Alida.
- 30 Décembre 1460.
Loches, Touraine.
Je suis arrivée à Loches hier au soir, alors que les portes de la ville allaient bientôt se refermer. J'ai cherché quelques temps une auberge où passer les prochaines nuits et m'y suis installée avec les maigres affaires que j'emporte avec moi depuis déjà un mois. Tout ce temps déjà écoulé m'apaise. Un mois me sépare de ma famille ainsi que de ma ville. J'en éprouve une certaine satisfaction, signe évident de la réussite de mon projet. Au moins, personne ne viendra me chercher maintenant. J'imagine ma mère cédant un premier temps à la folie, avant que la raison ne finisse par l'emporter. Après tout, c'était inévitable, dira-t-elle. Quant à mon père... Je pense qu'il a d'abord tenté de me retrouver pour faire plaisir à sa femme avant de tirer un trait sur mon existence, il n'attendait que cela depuis seize ans. Au fond, je lui ai rendu service. Il n'y a que ce vieil homme impotent envers qui il a du se morfondre en excuses, désolé de ne pas pouvoir lui offrir la main de sa fille comme convenu.
Je ne regrette pas mon choix, même si c'est celui de la fuite. J'en rêvais depuis tellement longtemps ! Enfin je peux parcourir les routes et voyager au gré de mes envies, rencontrer de nouvelles personnes, mais surtout, vivre comme je l'entends. Je me sens revivre même si la fatigue me gagne. Peut être qu'il me faudra rester à Loches plus longtemps que prévu, ce ne serait pas prudent de repartir affaiblie.
En attendant, je vais aller visiter un peu la ville, je n'en ai pas encore eu le temps. J'entends le clocher de l'église sonner, si je me dépêche, j'arriverai peut être pour le début de la messe sans trop me faire remarquer. Je pose donc la plume pour l'instant. J'espère que ce soir j'aurai matière à écrire encore quelques mots sur cette journée qui ne fait que commencer...