serrant son bon vieux châle autour de ses épaules.
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(Helen Kazei / Pierre de Ronsard, Je n'ai plus que les os)
Ascelin
Il marchait encore et toujours. Au fil du temps, la masse de l’église se faisait de plus en plus imposante. Au fur et à mesure qu’il s’en approchait, les détails architecturaux apparaissaient plus ou moins, les contours demeurant peu nets, brouillés par la légère brume et les gouttes persistantes. Il se questionnait. N’était-il pas stupide ? Il partait en guerre contre un vol de cadavre mais s’apprêtait peut être à combattre aux portes, ou même à l’intérieur, d’une église. Ce n’était pas folichon comme programme, et bien casse gueule comme plan. Un mal pour un bien certes, mais était-ce ainsi que le Très-Haut le verrait Lui ? Pas sûr. Vaut-il mieux se battre dans un lieu saint ou soustraire crapuleusement un corps ? Lequel emporte-t-il plus la faveur de l’Enfer lunaire ? Finalement il secoua la tête comme pour chasser ses tracasseries inutiles. Vous croyait vraiment que la Kermorial vive réfléchit à ça, elle ? Sait-on jamais…

Ce qu’il n’arrivait pas à chasser de son esprit en revanche c’était ce qu’en pensait la Kermorial défunte, celle dont on pouvait presque sentir sa présence de l’extérieur du bâtiment. Que dirait-elle de voir sa sœur et son régent s’affronter ainsi ? Peut-être qu’elle est heureuse de voir que sa mort ne laisse personne indifférent, allez savoir.

Comme souvent, l’église était au cœur de la ville de Rieux. Tout autour c’était construit de nombreux bâtiments. Il se rappelait à peine le cadastre de la ville qu’il avait tenté de mémoriser à Cucé avant de partir dans une veine de tentative de préparer un plan et son voyage. Il croyait bien que la mairie n’était qu’à quelques rues de là, mais n’y mettrai pas sa main à couper. En revanche, ce qu’il avait parfaitement retenu, c’est qu’il existe au sein des remparts quatre portes. Ajoutez à cela que l’église est au centre de la ville et donc à égale distance de ces quatre potentiels points de fuite. Bref, Elsa avait de quoi lui filer entre les doigts, et plutôt deux fois qu’une.

Il pesta intérieurement, jetant un œil en l’air.
*Tssss. Qu’ai-je fais pour que Vous me compliquiez ainsi la vie ? Mes projets icelieu ne sont-ils pas vertueux ?*

Le pas suivant s’acheva dans un « chpouiiik »peu ragoutant. A ces pieds, les restent d’un repas mal digéré par on ne s’est quel animal et évacué eu plein milieu de la rue par les voies naturelles. Il releva à nouveau els yeux. *Charmant. Est-ce une façon de me répondre ?*

Ce pathétique est imaginaire dialogue avec le Très-Haut prit fin lorsqu’il aperçut, tout près du parvis de l’église, un carrosse. Celui de la Kermorial ? Peut-être mais rien ne permettait de l’affirmer sans retenue. Il y avait en tout cas âme qui vive dans les alentours. Ils avançaient encore, jusqu’à distinguer une silhouette dans l’encadrement de la porte. Ils étaient encore trop loin pour distinguer des traits identifiables. Néanmoins, le jeune baron stoppa le groupe.

Roxanne, je sais me battre mais je ne suis stratège miliaire. Je ne sais s’il y de meilleures chances de réussite si je m’avance seul ou encerclé par vous trois. Qu’en penses-tu ?
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Roxannemontfortlaval
Indifférente à la pluie qui tombait à verse, elle s'en galopait avec le convoi. Des rafales de pluie, portées par des vents violents, s'abattaient sur eux et changeaient les chemins en un vrai marécage. Ils portaient néanmoins sur eux l'assurance sereine de ceux qui n'ont rien à prouver. En chasse d'un cercueil. Silhouettes agiles vêtues de braies et d'une tunique de cuir, surmontée d'une chemise de maille. Baudrier suspendus à leurs ceintures.

A mesure qu'ils se rapprochaient, Ascelin se faisait un peu plus bavard et toujours en maintenant son allure, elle lui répondait. Cet homme la faisait partie des rares auxquels la Montfort accordait crédit et confiance. Et si elle était en mesure de l'aider, c'est toujours simplement qu'elle acceptait de le faire.

Puis peu à peu, les piliers massifs de l'église commencèrent à se dresser et l'on pouvait apercevoir des galeries percées de fenêtres. L'ensemble était couronné par une voûte en arceaux.

Roxanne ne fut semble t'il pas la seule à remarquer le carrosse mais elle ne fit aucun commentaire, jusqu'à ce que de nouveau le jeune baron s'adresse à elle. Elle avait aussi eu loisirs d'observer la disposition des remparts.


Roxanne, je sais me battre mais je ne suis stratège militaire. Je ne sais s’il y de meilleures chances de réussite si je m’avance seul ou encerclé par vous trois. Qu’en penses-tu ?

De l'écouter, tout en regardant autour d'elle. A priori, il était fort probable qu'ils trouvent le cercueil en l'église.

"- Je pense que je vais poster Macsen et Téo à chacune des sorties de l'église et que je vais te laisser t'avancer seul. Je ne connais pas la soeur de Marie, par contre nous voir tous avancer n'aiderait pas à la calmer. Je pense qu'elle doit avoir beaucoup de chagrin et ne pas être dans son état normal pour avoir fait une telle chose. Tu ne devrais pas avoir trop de mal à lui faire entendre raison. Je resterais tout de même non loin au cas où. Puis quand nous aurons réglé ceci, j'aurais quelques questions à te poser au sujet d'Alix-Ann."

Elle avait bien conscience que ce n'était pas le moment, mais dès que le cercueil serait en sécurité, elle ne lâcherait rien pour savoir où se trouve la fille de Marie et Cassius. Elle en avait une petite idée, mais c'était encore vague. Roxanne tenait à ce que la petite héritière Montfort, assiste aux obsèques de sa mère, si tout du moins l'enfant le souhaitait.

Dans l'immédiat, elle fit signe à ses escuyers et laissa Ascelin s'avancer.

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En deuil de ma Pelote, Dame de Concoret & de Naël d'Artignac, Duc du Tregor et Chevalier de Pontekroaz.
Else
Appuyée contre le chambranle, Blondie poussa un profond soupir.

Elle s’attendait à être poursuivie – à quoi bon le nier ? Mauny, une fois soulagé du cadavre, n’avait pu que tirer la tronche. Et après ? Si ses plans, au demeurant fort simples, s’étaient déroulés comme prévu, il aurait remué ciel et terre en vain : la cérémonie funèbre aurait déjà été prononcée asteure, et le très modeste cortège serait en route pour le Léon, afin d’enterrer Marie dans la première ville de son cœur. Ou sur la côte… Proche la mer… Elisabeth voyait déjà l’endroit.
L’implacable mécanique ecclésiastique en avait décidé autrement.

Tandis que les figures floues et scintillantes s’agitaient sous la pluie, Kermorial se demanda pourquoi elle n’avait pas quitté Rieux aussi sec, en constatant qu’il serait résolument impossible d’obtenir des funérailles. A deux clampins, chargés d’un cercueil, profiter de leur avance eût été la seule chance de distancer Mauny. Mais pour quoi faire ? Sans cérémonie, pas question d'enterrer la morte. La garder pour elle seule, alors ? « Tu ne l’auras pas, elle est à moi » ? Fuir ? Depuis quand, au juste, craignait-elle l’affrontement ?

Elle repoussa ces pensées avec humeur, et tendit la main au dehors pour récupérer quelques gouttes de pluie dans le creux de sa paume.


- « Et c’est alors que l’horreur commença », récita-t-elle à mi-voix, presque amusée.

Plus de plan. Plus d’idée. Petite ancre perdue au milieu du déluge, qui ne retient plus qu’un navire fantôme. Elle releva le nez. La pluie étouffait les voix, troublait les traits des visages, mais ne cachait rien du tableau d’ensemble : c’était un siège, ou Blondie n’y connaissait rien. Et l’on se gardera de préciser qu’effectivement, elle n’y connaissait rien. L’incongruité de la situation lui chatouilla le coin des lèvres. Non, ça… Que le baron ballot viendrait les armes au poing lui disputer sa sœur… elle ne l’avait pas vu venir. Quant à s’imaginer qu’une Montfort était de la partie, elle en était bien loin.

Loin de s'en inquiéter, que ce soit par suggestion arrogante ou séquelle du deuil, ou par la certitude qu'il ne tenterait rien dans l'enceinte d'un lieu sacré, elle fut près d'en féliciter mentalement son adversaire. Le fer tranche plus sûrement que les mots, et c'était une arme qu'elle ne savait pas manier. Bon choix, en somme. Pas question pour autant de renoncer à lancer les hostilités ; tandis qu’elle reculait d’un pas pour le laisser entrer, une liste de formules de bienvenue se déroula dans son esprit.

Agressive :
« C’est fou. Vous n’êtes même pas entré, vous m’ennuyez déjà. »
Descriptive : « Vous dégoulinez sur le parquet. Vous allez gonfler le bois. Et pas que. »
Curieuse : « Quatre… Un par poignée ? »
Gracieuse : « Voulez-vous des patins ? »
Prévenante : « Vous allez prendre froid, filez donc vous mettre au chaud. Chez vous. »
Pédante : « Les lourdes et imposantes portes de l’église étaient vieilles de plusieurs siècles. Elles avaient connu les affres du temps sans jamais faire montre de la moindre faiblesse. Mais la tornade les fit s’envoler comme des fétus de paille.* Mhm. Question tornade, vous ne vous posez pas tellement là, vous, si ? »
Cavalière : « Fermons cette porte, et faisons comme si vous n’y étiez pas. »
Emphatique : « Une armée pour ma sœur ! Aux portes d'un lieu consacré ! N’a-t-elle point donné suffisamment ? »
Dramatique : « Ainsi vous voilà, venant disputer la sœur à la sœur, la chair à la chair. »
Admirative : « Quelle vélocité… Sous la pluie, en plus… »
Naïve : « Vous cherchez quelqu’un ? »
Militaire : « Rompez, soldats. La place est bien gardée. »
Pratique : « Vous pouvez bien geindre, ça ne réveille pas les morts. »
Attentionnée : « Comment va Gauvin ? »
Incrédule : « C’est pour moi, tout ça ? Et vous comptez vous en servir ici ? »
Stratège : « Quatre guerriers contre trois gringalets, dont une morte. Est-ce bien prudent ? »
Pointilleuse : « On laisse ses armes à l'entrée, quand on est bien élevé. »

En d’autres temps, elle eut opté pour l’une ou l’autre. La lassitude l’a drôlement assagie.
Assagie ?


- Vous v’nez assister à la cérémonie que vous avez fait empêcher ?

… Plus ou moins, quoi.

*La Fin des Temps, III, 4.
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(Helen Kazei / Pierre de Ronsard, Je n'ai plus que les os)
Macsen_pedr
Macsen était resté plus en arrière, suivant son chevalier Roxanne ainsi que l'homme qu'ils étaient venue aidé. La pluie mouillait, ce qui lui semblait un peu étrange. Question existentiel lui parvint, pourquoi la pluie doit-elle forcément mouiller ?

Du haut de sa monture, l'homme regardait devant lui, ainsi que le paysage. Il n'est pas du genre à rester tel une statue et strictement stricte. La rêverie fait partie de son tempérament.

Voilà le signe ! L'écuyer fit tourner son destrier, du moins ce qui lui servait pour ce-ci. Hop, direction l'arrière de l'église ! Devait-il tuer ceux qui veulent entrer ? Ou sortir ? Mince qu'elle était déjà sa mission la dedans ? Un petit coup dans la caboche, et la mémoire revint ! Se contenter de stopper toute sortie avec un cercueil ou un cadavre... Mouais, ben ça doit être approximativement ce-ci.

Patientant sous la pluie, perché sur le dos de son cheval, suffisamment éloigné de l'église pour y voir toute sortie sans se faire surprendre. Prêt à fondre sur sa ou ses victime en chargeant tel un dément monté sur une créature furieuse... Bon, vous avez compris, il s’apprête à charger toute personne sortant avec quelque chose ressemblant ou pouvant cacher un corps.

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