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1460

[RP] Comme le hasard défait les choses.

Ayena
[Tour de Saint Rémèze, Viscomtat de Sant Remezy, Lengadoc. - Fin octobre 1460]


Énième retour de retraite. Finalement, les voyages sont plus fatigants qu'autre chose. Mais il le faut. On est Vicomtesse ou on ne l'est pas. Enfin, en l’occurrence, Ayena ne sait plus trop ce qu'elle est. Sinon sur la sellette. La Héraulderie semble ne pas vouloir reconnaitre qu'elle fut mariée sous contrat à Adrien Desage. Aussi, pour le moment, elle n'est plus Vicomtesse que dans ses souhaits. Or des souhaits, elle en fait pléthore chaque jours. Parmi eux, celui de rester en vie arrive numéro un. Ce n'est pas parce que l'on est une femme, enceinte, prête à accoucher que l'on va forcément mourir... N'est-ce pas ? Ha, et tous les regards autour d'elle ne la rassurent pas sur ce fait. Bande d'oiseaux de mauvais augure, tous ! Pourquoi le fait de ne plus pouvoir tenir debout sans aide d'une cane et d'une servante ferait-il pitié ? Mh ? Je vous le demande.
Soit. Elle est en mauvais état. D'accord. Vous avez raison. Mais ne faudrait-il pas au contraire lui insuffler de l'espoir ? Lui faire miroiter un avenir doux ? Exemptée de douleur et physiques et morales ? L'espoir fait vivre.Mais qu'il est compliqué à obtenir, le gredin.


- Amène moi de la bière. Et du lait.

La bière, pour elle. Le lait, pour le marmot, celui qui pousse chaque jour les frontières de ses entrailles plus loin, celui qui repousse les limites, juste par principes. Mais Ayena fait semblant de l'aimer déjà. Les gens attendent cela d'une mère : qu'elle aime ce qui met sa vie en sursit. Allez comprendre. Alors elle boit du lait. Parce qu'Adrien, le Hibou, buvait du lait. Et que mine de rien, ça ne lui réussissait pas si mal. Si l'on excepte le fait qu'il a finit broyé sous des rochers. On ne peut pas tous avoir une belle mort. Mais peut être que s'il avait pas bu de lait, sa mort aurait été pire. Allez savoir. le Très-Haut est un peu étrange parfois, dans ses idées.

- Et de l'encre.

La servante la regarde avec un air de pitié. Attention, ça commence à échauffer les sangs de notre poupette. Ils vont la rendre folle. C'est sur.

- Pas pour la boire fada ! Pour écrire !

Bon. La voix est faiblarde, trop rauque. Elle a perdu de son ton sucré et délicat, celui qu'Adrien, l'amour perdu a connu. Mais il n’est plus là. Elle ne fait plus d'efforts. Elle a arrêté de manger ses dix cuillères de miel le matin. Et puis, il n'avait qu'à pas la laisser. Lâche.




    A Aimelina de Siarr, ma douce et tendre filleule,
    A la Vescomtessa de Fenouillèdes, qui a déserté ses terres,

    De nous, Ayena de Talleyrand, Veusa Desage,
    Esseulée, seule et solitaire,

    Adissiatz.

    Je vous en veux. Vous restez muette, ma chère, à mes missives. Je sais qu'elles sont rares. Mais j'ai besoin de votre amitié et de votre amour. Folle que vous êtes d'avoir quitté le Lengadoc. Car en me laissant seule, aux mains des habitants du coin, vous avez laissé une veuve dont l'âme dérive. D'ailleurs, je n'ose faire appel à un confesseur. D'abord parce que je suis trop usée pour remuer ciel et terre pour en trouver un de confiance qui n'ira pas répéter mes péchés, mis aussi parce que je vois bien, lorsque je suis au couvent entourée de sœurs, que mon comportement dérange. Alors je me confie à vous. Vous savez entendre. Ou lire, puisque la distance nous oblige à ces subterfuges. Vous ne me jugerez pas. Vous avez vous-même trop vécu pour me reprocher mes écarts. Enfin, je l'espère. Mais si je devais attirer votre courroux, au moins suis-je assez loin pour ne pas craindre sa violence.
    Je pense souvent à la mort. D'abord pour tenter de me faire à l'idée. Car si vous avez survécu à la mise bas de votre bâtard, je crains que cela ne soit pas mon cas. Pensez donc : je me suis rendue avant hier à la cérémonie d'allégeance à Malkav. J'ai du tenir la couche deux jours ensuite tant cela m'a épuisée. Je marche avec une cane, soutenue par une bonne. Au moins, votre infirmité à vous ne vous a pas empêché de donner la vie. Mon bâtard à moi (grand dieu oui, ce sera un bâtard, l'héraulderie me fait encore des misères) doit passer par des endroits qui se déchirent rien que d'y penser. J'ai peur, ma chère. Je suis terrorisée. Mettre cet enfant au monde en sachant qu'il n'aura pas de père est déjà une horreur. Pensez alors que je ne serai plus capable de gérer le Vescomtat ou la Baronia ajoute à mon effroi. Tout cela risque de mal tourner. Et tout cela reviendra à Liloie, qui n’est pas non plus en bonne santé. Pensez donc qu'en plus d'avoir perdu son père Adrien, elle a perdu un enfant.
    La maison Desage va à son terme, je le crains. Et je n'ai plus la force de me battre.
    J'ai espéré longtemps qu'un noble des environs me prendrait en pitié et viendrait demander ma main. Mais ou passer après le Hibou leur fait peur, ou je suis trop éplorée pour eux. Tant pis, ils ont perdu une belle alliance. Car à ma mort, tout aurait pu revenir à celui qui aurait pris sous son aile le petit bâtard et les domaines. Et il est trop tard pour eux : étant donnée la tension de la peau de ma gésine, je ne vais pas tarder à ressentir les douleurs de l'enfantement.
    J'ai pensé à faire un testament, mais ...


A trop remuer d'idée morbides, le petit dans son jus finit sans doute par ressentir les ondes plus que nocives de tout cela. Il se rebelle et envoie un violent coup de tête de pattes ou de l'on-ne-sait-quoi dans les reins de sa génitrice.
Ayena serre les dents, laisse passer la vague, les yeux humides. Elle en veut à cette chose en elle. Elle aurait préféré garder Adrien et ne jamais avoir d'enfant. Cet échange de vie ne lui parait pas correct : personne ne lui à demandé, à elle, son avis. Or elle était la première concernée. Satané Très Haut.
Avec dépit, l'ébauche de lettre est pliée, incomplète, en suspens. Ha. Jamais elle n'enverra cela. Il suffit que ça soit intercepté et pouf, le peu de respect qu'on lui devait encore se muera en dédain, voire en haine. En dégout ? Pf. Qu'importe. Mourir seule. Et retrouver son Adrien. Voilà tout ce qui importe. Plus que quelques semaines à subir encore les douleurs de la vie ici bas pour avoir le droit d'accéder au Soleil.

Sur son lit, la jeune femme s'endort. Autour d'elle, sa chevelure épaisse et jadis brillante, est terne. A l'image de sa vie. Sans intérêt. Son souffle n'est pas paisible. Jamais. Depuis qu'elle est veuve, elle a perdu tout attrait. Pour les autres, mais pour elle, aussi.

Un serviteur entre. Il voit le pli. Il pense bien faire. Il s'en empare et... Le fait envoyer. Dieu sait où.

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- Bases par Truscot et DellaGrottaglia - Héraldique > Ayena est habillée par DECO
Enzo
    [ Oustau de Château-Thierry, Montpellier – début novembre. ]


Enzo allait enfin mieux. Doucement. La toux persistait tôt le matin, ou parfois la nuit, mais dans la journée cette dernière se dissipait. Les sueurs nocturnes avaient finalement décidé de lui laisser ses nuits et aidait le jeune homme à se rétablir. Il devait continuer à prendre ses traitements et son médecin semblait avoir décidé de lui faire suivre un certain régime alimentaire. Pour sa santé. Ainsi, même s’il pouvait de nouveau aller en taverne, prendre des marches et aller au marché, Enzo ne pouvait pas s’entrainer, et évitait le canasson. Sa respiration était encore quelque peu difficile et il s’essoufflait rapidement. Il s’ennuyait de nouveau. Et cette fois, pas de contes, de feu ou de gamin trop curieux pour se divertir. Les maquettes ? Ça aurait pu le faire si ses humeurs étaient plus stables. Là, il avait l’impression qu’un rien le contrariait. Il lui semblait que tout s’acharnait sur lui depuis sa rencontre avec Gabrielle. Sans compter de l’ancien amant de sa femme qui venait de débarquer et venait généré un trouble profond dans l’esprit du jeune noble. Apprendre à faire confiance à sa femme était plus difficile qu’il ne l’aurait cru. C’est donc dans un soupire qu’il s’était rendu à son bureau dans l’espoir de trouver une certaine paix, tout du moins de remettre de l’ordre dans ses pensées sombres.

Des lettres avaient été déposées sur son bureau. Enzo les prient dans ses mains regardant les écritures, et mettant de côté ceux qui lui venaient de Falmignoul. Une lettre d’un inconnu, une d’Arthur qui parlait des mines, sans doute envoyés à tout le Comté. Rien d’exceptionnel en soit. Il fouilla encore un peu et se décida à prendre une lettre à propos de sa seigneurie, sauf qu’une seconde lettre semblait s’être attaché à cette dernière. Surpris, le jeune noble décolla les deux lettres et jeta un œil au style d’écriture. Inconnu. Il fronça quelque peu les sourcils, hésitant à ouvrir cette dernière ou au contraire l’envoyer au feu comme il le faisait avec certaines. Sauf qu’il s’ennuyait, et cette lettre inconnue allait peut-être le sortir un peu de sa torpeur. Peut-être pourrait-il s’amuser. Ou pas. Un regard sur la lettre de nouveau avant de l’ouvrir. Après tout, elle avait atterrit chez lui, peut-être était-ce un signe. Celui qu’il attendait depuis sa maladie. Ce besoin de se retrouver dans la religion aristotélicienne. Il avait tellement l’impression que son couple, sa vie tenait à un fil si mince et si fragile que ça le bouleversait, et Enzo cherchait une explication, une rédemption de ses pêchés, une réponse aux malheurs qu’il traversait et à sa souffrance qu’il taisait. Angoisses, déprime, passion et déchirures. C’est tout ce que semblait être sa vie. Et pourtant il aimait Gabrielle, et il n’était pas malheureux avec elle. Les circonstances, toujours. On s’acharnait sur lui, et chaque jour cela devenait une évidence pour le jeune seigneur. C’est donc dans cet esprit mélangeant malaise et trouble qu’Enzo lut la lettre qui définitivement ne lui était pas du tout destiné. Elle n’était même pas terminée...

Devait-il répondre ? Devait-il soupirer et envoyer la lettre au feu ? Devait-il partager cette découverte avec sa femme ? Tenter de savoir qui était Ayena ? Elle semblait avoir les mêmes peurs de l’enfantement que Gabrielle, ce qui était venu troublé le jeune homme qui craignait d’y perdre sa femme. Situation étrange que de se retrouver devant une lettre d’une telle ampleur. S’il n’était pas marié l’idée de prendre cette inconnue sous son aile pour espérer hériter – si ce dernier était intéressant – aurait pu lui traverser l’esprit, sauf qu’il avait déjà l’anneau aux doigts et aimait sa femme. Même si certains ce demandait. Le jeune noble soupire et réfléchit. Est-ce son côté arriviste qui le pousse à prendre la plume ? À espérer que s’il l’aide, il pourra avoir quelque chose en retour ? Peut-être. Ou peut-être pas. Rien n’est réellement moins sur. Gabrielle n’a pas l’air d’être présente dans l’Oustau, il peut donc écrire tranquille sans être déranger et parsemer de questions qui risquerait de le rendre fort mal à l’aise. Pour l’instant, elle ne devait pas être au courant de cette lettre, et du fait que son mari décida d’y répondre...


Citation:
À vous, Ayena de Talleyrand, Veusa Desage,
De nous, Enzo, Senhor de Falmignoul


Addisiàtz.

    L’intérêt s’allume parfois par une lettre écrite par un correspondant inconnu. C’est un peu le cas avec vostre lettre que nous avons reçu. Lettre destinée à une certaine Aimelina de Siarr, vostre filleule selon ce que nous avons lu. Nous ne savons pas bien ce qui nous prends de répondre à cette lettre. Il va de soit, que contrairement à vostre filleule, nous ne sommes pas muet devant vostre lettre. Nous nous connaissons pas, et vostre nom, pour l’instant, ne nous dit rien, mais peu importe. Nous ne devrions peut-être pas vous écrire cela, ni même avoir lu la lettre. Vous allez sans doute paniquer, car nous avons lus des choses que sans doute vous ne voulez pas qui se sache. Peu nous importe. Et même si vous m’insultez dans la prochaine lettre – car nous avons la prétention que vous allez répondre – nous nous en foutons quelque peu. Après tout, ne cherchez-vous pas écoute en écrivant cette lettre. Vous devriez en être heureuse que nous prenions le temps de vous répondre, non ?

    Si vous voulez réellement mourir, je vous conseil la belladone, plantes très toxiques et si personne ne vous fait vomir, vous devriez réussir vostre coup. Ou peut-être ne voulez-vous pas réellement mourir ? Sachez seulement qu’il y a des risques que vous ne pouviez pas rejoindre vostre mari, s’il est parti rejoindre le Très-Haut. S’enlever la vie n’est pas toléré par nostre religion aristotélicienne, il nous semble bien. Vous dites que la hérauderie vous fait des problèmes ? En quoi ? Nous sommes curieux de comprendre, puisque cela semble vous préoccupez tellement que vous chercher mari, alors que vostre veuvage ne semble être terminé encore. Ça n’est point de nos affaires sans doute, vous allez me dire et c’est entièrement véridique, mais n’oubliez pas que nous prenons la peine de répondre à cette lettre qui nous ai arrivé par erreur.

    N’avez-vous pas une matrone pour vous sécuriser sur l’enfantement ? Ma propre femme semble effrayée à ce propos aussi, mais en tant qu’homme nous ne savons guère quoi faire. Nous ne savons même pas depuis combien de temps elle est enceinte. Elle nie et déteste cette présence dans son ventre. Enfin, ça n’a pas d’importance et surtout ce ne sont pas de vos affaires. Ce qui nous surprend c’est que vous parliez de bastard alors que vous semblez avoir été marié avec l’homme qui vous a mis enceinte ? Enfin, nous nous demandons aussi pourquoi vous n’avez jamais terminé cette lettre. Peut-être être vous déjà décédé. Ce que nous n’espérons pas, tout de même.

    Enfin, nous vous envoyons avec ce courrier un coursier beaucoup plus fiable que le précèdent ou peut-être fonctionné vous par pigeon ? Peu importe.

    Que le Très-haut vous garde, vous et vostre enfant,


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©JD Marin
Ayena
[Tour de Saint Rémèze, Viscomtat de Sant Remezy, Lengadoc. - Début novembre 1460]

A trop dormir, elle finira par s'épuiser. C'est étrange comme parfois les remèdes font pire que les maladies.
Ayena, allongée sur son lit, en cette fin d'après midi, est plongée dans un demi sommeil. Les yeux ouverts, elle regarde la bosse de son ventre qui apparait sous une chainse qu'elle n'a pas quittée depuis un moment. L'odeur s'en ressent. Aux frontières du rêve et de l'éveil, entre deux assoupissements, elle voit, distingue, devine ou imagine des mouvement sous le grossier tissu. Le petit Hibou bouge à l'intérieur de sa mère. Cette image d'horreur est à la source des bien des cauchemars chez la jeune femme : pensez donc ! Ne parle t-on pas de sorcellerie lorsque les gens sont habités par autre chose ? Alors, pourquoi tout le monde trouve t-il normal de voir les femmes héberger d'autres esprits en leurs seins ? Folie humaine que de se voiler la face : toute les femmes sont en proie à de petits démons. Il n'y a pas d'autres explications.
Hier, Ayena a réalisé qu'elle aurait pu trouver une solution pour faire partir ce monstre d'elle. Une chute. Malencontreuse. Mais il est trop tard. Il aurait fallu le faire plus tôt. Lorsque cela aurait encore pu faire revenir Adrien. Or à présent, enseveli sous sa pierre, il ne reviendra plus. Son épouse a trop tardé.

- Bouillon de lapin et petits pâtés en croute.

On lui amène sa nourriture au lit. N'est-ce pas le début de la fin ?

- Amène moi des fruits, aussi.

Oui, elle a faim. Autant profiter des douceurs de la vie terrestre pour le peu qui lui en reste. Et puis, depuis qu'elle est alitée, les nausée quotidiennes l'ont quittée. Ces nausées qui lui ont tenu compagnie pendant plus d'une demie année se sont évaporées. Ayena voit enfin la lumière au bout du tunnel. Par conséquent, elle se goinfre. Et joyeusement, encore. Elle qui a toujours été si modérée mange comme dix. Et le plus amusant, c'est que tout ce qu'elle ingurgite semble aller se loger directement au niveau du petit démon. Car la mère, elle, s’affaiblit de jours en jours quand le descendant gagne en énergie.

Avec la coupe de fruits surtout emplie de pomme, de poires, de noix et de quelques noisettes, la servante donne à sa maitresse une liasse de courriers.


- Donà, il faudrait peut être y jeter un oeil...

Vrai qu'Ayena n'a pas regardé son courrier depuis un moment. Aujourd’hui, elle se sent en forme. Il est temps d'accorder du temps aux affaires.

Le repas avalé, digéré grâce à une sieste et arrosé de beaucoup de vin parce que ça avait l'avantage d'endormir les douleurs dans les reins, la jeune femme attrapa le petit paquet de plis et commença à les ouvrir un par un sans pourtant tout lire : des courriers de bourgmestre, un d'Arthur pour les mines (et sans le moindre mot personnel, pitoyable), un de Kelak pour lui demander des nouvelles, un de Brangaine pour lui demander si elle reviendrait à la gestion des ports. La vie était cynique. Brangaine reçut réponse. Kelak, le pauvre, non. Mais, il comprendrait. Ou pas.
Et voilà. Personne qui ne s’inquiétât pour elle. Quelle triste destinée. Mourir isolée. Au moins, cela donnait une raison pour se morfondre sur son pauvre sort. Ce qu'Ayena s’apprêtait à faire en versant quelques larmes lorsque la servante entra à nouveau.


- Donà un coursier, vient d'ame...
- Rha, plus tard...
- Mais il dit que si réponse il y a, il peut la prendre en retour et que...
- De qui est-il ?
- Il n'a pas dit, mais...
- Donnez moi ça, qu'on en finisse.


Le scel d'un seigneur. Rien qu'Ayena ne connaisse. Que lui veut-on, encore ? L'inviter à une chasse à courre ? A des joutes ? Les nobles sont d'une sottise...
Agacée et n'aspirant qu'à une chose c'est à dire à se morfondre tranquillement, Ayena ouvrit la lettre pour la lire. La seule entête la fit rater une respiration : qu'on lui donne pour tout titre celui d'être la Veusa Deusage était...
Quoi ? Etrange ? Mauvais ? En tous les cas, elle remercia le Très Haut d'avoir fait qu'elle soit assise en sa paillasse pour lire cela. Elle en aurait perdu le peu de fonctionnalité de ses jambes en le cas contraire.

Écriture inconnue. Nom itou : connaissait-elle un Enzo ? Ou était Falmitruc ?

Le tout est parcouru rapidement. L'estomac serré, par la peur, la honte, un mélange des deux.


- Oh mon Dieu...

Oui, encore lui. Dieu. Décidément...
Fébrilement, le regard couleur mer agitée se lève vers l'écritoire. La lettre pour Lina. Emportée, Ayena se lève même et vacille jusqu'au lieu où elle a laissé la lettre pour sa filleule. Rien. Rien. Elle s'affale sous le regard de la servante qui n'ose trop rien dire : c’est qu'elle connait ce que donne les colère ayeniennes : pas du bon.


- Dona ... ?
- Despenha* !


La servante fuit : quand l'Artésienne parle en occitan, il ne vaut mieux pas être dans les parages.



A vous, Senhor Enzo de Falmignoul,
De nous, Ayena de Talleyrand, Veusa Deusage, Vescomtessa de Sant Remezy, Baronessa de Crussol, Dame d'Alquines.


Paf. Il fallait tenter de l'impressionner. Elle n'ets pas n'importe qui. Même si ces titres ne lui appartiennent plus réellement.



Adissiatz.

Ainsi ce qui ne vous était pas destiné vous est parvenu. Nous ne vous connaissons point et espérons pourtant que vous saurez garder discrétion quant à ce que vous avez lu. La missive n'aurait jamais du quitter la planche de mon écritoire et aurait finie grattée si nous ne savons quel domestique ne s'en était emparé.
Vous aviez raison, nous vous répondons. Non point tant pour cautionner votre comportement mais pour vous prier de rester sage et surtout à bruler ce pli si ce n'est déjà fait. Vous comprendrez pourquoi.

Sachez, à toutes fins d'informations, que jamais nous ne penserons au suicide.


Le mensonge était un bien piètre péché, non ? Il fallait sauver sa peau : elle ne savait pas à qui elle avait à faire.



Car en tout état de cause, nous sommes trop croyante pour nous y laisser aller. Si nous vous avons donné cette impression, c'est que nos mots étaient mal tournés. La mort viendra, si elle le veut, en choisissant son moment : sans doute celui de la mise bas.
Gardez vous à l'avenir, donc, d'étaler vos sordides connaissances en matière de simples.


Assurez ses arrières...



Nous allons profiter de cette lettre pour vous répondre. Ainsi vous saurez ce qu'il en est de nos petites histoires et ne pourrez laisser votre âme inventer ce qui n’est pas.

La Héraulderie semble ne pas vouloir reconnaitre le contrat de mariage qui m'unissait à feu mon époux. En conséquence de quoi il semblerait que l'héritage soit plus compliqué qu'au premier abord. Ce qui n’est pas sans peser sur la tête du petit que je porte, qui naitra sans père et peut être déshérité. Tel un bâtard. La vie n'est-elle point ironique ? On me prend mon mari, puis ma dignité et celle de mon enfant...

Quant à mon éventuel remariage, il n'aurait de toute façon pu se faire sans l'aval de la héraulderie qui semble prendre un malin plaisir à faire trainer les échéances. Mon époux est décédé il y a de cela six longs mois. Et si depuis j'ai prêté allégeance à la couronne languedocienne, ce n'est que pure fioriture. Dans la continuité des jolies danses que connaissent si bien les nobles...


Et voilà. Et elle commence à en dire trop. D'ailleurs elle a oublié le nounouiement... Ne pas s'épancher surtout. Garder en tête que c’est un inconnu. N'importe qui.



Pour votre femme, sachez que porter la vie est une terrible épreuve. Nous ne pouvons que vous encourager à rester près d'elle et à la soutenir. Même si cela implique de perdre quelque peu une dignité masculine. Mais l'intimité de l'alcôve permet sans doute de faire tomber les masques.
Pour nous, nous n'avons pas de matrone. Notre maisonnée est assez composée de femmes qui ont vécu cela. J'ai moi même déjà donné la vie déjà plusieurs fois.


Euh... donné la mort, plutôt. Mais, son destinataire n'aurait pas compris. Mettre au jour des morts nés ou des enfants qui ne survivent que le temps d'un soupir, on ne peut pas appeler ça la vie. Mais un homme ne pourrait pas comprendre. Non, il ne pourrait comprendre à quel point c'est un déchirement de voir des morceaux de soi mourir. Il ne pourrait comprendre qu'à la suite de cela on peut nourrir une haine incroyable envers les enfants, les mères, la maternité... Non. C’est un homme. Il ne peut comprendre.



Et toute l’expérience du monde ne peut rien face au destin. Vous comprendriez si vous me voyiez : je suis faible et ne survivrai sans doute pas à l'épreuve. Je me suis simplement faite à l'idée. Et comme cela n'est sans doute pas le cas de votre épouse, elle nourrit ce que l'on appelle de la peur. Rien de plus normal. Elle risque sa vie pour vous donner un héritier. Honorez la donc !

Enfin, le Très Haut décidera.

Nous terminerons en vous envoyant nos excuses pour cette missive égarée. Cela ne se reproduira plus. Les valets seront fouettés.

L'On vous garde.

A. d'A.


Tremblante, Ayena cacheta le tout d'un rouge colère. Cet homme semblait prétentieux. Il fallait espéré ne pas l'avoir fâché en se montrant plus forte et décidée qu'elle ne l'était.



* Dégage !
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- Bases par Truscot et DellaGrottaglia - Héraldique > Ayena est habillée par DECO
Enzo
    [ Oustau de Château-Thierry, Montpellier – début novembre. ]

Les humeurs enzesques allaient et venaient au gré du jour, de la journée, de ce qui se passait. Elles vaquaient à maltraiter leur hôte qui cherchait simplement à avoir une certaine paix intérieure. Impossible chez Enzo vu le nombres d’angoisses qui l’étouffaient chaque jours, mais il ne cherchait pas vraiment à se mettre d’autres soucis en plus. Christopher tournait de plus en plus autour de sa femme, et cherchait à le provoquer avec des allusions qui faisaient bouillir le sang Blackney, mais aussi le déprimait quelque peu. La crainte de perdre Gabrielle était plus forte que toute les excuses que l’on pouvait lui donner ou les explications à la situation. De plus, personne ne semblait comprendre son désarroi ce qui agaçait fortement le jeune Seigneur. Enzo était donc dans son bureau – encore – en train de tenter de détendre sa tête et ses humeurs en parcourant quelques lignes sur les stratégies militaires et les engins de sièges. Ça éviterait de taper un scandale dans l’Oustau et d’avoir une engueulade avec Gabrielle, ou de casser la gueule à l’angloys. Oui, définitivement c’était vraiment mieux de rester dans le bureau tranquillement. De plus, il avait quelques petites choses à faire en ce qui concernait les prochaines élections comtales, donc c’était mieux ainsi. Sauf que Nortimer était décidé à déranger son maitre et de cogner à la porte du bureau, ce qui fit ronchonner le jeune homme qui se leva pour aller à la rencontre de ce dernier.

- « Quoi ? »
- « Vostre courrier...»
- « C’était urgent ? »
- « Non Mon...»
- « Attends ! »


Et Enzo de retenir Nortimer qui s’en allait s’éclipser. Le sceau rouge. Ovale au lieu d’être rond. Le jeune homme prends la lettre et regarde l’écriture. Serait-ce sa correspondante inconnue ? Un léger sourire de venir s’installer sur le visage du jeune homme. Elle lui a réellement répondu ? Bien. Enzo prend le reste du courrier qu’il zieute rapidement pour classer les lettres par importance. Rien d’intéressant n’en soit. D’ailleurs, elles ne sont pas tous pour lui. Le jeune homme redonne donc le courrier à Nortimer mise à part la fameuse lettre avec le scel rouge.

- « Apporte-moi donc une bouteille de calvados... »
- « Oui, Sire. »
- « N’oublie pas de fermer derrière toi. »


Enzo pénètre de nouveau dans son bureau, la lettre à la main. Il attends que Nortimer lui apporte ce qu’il lui a demandé et de le voir fermé la porte avant de faire sauter la lettre et lire le contenue. Léger sourire qui apparait de nouveau. C’est bien elle. Il ne devrait pas sourire comme ça à cause de cette lettre, après tout il ne sourit presque plus ailleurs. Gabrielle n’a pas tord, mais Enzo ne veut pas le reconnaitre. Il ne veut pas reconnaitre qu’il va mal, car de toute manière autour de lui, tous le font culpabiliser. Il devrait s’occuper mieux de sa femme, il devrait l’écouter, ne pas la contrarier, il devrait lui faire plus confiance, être tendre, plus présent, être d’humeur plus stable. Il ne fait jamais rien qui soit correct, et ça l’agace aussi. C’est un peu comme lui dire que c’est ridicule d’angoissé parce qu’il doit retiré tout ses vêtements aux étuves ou qu’il est idiot de plier ses vêtements sales chaque soir avant d’aller dormir. Le jeune seigneur est un névrosé, et chaque parole peut avoir un effet néfaste sur ses humeurs. Ça rend infernale la vie de ceux qui l’entoure, mais c’est ainsi. De plus, son égocentrisme ne lui permet pas de bien voir qu’il oublie un trop Gabrielle et devrait effectivement être un peu plus présent. Enfin, c’était sa correspondante inconnue. Et pour le moment, ça l’avait fait sourire. Valait mieux le prendre que de laisser aller. Enzo prit une plume et se mit à répondre.

Citation:
À vous, Ayena de Talleyrand, Vescomtessa de Sant Remezy, Baronessa de Crussol, Dame d'Alquines.
De nous, Enzo, Senhor de Falmignoul


Addisiàtz.

    Ainsi vous nous avez répondu. Nous n’avons donc point eu tord, ce qui nous fait sourire quelque peu. Présomptueux nous sommes, mais au moins ça permet de ne jamais avoir tord, puisque ça provoque à coup sur. Toutefois, avant toute chose nous voulons vous parler de quelque chose qui nous chipote. Dans la dernière lettre vous avez simplement écrit « veusage deusage » dans l’entête, et cette fois-ci vous étaler vos titres ou ceux de vostre défunt mari comme on étale une avec exagération de la confiture sur un bout de pain. Tentez-vous de m’impressionner parce que nous sommes « qu’un » petit seigneur ? Si c’est le cas, nous vous disons tout suite que ça ne nous impressionne pas du tout. Vous n’êtes après tout qu’une veuve qui hérite – ou n’héritera pas dans vostre cas – les titres de son époux, n’est-ce pas ? Nous ne cautionnerons pas ce petit manège qui nous parait fort ridicule, puisque d’une part nous pouvons comprendre et d’une autre nous savons ce que c’est la perte. Autant celle d’un proche que de l’héritage, mais ça n’a guère d’importance, vous en conviendrez.

    Nous nous garderons toutefois d’aller étaler ce que nous avons lu, soyez en certaine. Nous sommes prétentieux, et certain dise que je suis l’homme le plus pédant du Languedoc, mais la traitrise ne fait pas partie de mes nombreuses qualités. Quoique, cela peut dépendre, mais dans le cas qui vous intéresse, c’est-à-dire la divulgation des renseignements, soyez en certaine que ça ne pas étalé en place publique. Mise à part si vous me traité comme un vaurien, ou autre chose de ce genre et m’insulter en publique. Nous pourrions alors nous venger. Mais peu importe. Ainsi le suicide n’est pas une option ? Vous nous en voyez ravi. C’est que vous avez tout de même écrit «Je pense souvent à la mort. » et que malgré même si vous y penser parce que vous croyez que vostre mise à bas va mal se penser, vous vous conforter dans cette idée de mort. Tout du moins, c’est ce qui laissait paraitre.

    Nous sommes croyant aussi, et pourtant nous savons que parfois l’idée est tentante. Ça n’enlève rien au fait de croire ou non, Vescomtessa, mais comme pour tout, ça n’a pas d’importance non plus. Pour le reste, nous dirons bien ce qui nous plait d’écrire dans cette missive. Après tout, vous n’êtes qu’une inconnue pour moi, et vice versa. Quoique maintenant vous savez mon prénom. Il serait aisé de me retrouver, tout comme il serait sans doute aisé pour nous de vous retrouver aussi. Trêve de bavardage, vous dites que la hérauderie ne reconnait pas le contrat de mariage ? Ça nous parait étrange. Vostre enfant trouvera bien un moyen de récupérer ce qu’il lui revient de droit un jour, non ? Après les affaires d’Hérauderie sont toujours longues. Personne n’est présent pour vous à ce propos ? Nous n’avons pas encore de problème avec eux, mais ça va venir, sans doute, avec la complexité de nos relations familiales.

    Faites tout de même attention à ce que vous dites. Nous sommes noble aussi et si nous sommes que seigneur pour l’instant, nous étions un jeune homme très en vue des Royaumes, avant. De plus, nous comptons devenir Comte du Languedoc un jour. En ce qui concerne nostre femme, nous ne voyons pas bien ce que nous pouvons faire et nous ne comprenons pas ce qui semble être difficile. Ça n’est pas bien de donner la vie ? Nous comprenons le risque que cela est, d’ailleurs, honnêtement, nous craignons aussi de la perdre, mais ça ne peut que bien se passer, n’est-ce pas ? Si vous avez des gens pour vous accoucher, au moins vous ne seriez pas seule. Nous ne sommes pas très empathique, mais donner la vie seule doit tout de même être quelque chose d’assez effrayant. Et puis, ça n’est pas des choses d’homme la grossesse et l’accouchement. Nous ne comprenons pas bien les gens qui demande de nous « investir » dans cette « aventure » de devenir parent.

    D’ailleurs, nous sommes un peu jeune pour être futur parent. Un peu. Nous n’avons même pas encore l’âge d’être considéré comme un « vrai » homme. Nous sommes majeurs, mais nous n’avons pas passé la vingtaine, l’âge où on termine normalement nostre formation militaire et si nous étions escuyer, pouvons potentiellement devenir chevalier. Ça n’est pas nostre cas ceci dit. Nous avons vu nostre propre mère grosse qu’une seule fois, mais elle a donné naissance à nostre sœur loin de nos yeux d’enfants, à Paris. Nous savons absolument rien dans ce domaine, et comme nous l’avons dit, ça n’est pas de nostre ressources, ça n’est pas pour rien que les hommes doivent débarrassé le plancher lors du moment fastidieux, n’est-ce pas ? Il est si difficile de porter la vie et de la donner ?

    Enfin, la lettre devient longue. Elle va sans doute vous embêter, et peut-être même que vous n’attendiez pas réponse. Toutefois, répondez-nous donc. Nostre correspondances « secrêtes » nous intrigue. Vous devriez sauter sur l’occasion que nous nous intéressons à quelqu’un d’autre que nous même. Toutefois, n’essayez pas de cacher vos faiblesses. Vostre courrier est rempli de contradictions. Vous vous montrer forte, mais vous vous dites aussi faible et vous ne combattez pas devant ce qui vous semble évident : La mort. Bref, peu importe. Nous avons des choses à faire et devons terminer ici ce courrier qui nous semble bien ennuyeux, mais ça n’est pas nous qui allons le lire, donc ça n’a aucune importance. Ne vous vous excusez pas pour l’erreur de missive, nous nous amusons follement de cette dernière.

    Que le Très-haut vous garde Vescomtessa,


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