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[RP] Domaine des Billanges

Eloin
Eloin écouta attentivement le récit du sieur Bosk. D'abord car c'était son devoir et la raison de sa venue, ensuite car elle était inquiète de savoir ce qui pouvait séparer un couple qui paraissait solide et indestructible.

Il ne luy cacha rien du trouble qui l'habitait et qui le poussait à faire un choix déchirant : puisqu'il ne pouvait avoir deux femmes qu'il aimait en mesme temps, il s'éloignerait des deux. Mais n'était-ce point choisir la solution de facilité que de fuir par-delà le monde connu, au péril de son existence ?

Un moment de silence suivit les aveux du vicomte, tant la réflexion de l'abbesse était intense. Il avait posé des questions à haute voix aussi bien pour elle que pour luy, elle s'en doutait, mais elle pouvait peut-estre tenter une réponse basée sur les écrits des prophètes. L'amour avait été traité par Aristote et Christos tout à la foys, mais il était ardu de sortir des réponses toutes faites !


Je conçois que vous soyez déchiré entre deux femmes que vous aimez, et qui vous aiment, mesme si cela n'est guère recommandable...

Je serais tentée de vous dire que, si le destin ne vous a point laissé vivre avec Héloise durant vostre jeunesse, c'est qu'il y avait certainement une raison. Laquelle, je l'ignore. Mais vous avez au moins la chance de l'avoir revue, de savoir ce qu'elle est devenue, mesme s'il est dommage que cela ait réveillé vos vieux émois !

Je ne suys point grande théologienne, je ne pourrais donc guère vous répondre sur le fait qu'il existe des amours autorisées ou non, mais je puys vous dire une chose : si vous n'avez pu vivre avec Héloise lors de vostre jeunesse, c'était peut-estre mieux ainsi. Je veux dire, un amour de jeunesse n'est parfoys point assez fort pour surmonter tous les aléas de la vie.

En tous cas, une chose est sure : cette femme est mariée, vous également, pourquoi vouloir détruire vostre couple si, de son côté, elle n'a point dit vouloir faire de mesme ? Et mesme si vous deviez revivre quelque chose ensemble, je ne suys point sure que cela vous serait profitable... Vous avez tous deux changé, durant ces années loin l'un de l'autre, vécu des choses différentes, connu des personnes différentes... Parviendriez-vous à vivre de nouveau ensemble ?

Enfin, je clos là ma réflexion, puisque vous m'avez dit ne point vouloir vous forcer à choisir, mais je suys fort navrée de ce qui vous arrive...


Elle se tut un moment, tant pour se désaltérer que pour luy laisser le loisir de répondre.
Plus tard, elle se permit d'aborder un tout autre sujet.


Vous parlez de voyager... Je crois savoir que vous estes un assez bon marin ? Ma filleule, duchesse en Alençon entre autres terres, souhaite créer sa propre compagnie et partir en quête de nouvelles découvertes. Si cela vous tente de rejoindre semblable équipage, je pourrais vous mettre en contact...

Elle avait promis à Elianor de recruter en Limousin si elle le pouvait, autant profiter de l'occasion...
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Evêque de Limoges, Grand-Prieur de l'ordre cistercien.
Héraldique
Boskdeportkar
J'avais écouté attentivement Eloin, car sa sagesse, son savoir ne pouvait etre que bénéfique.

Effectivement, j'ai ressenti comme un soulagement de savoir qu'Héloïse était toujours vivante, et de la savoir heureuse avec un homme qui tient à elle, ne m'a pas rendu jaloux. Le fait d'avoir une fille, Louise, avec Héloïse amenuise mes regrets. S'il ne doit plus rien se passer entre Héloïse et moi, ce qui est le plus probable, nous aurons eu la satisfaction d'avoir engrendré une belle enfant de ce si jeune amour.
Je n'attends rien d'Héloïse, comme elle non plus. Pas de promesses, pas de folles illusions. Elle sait que la vie m'a changé, que je ne suis plus le jeune homme qu'elle a connu, que chacun a connu son lot de misères qui nous a endurcis.

Je ne souhaite pas dissoudre mon mariage pour Héloïse. Beaucoup de gens vont le penser, ils auront tort, mais qu'importe.
Je me dois de le faire, car je suis devenu encombrant pour Sofja. Ma nature "sauvage", renfermée, m'avait deja fait douter bien avant mon mariage, que je serais un bon parti pour ma femme. Elle si joyeuse, si enjouée, si vive, si avide de rencontres, la voilà mariée à un homme qui fuit de plus en plus la société, les mondanités. Sofja a besoin d'espaces, de projets, avec de nobles ambitions, et moi, je ne fais que la négliger, comme j'ai négligé sa famille, sa soeur et son frere.
Mon âme s'assombrit, et vient le temps de l'isolement.
Sofja ne réagit pas, ne me retient pas non plus.
Elle me facilite la tâche en quelque sorte, à penser finalement que j'ai raison de la laisser prendre son envol.
Mais ne lui dites surtout pas tout ce que je viens de vous reveler.
Elle ne pourrait comprendre que je l'aime encore.
Elle ne pourrait comprendre que je fais cela pour qu'elle retrouve le gout du bonheur, pour que notre fils ait une mère qui sourit à nouveau, même dans les bras d'un autre homme.

Tout doit etre de ma faute, je le repete, de ma responsabilité. Rien ne doit entâcher Sofja. Elle est une simple victime dans cette histoire. Et il ne saurait en etre autrement.
Alors coté procédure, et bien vous me direz ce que je dois faire dans les regles de l'art.
Je partirai uniquement quand tout sera rendu officiel. Qu'elle puisse etre libre de refaire sa vie sans entraves.


Je marquais un temps de reflexion

Oui, je fuis d'une certaine maniere, ou plutot, je fais en sorte qu'on m'évite, d'où ce projet de voyage qui me tenait à coeur depuis de nombreuses années.
Et vous avez attisé ma curiosité, en me parlant de votre filleule qui recrute des marins.

Je ne sais pas encore si je serai disponible selon ses besoins, mais si vous avez l'opportunité de nous mettre en contact, j'aurais tort de rater l'occasion. Car il me faudra bien trouver un navire prochainement, et à défaut d'embarquer sous les ordres de votre filleule, elle pourra peut etre me permettre de nouer des relations utiles.

Eloin
L'évesque faillit se mordre les lèvres de dépit en oyant la suite. Elle avait mandé à connaitre la vérité, elle se retrouvait maintenant à devoir partager le secret de cet homme, qui aimait toujours sa femme mais la laissait partir...

En somme, vous me demandez de garder le secret pour la protéger et luy permettre de refaire sa vie si elle le souhaite... Cela se conçoit, et j'ai bien du mal à vous en vouloir, tant je vous comprends tous deux.

C'était le défaut d'avoir eu une vie civile avant d'estre prêtre, elle était plus tolérante que ses confrères sur certains sujets. Pourtant, mesme si elle savait qu'il luy faudrait se repentir de ce blasphème, elle savait qu'elle les soutiendrait tant qu'elle le pourrait. Elle restait humaine, et donc faillible, comme l'avait dit le Très-Haut !

Elle acheva d'un trait son verre, la gorge soudain sèche.


Je vais donc entamer la procédure de dissolution avec vostre épouse. Ce sera certainement une procédure accélérée, la Curie ayant récemment validé deux cas pour lesquels il n'est plus nécessaire de passer par une officialité complète, ce qui réduira les délais et désengorgera les tribunaux ecclésiastiques. Je vous recontacterais si j'ai besoin de vostre signature sur un document, ou d'un témoignage.

Elle se renseignerait dans la journée, ne sachant point comment procéder avec cette nouvelle procédure simplifiée.

Adoncques, je vais parler de vous à ma filleule, et vous pourrez ainsi discuter sans intermédiaire. Je pense qu'elle pourra vous donner des contacts si vous veniez à ne point vous entendre, elle a jà fait un voyage de plusieurs moys sur un navire, et elle partage son existence entre ses domaines, elle connaît donc certainement nombre de gens habitués à parcourir les chemins, qu'ils soient terrestres ou maritimes.
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Evêque de Limoges, Grand-Prieur de l'ordre cistercien.
Héraldique
Boskdeportkar
Je vous remercie Monseigneur, de votre compassion et je vous prie de veiller et conseiller au possible Sofja si elle souhaite rester en ces terres de Limousin.

J'ai cru être capable d'être un bon époux. Mais nos exigences respectives réclamaient encore trop. Qu'Aristote veuille bien pardonner mon orgueil et ma fatuité à croire que je pourrais aimer sans blesser.


Je m'en voulais de faire vivre à cette chère Dame Eloin de tels évènements, mais il en va ainsi de la vie avec ces moments joyeux et puis ces moments de deuil.

Dame Eloin allait prendre congé, et m'informa qu'une procédure courte était de l'ordre du possible mais que ma signature serait bien évidemment exigée, tout contre celle de Sofja. Une dernière fois tout contre.

J'aurais voulu prolonger cette conversation, notamment sur la filleule de Dame Eloin, mais un élan de mélancolie m'envahit à l'idée de tenir un jour ce parchemin où serait inscrit la dissolution de mon mariage d'avec Sofja. Et pourtant j'allais devoir parapher ce document.


{Quelques jours plus tard...]


Fantine apporta de tres bonne heure, un parchemin de bonne taille. Elle se dépecha de le poser près de moi, et fila ausittot.
Je n'avais pas besoin de le lire pour savoir ce qu'il contenait et ce que je devais en faire.
Combien de temps s'écoula ? Plusieurs heures à priori, puisque j'entendis les matines, plus l'angélus. Je n'avais pas bougé, assis à mon bureau.

Puis finalement, je tendis la main vers mon écritoire, lu le parchemin qui confirmait la situation, apposa ma signature, puis, avec ma bague carrée y ajouta mon sceau. Alea jacta est.

Fantine, Fantine...
Fais porter cela au Presbytere sans délai.

Avant cela, apporte moi à boire.
Ferme tous les volets de la demeure. Que personne ne me derange.
Ecoute mes ordres.
Quand sept jours se seront passés, si les volets sont toujours fermés, je t'ordonne de venir me déloger de ce noir où je serai plongé.
Fais toi aider au besoin si je refuse et t'insulte à cause de trop de boissons.

Vas...vas t'en à présent . Mon deuil m'attend.
Boskdeportkar
Sept jours, sept nuits écoulés. Le noir presque complet dans la demeure, la cave presque vide, des cadavres de bouteilles un peu partout dans la piece. Le feu dans la cheminée s' était éteint depuis longtemps. Un froid prenant encerclait la piece. Je ne le sentais pas. Mon esprit divaguait ailleurs, pensif, effondré, incrédule.
J'avais tout perdu. Mes amours, mes enfants. Ma vie.
Une semaine d'enfermement à affronter la réalité et ses démons.

On vint à frapper à la porte, et la voix de Fantine me fut familière. Des bruits de bottes l'accompagnaient. Elle entra, avec elle la lumière absente depuis une semaine. Je baissai la tete devant l'agression. Puis protégé de mon bras, distinguais l'ombre des hommes qui emboitaient le pas de Fantine.

"Comme vous m'avez dit, je viens ouvrir les volets... Tout, tout va bien ?
" Me dit elle .

Je la sentais inquiete, et elle me regarda comme si un siècle s'etait écoulé. Manifestement je devais avoir une sale tete. Barbe drue, cheveux en bataille, traits tirés.
Les hommes silencieux n'osèrent pas bougés. Fantine s'enhardit et alla ouvrir les portes-fenetres.


"Faites, Fantine, comme je vous ai dis. Mon deuil n'est pas fini, mais la vie en ce Domaine doit continuer pour autant. Messieurs, vous pouvez disposer. Je vais sortir dehors. Fantine, veillez à tout ouvrir et aérer, et préparez moi de quoi retrouver aspect humain. Je vais affronter le soleil quelques instants, respirer l'air du jour. Et faire ce que j'ai à faire ensuite. . Je me doute que les champs et les bêtes ne peuvent attendre que l'on végète dans une maison plongée dans le noir. Sellez moi une monture, j'irai faire le tour du domaine tout à l'heure."


Sur le perron de la batisse, le soleil s'en donnait à coeur joie.
Un bel été dehors, un bel hiver dedans.

Puis je m'en revins en ma chambre.
A me contempler dans l'eau d'une bassine, quel triste constat ! L'age me rattrapait.
La barbe sonnait comme une évidence. Je fis toilette, changeait d'habits.
Puis comme si de rien n'était, comme si simplement, m'en alla faire un tour à cheval du Domaine. Pour m'occuper l'esprit.
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