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[RP] Du Nord souffle le vent de la raison

Osfrid
    C’était le grand jour celui qu’il attendait plus que quiconque.
    Si certains espéraient voir arriver la fin de l’année à grand pas, Osfrid, lui, ne voyait que par le jour où sa danoise de mère ainsi que quelques membres de sa maison allaient débarquer. Et l’effervescence était à son comble depuis qu’il s’était éveillé. La veille au soir, il avait retrouvé sa petite cousine pour lui demander de l’accompagner jusqu’au port afin d’y accueillir les voyageurs dès le lendemain. Sachant l’affection qu’avait Briana pour sa mère et donc tante, il savait qu’elle ne lui refuserait pas ce petit tour malgré les récents évènements dont l’enfant avait été victime. Mais le coup d’œil rapide lancé à l’enfant, Osfrid s’était assuré qu’elle avait repris quelques couleurs. De plus, elle lui avait assuré qu’elle mangeait correctement dorénavant et il savait, en plongeant son regard dans le sien, qu’elle ne lui mentirait pas. Un jour peut-être elle le ferait mais pour le moment, les regards échangés avec son grand cousin avaient encore cette saveur où l’innocence prenait le dessus sur la banalité des choses, sur les meurtrissures du passé dont celui d’Osfrid était encore empreint. Alors avec cette promesse faite la veille, le danois s’était rentré dans sa chambre à l’auberge du coin, satisfait de pouvoir entraîner la petite dans un nouveau tourbillon. Et le matin avait été là, plus vite qu’il ne l’aurait cru.

    Deux pieds posés à terre, Osfrid s’était passé une main dans les cheveux afin de rassembler ses esprits. Il faisait dans sa tête encore embrumé la liste de ce qu’il devait faire avant de retrouver sa famille. Les chambres avaient été retenues à l’auberge du port. Il savait sa mère avec ce besoin insolent et presque maladif de pouvoir contempler l’horizon et l’eau comme lui-même en était dépendant alors il ne s’était pas fait prier. Et puis, ça mettait les siens un peu à l’extérieur du centre du village ce qui n’était pas plus mal. Harald avec sa femme et ses monstres avaient tout autant besoin d’espace que lui, même solitaire, en réclamait. Un sourire aux bords des lèvres et il pensa à sa blonde de mère. Il espérait qu’elle ne serait pas trop fatiguée mais surtout que la peine et le deuil ne l’aurait pas amoindrie. Il savait les ravages de l’absence, il en connaissait les moindres affres pour les avoir vécues et en ressentir encore aujourd’hui les piques certains jours.

    Se levant enfin, le danois alla se débarbouiller. Le bain la veille lui avait offert cette détente nécessaire à une bonne nuitée et il ne lui restait plus qu’à ouvrir correctement ses mirettes pour affronter le monde et sa journée. Une fois chose faite, il enfila une belle chemise de lin tissé finement dans les tons qu’il affectionnait, lie-de-vin, avec quelques broderies dorées au col, puis ses braies couleurs crème assorties à son mantel. Aujourd’hui c’était jour de fête même si pour la plupart des gens il restait jour ordinaire. Quand on n’a pas vu sa famille depuis des mois, chaque instant devient exceptionnel. Il enfila enfin ses vieilles bottes qui avaient vécu tant de voyages qu’elles en étaient usées jusqu’à la corde mais Osfrid se sentait bien et n’avait pas mal aux pieds.

    Voilà qu’il était tout beau le danois et prêt à sortir. Mais à peine arrivé sur le pas de la porte qu’il se ravisa. Son épée, son éternelle Clémence qui l’accompagnait partout, il ne pouvait imaginer la laisser ainsi. La veille au soir, il avait passé de longs moments à l’astiquer. Chaque rune gravée représentait un adversaire tombé au combat et sa lame commençait à devenir presque trop petite pour recevoir cette distinction mais c’était une façon d’honorer leur mémoire. La plupart s’était battu avec bravoure et il ne voulait pas les oublier. Donc revenant sur ses pas, Osfrid saisit sa Clémence et la glissa dans le fourreau prévu à cet effet à sa ceinture. Là il se sentait complet et pouvait aller chercher sa petite cousine.

    Quelques pas en direction du centre où Briana logeait avec sa mère et le valet de celle-ci et Osfrid se retrouva rapidement devant la grille de la maison. Un instant d’hésitation, un regard vers les fenêtres de la maison, à l’étage. Souvenirs encore récents de sa venue jusque-là alors que la petite semblait vouloir quitter ce monde. Il ne l’avait pas vu venir celle-là, trop occupé à se déchirer avec sa mère, cette mère qu’il malmenait pour lui faire ouvrir les yeux et qui n’avait rien vu de plus que lui… Jusqu’où irait son inattention face à son enfant, il se le demandait chaque jour mais il avait aussi fait une promesse à sa petite fleur de Ribe et il essaierait de la tenir au mieux. Prenant une grande goulée d’air, il poussa enfin la grille et s’avança jusqu’à la porte pour soulever le butoir afin de prévenir de son arrivée.

    Osfrid se retourna, scrutant l’horizon puis ce ciel chargé de nuages annonciateurs de neige à venir. Un sourire naquit sur les lèvres du danois. Si le temps était au rendez-vous alors ça serait une belle journée pour tous. Mais la porte qui s’ouvrait soudainement à la volée le tira de ses réflexions. Ses azurs vinrent se poser sur celle qu’il espérait voir alors ses lèvres s’étirèrent doucement avant de se baisser pour se mettre à sa hauteur et la recevoir contre son torse. Petit ange dont il se faisait le protecteur, jamais il ne voulait en être séparé à nouveau même si sa mère avait ce pouvoir et le lui avait bien fait comprendre. Est-ce que la période de fêtes serait propice à changer les choses finalement, il se le demandait à chaque instant surtout avec cette colère sourde et ses reproches jamais bien loin de ses lèvres. Soupirant légèrement, il déposa un baiser sur la chevelure dorée.


    - Bonjour ma petite Fleur. Es-tu prête à venir avec moi accueillir comme il se doit notre famille ?

_________________
Briana.
Ô l'impatience... Celle qui accompagne l'enfance. Celle que l'on peine à maîtriser.
Simple émotion qui, ce jour, pousse à déambuler sans retenue entre les murs d'une maisonnée qui doucement s'éveille, et où les habitants, les yeux encore embrumés, têtes se laissant devinées dans l'entrebaillement d'une porte, se demandent pourquoi tant d'agitation.

Il est des pas qui ce matin résonnent.
Ceux d'une jeune fille en mal d'attendre et qui cognent, qui cognent le bois, marche après marche, mains en appuis contre les murs cernant le grand escalier qui la conduit au rez-de-chaussée.
Cette incapacité à attendre, Briana l'a toujours eu... Sans doute trop pressée de pouvoir jouir de ces instants tant attendus.

La patience, elle l'a pourtant apprise sous les bons conseils de sa nourrice, mais parfois, sa rivale est si forte, tellement ressentie que l'on ne peut aller à son encontre. Et cette "Impatience là ?".. N'est pas là pour être mauvaise. Loin de là. Elle est juste synonyme d'une envie, d'un besoin. Celui de retrouver enfin ce qui lui semblait être si loin.
Ribe s'en venait à elle, à Lui... A eux... avec les Leurs. L'annonce de les revoir avait su réchauffer un coeur enclin aux peines, à la douleur donnant à la Môme de retrouver le sourire progressivement en plus d'une forme qu'elle avait laissée s'échapper, mais qu'à présent, elle tentait de regagner.
Promesse avait été faite en ce sens et elle s'y tiendrait.

Dehors, alors que le temps froid de l'hiver accompagne le monde d'un ciel lourdement chargé, dedans c'est à la chaleur d'un sourire adressé à une mère qui s'approche, d'un rire émis sous le coup d'une folle excitation, d'un souffle venu mourir sur le froid d'une vitre au travers laquelle le regard nerveux visite la ruelle qui s'offre à eux, de se faire sentir.
Combien de temps maintenant qu'elle attend derrière cette fenêtre ? Celle-ci ou une autre d'ailleurs... Car toutes y sont passées. De sa chambre au salon elle n'a cessée de courir et ce depuis qu'elle s'est levée, parée de l'une des plus belles toilettes que comptait les malles qu'elle avait faites apporter.
Sur elle, du bleu. Celui d'une robe dont le velours jouait de ses teintes, allant du clair au marine, tirant parfois sur l'émeraude. La peau laiteuse qu'offre le haut d'un buste ainsi que le cou sont dissimulés sous une chemise au ras du corps. Plus loin, posé sur l’assise d’un fauteuil son mantel qui bientôt la couvrira pour s’élancer dans le froid aux côtés de celui qu’elle attend…
Osfrid. Cet Autre retrouvé. L’amour d’une vie… Particulier. Pas de celui qui naît d’ordinaire entre deux personnes de sexe opposé. Non ! Parce qu’elle n’est qu’une enfant mais surtout parce que dans son sang c’est un peu du sien qui coule. Entre les deux, un lien, indestructible. Un lien invisible auquel on se raccroche et qui vous tient en vie, la tête et les épaules tenues hors de l’eau.Parce qu'il est son Présent, parce qu’il fait parti de l’avenir… Parce qu’il est l’Espoir.

La veille, il lui avait dit venir la chercher pour qu’ensemble, ils se rendent au port. Il n’était pas d’heure fixée mais les aurores avaient vu Briana quitter sa couche après une nuit agitée. Troublante impatience qui là aussi vous empêche de trouver le sommeil alors qu’on se demande quand viendra le soleil annonciateur du jour, et avec lui, le moment que l’on attend. Et il fait maintenant des heures qu’on pointée les premières lueurs. Ne reste plus qu’aux cheveux encore indisciplinés d’être soigneusement rangé et pour se faire, les mains attentionnées d’une mère. Elles sont là, qui doucement, font glisser le peigne dans la chevelure dorée lui donnant ordre parfait, avant de les tresser. Les doigts maternels sont habitués, agissant avec agilité et rapidité. Et fort heureusement, car à la silhouette qui apparaît, se dessinant derrière les barreaux de fer que dresse en hauteur une clôture qui tient fermée petite parcelle à l’avant de la maison, la Blondie n’hésite pas de bondir, sans se soucier d’en avoir terminé.
Il est là et la seule envie qu’elle ait est d’aller le rejoindre.

Avec précipitation, les mains soulevèrent la lourde mante fourrée pour venir trouver repos sur les menues épaules.
Un cri :


«  J’y vais Maman ! Osfrid est arrivé ! »


Un cri pour annoncer qu’elle sort, et qui vient soudainement briser le silence. A l’entrée, un panier qui l’attend et qu’elle s’empresse de ramasser par l’anse. Il est un présent de bienvenu qui renferme quelques mets et autres spécialités du Comté.
La porte est franchie, sans même qu’elle ne prenne la peine de se retourner et déjà Osfrid est rejoint. Geste coutumier qui les fait se retrouver. Deux corps qui s’entrechoquent doucement, ses bras trouvant place autour de son cou, intensifiant l’étreinte alors qu’un murmure se fait entendre à l’esgourde :



«  Il fait longtemps que je vous attendais… Ce fut si long… »


A une bise de venir résonner, claquant sur la joue qui s’offre à ses lèvres légèrement ourlées et encore chaudes.
La famille, d’en entendre parler, laisse apparaître un large sourire, alors qu’à l’esprit s’insinuent vivement les souvenirs.
Déjà la main se tend et invite Osfrid à se relever. Doigts resserrés sur la Géante, et la voilà qui l’entraîne hors de la petite propriété.
Un regard est accordé sur l’une des fenêtres derrière laquelle se dessine une silhouette familière. Sa Mère, à qui elle adresse un signe, un dernier avant de disparaître, direction le port de Montpellier.



«  Comme j’ai hâte de retrouver ma Tante et Inge… même Harald, pour qui j’ai préparé de quoi mangé, des fois qu’il aurait un petit creux. Vous croyez qu’ils seront arrivés où qu’il nous faudra attendre encore un peu avant de voir accoster le navire ? Et Est-ce qu’il me trouveront changés ? Et si… »


Moult questions là d’animer une conversation… Habituel rituel pour la jeune de Courcy. Parler pour passer le temps, pour voir arriver plus vite le moment…
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      Parce que ma vie à moi est faites de rêves, j'ai décidé de faire de tous mes rêves une réalité.
      " Ne rêves pas ta vie, mais vis tes rêves "... avec une pensée pour Lui
Osfrid
    Pas un regard en arrière, pas besoin. Il savait qu’elle était à la fenêtre à regarder son enfant partir. Il savait car il pouvait sentir cette présence qui attendrait et attendrait encore. Comment se pouvait-il qu’ils soient de la même famille tous les deux, Osfrid se le demandait un peu plus chaque jour.

    A part passer son temps à se lamenter et se cacher, sa cousine n’était pas une femme qui faisait partie des personnes qu’Osfrid fréquentait d’ordinaire. Il avait cru qu’elle était différente au début de leur rencontre. Un caractère forgé dans l’acier, une bouche aussi grande que la sienne, une témérité à toute épreuve et puis… tout était retombé comme un soufflet trop vite sorti du four. Adeline n’était pas celle dont elle donnait l’image. Trop réservée, trop effacée, trop muette, elle lui faisait l’effet d’une fantomatique apparition. Et forcément, aux yeux du danois, elle devenait moins intéressante, moins abordable, certainement plus étrangère. Il lui fallait toujours lui tirer les vers du nez, il lui fallait toujours mettre genou à terre et presque la supplier afin d’obtenir un semblant d’information sur sa vie, sur ses ressentis, sur son présent ou son avenir. Même l’irlandaise il finissait par avoir de longues conversations avec elle c’était pour dire… alors non, il ne se retournerait pas pour la saluer. De toute manière, la situation n’avait guère changé entre eux même si Osfrid y mettait beaucoup du sien. Mais à ce jour, aucune explication n’était venue satisfaire le danois et les deux cousins restaient dans un « no man’s land » à la fragilité palpable dont on pouvait sentir bien des fois quelques brèches se creuser.

    Resserrant ses doigts sur ceux de Briana, Osfrid tenta de chasser cette vague impression de reproches qu’il pouvait ressentir dans son dos, comme si le regard de la de Courcy pouvait lui asséner un mauvais coup. Combien de fois avait-il fait un effort, combien de fois s’était-il fracassé contre un mur ? Il ne comptait plus le nombre incalculable d’essai et il ne réitérait pas la tentative. Leur dernière dispute remontait à quelques jours en arrière quand la vicomtesse avait voulu comprendre certaines choses du passé. Osfrid ne prenant aucune pincette comme à l’accoutumée c’était vu taxer de menteur, de faiseur d’histoire et pire encore, la cousine avait insulté la mère du danois alors rien que pour cela, il la mettait aujourd’hui à l’index. Qu’elle joue avec lui, il trouvait ça un tant soit peu intéressant mais l’insulte faite ainsi à celle qui lui avait donné le jour, il ne pouvait pas oublier, il ne pouvait pas pardonner. Et il était hors de question qu’elle s’approche de près ou de loin de sa blonde mère. Et tandis qu’avec douceur, il avait pris la main de Briana dans la sienne, sans se retourner donc, il avait pris le chemin du port avec l’enfant qui ne savait plus s’arrêter de parler tant l’attente se montrer abominablement longue avec elle.

    Les rues n’étaient guère désertes à Montpellier et ça y allait d’un salut amical à un bonjour curieux, d’un sourire timide à un regard insistant... Et Osfrid continuait sa progression avec Briana, partagé entre l’impatience de revoir les siens et la curiosité d’écouter la petite fille lui raconter ses dernières heures dans cette nouvelle demeure qui était sienne pour quelques temps. Mais le temps décida que sa course serait rapide et bientôt, le port fut accroché aux prunelles azurées. Un instant d’arrêt pour jeter un regard dans les moindres recoins de l’horizon avant de reprendre, d’une marche plus vive, la direction de la jetée où déjà le navire les attendait.

    Le danois s’approcha un peu du bord de la jetée puis tendant les bras à Briana afin de lui prier de venir à lui, il prit le panier qu’il posa au sol avant de porter la petite dans ses bras protecteurs. Un sourire qui en disait long sur son impatience marquait son visage, les yeux pétillaient de joie, son cœur battait à tout rompre. Bientôt il les retrouverait, bientôt ils seraient tous réunis, bientôt les dernières souffrances s’effaceraient pour laisser la place à cette joie qui les caractérisait. Un baiser sur la tempe de la petite qui était devenue un membre à part entière de la famille danoise et Osfrid relevait le visage tout en mettant une main en porte-voix pour crier.


    - Hé oh du bateau… y’a quelqu’un ? Hé oh…

    Des cris, des rires puis trois visages d’enfants vinrent montrer le bout de leur nez sur le bastingage. Levant la tête vers le haut, Osfrid sourit en reconnaissant les deux fils de son ami Harald ainsi que la petite Thyra qui souriait en reconnaissant Briana. C’était déjà bon signe s’ils étaient là car c'était la preuve que finalement tout le monde avait embarqué… enfin tout le monde sauf Eirik, le grand-père d’Osfrid qui, dans son dernier courrier, refusait catégoriquement de quitter Ribe. Il était trop vieux désormais pour voyager afin de venir sur ses terres inhospitalières avait-il décrété et même si Osfrid le comprenait, il en avait été touché. Mais chassant cette pensée qui le tiraillait, la joie revint rapidement lorsque la silhouette de sa digne mère se profila sur la passerelle. Reposant doucement Briana, il s’avança afin de proposer sa main à Sigrùn et l’aider pour qu’elle touche enfin terre. Et de ses bras, il l’entoura lorsqu’elle fut enfin à quai.

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Deedee
Il y avait longtemps que la maison n’avait pas résonné de cris joyeux d’enfant, longtemps aussi qu’elle n’avait pas été réveillée de la sorte, arraché des bras de Morphée par une petite tête blonde impatiente comme le sont les enfants lorsqu’un cadeau leur est promis. Il est des réveils comme cela, qui vous donnent le sourire, le sourire et l’envie de rire, et Adeline s’était levé ainsi, les yeux pétillant de voir sa petite fille si joyeuse et heureuse. Elle qui quelques jours plus tôt gisait pâle dans son lit, elle pour qui ils avaient tremblé craignant le pire, elle, qui aujourd’hui rayonnait et s’impatientait !

Il faut dire que la journée était particulièrement spéciale pour Briana, et Adeline ne pouvait que comprendre la fébrilité et l’impatience qui s’était emparé de l’enfant. Dans quelques heures, il viendrait la chercher, lui, ce cousin, cet homme dont elle aurait juste une fois aimé croiser le regard, mais pas ce regard qu’ils se lançaient sans cesse, regard plein de reproches, d’amertumes et de douleurs, ce regard…. Elle aurait aimé, peut être juste une fois… un sourire, un encouragement, un… Mais pour cela il aurait sans doute fallu, seulement, qu’elle l’écoute.
Enfin pour l’heure, il n’était pas question d’elle, ni de lui, mais de Briana, de sa petite princesse qui jubilait d’impatience de le retrouver et retrouver un peu de son escapade en terre du Nord.

La toilette avait soigneusement été préparée, une robe, des plus belles de sa garde-robe, choisi dans une de ces villes qu’elles avaient traversées. Un petit déjeuner, avalé bien vite, mais avalé tout de même. Adeline avait longuement insisté pour que l’enfant mange, et mange tout ce qu’il y avait dans son plateau, le dernier épisode était encore bien trop frais à son esprit pour qu’elle ne fasse l’impasse sur le déjeuner, et puis…. Un moment privilégié qu’elle n’aurait voulu laisser à personne d’autre le soin de faire, et qu’elle n’avait si longtemps pu faire, peigné et coiffé les boucles blondes de sa fille. Digne héritage des racines de son père, des boucles de la couleur de l’or qu’il fallait démêler avec soin avant de tresser, simplement, mais rapidement.
Rapidement, et juste à temps. À peine un regard vers la fenêtre qu’Adeline découvrit en même temps que sa fille la silhouette imposante d’Osfrid venu chercher Briana.
C’était l’heure…


« J’y vais Maman ! Osfrid est arrivé ! »

Les mots furent lancés rapidement et la porte ouverte et refermée sans qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit. Machinalement, la jeune femme s’approcha de la fenêtre pour les regarder partir, un dernier petit geste de la main en réponse à la joie de sa fille, et un pincement au cœur…

Là-bas sur le port un bateau venait surement d’accoster, un bateau transportant un petit bout du nord. Ce nord qu’elle ne connaissait pas. Cette famille qu’elle ne connaissait que de nom, des noms tout juste couchés sur un arbre généalogique. Une famille qui était sienne, mais dont elle n’avait jamais pris la peine de connaitre. Une famille… dont elle se sentait tellement étrangère…. Et pourtant… il ne lui aurait fallu qu’un pas pour la connaitre. Un seul petit pas, comme ces deux êtres qui s’éloignait.
Était-ce en restant ainsi, cloîtrée chez elle, prostrée qu’elle parviendrait à connaitre cette famille ? Était-ce en réagissant ainsi qu’elle parviendrait a brisé cette glace entre elle et son cousin ? Elle aurait dû le suivre à Ribe lorsque son père se mourrait, elle aurait dû écrire à cette femme, sa Tante, cherché à la connaitre, et à en connaitre davantage sur sa famille, sa vie, sa naissance. Les derniers mots d’Osfrid avaient été dur, si dur qu’elle n’avait voulu les croire, et pourtant… Pourtant elle le savait. La vérité...Tout n’était que vérité.

Les silhouettes disparurent au bout de la rue, happées par les passants, les maisons et cette vie qui grouillait dehors.
Dehors…

Et sans attendre davantage, la Normande jeta sur ses épaules un mince châle avant d’ouvrir la porte rapidement et courir dans la rue en direction du port…

_________________
Briana.
Il est un coeur qui bat, assurément de vivre, mais qui cogne davantage d'impatience. Et plus elle avance, plus elle sent les battements de ce dernier forcer contre la cage humaine qui le retient prisonnier.
A leurs yeux, multitudes de venelles au beau milieu desquelles ils déambulent, à deux, la marche pressée. Mais ce jour, on croirait presque que tout est là pour ralentir leur pas. Il n'est pas homme ou femme qui ne s'arrêtent pas à un moment donné, devant leur nez, comme s'ils se jouaient de faire entrave à leur passage.
Il est des soupirs qui accompagnent alors l'agacement, les mains frêles n'hésitant pas un seul instant à se frayer passage entre les gens, abandonnant quelques secondes celle d'Osfrid. La populace est vivace en la cité, surtout en son centre, où sont regroupés marché et autres échoppes indispensables au quotidien de ses habitants.

Après quelques salutations brièvement échangées, quelques dernières bousculades évitées, ou pas, ils s'éloignèrent enfin du centre, empruntant les chemins de passe qui menaient au port. Deux ruelles... Plus qu'une et les azurs se posaient enfin, non plus sur tas de murs immenses qui s'élevaient haut dans le ciel, mais sur un horizon parfaitement dégagé, avec mer à perte de vue.

Le port rejoint, à nouveau Briana lâcha prise sur cette main qu'elle s'était approprié le temps du trajet qui séparait l'endroit de la demeure familiale. Regard rivé sur son cousin, comme lui elle eut fini par scruter les environs, à la recherche d'un navire qui saurait être porteur de ces voyageurs dont ils attendaient la venue avec tant de hâte.
Et il était là, son grand mât fièrement dressé au milieu du pont, voiles au repos, l'équipage s'affairant déjà à débarquer marchandises du fond de sa cale, mais aussi les premiers bagages auraient-on dit.

Scène de vie qui, inéluctablement, laissait place aux souvenirs. Il n'était pas si loin en fait, ce jour ou, elle aussi, s'était vu embarquer sur l'un de ses grands bateaux. Pas loin, le temps où traversant les eaux et les tempêtes, ils avaient rejoint Ribe, pour le pire, mais aussi pour le meilleur. Car si malheur avait frappé une nouvelle fois, il n'en restait pas moins que rencontres et retrouvailles avaient su apporter bien plus que chacun auraient pu espérer. La mort d'un homme avait su créer, resserrer les liens déjà existant, apportant dans la peine son lot de bien-être et de sérénité. De tout elle se souvenait. Tout en elle était gravé. Chaque moments passés, chaque visages, quelques uns se dessinant très distinctement au travers ses innombrables songes.
Bons nombres de rêveries qui, d'ici quelques minutes tout juste, prendraient vie. Joyeuse réalité qui donnait à la Môme de poser regard partout autour d'elle, à la recherche d'une silhouette familière. Ses bras liés autour du cou d'Osfrid, avec lui elle attendait cet instant où ils les découvriraient enfin.

Puis au sourire de s'étirer sur ses lèvres.
A l'appel lancé d'une voix roque et poussée de recevoir sa réponse, de voir trois têtes apparaître, les bras fendant l'air en de grands signes pour les saluer.
Azurs levés sur les cieux, il lui fallut porter sa main en visière, pour soulager les cristallins d'un trop plein de lumière venu affaiblir sa vue, et ce avant que sa voix ne s'élève à son tour pour interpeller les nouveaux venus :



" Les Garçons ! ... Thyra ! Nous sommes là ! Venez vite ! "


Ravie de les voir, elle ne parvenait à détacher de sur eux son regard, suivant leur descente. Au même moment, elle se sentit déposée, ses deux pieds touchant sol, ses bras déjà prêt à accueillir Thyra alors qu'elle la voyait se rapprocher à vive allure.
Quelques secondes d'une course effrénée sur le pont du bateau avant qu'elle ne puisse refermer ses bras sur la silhouette toute aussi menue que la sienne de son amie. Pour chaque joues une bise avant de relâcher l'étreinte, d'adresser un sourire et de porter son attention sur les deux frères qui eux aussi avaient touchés terre, ne cessant plus de courir, leur tournant autour sans s'arrêter.
C'est alors qu'effectuant demi-tour sur elle même pour suivre leur course, que ses yeux firent pause sur sa Tante dont la silhouette était demi happée par celle bien plus imposante de son cousin.
Un nouveau sourire, sa main lâchant celle de Thyra... Quelques pas avant de se figer non loin du couple mère/fils alors que déjà petite voix venait interrompre les retrouvailles :



" Ma Tante... Vous voilà..."
Sigrun



[Ribe – Danemark ]

Les courriers avaient été intenses au début, lorsqu’Osfrid et Briana avait regagné les terres de France puis doucement, petit à petit, ils s’étaient fait moindre jusqu’à n’être plus qu’une petite étincelle dans la vie de Sigrùn. Et tout à l’écoute de sa famille, elle savait que quelque chose ne se passait pas bien dans la vie de son fils. Elle avait beau l’interroger à chaque retour de courrier, jamais elle ne recevait une réponse qui la satisfaisait. A croire qu’il voulait lui dissimuler des choses, à elle, sa mère. Alors s’il ne voulait pas lui en dire d’avantage, elle viendrait jusqu’à lui afin d’en avoir le cœur net. Et c’était ce que la blonde danoise avait fait en demandant à son père d’organiser une expédition pour ce pays qui semblait vouloir dévorer son fils, vouloir l’engloutir jusqu’à ne plus laisser aucune trace de lui, vouloir lui arracher la chair de sa chair. Jamais elle ne laisserait faire ça, jamais elle ne baisserait les bras et laisserait son fils se perdre dans les méandres d’humeur de gens qu’elle ne connaissait pas.

A sa demande, Eirik le rouge n’avait fait qu’approuver bien que lui-même ne se sentait pas la force de traverser les mers pour venir botter quelques culs, il comptait sur le caractère volcanique de sa fille pour le faire à sa place. Et bien qu’il sache que Sigrùn n’était pas femme à se montrer vindicative au premier abord, il la connaissait assez bien pour savoir qu’elle finirait par sortir ses griffes rapidement. Et puis comme il avait l’habitude de le dire, ce n’était plus de son âge que de venir conquérir de nouvelles terres. Et il fallait bien que quelqu’un s’occupe de la maison de Ribe.

L’affaire avait vite été entendu et les plus proches de Sigrùn furent admis à voyager avec la dame de Ribe. Harald et sa famille eurent été invités quoi qu’il ait couté à la danoise et bien entendu Inge dont elle ne se séparait jamais. Depuis la mort de son époux, les deux femmes semblaient avoir plus de mal encore à s’éloigner l’une de l’autre ce qui était tout à fait normal lorsqu’on y pensait. Inge était au service de Sigrùn depuis plus d’une trentaine d’années, elle avait su se faire une place dans cette famille. Donc tout ce petit monde embarqua rapidement afin de venir jusque sur ces terres du sud où la mère d’Osfrid avait voyagé une fois, il y avait de ça bien longtemps mais le souvenir ne lui déplaisait pas et la blonde mère essayait de garder à l’esprit que tout irait bien, que tout serait parfait, que tout pourrait s’arranger.


- LARGUEZ LES AMARREEEES

Le visage se tournant doucement vers la maison sur la petite colline, Sigrùn posait une dernière fois ses azurs sur ce paysage qui lui manquerait très vite, elle le savait. Même si la joie de retrouver son fils l’emportait sur tout, quelque chose lui disait que tout serait bien différent après ce voyage. Le passé s’effacerait pour laisser la place à de nouveaux souvenirs bien entendu mais pas seulement…


[En mer -- Les jours passent et se ressemblent ]

Sur un bateau, on prend vite des habitudes et Sigrùn se pliait de bonne grâce à un petit rituel chaque jour. A l’aube de son départ, elle avait ouvert un grimoire afin d’y noter ses impressions, ses tracas, ses joies aussi et ainsi conter cette aventure. La première fois qu’elle quittait Ribe sans sa moitié et désormais, elle savait que cela serait toujours ainsi. Une nouvelle vie avait entamé son cycle lorsque son époux fut mis en terre et pour ne pas oublier, elle consignait tout désormais. L’âge n’était pas là non plus pour la faire rajeunir et la mémoire avait ses propres failles. Et qui sait, un jour si les dieux le voulaient, des enfants peupleraient à nouveau sa famille et ils seraient assez curieux pour vouloir connaitre un peu de ses voyages à travers le monde. Qui sait l’avenir qu’on leur réservait alors elle notait avec attention, avec délicatesse, avec émotions. Puis venait le moment de faire un peu de marche sur le pont avant de se retrouver enfermer des heures durant à nouveau dans la cabine qui servait de logement de fortune. Heureusement, Sigrùn avait Inge ainsi qu’Elfride pour lui tenir compagnie et des heures durant, les femmes s’adonnaient à quelques grands travaux de couture jusqu’au jour où les murs de la cabine retentirent sous les cris des marins.

- TERRE TERRE TERRE !


[Montpellier – Royaume de France]

On attendait plus qu’elle. Le pont avait été abaissé et les enfants d’Harald avait déjà repéré Osfrid et Briana sur le quai. Inspirant profondément, Sigrùn mit une dernière touche à sa natte bien accrochée sur sa tête puis demanda un œil approbateur à Inge avant de se lancer à la conquête de ce nouveau monde.

Vêtue d’un manteau de couleur clair, aux poignets fourrés ainsi qu’au col, Sigrùn prit la main du marin qui l’aida à traverser la passerelle afin qu’elle pose pied à terre. Le sol ferme lui tendait les bras tout comme son fils qui avait déjà agrippé sa main et plongé son regard dans le sien. Et là, de constater la douleur et la tristesse qu’elle pouvait y lire venir l’assaillir. Qu’était-il donc arrivé durant tous ses mois où ils avaient été séparés pour qu’Osfrid en arrive à n’être que l’ombre de lui-même. Mais déjà ses yeux se posaient sur la petite tête blonde qu’elle reconnue immédiatement. Ses bras protecteurs vinrent prendre possession des épaules frêles avant de sourire, satisfaite de la retrouver.


- Te voici donc Briana… Je suis heureuse de te retrouver… Par tous les dieux, ont-ils décidé de te faire pousser plus vite qu’il n’est nécessaire ?

Et de ce sourire tendre dont elle ne se dépareillait pas, elle gratifia l’enfant avant de lui caresser la joue avec délicatesse. Puis se tournant vers Osfrid, elle ne put s’empêcher de venir murmurer tout contre son oreille.

- Toi, tu as intérêt à avoir de très bonnes explications à me fournir sinon tu vas subir le pire des interrogatoires de ta vie, c’est une promesse que je te fais mon fils !

Le couperet maternel était tombé et sans appel. Elle n’était pas venue ici pour faire de la figuration, bien au contraire. Certaines choses devaient être réglées et ça le serait, dans la douleur ou dans la paix mais certains allaient y laisser des plumes. Soudain, Sigrùn se tourna vers Briana et lui prit la main d’autorité.

- J’espère que tu vas passer du temps avec moi Briana, j’ai besoin de tes lumières pour comprendre certaines choses. Je doute que ton cousin ici présent soit bavard sur certains points et j’ai besoin de comprendre les choses. A Ribe, je suis trop loin mais maintenant… Ah et puis j’exige de voir ta mère ! Puisque je me suis déplacée jusqu’ici, elle n’a pas intérêt à me faire faux bond… Aux dernières nouvelles, avec ta petite famille vous êtes venue vous installer près d’Osfrid pour éviter quelques soucis m’a-t-il raconté dans un de ses SI RARES courriers donc tu lui feras part de ma requête, n’est-ce pas Briana ?

Un sourire mais personne ne pouvait se tromper. Le sang danois bouillonnait dans ses veines et ce fut avec un léger soupir d’exaspérèrent qu’elle se tourna vers la passerelle quand retentit la grosse voix de son père.

-Laisse donc cette enfant tranquille Sigrùn ! Elle n’a pas à être au cœur des conflits de cette famille… Elle à d’autre chose à penser n’est-ce pas Botilde ?

Et le rire tonitruant du patriarche remis les pendules à l’heure. Le géant danois touchait terre pour soulever encore la gamine dans ses bras avant de lui coller un baiser sonore sur le front puis de la reposer tandis que Sigrùn soupirait doucement.

- J'oubliais... ton grand-père a finalement changé d'avis mon fils ! Sois-en heureux !
Osfrid
    L’arrivée des danois avait été un évènement dans la ville de Montpellier surtout lorsque le grand père se mettait en tête de vouloir inspecter la moindre taverne afin de s’y délecter de quelques breuvages du Sud. Heureusement, Osfrid et Harald avaient de l’endurance à ce petit jeu-là et connaissant les méthodes d’Eirik, ils arrivaient encore à le tenir plus ou moins correctement. Et les jours passèrent dans la joie et la bonne humeur. Briana avait retrouvé son amie Thyra qui lui avait fait retrouver le sourire et son insouciance de petite fille, les garçons d’Harald mettaient à profit leur venue en terre françoyses pour se perfectionner dans la langue étrangère bien qu’ils avaient quelques rudiments, acquis auprès du père d’Osfrid. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes… Enfin pas tout à fait. Sigrùn avait réussi à coincer son fils par un beau matin de décembre alors que l’année touchait à sa fin. Et ce fut sans conteste que le danois dut se plier à la curiosité maternelle.

    Bien que dans un premier temps, il ne voulait guère s’étendre sur le conflit cousinesque, il dut se faire violence et se mettre à table. C’était ce qui le rongeait depuis un moment. Il avait voulu arrondir les angles et parfois, il y avait réussi mais sa cousine l’avait, à chaque tentative, rejetée, le chassant à grands renforts de mots blessants alors il n’avait pas baissé la tête, il n’avait pas courbé l’échine, bien au contraire. Qui connaissait Osfrid savait qu’il n’était pas homme à se taire et ses mots venaient atteindre sa cible, appuyant là où ça faisait mal. Et puis, au cœur de la confidence, il avait avoué à Sigrùn qu’il en était venu aux mains avec Adeline, lui envoyant une baffe et pas qu’une d’ailleurs même si de son côté, la de Courcy n’avait pas molli et s’était elle aussi fait entendre. Un soupir plus loin, en pleine réflexion, Sigrùn avait tranché.


    - Je vois… Je pense que la mère de Briana ne nous accepte pas et cela blesse mon cœur de savoir que ton père est rejeté par-delà la mort. Les secrets qui entourent la naissance de ta cousine ne sont pas de ta faute, ni de la mienne, ni celle de ton père. Nous avons été les témoins silencieux de la folie d’Enguerrand et apparemment elle nous en rend responsable.

    Osfrid s’était alors levé pour venir entourer de ses bras les épaules de sa mère, calant son visage dans son cou.e.

    - Vous n’y êtes pour rien mère. Vous ne pouviez pas vous opposer à des décisions qui n’étaient pas les vôtres mais Adeline a choisi de ne pas nous croire, a choisi de nous rejeter, de nous traiter de menteurs et par-dessus tout d’ignorer votre existence… Elle l’a prouvé en se murant dans son silence depuis que père nous a quitté et regardez… vous êtes ici depuis des jours et malgré la demande transmisse par Briana, aucun message de sa part n’est venu jusqu’à vous. Je suis désolé mère que vous subissiez cela de plein fouet.

    - Osfrid tu n’es responsable de rien, juste peut être d’avoir été impulsif avec elle mais de ce que tu me dis, cela n’aurait rien changé. Lorsque l’on voit comment elle élève ses enfants, comment voulais-tu qu’elle nous accepte, nous les étrangers, les barbares…

    Sigrùn se leva pour aller se poster devant la fenêtre, son fils l’y rejoignit en posant sa main sur son épaule. Doucement, sa blonde mère enlaça ses doigts aux siens.

    - Ton deuil va prendre fin Osfrid… L’année touche à sa fin…

    - Je sais et pourtant je ne suis pas prêt… j’ai essayé mais je ne suis pas prêt à reprendre vie. J’ai trop de souvenirs, trop de nostalgie, trop de déchirures en moi qui me rappellent constamment le manque de Sibila et Ragnard. Peut-être que finalement je ne serais plus jamais heureux...

    De confidence en confidence, Osfrid laissa son cœur s’épancher sur cet autre mal qui le rongeait plus insidieusement. Le manque de son âme sœur et de son fils. Rien n’était comme avant depuis un an, le cauchemar qui avait pris vie dans son existence ne voulait cesser et même si le fait d’être entouré des siens, de Briana qui lui apportait tant, il aurait dû en profiter, ce n’était pas le cas. Il se sentait si incomplet, une partie de lui étant mort à l’intérieur depuis ce jour-là. Soupirant dans le silence de la chambre, Sigrùn et son fils restèrent ainsi un long moment. Pas besoin de mots pour traduire le manque éternel de l’être aimé et à eux deux, ils savaient ce que cela voulait dire.

    Puis les jours se suivirent. Doucement, inexorablement. La décision de visiter les alentours fut prise. Briana serait du voyage afin qu’elle et Thyra puissent continuer à se côtoyer dans la bonne humeur même si Osfrid voyait le moment de la séparation arriver et avec elle la douleur que laisserait dans le cœur de l’une et de l’autre ce moment. Mais la vie n’était pas toujours telle qu’on la rêvait, malheureusement. Deux jours à Béziers, un brigandage plus tard et retour à Montpellier pour que la mini de Courcy se retrouve devant portes closes chez elle. Sa mère était partie précipitamment, courant derrière un valet disparu ou enfui sans se préoccuper de sa progéniture, laissant Erwan chez les moines et Briana à Sigrùn. La colère avait alors envahi Osfrid. Comment une mère pouvait laisser son enfant ainsi et surtout ne pas s’acquitter d’une demande en bonne et due forme auprès de son cousin. Il était dépassé par cette attitude et ne voulait plus revoir la de Courcy sous peine de la tuer sur place. Elle avait atteint le point de non-retour en ce qui le concernait et tout ceci serait qu’un mauvais souvenir lorsqu’il partirait, ce qui se ferait sous peu. Les jours qui suivirent furent passés en famille, Briana s’intégrant parfaitement aux danois qui l’avait pris sous leurs ailes et Sigrùn fut enchantée de pouvoir prendre soin d’une jeune demoiselle comme il se devait. Mais l’annonce du retour au Danemark vint ternir les derniers jours. La séparation serait à nouveau douloureuse pour Osfrid et les siens. Lui avait pris un engagement qu’il ne pouvait annuler mais il promit à sa famille que bientôt il reviendrait les retrouver. Et puis, ils ne repartaient pas seuls. Un membre de plus serait dorénavant compté à Ribe. Sous la protection d’Eirik et de Sigrùn, Briana serait à sa place dans cette famille unie qui ne demandait plus rien à la branche normande. Les choix avaient été discutés, posés, faits en toute connaissance de cause et l’enfant qui grandissait avait besoin pour une fois d’être entouré et surtout de trouver une stabilité qu’elle n’avait jamais eu jusqu’à présent. Loin du royaume de France, Briana apprendrait surement à se construire, différemment.




    ~FIN~

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