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[RP] C'est l'effet papillon ... (*)

Harchi
RP fermé, néanmois, si vous souhaitez y participer adressez toujours un MP on verra comment trouver une petite place à votre personnage.


- MA-RIE- A-ME-LYA D'E-LI-CAHRE KIER-KE-GAARD ! Revenez ici tout de suite ! je n'ai pas fini de vous parler ! Je vous interdis de le fréquentez autrement que comme un garde ! Vous m'entendez ? Il n'est pas pour vous et ne le sera jamais !

Le sang du vieux soldat n'avait fait qu'un tour, quand de bon matin, il s'était rendu en ville pour acheter les ingrédients que la cuisinière aux formes généreuses lui avait demandés pour le repas de la Saint Noël, et qu'il avait appris la nouvelle. Le soleil pointait à peine ses premiers rayons, les rues n'étaient pas encore totalement encombrées par les étales sauvages de quelques marchants. Dans la lueur claire du matin, Harchi avait rencontré Firmin. Firmin, fournisseur de tissus les plus délicats pour la petite Roussotte, qu'était Mahelya. Et à ses heures perdues, la langue bien pendue, il devenait commère, propageant rumeurs et potins sur les habitants du Limousin. C'est ce vieux tisserand, de cinquante printemps, qui lui avait appris pour la Rousse et le Balafré, il les avait surpris un soir, en sortie de taverne échanger un chaste baiser... Étrangement le mot chaste était complétement passé à la trappe dans l'esprit du vieux soldat. Et tandis que la rage s'insinuait en lui, oubliant le pourquoi du comment il était venu sur la place du marché de Limoges, Le Vieil Homme au cœur usé, avait immédiatement rebroussé chemin pour demander des comptes à Mahelya. Après tout, même si elle ne le savait pas, elle était sa fille, sa chair et son sang. Foi de lui, il ne la laisserait pas fréquenter ce freluquet en qui il avait placé une confiance toute limité. Il avait bien senti depuis le début que ledit Nizam avait d'autre idées pour sa protégée. Pauvre Harchi, ne vois-tu pas que c'est ton cœur de père qui parle ?

Arrivé rue de la justice, les premières victimes de sa folie colérique furent les portes, claquées, malmenée, le vieux soldat faisait un raffut de tous les diables. Même Bertille n'osa pas l'approcher. Toujours très agité, il monta les marche en quête de la Filia Solis (**). Évidemment, comme il s'en doutait, il l'avait retrouvée, penchée sur quelques parchemins. Depuis quelques temps, elle avait prit l'habitude de travailler tôt. Il n'avait pas frappé, n'avait même pas demandé la permission de rentrée. Et le sourire radieux avec lequel elle l'accueillit s’évanouit instantanément de son visage aux tâches de rousseurs. * Comprends ma Filia, c'est pour toi que je fais cela. *
Les opales encré dans le visage buriné par le poids des années, se faisaient dures, fermes.


- Je vous l'interdis vous m'entendez ! Ce Nizam n'est pas pour vous ! J'en parlerai à votre Mère dès à présent !

Il le savait, il s'en était douté. C'était mal la connaître que de penser que la Petite Étincelle obtempèrerait facilement quand elle était passionnée, il était impensable de lui faire baisser les armes. Pour l'heure elle le toisait, regard froid, noir, toute petite flamme de joie disparue de ses prunelles habituellement émeraudes. Le cœur du vieux Valet faillit céder, elle souffrait, il le savait et il en était même l'instigateur. C'est l'instant précis que choisie la Folie, fidèle compagne du Soldat pour se manifester. * Pauvre bougre que tu es, elle s'en va le retrouver, il la consolera, la prendra dans ses bras ! Tu sais tout ce que toi qui est son père pourtant tu n'as jamais pu réaliser. Ensemble ils se moqueront de toi ! Te tournerons en ridicule. Ne t'avais-je pas dit de te méfier ? * A cette idée, sa détermination eut un regain.


- Il n'est pas pour vous ! Il ne vous mérite pas ! Il va abuser de vous et de votre douceur.

Cette fois il en avait dit trop. La petit Flamme devant lui n'avait que des onyx pour miroir de l’âme. Sans mot dire, elle ferma sèchement le livre qu'elle était en train d'étudier, et sans un regard pour lui, elle sortit du bureau. Le palpitant du vieil homme devint douloureux, mais toujours dans sa tête cette petite voix qui murmurait. * Tu la laisses partir ? Faible ! Lâche ! Crétin ! Voilà pourquoi elle n'en a que faire de toi ! Regarde là, victorieuse marcher vers celui qui la cueillera. * La gorge se serra et le ton se durcit à mesure qu'Harchi perdait pied avec la réalité, se laissant bercé par ses démons.

- MA-RIE- A-ME-LYA D'E-LI-CAHRE KIER-KE-GAARD ! Revenez ici tout de suite ! je n'ai pas fini de vous parler ! Je vous interdis de le fréquentez autrement que comme un garde ! Vous m'entendez ? Il n'est pas pour vous et ne le sera jamais !

Sa Silhouette frêle s'arrêta un temps sur le pallier. Il cru voir les lèvres purpurines lui murmurer quelques choses. Mais la colère s'était induite en lui, vicieuse et pernicieuse avait contaminée chacun de ses pensées.* Elle se moque de toi ! Vois le rictus qui étire ses lèvres ! * Il ne pouvait effacer les images de Nizam posant les mains sur la taille de sa protégée, Sa fille ! Oui sa fille à lui. * Minable, elle n'est plus à toi depuis longtemps ! * Harchi n'entendit pas ce qu'elle lui dit, constatant une fois de plus qu'elle se défilait de lui pour descendre au rez-de-chaussée. Elle allait le retrouver, il en était convaincu, il en était certain, il en était malade. L'amertume remonta dans sa gorge tandis que ses pensées devenait ténèbres.
Aveuglé par sa colère, il tenta d’attraper le coude de Mahelya pour la faire réagir, mais celle-ci presque engagée sur une marche s'esquiva...
Et là ...
C'est le drame...


_________________
(*) chanson de Bénabar
(**) fille du soleil en latin
Mahelya
    La journée avait pourtant si bien commencé ...

Tout était parfait, une fois de plus la petite Flamme avait dormi dans les bras de son balafré, se réveillant à l'aube pour retourner en secret dans sa chambre. Oh les voyeurs et curieux, rien de bien méchant, ils ne faisaient que dormir l'un près de l'autre en tout bien tout honneur. La Rousseur souhaitait plus que tout éviter la ceinture de chasteté. Donc pas de bêtises pour les tourtereaux. Agile, frêle et gracile, la Flammèche, alors que la nuit tardait à retirer son manteau sombre de Limoges, avait escaladé sa façade pour regagner la fenêtre de sa chambre qu'elle laissait entrouverte à l'espagnolette, ainsi personne n'était au courant de ses escapades nocturnes. Quelques instant plus tard, elle avait feinté de se lever vraiment, avait avalé un petit déjeuner rapide, avant de monter à l'étage et de s'enfermer dans son bureau un livre de médecine sous la main.
Tout était parfait.
Dans les rares instants où son esprit se faisait vagabond, les images de Nizam lui apparaissaient, et la Roussotte ne pouvait retenir le sourire ravie que cette vison faisait naitre sur ses lèvres purpurines.
Tout était parfait...
Ce fut lors d'un de ces rares instants qu'elle s'accordait à rêver au prince charmant qu'un vacarme ahurissant se faisait entendre au rez-de-chaussée. * Tiens Harchi venait de rentrer, et apparemment il n'avait pas trouvé ce qu'il cherchait. * C'est presque un sourire amusé qui fleurit sur les lèvres de la Pucelle. Ahhhhh Harchi, mon soldat, tu es tellement soupe-au-lait. Avant qu'elle ne réalise que le vacarme se rapprochait peu à peu d'elle. Soit ! Il venait donc se plaindre. * Gentille et Chaleureuse, tu vas voir mon Harchi je vais vite te faire oublier tes soucis.*

Comme elle s'y attendait, la petite porte de son bureau craqua, pourtant elle ne se départit pas de son sourire. Jusqu'à ce qu'elle entende les premiers mots prononcés par son valet, son Ombre. La joie laissa place à la colère, sourde, imposante, envahissante, vicieuse qui échauffe déjà les sens de la Flamme. Prend garde Harchi, une flamme en colère n'est jamais docile. Déjà l’Étincelle sentait toute chaleur fuir son petit être, seule la glace de la haine coulait dans ses veines. * De quoi te mêles-tu ? En quoi cela te regarde ? Et qui es-tu pour m'interdire ceci ou cela ? Harchi tu va trop loin ! Beaucoup trop loin ! Ne parles pas de Nizam comme ça ! …* Pourtant les lèvres de la Frêle restaient inlassablement scellée. Malgré la fureur qui l'entourait comme une aura, elle avait préféré garder le silence. Elle savait son vieux garde tourmenté, elle le voyait bien en détresse. Mais l'homme avait refusé de se livrer, elle s'était promis de le ménager ... un peu ...
Aussi poings serrés, elle tentait de maîtriser les paroles acerbes qu'à cet instant elle pourait lui balancer. Cependant … Comme possédé, Harchi cru bon d'en rajouter une couche. La Flammèche se mordit la langue pour ne pas répondre, le gout de fer se répendant dans sa gorge. Dun geste sec, sans quitter le visage marqué par le temps, elle referma le livre de médecine. Il était temps pour elle de tirer sa révérence à cette scène. Car elle pourrait bien lui sauter à la gorge.
Lentement, avec grâce, elle évita la silhouette massive du vieux Soldat pour regagner au plus vite le repaire de la cuisinière qui elle serait de son coté, l'Etincelle en était certaine. Un feulement sourd se faisait entendre dans sa gorge, et la petite Flamme se découvrait féline. Les marches étaient proches, sa libération aussi, pourtant elle ne put s'empêcher de faire volte-face aux dernières paroles maladroites Du Valet.


- Qui es-tu pour m'interdire quoi que ce soit Harchi ! Tu me parles comme si tu m'étais supérieur ! Tu es dans ma demeure ici je te prierai de montrer plus de respect à Nizam comme il essaie de le faire pour toi ! Que cela te plaise ou non !
Quant à ma Mère, elle est déjà au courant ! Et c'est sa bénédiction qu'elle m'a donné, je n'ai donc pas besoin de la tienne.


Sans ajouter un mot, elle s'engagea dans l'escalier. Mais la main d'Harchi qui tentait de la saisir la fit finalement basculer. La chausse glissa sur le bois ciré, la fine cheville se tordit la silhouette fut balayée et c'est la tête la première que la Rousseur dévala les escaliers. Se fut rapide, se fut douloureux, se fut terminé en un battement de cil. Durant la chute, l'une des marches s'étaient enfoncée dans la peau blanche au niveau de ses cotes, le front avait violemment heurté la rambarde, fendant un peu le cuir chevelu à la naissance des boucles rousses, et la cheville avait souffert de cette torsion non désirée pas un son ne franchit les lèvres purpurines pourtant, seule le bruissement d'un tissu agité trahissait la chute de la Rouquine. Sonnée, l’Étincelle était à présent assise par terre au milieu du hall d'entrée.
Pas de larmes, pas de cris, juste cette douleur effroyable à chaque respiration. Encore un peu dans les vapes, la flammèche entendit Harchi dévaler les escaliers.


- Filia ! Filia ! ça va ? je ... je ... je suis désolé !
- Ne ... me touche pas ...
Le ton était sec dur et sans discussion possible. Une porte claqua quelque part.
- Qu'est-ce qu'y c'est passé ici ? Mahelya ? ! ç'va ? Harchi qu'est-ce t'as fait ?
- je ... je ... Elle est tombée par ma...
- SILENCE ! je ne veux plus vous entendre. Bertille apporte le repas chez Nizam...


Toujours la tête baissée, l'Incandescente tenta de se relever, tant bien que mal. La douleur sur ses côtes du coté droit l'empêchait de se mouvoir correctement. Après plusieurs essais elle parvint à se hisser sur les deux jambes, refusant l'aide qu'ils proposaient. Un regard noir glaça surement le sang du Valet. Et sans mot dire la jeune fille quitta le seize rue de la justice pour se réfugier au quinze. Trois coup sur la porte en chêne. Et elle espérait ardemment qu'il lui réponde.

TOC TOC TOC
    La journée avait pourtant si bien commencé ...

_________________
Nizam
    Tout était parfait... Mais s'il y avait bien une chose qu'il avait appris, c'est que rien ne dure.
    Soirée et nuit en compagnie de la jolie Flamme, celle qui s'était peu à peu insinuée dans les pensées du blond, il respectait à la lettre les promesses implicites, et satisfaisait déjà l'envie de savoir la rousse proche de lui, et l'on ne peut imaginer le délice simplement donné en sentant contre le sien le corps aimé. Le blond baroudeur s'est épris d'une rousse étincelle et réussit à s'étonner devant ce choix, il s'était pourtant douté d'une attirance au début, d'un charme de la jeune fille dont lui, homme, était sensible. Le solitaire avait eu beau posé des distances, lorsque vous fréquentez une personne presque tous les jours de la semaine, ne pas s'y attacher devient un défi. Nizam chérissait et idéalisait sa liberté, celle qu'il vendait le temps d'un contrat, ainsi il supportait mal une contradiction entre volonté et sentiments, s'enticher revenait à être prisonnier... mais n'avait-il pas trouvé une cage dorée ici ? Lui, vagabond, bien que réfutant l'amour dans sa forme la plus mielleuse qui soit avait apprécié des nuits dans des bras inconnus, si, en marginal, il avait laissé de côté l'idée de couple, il n'en avait pas moins profité pour découvrir la chaleur dans des draps différents, le désir comme le plaisir charnel est à la portée de chacun, et cela lui suffisait, tout n'était que béguin éphémère, au mieux un embrasement soudain qui s'éteignait peu à peu comme il avait eu avec une brune voyageuse à Guéret et dont à l'époque il se serait passé des conséquences.
    Les habitudes furent donc bouleversées et délaissées au profit d'un sourire de rouquine. L'aimes-tu comme les autres Balafré ? Ou tu espères changer des années de débauche en quelques jours ? Semble-t-il y croire, en tout cas. Le fait qu'il recherche la présence de Mahelya et que toutes vaines réflexions le ramènent irrémédiablement à elle était déjà preuve que le garde tombait, coeur le premier, en amour, et aujourd'hui, c'était cela qui importait, ajouté à sa jalousie maladive.

    Ce matin, toujours dans sa somnolence Nizam avait émis un grognement contrarié, faussement exagéré, lorsque la Frêle s'était doucement retirée aux premiers rayons du soleil, leurs nuits avaient un goût d'interdit mais le blond n'aurait pas voulu y mettre un terme. Il s'était levé seul, le manque refaisait surface alors qu'il quittait le lit et s'habillait de vêtements propres, chemise blanche délacée et braies bordeaux, s'il trouve le courage il préparera un baquet d'eau et se lavera mais... Les premières minutes furent utilisées pour chasser la brume de son esprit, raviver les braises dans l'âtre et prévenir le jeûne en avalant des gâteaux qu'il avait récolté du seize.
    Il songeait d'ailleurs se présenter bientôt chez sa rousse voisine où Bertille avait dû servir le petit déjeuner, et non ce n'était nullement un prétexte pour voir sa patronne... Il entendit les trois coups donnés sur le bois, grommela tel l'homme sorti vivement de son sommeil et alla ouvrir. Loin, très loin de se douter de ce qui avait pu se produire à quelques mètres de lui, il accueillit la Flammèche devant sa porte avec un air agréablement surpris, toute trace d'assoupissement disparaissant subitement pour une allure enjouée.


    - Bonjour vous ! Besoin de prolonger ... votre nuit ...

    Si le ton était taquin au début, il s'effondre et devient rapidement incertain quand les azurs détaillent la jeune femme, l'habituel sourire empli de joie n'était pas là, à la place une main portée à ses côtes, et surtout, surtout, ce filet de sang au coin de son visage mêlé à ses boucles, une parcelle de peau enflée. Prémices d'une agitation chez le Balafré.

    - Vous êtes blessée ?! Mahelya, qu'est-ce que.. Comment vous.. ?

    Qu'est-ce qui s'est passé ?! J'aurai dû être là, elle est tombée, on l'a frappé ?! Elle saigne, bordel, fais la rentrer ! - Il s'avança vers elle, l'inquiétude augmentant dans son regard posé sur la blessure et main venant se glisser sur l'un des bras fins. - Dis-moi, rouquine, est-ce qu'on a osé lever la main sur toi ? Viens et réponds-moi je t'en prie... Car plus les secondes passent, plus j'ai besoin d'explication.
Mahelya
    Sur chaque visage on lit un désespoir Où même le chagrin ne pourrait faire brèche.

(de Malcolm Lowry Extrait de Pour l'amour de mourir)


Et la porte fut ouverte...

La journée avait pourtant si bien commencé...
Si seulement elle était revenue pour finir sa nuit auprès de lui ... Frôler sa peau, s'enivrer de son odeur, gouter ses lèvres, laisser ses doigts immaculés se perdre dans les mèches blondes, sentir l'emprise du bras masculin sur sa taille fine, sa main à lui effleurant le nuque délicate au teint de perle, le retenir quand il voudrait se lever, qu'il en fasse de même quand ce serait son tour à elle. Qu'entre sommeil et réveil, ils discutent de tout et de rien. Qu'elle se sente seule au monde à l'abri dans ses bras. Que plus rien ne compte... Tout était parfait...
La journée avait pourtant si bien commencé...

Les émeraudes que la Petite Flamme offrit à Nizam n'avaient plus aucune étincelle d'amusement, ni de joie. Le vert de ses prunelles devenait gouffre avec pour fond le néant. Si la Frêle s'était montrée forte devant Bertille et Harchi, Elle abandonnait le masque des illusions devant le Balafré. * Vois, je suis moi ! Je suis devant toi ! Aides-moi, je t'en prie. *. Doucement elle s’agrippa au bras qui avait saisit le sien, une aide bien salvatrice si elle devait faire ne serait-ce qu'un pas supplémentaire. Car sa cheville avait enflée et à travers la laine de son bas elle sentait son sang battre contre sa peau. Lentement, La Flammèche tenta d'avancer, mais le pied fragilisé en décida autrement. Une douleur fulgurante transperça sa chair, semblable à la pointe glaciale d'une aiguille ce qui lui fit perdre l'équilibre et lui arracha une plainte la poussant par conséquent un peu plus contre le Blondinet. Mal ?! était un doux euphémisme pour décrire ses impressions, mais quelle était la douleur qui la faisait la plus souffrir ? La Physique ou la Morale ?

Elle tenta de se redresser, là affalée contre lui. Mais la tête lui tournait, encore assaillit pas les brumes du choc au crâne. Alors, doucement elle leva ses prunelles sur celles du Balafré. Émeraudes contre Saphirs. * Dis moi vois-tu le vide qu'il y a en moi ? Vois tu que je suis désespérée ? Tu veux savoir ce qu'il s'est passé ? Je vais te le raconter *. Le vert si particulier mais si blafard maintenant, disparu un instant, tandis qu'elle essayait de prendre une grande inspiration. Cependant respirer, la faisait toujours autant souffrir, aussi respirer profondément lui arracha une plainte sourde en même temps que les traits de son minois aux tâches de rousseurs se crispaient esquissant à peine la souffrance qu'elle ressentait vraiment. L'emprise sur le Bras de Nizam se serra davantage * J'ai besoin de toi mon Balafré, soutiens-moi je crois que je vais tomber *. S'humectant les lèvres de la pointe de sa langue, elle ouvrit enfin les paupières. Sentant la panique envahir le Blondinet, elle devait lui parler, lui expliquer ... * Ce n'est pas ta faute, je suis tombée. *


- Une dispute ... Je me suis disputée avec Harchi ... Un geste maladroit et ... Je suis tombée dans les escaliers ...

La Frêle affaissa sa silhouette un peu plus contre le Blond, levant du sol la cheville tortionnaire. Avec une douleur de moins, peut-être arriverait-elle enfin à articuler quelques choses de compréhensible.


- Je ne ... n'avais pas envie d'écouter ce ... ce qu'il disait ... j'ai voulu partir ... il a tenté de me retenir ... au lieu de cela ... Je suis tombée.

* Il m'a bousculé, Involontairement certes mais c'est lui qui m'a fait chuter. *. Mais pour rien au monde la Flammèche n'aurait prononcé ces mots, impossible d'acculer complétement Harchi. Impossible de reporter la faute uniquement sur lui, même si elle ne pouvait refouler au plus profond de sa mémoire le regard qu'il avait eu un peu avant le drame : Un regard de possédé, de fou... La peur s'insinua lentement dans les veines de la Frêle et si Harchi l'avait fait exprès ? Il semblait tellement en colère, haineux ... Non jamais ... Impossible, pas son Ombre.
Une fois de plus les sinoples se scellèrent aux azurs. Les larmes de la jeune fille étaient contenues. Aucune perle d'eau salé n'avait glissé sur ses joues, elle ne se plaignait presque pas de la douleur qu'elle ressentait pourtant, La Rousseur n'en pouvait plus sentant la menace proche que ses jambes se dérobent sous son poids. Mais retourner au seize ? Non elle ne voulait pas revoir le vieil homme pas maintenant, pas tout de suite, pas temps qu'elle n'aurait pas mis des mots sur ce qu'il s'était passé.


- Je ... je peux rester avec ... vous ici ? Parler lui était encore difficile. J'ai ... tellement mal ... Niz ...* Aides-moi je t'en prie, la salle d'eau pour laver mes plaies ou un siège pour soulager ma cheville. Peu importe, mais soutiens moi, seule je n'irai pas très loin. *
_________________
Nizam
    L’Étincelle brisée se laissa aller dans ses bras. Les pensées du blond imaginaient mille et une situations responsables de l'état de la rouquine, la peur s'immisçant lentement, elle donna des battements de plus dans la poitrine et s'ajouta à l'inquiétude. Le Balafré, tu te dis impassible devant le sang et la douleur des autres, ce n'est pas le moment de paniquer lorsque la Frêle a besoin de toi. Nizam retint la jeune fille, un bras soutenant le sien, le second s'accrochant à sa taille et sa robe afin qu'elle évite désormais la chute. Et contre lui, elle souffre, il l'entend, le voit, le devine aisément, la faible Flamme vacille tandis que lui afferme son emprise. L'incompréhension fut enfin balayée par les quelques mots de Mahelya. Dans les escaliers ?! La maladresse n'était pas suffisante à ses yeux, du moins pas assez pour que l'on puisse l'accuser des blessures de la rousse. Harchi... Le garde la soutenait toujours, décryptant les paroles qu'elle lui soufflait. L'aversion que nourrissaient les deux hommes l'un envers l'autre s'en trouva d'autant plus ravivée chez l'ancien vagabond dès qu'il compris ce que Mahelya n'osait pas lui avouer. La dispute devait concerner le jeune couple, Nizam savait que le vieux valet s'opposerait, il voyait déjà la scène et ce qu'il avait pu lui dire. Fine crispation, une lueur de rage remplaça l'angoisse dans les azurs. Elle, l'importance c'est elle; son regard ancré au sien, il n'attendit pas qu'elle eut prononcé sa question pour la faire entrer, l'aidant au mieux à marcher. La porte est refermée du pied alors qu'il l'entraîne à l'intérieur. Nizam la mena jusqu'au siège le plus proche, en regard d'une cheminée aux braises endormies, et la fit s'asseoir.

    - Où ? Où vous avez mal Mahelya ? Délacez votre corset, ou je vous aide, mais que rien n'entrave votre respiration. Attendez..

    Le blond se releva et chercha hâtivement du regard ce qui pourrait les aider, il se rendit en quelques pas dans la salle de bain, petite et aucune chaise pour la rousse, mais la bassine d'eau fraîche attendant là sera bel et bien utilisée aujourd'hui, revenant avec, il prit au passage du linge propre et posa le tout à côté d'eux, qu'importe si des gouttes tombent sur le plancher. Un de ses poings se serra, il songea encore à Harchi, il l'avait poussée ? Il avait voulu la blesser ? Si le vieux tentait le terrain de la violence pour se faire entendre, il ignorait jusqu'où le Balafré pouvait aller en réprésaille. Concentre-toi ! Il y a l’Étincelle dont tu dois te soucier en premier. Il plia un morceau de tissu blanc et en humidifia le bout avant de le poser sur la plaie sanguinolente au visage de Mahelya, retirant les tâches rougies, première contusion, peau enflée. Il l'examina brièvement, trempa à nouveau la compresse de fortune puis la tendit à l'une des mains de la Frêle afin qu'elle la tienne contre l'ecchymose.

    - Gardez-la dessus.

    Nizam avait fait de multiples passages dans des dispensaires, chez les moines, ou des médecins, barbiers plus ou moins aguerris pour soigner de l'écorchure à l'entaille profonde, choisir de vivre par la lame lui avait donné à force une maigre expérience des soins. Il descendit son regard sur le corset ocre, au vue des réactions de la rousse, elle avait également dû être touchée au thorax, enfin les iris froides se posèrent sur les chausses, elle avait boité... Malgré les bas de laine, on distinguait l'enflement de l'une des chevilles.

    - Pardonnez mais..

    Il se baissa, croisant à nouveau les sinoples. *Tu restes avec moi, rouquine, je t'interdis de penser à autre chose... Laisse-moi t'aider*. Doucement il retira la chausse, puis le bas, faisant particulièrement attention à l'endroit de la possible foulure, Mahelya risquait de lui en vouloir, il réveillait le mal mais c'était nécessaire.

    - Vous avez envoyé quelqu'un chercher un médecin ? N'me dites pas que vous en avez pas besoin...
    Votre cheville, mettez là dans l'eau froide, au moins c'la vous soulagera.


    Heureusement, la bassine était suffisamment proche du siège.
    Nizam la regarda, malgré la nouvelle anxiété, des questions brûlaient ses lèvres, il avait un coupable désigné pour les coups qu'avait subis la Frêle et ne cédera pas à l'idée que le grisonnant devait assumer pleinement l'acte. Une pointe de colère refit surface alors qu'il marmonna à voix basse. *Parle-moi je t'en prie, dis-moi la vérité, vois qu'il ne mérite pas que tu le protèges, vois ce qu'il t'a fait...*


    - Ce n'est pas une histoire d'équilibre ... C'est lui, c'est à cause de lui ?
Mahelya
    Je préfère une vérité nuisible à une erreur utile : la vérité guérit le mal qu'elle a pu causer.

(de Johann Wolfgang von Goethe)

Et tu viens de poser la question de trop Le Balafré. La jeune fille tissu appuyé contre la bosse sanguinolente, essayait de délacer son corset de sa fine main libre. Et elle y était presque parvenue quand la question du Blondinet stoppa net tous ses gestes. *Pourquoi me demandes-tu cela Nizam ? Pourquoi cette interrogation, t'es-tu senti obligé de me la poser ?* Les dents blanches vinrent à mordre le charnu de sa lèvre inférieure. La question avait ravivé tout ce que la Rousseur avait tenté de mettre de coté depuis l'accident. Les sinoples qui étaient déjà vides de tout, devinrent vide de vie. Toutes émotions quittaient l’Étincelle tandis que ses pensées devenaient encombrantes, lourdes, insupportables, peintes d'horreur, teintées d'effroi. Harchi l'avait-il vraiment faite tomber ? Et si oui, l'avait-il fait intentionnellement ? Elle refusait de toutes ses forces d'y croire, après tout n'avait-il pas veillé sur elle toute sa petite vie ? N'avait-il pas tué quelqu'un pour elle ? Francis. Cette raclure qui avait tenté de s'emparer de sa virginité, qui avait blessé Sindanarie lui faisant perdre l'enfant qu'elle portait. Ne l'avait-il pas occis ? N'était-ce pas pour la protéger Elle, La Flammèche ? Alors si oui pourquoi aurait-il tenté de la faire chuter dans les escaliers ?

Le regard émeraude se perdait entre raison et folie. Car oui ce n'était que pure folie de croire que le geste du vieillard avait été délibéré. Mais, ne se souvenait-elle pas du regard de son Valet ? Ce regard si noir, si rageur, si colérique qui enflammait les yeux clairs et fatigués du vieux garde. Avait-il deviné qu'après leur dispute, la Rouquine aurait couru se réfugier dans les bras de son Balafré, écouter les paroles réconfortantes qu'il lui servirait ? Et si cette option lui avait fait perdre la raison ? Et si pour qu'elle l'écoute, et surtout pour l'empêcher de retourner auprès de Lui, il n'avait trouvé que ce moyen : la faire tomber dans les escaliers, au risque de la tuer ? * Non ! Je m'y refuse, Blondinet ! Je refuse de le croire, de le dire, d'y penser ! m'entends-tu ? L'admettre serait se faire écrouler mon univers, celui dont j'ai tant besoin pour avancer, pour respirer, pour être tout simplement moi ! Ne m'oblige pas à le dire ! Ne m'oblige pas à le dire ! * Pourtant, Nizam n'avait-il pas raison ?

Les larmes coulaient sur les joues aux tâches de rousseurs, non pas parce qu'elle avait mal, non pas parce qu'elle pleurait. Non L’Incandescente ne pleurait pas, sa frêle silhouette se vidait simplement de tout. Et ce vide abyssal qu'elle ressentait au plus profond de ses entrailles, s'évacuait de ses paupières à demi closes. A nouveau la danse des doigts fins reprit sur les cordes du corset, et bientôt le tissu, entrave à sa respiration, chut sur le sol du 15 rue de la Justice, lui permettant peu à peu de dévoiler sa féminité naissante mais aussi et surtout de retrouver un souffle régulier, mais encore perturbé par les battements irréguliers de son palpitant. Une boule s'était formée dans la gorge délicate, lui causant grand mal pour parler. Pourtant, Nizam avait posé des questions et elle se devait d'y répondre. La plus facile en premier.


- Il ... Il n'y a pas de médicastre à Limoges, je ... je me débrouillerai seule, avec votre aide.

La voix était plus grave, plus chevrotante qu'à son habitude. La suite à avouer, serait encore plus difficile. Aussi la Petite Flamme s'accorda quelques instants pour retrouver ses esprits pour manipuler la langue française, et donner son aveux sans pour autant incriminer vraiment le vieillard qui la suivait depuis le berceau. Pour se faire, elle plongea sa cheville comme le lui avait demandé le Balafré, dans l'eau froide. La réaction immédiate, fut une grimace, crispant les traits délicats de la Frêle. La douleur était bien plus vive que ce qu'elle pensait, que ce qu'elle ressentait jusque là. Et retrouver ses esprits n'était pas si aisé, le choc probablement l'embrouillant encore, quoiqu'elle en dise, elle était sonnée, et réfléchir lui demandait bien plus d'efforts qu'auparavant. Doucement, la pointe de la langue de Mahelya, humecta une fois de plus ses lèvres. L’Étincelle sentait les azurs du Blond posés sur elle, la scrutant, l'observant et la voix bien plus rocailleuse qu'à l'accoutumée, raisonna enfin dans le silence gênant.


- Il ... Il ne l'a pas fait exprès... Il était en colère... Il a appris pour nous... Ca ne lui plait pas du tout, il pense que vous profitez de moi et de ma gentillesse... Il m'a faite tomber... Mais je suis certai ... enfin je ne pense pas qu'il l'ait fait exprès... Il veut simplement me protéger non ?

Non ! Et tu le sais petite Flamme, sinon il ne t'aurait pas fait glisser. Il n'aurait pas risqué ta vie pour t'empêcher de rejoindre le Blondinet. Pense à ce qu'à fait ta Mère lorsque tu lui a parlé de Nizam, la première fois ...
Alors, doucement les sinoples se levèrent pour croiser les prunelles du Balafré. La Flammèche s'était perdue dans ses pensées, c'est une coquille vide qui scrutait le nouveau garde. Un mot, juste un mot pour raviver l’Étincelle, un mot ou un geste. Quelque chose, pour la faire revenir avec Lui. Car la Vérité admise dans l'Esprit de la Rouquine était bien trop dure, violente pour elle. * Ce que les mots n'ont pu admettre Balafré, le comportement de la Petite Flamme te l'avoue. Que vas-tu faire de cet aveux muet ?*

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Nizam
    Il retint un juron contre cette foutue ville que les médecins avaient semble t-il déserté. Seule, te soigner seule, tu as définitivement perdu la raison rouquine, regarde-toi ! Outre le mal physique, le jeune homme constatait peu à peu la blessure morale qui affectait la Frêle. S'il avait raison de penser au valet comme le coupable, il ne pouvait qu'entrevoir sur le visage de Mahelya l'incompréhension, la déception ? Ébranlée, elle ne faisait que confirmer l'idée de l'esprit emporté du garde, Nizam à la hauteur de la rousse retint de ses mains le pâle visage sur lequel les larmes salées ne cessaient de tomber. Il avait besoin de l'entendre dire, même s'il lui imposait inconsciemment une souffrance supplémentaire. Les azurs sondaient l’Étincelle tandis que se réveillait le mépris pour le vieil homme. Si le mercenaire avait eu l'habitude de prendre ses distances avec les sentiments avant de se laisser apprivoiser par la Rousseur, ce n'était pas seulement dû à une tendance à la misanthropie ni la peur de l'attachement, mais au fait que le comportement réfléchi du blond pouvait vite tourner au désastre lorsque derrière la carapace le coeur était touché. Ce fut le cas aujourd'hui. Il avait entendu son murmure, ces mots qu'elle avait eu tant de mal à prononcer. Ainsi, Harchi avait su pour ce qui avait été attisé entre sa protégée et le nouveau garde, il s'était cru au dessus de tout en le reprochant à Mahelya... Et tu ne crois toujours pas qu'il l'a fait exprès petite Flamme ? La voir dans cet état inquiétait et irritait déjà assez le Balafré, mais avec les détails ajoutés, ce qu'il ressentait pour Harchi dépassait maintenant aisément l'animosité habituelle. Il ne supportait pas d'être jugé, lui, elle, et si l'histoire dans laquelle il s'était embarqué n'avait pas lendemain, si l’Étincelle faisait sa plus grande erreur en lui attribuant sa confiance - et plus - qui avait droit légitime de s'y opposer ? Certainement pas ce vieux domestique.

    - Vous protéger ? Vous pousser dans cet escalier c'est vous protéger peut-être ?

    La voix était amère, peut-être plus rude qu'il ne l'aurait fallu avec la Flamme vacillante. Il regretta un instant la phrase, les iris d'un bleu de givre posées sur cette rousse que l'on avait suffisamment heurté. Il allait se reprendre lorsque trois coups brefs furent donnés à la porte, retenant difficilement un soupir, il adressa un regard interrogatif à la Frêle. Un médecin apparut par miracle; Harchi ? Ni l'un, ni l'autre. Il délaissa Mahelya pour ouvrir et fut surpris par Bertille, la cuisinière la mine préoccupée avait apporté comme demandé le repas sur un plateau de bois.

    - Bertille, mais vous fai..
    - B'jour Nizam, j'sais qu'elle est avec vous, Mahelya, m'a d'mandé d'vous apporter l'repas mais c'mment elle va ? J'peux la voir ? J'arrive pas à croire à c't'histoire...
    - Oui.. Entrez. Vous savez où est Harchi ?
    - A s'lamenter à l'étage, l'a pas voulu v'nir.


    Visage fermé, visiblement l'inquiétude ne rongeait pas uniquement le blond. Il invita à l'intérieur la femme, indiquant la table, et le fauteuil où était assise la jeune fille. Une lueur agitée dans ses yeux, le Balafré avait avec cette information une occasion de faire un tour au seize... Mais la rouquine méritait toute son attention, n'était-elle pas venu ici pour son aide ? Pourtant, savoir que l'homme responsable était encore tranquille à quelques mètres d'eux ne fit qu'accroître l'aigreur de ses pensées. Malgré un grincement de dents, il revint près de l’Étincelle, l'une de ses mains venant se poser sur les siennes, le garde tombait sur sa hargne mêlée à une nouvelle détermination.

    - Mahelya, je vais voir ça avec lui, j'ai hâte de l'entendre parler...

    *Je reviens petite Flamme, je reviens pour toi, mais j'ai une chose à régler* Une objection, une parole de plus aurait été inutile, il sortait du quinze alors que les battements dans son torse et ses tempes s'accentuaient. Il ouvrit bruyamment la porte voisine, l'impulsivité jouant l'avant-goût d'une violence jalouse et primaire qu'il était désormais incapable de dominer à mesure des marches montées. C'était là, là qu'Il avait osé ... Tu lui reproches l'acte, Balafré, mais tu ignores que tu es entrain d'être aveuglé comme lui. D'un geste brusque, il força la chambre du valet, Bertille n'avait pas menti, l'homme était assis à son lit, yeux embués et un livre à la reliure de cuir entre les mains. Nizam n'était jamais entré ici mais qu'importent les détails, les remords, le Balafré avec un rictus de colère s'avança vers Lui et asséna dans son élan un coup de poing rageur à la mâchoire dudit "protecteur". Profitant de cette tendre surprise, il le releva en le saisissant au col. Voyons avec l'âge ce que tu vaux, Harchi.

    - T'es d'venu fou vieillard !! T'as dû en crever d'savoir pour elle et moi, hein ?! Mais BORDEL t'es qui pour dire c'qu'elle doit faire ? T'es QUI pour la balancer dans ce p'tain d'escalier ?! T'aurais pu la tuer ! La TUER ! Et c'est d'moi qu'elle doit s'méfier, c'est ça ? Lève la main sur elle, j'jure que c'est ton crâne qu'on r'trouvera en bas d'ces marches..

    Voilà que la maîtrise venait de s'envoler avec les propos fulminés, ponctués d'arrogance, de reproche et de menace, sans en imaginer les conséquences.

    [HRP: Avec accord de JD Bertille]
Harchi
    Je suis le ténébreux, - le veuf, - l'inconsolé,
    Le prince d'Aquitaine à la tour abolie
    Ma seule étoile est morte, - et mon luth constellé
    Porte le soleil noir de la Mélancolie.

    Dans la nuit du tombeau, toi qui m'as consolé,
    Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,
    La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
    Et la treille où le pampre à la rose s'allie.

(Gérard de Nerval, El Desdichado)

Il la regarde partir, il hésite. Sa main burinée esquisse l'espace d'un instant un mouvement pour lui saisir le bras. Doit-il la retenir ? Non ! Le regard incendiaire qu'elle lui lance l'en empêche, la peur de consumer plus encore sa colère. La porte se referme alors doucement sur la silhouette de la Frêle. Et lorsque que le bruit sourd se fit entendre, le cœur s'effondra en miette. Qu'avait-il fait ? Lui-même ne savait plus s'il l'avait poussé exprès ou si c'était un accident. Les opales usées par le temps se posèrent alors sur la main coupable, celle qui s'était pourtant tant de fois hasardé sur ses boucles, celle qui l'avait cajolée, celle qui avait séché ses larmes, était-il possible qu'elle soit juge et bourreau à Présent ? Pouvait-il vraiment avoir commis ce geste impardonnable ? Harchi ne savait plus. Cependant au fin fond de ses entrailles, la voix nasillarde, folle maitresse de ses nuits et de ses pensées lui chantait doucement : * Ne regrettes pas ! C'était pour son bien ! Si seulement elle ne s'était pas relevée … Tu imagines là qu'elle s'abandonne dans les bras de l'autre ? Tu l'as protège et c'est lui qui en récolte … *
Mais déjà la voix d'une Bertille affolée, coupait court à toute nouvelles pensée.


- Harchi ! Harchi ! Mais c'est passé quoi là-haut ? Comment elle … Mais va la chercher !
- Non ! Bert' … je … je l'ai poussée … laisses-là et prépares lui son repas comme elle te l'a demandé.
- M'fin Harchi ! Va la cherché j'te dis dediou ! Elle a du s'faire mal !
- Suffit ! Contentes-toi d'faire ce qu'elle a dit.


*Tais-toi Pauvre folle ! Tais-toi … Ne vois-tu pas que je souffre assez comme ça ? Ne vois -tu pas qu'elle a fait un choix et que je ne suis pas celui-là ? Ne vois tu pas que je l'aime autant qu'elle me rend fou ? Non tu ne vois rien ! Ferme-la !* Les opales se durcissent alors qu'il adresse un dernier regard à l'intention de la Généreuse, avant de remonter dans sa tanière, son refuge, son temple, sa chambre, où seuls résident quelques vestiges de cette vie qu'il pensait oubliée à jamais. Là, sur le lit, le livre des Vertus dans les mains, Là ... Il médite, il réfléchit, il sombre alors... A mesure que les minutes s'égrainent le vieil homme est en proie aux doutes, oui mais ces doutes ne sont rien comparés à la tristesse qui enserre le cœur meurtri, il osé lui porter atteinte, il a osé lui faire du mal délibérément ... Elle, sa Flamme, sa Rouquine, sa Fille. Car oui, Mahelya était sa fille, sa Seule de chair et de sang, vestige d'un passé qu'il tente désespérément d'oublier alors qu'Elle est son avenir et son présent.
Le regarde se perd dans le néant, absorbé par le vide. Quel genre de père est-il vraiment ? Comment a-t'il pu faire cela ? Et sa Folie se tut un instant. Un instant seulement.

Le livre fut ouvert à la page où le vieux soldat gardait précieusement, une mèche de cheveux de sa défunte femme. Aussi Roux et Lumineux que ceux d'une petite Flamme de sa connaissance. * Sylvine ... ma douce Sylvine ... pourquoi ne m'as-tu jamais dis que c'était notre fille ? Ne t'ai-je pas assez parlé pendant toutes ses années ? Ne t'ai-je pas dis au début tout le mal que je désirai lui faire ? Et ne t'ai-je pas conté non plus la fierté que j’éprouvai à la voir grandir et s'épanouir ? Comment aurais-je pu savoir qu'elle était ma Fille ? * C'est l'instant que toujours choisit le cauchemar pour se remémorer aux bons souvenirs de sa victime. * Allons ! Tais-toi ! As-tu un seul regret ? Mais oui vieil homme tu n'en as qu'un c'est qu'elle se soit relevée. Tout aurait été tellement plus simple si elle était restée allongée ... *

-Suffit ...
*Si seulement elle n'avait pas ce fichu caractère aussi ! C'est de sa faute à elle, elle n'a qu'à t'écouter après tout.*
- Arrête ... tais-toi ... tais-toi ...

    Les pires souffrances sont celles de l'esprit.

(de Simone Piuze Extrait du Les cercles concentriques)

Doucement les larmes coulent sur ce visage marqué par le temps. Qu'a-t-il fait ? Qui est-il ? Peut-il seulement perdre le contrôle de lui-même au point d'en devenir dangereux pour les autres ?
Des pas se fond entendre dans les escaliers... Maudit escaliers ... Chaque fois qu'il les prendra il reverra dans sa mémoire la chute de son Etincelle. Lentement le livre à la reliure de cuir usée est refermé, le vieillard s'apprête à recevoir toutes les remontrances de la cuisinière. Pourtant la porte ne s'ouvre pas sur elle. Mais ... Sur le responsable de la situation. La vague de colère n'a pas le temps de chauffer complètement les entrailles du vieux reitre, que déjà la main du blond, poing serré, s'écrase contre sa mâchoire, lui faisant perdre l'équilibre. Dans la chute, le livre précieux vole à travers la pièce, pour atterrir un peu plus loin pages ouvertes, quelques mèches de roux éclatant s'esquivant des parchemins. * Je vais te tuer le Blond, pour son bien et pour le mien ! Tu ne lui feras que du mal ! * Le coup est rapide, surprenant, fort mais pas assez pour le mettre K.O. même s'il laisse un temps le vieux sonné, mais ce n'est pas aux vieux singes qu'on apprendra à faire la grimace, encore moins aux vieux soldats, le passage-à-tabac sans répliquer.


- Lâches-moi ou tu vas le regretter !

Siffle-t-il entre ses dents serrées. La voix est pleine de menaces, et déjà la main usée se referme pour former un poing parfait. * Si tu crois que je vais me laisser attraper par le colbac comme ça et te laisser tranquillou passer tes nerfs sur moi ! Rêve ! * Le poing est alors envoyé avec force pour se loger dans l'estomac de l'assaillant, laissant ainsi à Harchi la possibilité de s'écarter du Balafré. Le regard opalescent se pose alors sur l'homme tant détesté. L'animosité n'est plus dissimulée, plus besoin de masque à présent. Pour le vieux Valet c'est l'occasion rêvée, sa proie est venue à lui le chasseur. Déjà la silhouette du vieux se place correctement.

- C'est toi qui la tuera si tu continues à jouer avec elle.

Le regard se prolonge, il est à la fois accusateur, bourreau et Juge. Et déjà l'Esprit dérangé du Vieux Reitre imagine mille est une torture pour que disparaisse le rictus du visage de Nizam. * Dans deux secondes je t'éclate. *
Nizam
    Choque. Souffle. Douleur. Souffle ... Douleur.
    Col lâché, pas en arrière, le vieillard en déliquescence n'en était pas tant au vu du poing ferme qui se logea dans l'abdomen de Nizam. Il l'avait sous-estimé, mal usé de son attaque physique et cinglante. L'homme d'armes, l'échine courbée, avait porté sa propre main au ventre touché; comme il avait oublié ce que la brutalité engendrait, galvanisé par sa haine, spasme dans les entrailles, rage et rancune s'accentuaient, à l'image d'une spirale de fureur. Le regretter... Tous ses regrets en cet instant se résumaient à n'avoir pas pu écarter plus tôt Harchi de l'entourage de l'adolescente. Le Valet ne l'avait jamais apprécié, il le lui rendait avec joie. Le garde avait brusquement balayé les limites de leur animosité, que le vieux ne pense pas être seul à vouloir désormais en profiter ! Qui sera proie et chasseur ? La vision de la rousse sanguinolente avait réveillé bien trop de choses pour que l'Impulsif soit maître de tout, particulièrement de sa colère. Tendre colère... Il crache dessus lorsque l'esprit reprend ses droits, parfois elle le révulse. Parfois seulement, en raison de l'amertume qu'elle lui laisse en bouche. Pourtant il ne change pas, le mercenaire créé en l'agressivité pure l'exutoire de son ire, accompagné d'un goût d'euphorie malsaine qu'il ne contient plus. S'il est volcan, la violence est lave, ardente, brûlante, ô combien incontrôlable et destructrice.

    A la dernière phrase du grisonnant déjà se devinait le rictus mauvais du blond. Toi qui la tuera... S'entendit-il parler ? Fallait-il le pousser à son tour dans ces marches pour lui rappeler qui avait failli inviter la Mort dans cette maison ? Qui est responsable ? Coupable ? Nizam rejetait la faute entière sur le vieil homme, il ne jouait pas, comment le coeur pourrait mentir ? Car tu n'as jamais menti avec elle, n'est-ce pas ? ... Il était venu jouir des avantages et autres affaires pécuniaires que lui offrait la rousse nobliote, mais n'avait pas envisagé la conséquence indirecte de leur proximité, à savoir qu'un amour s'immisce dans leurs liens. Car tu l'aimes, n'est-ce pas ? ... Bien sûr que tu l'aimes Balafré. Tu as besoin d'aimer et qu'autrui flatte ton ego de ses sentiments. Tu t'attaches à elle, ignorant que dans moins d'un mois certains jugements sur ce couple singulier auront eu part de vérité.


    - Et la balancer dans cet escalier, c'est pas ton nouveau jeu ?

    Il se redresse, avant de diminuer de nouveau l'espace entre lui et le Valet. Délecte-toi de l'instant Harchi, imagine tes tortures, tes menaces, mais si tu crois en ton expérience, ne néglige pas la force bouillonnante de la jeunesse. Tu t'avachis, t'alanguis et t'ankyloses, penses-tu que l'opportunité ne sera pas assez belle pour lui ? Il n'a qu'un mot en tête... Frappe.
    Nizam agrippe l'épaule et la chemise, la pointe dessinée par le genou plié rencontre la jambe raide du domestique, ainsi que l'articulation rongée d'arthrose. Il enserre le Valet et l'emporte soudainement dans la pièce avec l'idée de briser son équilibre, que le vieillard tombe ! L'un comme l'autre se débat, jusqu'à ce que dans l'agitation le regard fulminant du Balafré se pose enfin sur les mèches répandues au sol. Rousses. Elle.
    On aurait pu considérer normal qu'un parent conserve tel souvenir de son enfant, n'avez-vous pas enfermé dans une vieille boite poussiéreuse quelques dents de lait ? Des cheveux coupés alors que vous étiez bambin ? Ici, le garde n'avait aucune idée quant à la relation exacte entre Mahelya et Harchi, ni ne savait que ces étincelles étendues appartenaient en réalité à la mère. De ce fait, et pris dans son irritation, la prime réaction du blond fut une énième vague de dégoût.


    - 'Tain, mais.. Vieux pervers ! Tu fais quoi avec ça ?! Tu fous quoi avec elle ?!

    Ne retirant pas sa prise des bras ou du torse de l'homme, il le tira à l'aide de son poids vers ces mèches de flamme traînant à leurs pieds, selon lui la démence sénile ne faisait que se confirmer.
Harchi
    La sagesse et la folie dorment dans le même berceau.

(de Marc Gendron Extrait du Opération New York)

Un grand sage devient alors le plus terrible des fous lorsque les deux s'enlacent. Et c'est bien ce vers quoi glissait la conscience du vieux Valet. Depuis l'arrivée du blond dans sa chambre, il était devenu aveugle, obsédé par la seule pensée de lui faire mal, vraiment mal et pourquoi pas le tuer aussi ? Ainsi se débarrasserait-il d'un problème que rencontrait sa Filia. La voix que prenait cette déraison ne cessait de lui murmurer à l'intérieur de son crâne, voix douce et séductrice, manipulation et vice, tout ce qu'il pourrait lui faire, pour voir disparaitre ce rictus affreux de son visage balafré. * Le sang ! Fais donc couler ce fluide qui lui permet encore de se jouer de toi. Répands le ! Laisses-le s'échapper de sa carcasse comme lui laisse Mahelya t'échapper ! N'est-ce pas ce sang là que tu voulais verser ? Le sien contre celui de ta Fille ? Tu le sais vieil homme, tu sais déjà comment se finira cette histoire et tu la connais que trop bien pour savoir ce qu'elle tentera. N'est-elle pas aussi folle que toi à sa manière ? C'est une histoire de famille. *

Les opales fatiguées scrutaient l'homme d'armes déséquilibré. * Tu m'as sous-estimé Gamin, tu ne t'y attendait pas à celui-là ! * Et l'ombre d'un sourire apparaissait déjà sur le visage buriné, cette peau hâlée sur laquelle, le temps avait laissé son emprunte. * Frappes encore qu'attends-tu ? Frappes plus fort, n'attends pas qu'il se relève, profites de sa faiblesse ! Pas d'état-d'âme, il jouit bien à sa guise de celle de Mahelya. * Trop tard ... L'hésitation, la délectation du spectacle avaient été de trop. Déjà Nizam se calme et le regard qu'il assène au Vieil Homme, a le don de le paralyser. Le Mal vit dans les yeux du Balafré comment n'a-t-elle pas pu le remarquer. Pourtant rapidement, le Reitre se ressaisit, redressant sa carrure et poings serrés. S'il est des choses qu'il a apprise dans sa vie c'est savoir anéantir le Mal, peu importe où il apparaissait. * Frappes-le jusqu'à ce que le souffle lui manque ! Assommes-le ! Étrangles-le ! Que tes coups s'abattent sans retenue aucune ! Qu'il souffre ! Qu'il pleure ! Qu'il regrette à tout jamais d'avoir osé venir ici. *

Le pas s'esquissait déjà mais la phrase prononcée par le blond eut raison de sa détermination. La fureur lui donnait la fièvre. L'odeur du sang se remémorait à lui avec violence, souvenir de duel, de corps à corps toujours conclus par l'écarlate qui se verse. C'est beau le Rouge, vous ne trouvez pas ? C'est grisant, hypnotisant... Le regard de possédé se troubla, tandis que la voix grave bredouillait :


- Je n'ai pas voulu lui faire du mal ... Je n'ai ... A moins que ... Non ! Je ne ... l'ai pas fait exprès ... Je ... Elle ne devait pas te rejoindre ... Qu'importe le moyen du moment que je l'éloigne de toi !

Tu parles trop Harchi. Voilà qu'il se trouvait à nouveau empoigné. Maudite Vieillesse qui le rend raide ! Le coup porté à sa jambe raide, lui laissa échapper un cri de souffrance. Douleur réelle, extrême, insupportable. Aussi le traitre, avait-il remarqué qu'il claudiquait parfois ? Avait-il vraiment tout préparé jusqu'à cette bagarre dans la demeure de sa fille ? * Bien sur qu'il a tout calculé ! Ne vois-tu pas que tu le gène dans son plan pour séduire Mahelya ? Comment peux-tu laisser faire ça ? * Devenu loque à cause de la torture que lui infligeait sa jambe, le Vieux Soldat, se laisse trainer malgré ses multiples tentative pour se défaire de la main geôlière. Le blond l’amène là ou il voulait. Les questions qu'il lui posa alors n'avaient aucun sens pour l'ancêtre, jusqu'à ce que son regard frénétique se stabilise enfin sur les boucles rousses qui s'échappaient de son livre.

- Sylvine ...


* Frappe ! Il va te la prendre elle aussi ! Tues-le ! Il te les prendra tout ! * Le corps âgé craqua en se penchant pour se saisir de son trésor, qu'il ne parvenait pourtant qu'à effleurer du bout des doigts, tandis que la voix plus menaçante que jamais raisonnait avec force dans la chambre du Vieux Soldat.

- Ne touche pas à ça ! Sinon je te jure qu'on retrouvera ta dépouille dans le fossé au petit matin tellement amochée qu'on ne saura dire si c'est toi ! Ils ne sont pas à Elle ! Ne pose pas tes sales pattes dessus, sinon je t'étripe !


Et la rage le prit tout entier. Poings fendant l'air sans vraiment savoir où ils finissaient leurs courses.
Nizam, incarné par Heaveen

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    La violence exalte les sens. L'excès enivre, vous donne impression de vie, dominante, effrénée; comme cela lui avait manqué ! La lueur dans les azurs ne reflétait pas même folie que l'ancien, mais la fièvre était similaire, qu'attendre de la part d'un garçon devenu homme dans l'univers de l'alcool débauchard et des armes ? L'âge et l'expérience contenaient parfois les assauts rageurs, il avait réprimé les troubles et l'emportement dû à de banales contrariétés depuis sa venue à la capitale, depuis qu'il connaissait la rouquine. celle-ci avait douce influence sur le tempérament du Balafré. Il jouait auparavant dans les extrêmes, de l'humeur badine et légère à l'aggressité injustifiée, il devenait aussi susceptible qu'odieux, c'était évidemment durant ces moments que les actes et les paroles brutals faisaient leur apparition. Harchi avait réveillé cette facette provocante et querelleuse du blond, mais ce dernier le remercierait presque de lui avoir donné l'occasion d'user ses poings.
    Le sourire satisfait s'élargit lorsqu'il constata que le coup donné à la jambe boiteuse avait eu l'effet escompté. Estropié par les années, tu n'as plus l'âge de te battre, vieux soldat, noies tes visions de gloire passée mêlée au rouge de tes ennemis, tu es comme du bois mité, du fer rouillé, tu es bon à rien sinon à creuser ton propre trou à l'ombre de l'église. L'entendre confirmer son envie d'écarter le mercenaire de sa protégée avait seulement encouragé Nizam à poursuivre son geste et traiter sans ménagement la carcasse du Valet. Il avait à peine perçu le prénom murmuré par le vieux, mais déjà la curiosité s'immisçait, s'ajoutant à l'agitation perpétuelle qui régnait dans son esprit. Fébrile, il fut cependant surpris par le regain du vieillard à mesure de ces mots, il en oublia d'affermir sa prise, pour le plus grand malheur de son arcade... Si l'un des poings fila dans l'air, le second s'arrêta nettement à l'os surplombant l'oeil droit. Après un cri étouffé dans sa gorge, le blond se recula, l'instinct le fit poser sa main sur la nouvelle blessure. Écarlate. Il avait la paume écarlate et une douleur lancinante à la tempe. Oh merci Harchi, il ne lui en fallait pas davantage pour que la frénésie déborde; durant un court laps de temps, le rictus déformant ses lèvres n'eut plus rien d'humain.


    - Tu m'étripes ?.. TU m'étripes ?!

    Inutile d'attendre, en réponse les phalanges resserrées et guidées par l'amertume s'abattirent au visage du boiteux, frappant furieusement la pommette saillante et l'arête du nez. Il le saisit par l'arrière du crâne, agrippant les cheveux grisonnants, et le bouscula afin de l'envoyer s'écraser en entier dans le mur le plus proche. Le sang perlait jusqu'à la joue tailladée, mais plus la colère enflait, plus la souffrance de l'autre était stimulante et nécessaire, qu'importe la sienne.
    Le Balafré se pencha et souilla du pourpre de ses doigts le roux traînant au sol. Il agita les étincelles en un ricanement cynique.


    - Pas à Elle, alors qu'est-ce que ça peut t'foutre ?! Tu caches quoi vieillard ? T'en pinces pour les rousses c'est ça ? Rah j'suis maladroit, un souffle, et tout s'barre. J'te vois bien l'ramasser ch'veu par ch'veu, au sol comme un chien ! Allez relève-toi bordel ! A qui ça appartient ?! Ça m'aidera p't'être à choisir c'que j'vais en faire.

    Il avait pu estimer l'importance de cette mèche après la vive réaction du domestique, si elle n'appartenait pas à la Frêle, il imaginait cependant que de précieux souvenirs devaient y être attachés. En somme, une faiblesse, une marque de sentiments qu'il serait bon de brusquer pour narguer le vieux fou, ignorant ses menaces. Avance, Harchi, frappe et tu peux dire adieu à ton trésor.



A la demande du joueur qui est dans l'impossibilité de poster lui-même, voici son post. Bonne lecture !
Harchi
La rage fulmine et transperce les opales du Vieil Homme. La folie, sa Folie le berce dans de Douces révélations, plaisantes à son oreille. * Abandonnes toi à moi Harchi ... Laisses-moi faire ... succombes à mes murmures et laisse moi agir ... de rien tu ne te souviendras mais à ton réveil le Balafré ne sera plus qu'un lointain souvenir et alors elle te reviendra. Ta fille... Lâche prise Harchi ... Tu m'as toujours fait patienter, n'est-ce pas le bon moment à présent ? * Mais le combat est bien trop enivrant pour céder totalement à la déraison. Plus tard ... Peut-être ... Le Vieux reitre veut encore se délecter de lui faire mal, car sa douleur lui permet d'oublier la sienne. Le Blond a un mouvement de recule. Les poings ont fait mouche et c'est presque un sourire de satisfaction qui s'étire sur le visage marqué par le temps quand il constate la paume maculée de sang. Fluide rouge aussi terrifiant que fascinant. C'est une mélodie à l'oreille de sa Folie. Elle jubile, l'instant lui est jouissif. * Encore ... encore ... de L'écarlate ... * Vois Balafré : faire couler le tien me sied davantage que de faire s'écouler celui de n'importe quel ennemis. Là dans cette Chambre, face à face un court instant. L'un comme l'autre ils sont devenus fous, exaltés par la violence et les coups. Et cela Le Vieux le devine, le réalise, le constate. Ils ont ce point commun... Terrible... Leur folie tuera l’Étincelle... d'une manière ou d'une autre, près d'eux elle ne sera plus jamais la même. La garde se baisse, le poing du jeune n'est pas anticipé et s'écrase sur l'arrête de son nez.

Choc ... Ça craque ... Le liquide tiède s'échappe de là aussi ... Du moins le devine-t-il.
Quelques points noirs dansent devant ses yeux. La tête lui tourne. La Folie gronde, plus démente que jamais, plus forte que jamais. L'odeur de fer l'attise aussi surement que l'air attise les flammes. * Relève-toi Imbécile ! Où laisses-moi faire !... Une fois que j'en aurai finit nul ne pourra dire qui il était. *
Pas le temps de se laisser aller, de se relever ou de s'en remettre qu'un nouveau coup est asséné. Le vieux valet finit sa course tête la première dans le mur. La carcasse lourde s'affale sur le sol et un instant le corps ne bouge plus. Le temps semble suspendu à peine pendant quelques seconde. L'homme âgé est dans les vapes et la Folie lui chante Ô combien elle aimerait distribuer la mort dans cette chambre. La voix décharnée murmure à l'Esprit torturé tout ce qu'elle aimerait infliger à ce jeune présomptueux. *Mais ce n'est pas encore ton heure compagne de mes jours et de mes nuits, instigatrice de mes cauchemars et créatrice de mes délires. Je dois préservé ce qui est tombé de mon livre. C'est tout ce dont il me reste d'Elle. Tu comprends ? *
L'air coincé dans les poumons est recraché dans une toux grasse. Sur le parquet quelques goutes rubis se mêlent à la salive. Le vieux est bien blessé. Mais Elles sont plus importantes. Douloureusement, il se relève et du coin de l’œil observe l'Etranger.

La colère agite toujours les entrailles du Soldat mais il est dans l'incapacité de l'exprimer. Le souffle lui manque, cependant il continue de se relever s'aidant des rares meubles encore debout qui l'entourent. Le regard se fait glace. * Regardes Mon Autre, comme il s'amuse de ses mèches ! Regardes comme il les souilles ! Je t'avais prévenu qu'il te la prendrait elle aussi. ! * Le pas, titubant s'esquisse dans la direction du Balafré.


- Lâches ça !

La voix ressemble plus un grondement.

- Ils sont à sa ma Défunte Femme ! ... Sa Mère ... - Ne t'avise pas de me juger. C'est tout ce qu'il me reste d'elle. Rends-moi ça ! Immédiatement !

Première nouvelle Harchi est marié ! Deuxième, il est veuf ! Troisième, sa défunte femme a exactement la même chevelure que Mahelya. Mais peut-être que pour percer le secret c'était le livre qu'il aurait fallu ramasser. Le vieil Homme esquisse un pas supplémentaire. * Dis-moi Balafré ... Dans ta folie es-tu capable de raisonner ? Es-tu capable de tourner tes pensées vers Mahelya ? *

- Toi qui dit l'aimer ... Que ferais-tu s'il ne te restait que cela d'Elle ?

Harchi ne peut retenir un rire cynique comme si la bête devant lui était capable de sentiment ... La silhouette douloureuse avance d'un pas supplémentaire. Attention Gamin à ce que tu répondras. Les Opales sont sans vie, démentes, une lueur étrange y brille au fond. Une étincelle macabre. La Folie a prit le dessus.
Nizam, incarné par Mahelya

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    « How much are you worth
    You can't come down to earth
    You're swelling up - you're unstoppable
    'Cause you've seen, seen
    Too much too young, young
    Soulless is everywhere »*



    Le Balafré le sait, dans ses gestes, sa façon d'être, il y a toujours eu l'Autre, l'Autre qui s'emporte, se réjouit lorsque de ses coups jaillit le rouge, trouve dans la souffrance de ceux gisant à ses pieds ce sentiment bestial et enivrant de puissance, décuplé quand on assouvie une vengeance. La douleur qu'il éprouve, elle, est étrangement vivifiante, le filet pourpre s'écoulant de l'arcade l'importe peu, les pulsations dans ses tempes rythment ses pensées tandis que son corps se laisse dévorer par une vague de chaleur et d'excitation comparable à celle que devait ressentir le vieillard. Peut-être ne sommes nous pas si différents Harchi... La maîtrise dans ses accès de colère s'envole, telle une barrière brisée, la conscience ne retient rien et entre en jeu l'émotion, sensation. La violence s'insinue, et l'on y prend goût tant elle nous attise, tant elle nous aveugle et donne l'illusion d'être invulnérable, supérieur à celui qui se crispe, se contorsionne devant nous. Tout est permis pour que l'adverse rampe, trempe dans le visqueux et le brûlant du sang. Ce que certains nomment folie le déshinibe, elle est rare, naissante à chaque obstable qu'il rencontre, acquise par des années sombres. L'homme d'armes s'en sert dans ses contrats, l'adrénaline déversée dans ses veines est alors des plus plaisantes, mais c'est lorsqu'elle surgit, incontrolable, involontaire, qu'elle le trahit, comme aujourd'hui.

    Nizam sourit, frôlant le sardonique rictus. Il avait enfin trouvé un chemin direct à la peine du vieillard esquinté, les supplices infligés prenaient une tournure très intéressante dès que le mental et les souvenirs se déchiraient. Il joue des mèches rousses, s'amuse de la soudaine réaction chez l'ancien. Il n'allait pas manquer l'occasion d'enfoncer un peu plus la lame dans la plaie du Valet. Il le toise, l'avise, méprisant les ordres qui lui sont lancés.


    - "Ta" femme ? 'S'est passé quoi, elle aussi t'as pas fait exprès d'la tuer en la balançant dans un escalier ? Ca m'étonnerait pas, vu comme tu chiales pour récupérer ça.

    Les azurs rivés sur le veuf guettent ses pas, s'étonnent de le voir revenir, insister après s'être écrasé contre le mur. Pourtant le regard vacille quand il parle d'Elle. Elle qui doit l'attendre, Elle qu'il a abandonnée blessée pour évacuer sa rage sur le vieux. Tu ne réponds pas Balafré, que ferais-tu ? Le sais-tu seulement ? Tu l'aimes, n'est-ce pas cette jalousie et le désir de protection qui a provoqué toute cette hargne à l'égard d'Harchi ? Ou profites-tu encore de la situation... Les images de l'Etincelle lui reviennent à l'esprit, voilà qu'une simple question l'aura troublé, l'extérieur heurte de plein fouet la fureur à laquelle il s'abandonnait. Elle a besoin de toi, tu ne crois pas ? Tu ne sais pas dans quel état elle est maintenant, mais tu préfères le rouer de coups, lui. La raison oubliée murmurait et l'ébranlait faiblement. Cela ne dura qu'un instant, assez pour qu'il reconnaisse à son tour la démence dans les opales. Une part de lui souffle qu'il ne souhaite pas devenir ainsi. Amer, il balaye les voix contradictoires envahissant son crâne.

    - Parce que passer sa vie à s'morfondre dessus est la meilleure des idées ?
    Doute encore de moi et j'te donne un autre aperçu d'ce mur ! Crois-le, j'ferai tout pour n'pas avoir à me poser cette question un jour.


    Ne pas envisager le "sans Elle", ne pas penser que tout pourrait s'arrêter. Naïf. S'il y avait bien une chose qu'il haïssait, c'était les lamentations, imaginer comment il serait sans la Rousse ne lui renvoyait aucune image agréable, par la blessure que cela engendrait, mais également par le déclin dans lequel il plongerait. Il est incapable de répondre, le réalisant, son mépris pour le Valet s'enflamme et empiète sur la colère. Quelques cheveux s'échappent de sa prise, il frotte le reste entre le pouce et l'index pour l'envoyer peu à peu rejoindre le parquet.

    - Oh, c'est bête regarde, il n'en reste presque plus... T'aimes ramper par terre j'espère ?
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    *Muse - New Born ; Trad boiteuse : "Peu importe ce que tu vaux, tu ne peux pas redescendre sur Terre, tu enfles, tu ne peux pas t'arrêter car tu as vu, trop vu, trop jeune, ce monde est sans coeur"


Posté avec l'accord du joueur de Nizam.
Harchi
La Folie, c'est lui à présent, le vieux reitre y a succombé, la mèche de cheveux fut de trop. Les opales restent sur le Balafré, froid, habité simplement par une lueur démente. Le Vieux Valet blessé n'est plus, se mouve à présent Elle, celle qui le réclamait depuis des années et qui chaque jour s'intensifiait doucement mais surement dans les veines du condamnés qui l'ignorait. Car Elle, elle n'avait aucun doute sur le fait qu'un jour elle le contrôlerait entièrement. Le pas est calme, l'allure est calme, une froidure apparente, mais il faut se méfier de l'eau qui dort. Harchi esquisse un pas en avant, vers l’Étranger qui souille son bien, la Mémoire de sa Femme. Mais pour l'instant il n'en a cure, il le dévisage, l'observe, le scrute car déjà dans son esprit possédé raisonne l'Appel du Sang. Une seule envie anime désormais le corps âgé, tuer l'objet de ses tourments. Ironique ! Des Tourments, le vieux en connait plus d'un. Cependant ce jour, ils se personnifient tous dans la carrure de Nizam. Et Elle n'aime que l’Écarlate se répandant. * Bientôt tu feras moins le malin Balafré, je n'ai pas peur d'ôter la vie à mains nues. A l'ancienne comme dirait l'autre. * Mais l'autre se tait, L'homme a baissé les bras au dépend de l'Aliénation. Retranché dans les tréfonds de son propre esprit il se contente d'observer Elle qui chantonne déjà ses envies. Un rire glacial raisonne dans la chambre de l'Ombre de Mahelya. Sans vie, sans joie. * Ahhh tu veux parler Blondinet, et bien causons, c'est simplement reculer pour mieux te torturer. * Le regard opalescent se confronte à l'azur mais le rire perdure encore un temps avant de baisser d'intensité, pour mourir enfin.

- Ce qui lui est arrivé ? Nouveau rire presque sadique. Mais on l'a assassiné ... Un nouveau sourire entaillé sur sa gorge comme si le sien ne suffisait pas. Ils l'ont sans doute regardé agoniser et moi je n'ai vu que son cadavre étendu dans la neige, une jolie auréole carmin pour accompagner son dernier soupire. La Folie s'en délecte, contrairement au Vieux elle aimait cette image. Une complainte sourde et muette raisonne dans l'Esprit torturé. L'homme pleure la Femme disparue. Une main burinée s'agite dans l'air. Elle essaie de le faire taire.- Alors dis-moi Balafré ... que ferais-tu si cela arrivait à ta protégée ?

C'est là qu'Elle, la nouvelle Maîtresse des Pensées, montre son visage au Balafré. Ne vois-tu pas Nizam que tu ne t'adresse plus à l'homme ? Ne sens-tu pas que la dernière phrase est une menace ? Car la Folie n'éprouve aucun sentiment, que ce soit pour Sylvine ou Mahelya, Elle ne s'anime qu'à la vue du sang, jouit du mal des autres, et si souffrances et tortures rallongent l'agonie alors Elle s'élève au firmament. Pourtant un nouveau gémissement de l'homme qui partage ce corps interrompt ses pensées funestes. Une fois encore la main se lève et les chasse sans ménagement. La jambe raide ne l'est plus tant que cela. L'aliénation ne ressent aucune souffrance physique. Et un nouveau pas s'esquisse en direction du nouveau garde tandis que le rire raisonne dans le silence de la chambre.

- Je trouve cette idée de se morfondre complétement ridicule je te l'accorde. Mais que veux-tu il se sent coupable. Ce que le vieux garde pour lui c'est qu'il est responsable de cet assassinat. L'appel des armes fut trop fort, mais ce fut la guerre de trop. L'imbécile a tout perdu, femme et enfants, brulés vifs dans leur propre maison pour les derniers ... Enfin presque tous ses enfants ... Le corps marqué par la vie dans de terribles craquements se penche vers le Blond. - Veux-tu connaître son secret ? Veux-tu savoir ce qui le tourmente depuis quelques mois et pourquoi il s'est enfin abandonné ?

Une terrible lueur de satisfaction brille au fond des opales voilées. Mais l'Homme s'oppose. *Tais-toi sombre Folle ! Tais-toi ! Il ne doit pas savoir.* Alors la Folie se fait rage et la voix raisonne plus fort.

- Mais fermes-là ! C'est moi qui commande à présent ! La silhouette massive tourne et retourne sur place. Constates-tu Balafré qu'ils sont plusieurs à occuper cet Esprit dérangé ? Le vois-tu ? Les opales glaciales, se posent une fois encore sur le visage à la cicatrice.

- Mais peut-être as-tu raison, et peut-être n'est-il pas nécessaire qu'il sache cela. Dors mon Soldat, dors et laisse moi m'occuper de lui

Le terrible sourire sadique s'esquisse une nouvelle fois sur le visage qui appartenait il a quelques minutes à un Vieux Valet. Pourtant l'éclat qu'il revêt confirme qu'il ne reste plus rien du vieil homme. Le temps semble s'être arrêté dans cette chambre au premier étage du seize rue de la Justice. L'observation s'étire et sans crier gare, la silhouette massive se lance sur le jeunot.
Et là c'est le drame. Car si la Folie est sourde et aveugle ce n'est pas le cas d'Harchi qui est scellé au fond de son propre corps. Et là où la Folie n'a pas vu Mahelya arriver, le vieux valet sent qu'elle est là désormais. La vois raisonne et déchire l'Esprit. * NOOOOOOOOOOOOOOONNN !!* Mais il est déjà trop tard. L’Étincelle qui n'est pas au fait de ce qu'il se passe dans cette chambre, se retrouve au milieu de son Valet et de son Amour. Et sa Fine silhouette subit l'assaut de plein fouet. Déjà ébranlée et affaiblit, la Frêle tombe sur le sol au pied de Nizam. Un peu sonnée. Et les Opales reprennent vie. L'homme renait pour constater les dégâts de sa Folie. Les yeux écarquillés de peur se posent d'abord sur sa fille avant de se lever doucement sur le Blond.


- Qu'est-ce qu'Elle a fait ...

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en noir gras italique les pensées de la Folie,
en bleu gras, la voix d'Harchi utilisée par lui ou la Folie quand elle le possède
en bleu italique, la voix d'Harchi dans la pensée de la Folie.
Nizam, incarné par Victoire_

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    Folie, douce folie... Si celle effleurant maintenant le Balafré s'apparentait à de l'impulsivité menant à l'excès et la violence, révélant la bestialité dormant en chaque homme, ce penchant primaire mais ô combien jouissif dans la domination de l'autre, dans ses gouttes de sang tombant de vos mains, de votre lame rutilante, la démence qui rongeait le Valet ne se contentait pas de frôlements, d'insidieusement lécher les plaies béantes de son esprit, tel le bout de langue titillant jour après jour l'aphte piquant votre lippe, plus vous y touchez, plus la blessure sera longue à guérir. Vous le savez, mais vous êtes incapable d'arrêter. Non la fièvre du vieil homme allait bien plus loin, le rire frénétique fut inutile, Nizam l'avait compris à son regard, à ses gestes dénués de douleurs, lui pourtant pantin désarticulé depuis sa brusque rencontre du mur. Des fêlés, des timbrés, le blond en avait vu, songeait en avoir fait le tour, de l'idiot du village à celui parlant à Aristote, passant par l'agréable cas des agressifs. Ainsi il ne retint qu'une chose concernant les plus sinistrement atteints : la mort pour seul remède. Radical. Efficace, certifié sans effets secondaires. *Laisse-moi être ce remède pour toi, vieillard.*
    L'insolent avait volontairement poussé sa curiosité et fut surpris des réponses données, ou davantage par la façon du vieux à en parler que par le contenu. Que sa femme soit morte le gosier à l'air, un, l'acte en lui-même était d'un banal affligeant - si j'vous jure, pour qui connaissant des coins sympathiques du royaume où l'égorgement était activité diurne et nocturne au détour d'une ruelle - j'exagère ? Deux, cela n'attirait aucune once de pitié du Balafré. Cependant, savoir pourquoi on l'a assassinée, et pourquoi Harchi gardait ce sourire malsain comme s'il... Comme s'il aimait cela, là, Nizam attendait des explications, mais il ne répliqua pas, pas encore. Le grincement de ses dents quand le domestique répéta sa question l'en empêcha.
    L'imagines-tu ? Elle git, meutrie dans le pourpre, tes sentiments oscillent entre le déni, la peine, la colère. Une impression, un poignard perce le brûlant de tes chairs.


    - La ferme, tu n'sais rien...

    Ça le dérange, ça l'énerve, tempes bouillonnantes il préfère se concentrer sur les froides opales, se rapprochant un peu trop à son goût. Le blond ne bouge pas, prêt à asséner une droite brutale aux rides faciales et crispées du Valet, le faire taire lui et son foutu rire d'aliéné. Le garde observe cette silhouette chancelante, craquelante. Les paroles l'intriguent. "Il", qui parle ? Harchi ? Un soudain regain d'ego ? Les sourcils se froncent à la suite des mots. Le Balafré a une partie de sa réponse, la raison de l'assassinat, les souffrances du veuf ... "Presque tous ses enfants" ? Comment ça "presque", les types n'avaient pas fini le travail ? ... Pourquoi chaque réponse donnée apportait son lot de questions ? La curiosité guidait désormais ses pensées jusqu'à ce que le grisonnant se penche.

    - Mais de quoi tu parles vieillard...

    Un secret ? Nizam avait surtout trouvé la conscience la plus torturée du comté, sans se douter qu'il fera le lien, cet épisode passé, entre ledit tourment d'Harchi, l'enfant - les enfants ? - sûrement en vie, les mèches maternelles d'un roux familier et le comportement des plus étranges du Valet envers une certaine Etincelle. Non, non, l'évidence était impossible.
    Le cri et la dernière phrase confirmèrent l'effrayante illusion. Harchi n'était plus, le corps était marionnette aux fils tirés par la Folie, alors comment croire tout ce qu'il disait ? Il se parlait à lui-même d'une inquiétante manière, les azurs le fixaient, sans une trace de peur, simplement déterminés à éliminer le sénile et sa démence. Ne crois pas être seul, vieux soldat, à ôter la vie mains nues sans remords. Les poings serrés, le mercenaire perçut les mouvements d'Harchi, anticipant brièvement le choc vif de leurs deux carcasses. Mais... mais une fragile flamme s'invita dans la scène, trop vite, trop tard. Le coup destiné au Balafré fut inévitable pour la Frêle s'interposant en toute ignorance du spectacle de fureur joué ici.


    - MAHELYA !!

    L'adolescente heurtée est jetée au sol, la raison frappe subitement les deux hommes. Le garde ne peut que tenter en vain de protéger la jeune fille avant d'être à genoux, près d'elle, pour relever le visage et le buste féminin suffisamment écorchés. Pourquoi es-tu venue...

    - Non.. Mahelya.. Mahe, regardez-moi, parlez-moi...

    N'est-ce pas ironique Balafré ? Tu refusais de répondre au fou, mais te voilà presque confronté à cette situation. Elle est blessée devant toi, pendant un bref instant la peur submerge tes pensées, le coeur n'est plus aveuglé par la rage mais par l'angoisse, ne voyais-tu pas ce qui importait ? Si tu ne l'avais pas laissée, rien de tout cela ne se serait produit. *Ferme-la... C'est à cause de lui, toujours lui.* Enfin le mépris refit surface dans les azurs le temps que ceux-ci croisent les opales.

    - Ce que TU as fait ! Tu n'as rien vu peut-être ?! Tu dis veiller sur elle, vois c'que TU lui fais !

    Pleinement accusateur tandis qu'il incitait l’Étincelle à prendre appui sur son bras, le ton sec laissa place à des murmures lorsque toute l'attention de Nizam fut pour la rousse. Il n'avait pas souhaité cela, bien sûr, ne voulait pas qu'elle les voit ainsi, mais l'état pitoyable du Valet et le sien, visages ensanglantés, devenaient secondaires. Réalisant avec difficulté qu'il avait part de responsabilité, il espérait entendre la voix de Mahelya, qu'il y ait un souffle, que les sinoples se posent sur lui pour chasser le sombre de ses idées.
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