Della
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...que de navoir jamais tendu un arc.
Verner von Heidenstam
Ou la visite d'une Bourguignonne à l'Empereur parce que tel est leur bon plaisir.
Once upon a time...
Della and the Emperor are friends for a long time.
They often wrote and little by little...♥
Della had promised to come to Strasbourg when Flavien would be Emperor, leaving burgundy.
So...she's there !
The adventure begins !
Nobody knows the end...
Quitter la Bourgogne n'avait pas été difficile, cette fois. Cela avait plutôt été un soulagement doublé d'un plaisir impatient.
Si la situation en Bourgogne et en France l'inquiétait malgré tout, le bonheur de revoir Flavien avait balayé jusqu'à ses dernières réticences à tourner les talons.
Pour venir ici, elle avait écarté tous les obstacles et mis de côté toute sa mauvaise conscience, fait taire la petite voix des scrupules qui aurait tout le temps de se faire entendre à nouveau plus tard.
Della voulait profiter de ce séjour en Empire, en boire les délices jusqu'à plus soif.
Elle s'était sentie confortée dans son projet lorsque son suzerain, le Prince Charlemagne, avait proposé ce voyage jusqu'en Lorraine. N'était-ce pas un signe du destin que cette opportunité ? Et même, le fait que la duchesse l'ait écartée était devenu un heureux hasard. Bref, toutes ces circonstances s'étaient données la main pour le résultat que voilà : Della est en Empire, à Strasbourg !
Lorsque le carrosse frappé à ses armes avait passé les portes de Strasbourg, la Duchesse avait senti son coeur battre plus vite, plus fort...un peu comme lorsqu'elle avait quinze ans et qu'elle plongeait le doigt dans la crème qui surnageait le pot de lait pour le lécher sans se faire voir.
Oui, Strasbourg, c'était un peu comme la crème, pour Della. Il allait s'agir de goûter à ses plaisirs sans se faire attraper.
A ses suivantes, elle avait expliqué qu'elle rêvait de visiter cette belle et grande ville car, disait-elle, son ami Flavien lui avait écrit...Et là, elle ne manquait pas de sortir la lettre de l'Empereur : Strasbourg est toujours agitée, toujours pleine de courtisans, de froufrous, source des dernières tendances impériales...La ville me rappelle Paris, en plus sobre, sans doute...Puis, elle repliait soigneusement la missive après l'avoir relue une fois encore. Si l'on prenait la peine d'observer la Duchesse alors qu'elle lisait cette lettre, l'on voyait ses yeux pétiller et se dessiner un charmant sourire. Bien entendu, elle aurait nié que ses joues s'enflammaient et que ses doigts se faisaient caressants au moment de glisser le précieux plis dans son escarcelle.
Oui, Strasbourg...la crème...le péché était au tournant !
C'est dans un hôtel proche de la cathédrale, la Maison Borringer (*), que les Bourguignons descendirent et que tous furent logés, chacun selon son rang.
La maison semblait sérieuse et le premier repas pris conforta Della dans le bien fondé de son choix, la nourriture était délicieuse et le service parfait.
Lorsque le repas fut achevé, alors que tout le monde s'attendait à ce qu'on monte prendre un repos bien mérité, Della fit savoir qu'elle voulait aller marcher un peu, près de la cathédrale que l'Empereur décrivait comme un bijou.
Elle s'habilla chaudement de son manteau de létice et glissa ses mains dans le manchon de castor et...elle sortit.
Le vent était vif, elle enfonça son cou plus encore dans la fourrure, elle fit quelques pas et s'engagea sur la place. Là, elle leva la tête et l'on vit encore ce doux sourire orner ses lèvres, ses yeux scrutant les étoiles dévoilées sur le ciel dégagé. Ses pensées la transportèrent secrètement auprès de l'Empereur faisant naître un frisson qui lui parcourut l'échine. La sensation était délicieuse entre douceur de l'attente et piquant de l'impatience. Entre ses doigts, elle tenait la plume qui allait tracer les mots de la relation qu'elle allait entretenir avec Flavien et tout dépendait d'elle, à présent. Il était encore temps de repartir et de renoncer à la crème en reposant le pot bien gentiment sur l'étagère. De cela, elle en était clairement consciente. Combien d'années vivrait-elle alors dans le regret d'avoir tourné le dos, de ne pas savoir, de ne pas avoir goûté...?
Une étoile fila dans le ciel et la cathédrale sonna une heure bien avancée déjà.
La Duchesse rentra à l'hôtel où elle gagna sa chambre et s'installa pour la nuit avec sur ses genoux, un écritoire et son nécessaire d'écriture. Encore remplie d'une fougue absolument pas sage du tout, sachant qu'elle n'arriverait pas à s'endormir...
Citation:
- Flavien,
Bonjour.
A l'heure où j'écris cette lettre, je devrais plutôt dire "bonne nuit". Mais cela ne se fait pas de débuter une missive par ces mots. Et puis, vous me lirez seulement demain et donc, le "bonjour" sera de bon aloi.
Je suis à Strasbourg, depuis aujourd'hui. Plus précisément, dans un hôtel proche de la cathédrale. Vous aviez raison, la cathédrale est magnifique ! C'est une pure merveille architecturale dont il me tarde d'admirer toutes les uvres. Le Très Haut doit être sensible à ce travail des hommes, je ne manquerai pas non plus d'aller y prier. Sans doute d'ailleurs irai-je à la messe demain.
Je ne pense pas qu'il faille mettre sur la jeunesse de Charlemagne ses procédés. Il a hérité de son père un caractère déterminé, ce qu'il veut, il l'obtient. Il m'a quelque peu entretenue du sujet qui vous préoccupe tous les deux et je dois avouer que son raisonnement se tient. Cela dit, je me garderai bien d'intervenir même si la solution me semble assez évidente.
Tout ceci n'a rien à voir avec ma présence à Strasbourg, vous le savez. La seule raison, c'est vous et le désir que j'ai de vous revoir.
Il me serait bien agréable de savoir où mes pas devraient me conduire afin de croiser, par hasard, votre route...
En attendant que ce hasard prenne vie, je vous embrasse.
Tendrement vôtre.
Della.
Il fallut attendre le petit matin pour trouver un messager qui porterait la lettre de la Bourguignonne au Palais et la remettrait à l'Empereur.
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(*)NDLJ : faire de cette belle et illustre maison de Strasbourg, un hôtel au XVème siècle est une adaptation totalement libre de ma part.
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