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[RP ouvert] Destins croisés...

Drusilia_et_nikolai
[Faut évacuer !]

Rieux. Le Sombre y avait suivi sa Précieuse, il l’avait vue céder à la folie qu’elle couvait, il l’avait vue se plonger dans un isolement tel que, même lui, l’Ainé, le Roi de son cœur comme elle se plaisait à l’appeler, n’était pas parvenu à l’en sortir. Et la frangine disparut, encore. L’arrogance et l’impétuosité étaient innées chez les Novgorod, tout comme l’étaient la violence et l’impatience, il ne dérogeait pas et surtout, il s’en amusait souvent, comme au gré des envies malsaines ou de quelques tensions, le verbe se faisait menaçant et prometteur de nombreux tourments. La dernière conquête sergueienne n’y coupa pas, le cadet plus enclin à épargner sa donzelle des affres félines, les slaves en devisèrent en lice et le Tigre d’en sortir vaincu, surpris par l’ardeur fraternelle à protéger l’étrangère.

La famille souffrait. Le Ténébreux n’était pas homme à chialer sur son sort, fier de par son sang, fort de par ses origines, il était venu, il avait vu, il reprit la route sans rendre de compte, simplement accompagné de deux charmantes créatures dont il éprouvait souvent les nerfs et bien davantage encore.

Petites virées, la tignasse au vent, adossée au géant sur son étalon ou sagement installée sur sa propre monture, rien de mieux pour égayer les journées d’une blondinette insatiable ! Ben oui, elle portait bien son surnom, arpenter les routes, découvrir de nouvelles perspectives, profiter pleinement de tous les plaisirs que peut offrir la vie et surtout ceux qu’IL veut bien partager ! Elle s’était promis de ne plus le décevoir, de se plier docilement à ses directives et faut quand même avouer qu’elle adorait ça ! Elle suivait la route du pardon et cette fois elle avait le sentiment de la parcourir correctement. Aucun écart, pas de perte ou d’égarement et beaucoup de plaisir en récompense, que demander de plus ? L’apprentissage était dur mais le Maître d’œuvre savait rémunérer ses efforts et lui donner le goût d’en vouloir toujours plus.

Et plus, pour une insatiable ça englobe beaucoup de choses ! L’attrait de plus en plus présent pour la gente rouquinesque par exemple… Un contrat signé pour un futur cours de natation avec la belle Ode était bien rangé dans sa besace depuis la virée océane, ça promettait déjà d’être quelque chose de spécial, enfin surtout présenté par une caboche blonde à l’esprit très imaginatif. Le rapprochement avec les rousses semblait tellement naturel à la blondine alors que beaucoup ne leur adresse même pas la parole. Sa persévérance apportait beaucoup de plaisir, tant à elle qu’au Maître d’apprentissage qui, cette fois-ci, lui avait laissé le champ libre pour partager son savoir faire avec la belle roussette.


La Bretagne était loin, l’Anjou en terre d’accueil pour quelques jours de pause, l’escale prévue afin de tirer d’éventuelles informations quant à la destination de Natasha, mais aussi de resserrer les liens, déjà très intimes, avec ses délicieuses compagnes. S’il était frère, le slave n’en demeurait pas moins mâle, loin s’en faut, et la proximité des femelles aux personnalités si différentes, ne manquait pas d’exacerber son appétit licencieux. La Blondine, délicate petite chose entre ses larges mains, se montrait docile et attentive à l’apprentissage, il redoublait sans complexe de desseins pervers alors que la Renarde, semblait plus prompte à provoquer l’ire masculine pour, finalement, partager ses pulsions animales.
Au gré des rencontres, les jeux s’étoffaient, l’insatiable portant un intérêt nouveau aux flamboyantes crinières, la valseuse peu encline à lui céder, ils trouvèrent à répondre aux fantasmes débridés de l’orgueilleux, en entrainant une candide rousse aux portes de la luxure.

Nouvelle expérience follement exaltante pour la belle, même si les conséquences peuvent être lourdes, ça n’empêche pas de jouer un peu avec le feu une nouvelle fois… C’est tellement bon de prendre des risques ! Un appétit féroce qui parcourt le corps frêle à chaque instant, difficile de ne pas l’entendre et surtout d’y résister, heureusement qu’elle ne cherche pas à résister d’ailleurs. Au programme, une nouvelle escapade vers l’inconnu, tout ce qu’il faut pour que les esprits et les corps s’échauffent. Et l’apprentissage continue ! Les forêts… ça fait remonter pleins de souvenirs délicieux et les feux de camps sont des endroits propices aux révélations ; il était fier d’elle en ce moment ! Comment ne pas chercher à en faire plus dans ce cas ? Impensable d’y penser ! Elle avait le meilleur des instructeurs et lui faisait entièrement confiance, autant profiter de tout, même si le pire et d’avantage encore était à venir, la route est encore longue, elle doit s’accrocher fermement et rester attentive à tout !

L’aparté saumurois n’avait pas duré, d’autres projets puisque la frangine restait introuvable, le trio repartit comme le Sombre jubilait encore des soirées passées, lourd secret pour certaines, précieux avantage pour lui alors qu’il userait volontiers de chantage, si c’était nécessaire, ce dont il ne doutait nullement et d’exulter plus encore. Le prédateur était sadique, il ignorait les scrupules, alors il prenait sans limite, jusqu’à se lasser des victimes qu’il aura vidées de leur volonté, par la violence le plus souvent et qu’il abandonnait sans le moindre remord, sauves parfois ou gisant dans le carmin épais.
Celles qui partageaient sa vie étaient d’une autre espèce, elles avaient gagné sa sympathie, celles-là étaient dignes de sa Précieuse, dignes de l’Asmodée et le Slave de leur porter un intérêt tout particulier. Les femelles se complétaient, à leur insu certainement, quand une l’agaçait, c’est l’autre qui payait, si la Sorcière le chauffait, c’est la Docile qui recevait, mais le duo féminin parvenait à apaiser les colères, quelle qu’en soit la manière, elles savaient le détourner des insignifiants insectes, comme lui, s’arrangeait à refroidir les ardeurs des célibataires ou des époux infidèles qui gouteraient volontiers les fruits défendus. Autoritaire, dominateur, il exigeait l’exclusivité des attentions féminines sans mépriser les besoins primaires des donzelles qui, au détour d’un sourire, pouvaient succomber aux charmeurs, pourvu qu’il n’en pâtit pas, et de rester Souverain aux pensées profondes du sexe dit faible.
C’est lors d’une nouvelle séance, la frêle blondinette à subir la puissante volonté masculine, qu’un volatile les invita à rejoindre la Bretagne, le Slave y répondit favorablement puisqu’ils étaient proches et Rieux leur ouvrit les bras au petit matin.

Changement de programme, c’est la Bretagne qui accueillait de nouveau le trio après la petite escapade. La blonde suivait, qu’importe le lieu du moment qu’elle était en sa compagnie… Non, en leurs compagnies ! La rouquine faisait partie intégrante du tout, du jeu du Slave qu’elle ne connaissait pas mais qu’elle suivait avec un plaisir certain. Même si cette dernière se bornait à lui résister, elle aimait beaucoup sa présence et un jour, elle s’en était fait la promesse, elle l’aurait ! L’Insatiable était patiente et acharnée, rien ne la détournerait de son objectif. Surtout que pour le moment, son comportement ne le décevait pas et elle comptait bien s’y tenir, faire encore plus d’efforts pour le satisfaire. Le Sombre avait trouvé le chemin pour habiter ses pensées, chaque parole, chaque geste était réfléchi pour ne pas lui faire honte.
Arrivée à Rieux, lieu-dit des fous dans la caboche blondine, ses rues, elle les connaissait par coeur à force de les avoir parcourues des jours durant et, pour être franche, elle ne pensait pas y revenir de si tôt… Mais l’imprévu a ses défauts aussi ! Qu’à cela ne tienne, la famille passait bien avant les états d’âme et le Maître Souverain bien avant tout le reste !
Les chevaux bien installés, pansés et nourris avec amour, elle arpentait les étales bretons à la recherche du cadeau parfait qu’elle avait promis à une belle demoiselle des plus adorables, avant de se rendre aux « Jambons Croustillants » l’esprit vagabondant dans les méandres des souvenirs de son apprentissage. Ça la hantait, ben oui ! Surtout qu’à chaque détour, chaque coin de rue, chaque porte passée, un nouveau cours pouvait débuter !
La porte de la taverne était poussée et en saluant timidement les personnes déjà présentes, elle fila directement s’asseoir sagement dans un coin, surveillant sans grand intérêt les allées et venues de la clientèle.



Lyson
[Bretagne, ici ou ailleurs… ]

J´habite où tes yeux brillent où ton sang coule
Où des bras me serrent.


Quand d’autres ont, peut-être, le besoin ou l’envie de se diversifier, le Chaton s’épanouit dans l’exclusivité totale, offerte au Lion, sans rien avoir demandé en retour.
La tâche s’en trouve d’ailleurs facilité par le manque d’entrain de leurs congénères à les approcher, hormis un boulet ou deux venu s’égarer à la même taverne pour quelques rares instants. Des proches eux, de la famille -à ce qu’il se dit- la présence est toute relative.

La reine de glace disparue du jour au lendemain, le Lion revenu seul de sa tentative ; la blondinette au sommeil aussi rapide que léger ; le frère, si différent à ses yeux et pour lequel elle n’éprouve le moindre intérêt, si ce n’est d’en rester à distance raisonnable ; Quant aux filles, elle ne les connaît pas assez, en partie par sa faute d’ailleurs, elle le reconnaît bien volontiers.

Oui… Presque symbolique. Mais finalement, elle s’y fait. Sans doute plus facilement que Lui d’ailleurs, elle qui n’a jamais vécu que seule avec ses vieux parents. Sans doute n’est-elle pas à même de comprendre les rouages d’une fratrie, surtout de celle des Novgorod.

Elle qui a cru, un moment, trouver une famille, fait de cet homme, son unique mode de vie. Le blond Sergueï, qui à lui seul, comble chacune de ses attentes.


J´irai où tu iras, mon pays sera toi
J´irai où tu iras qu´importe la place
Qu´importe l´endroit.


Que vouloir de plus, de mieux ?

Le temps d’une légère introspection, elle se surprend à se poser la question, alors qu’Il est là, étendu près d’elle, paupières encore closes, instants de repos glanés à l’abri d’une nouvelle grange anonyme après le chemin parcouru cette nuit encore.

Quelques heures, une nuit interminable pour elle, ils ont été séparés par un mauvais concours de circonstances. C’est alors son univers qui s’est vu perturbé.
Et elle n’a pu trouver d’apaisement avant d’avoir revu Son sourire, celui pour lequel elle franchirait les portes de l’Enfer sans même réfléchir. Et son souffle n’est redevenu régulier qu’après avoir senti le sien enflammer son cou. Et son corps ne s’est réveillé qu’après l’étreinte de ses bras, la caresse de ses lèvres. Et l’émeraude n’a retrouvé d’éclat qu’une fois noyé à l’azur troublant.
Alors non, elle ne veut rien de plus. Elle n’aspire à rien de mieux que Lui, son Cœur de Lion.

Que lui réserve l’avenir ? Quels seront les projets ? Où seront-ils demain ?...



…Qu´importe j´irai où bon te semble
J´aime tes envies j´aime ta lumière
Tous les paysages te ressemblent
Quand tu les éclaires


Et c’est là dans ses bras, Lyson bien éveillée, elle, alors qu’un premier ronronnement gourmand s’échappe des lèvres fines, que la vie poursuit son cours quand elle tente de le sortir de ses songes…

Un jour nouveau commence et avec lui, l’envie nouvelle de se montrer féline.

Le reste du monde attendra !


J'irai où tu iras. JJG

_________________
Serguei.novgorod
[Quand les yeux ne reflètent plus
Que le singulier goût d’étranger
Quand ma peau a ta peau déméritée
Quand l’uni se désunit, quand l’un se fait deux,
Quand tout « s’en va descendre, où tout se désassemble »*…
Au passé, Natasha,
A ce temps qui, naguère,
Faisait d’un tout… toi et moi.]




Elle a levé la tête vers la Lune, Louve qu’elle est. Meneuse, mère d’intention de toutes les autres, Reine des steppes gelées qui l’ont vu naître, à double, à triple titre. Crinière platine à astre luminescent… celle des deux qui atteint les cieux n’est pas celle qui y demeure, déjà. Alors il l’observe, silencieusement. Alors il dessine, d’un regard habitué pourtant, cet ovale de visage féminin qu’il a tant de fois parcouru. Alors il sait, sans le dire, sans en lâcher un mot, l’abîme de pensées dans lequel elle se plonge. Tu ne me caches rien, Natasha, pas même dans tes silences. Tu ne me dérobes rien de tes songes, ma Platine, même quand tu détournes les yeux vers un puits de lumière, comme c’était moi qui t’éclairait, hier encore. Tu ne me caches rien, Minouche… Rien de toi ne m’est étranger.

Le couperet tombe, alors qu’elle, impériale, rejoint la lourde et se fend de cinq petits mots aux allures de mur infranchissable. Il ne dit rien, n’esquisse pas le moindre geste quand, peut-être, son bras eut voulu se tendre, sa main la retenir ; on n’emprisonne pas le sable. Elle a toujours, reine de Saba, su se dérober à tout joug qu’elle ne souhaitait pas. A quoi bon tenter ? Venir la chercher n’aura eu pour effet que de la laisser partir la tête haute, claquer la porte sur les tentatives fraternelles d’arranger les choses. Port de tête pour serre sur cœur, soit. Savoure, Princesse, cette carpette de frère que tu viens de faire, et que tu appelais ton « autre », jadis. Admire, Princesse, la déchéance de l’un qui fait ta grandeur, aux yeux de tous. Puise à ce regard là, tendu, mer azur balayée d’une dérobade de l’ambre, comme tu franchis le seuil, sans plus un regard, la fierté qui doit t’emplir, dorénavant, de ce pied de nez magistral. Oui admire, savoure, puise ; déchire encore, Princesse, si ça te reconstruit. Fais lambeaux de moi, puisque c’est moi que tu exècres, maintenant. Moi quand ce fus d’autres ; je comprends leur désarroi, à présent. Je sais le vide qui a dû les emplir, quand tu auras tiré de la mise à mort, la grâce féline dont tu t’habilles, en te détournant, en abandonnant, gisant, celui qui t’aura blessée et que tu voulais mort, disparu. Dévore, salis, aime, finalement. Comme tu en as aimé d’autres, et qui n’étaient pas moi. M’as-tu aimé, vraiment, dis, Princesse ? Juste une seconde ? J’en doute, alors que tes pas s’éteignent peu à peu.

La porte aura-t-elle été laissée ouverte ? Qu’importe, au final, quand c’est un vent glacial, battant, qui fait s’agiter, grinçantes, les alvéoles coronaires d’un Lion laissé là, comme un tapis devant l’âtre. Beau, mais inutile, avec pour seul éclat celui de son aura passée. Fastidieux colossal de chair. Vain. Tout s’égare, tout s’égale, au final ; rien n’a d’importance.

Il a fini par se lever, par sortir à son tour, et refermer cette porte sur ce cloaque creux de cellule ; a traversé les intestins de couloir du dédale religieux, et est revenu au monde, au vrai, par la grande porte, sans se soucier du regard surpris des quelques nonnettes croisées sur sa route… sans voir rosir au passage, quelques-unes des pommettes qu’il avait fait rougir d’un autre feu, quelques paires de mois plus tôt ; ah, Sergueï, tu es voué à l’art du souvenir, petit fantôme de songes de bien des femmes. Et quoi d’autre, en fin de comptes ?

La silhouette des murs s’effacera donc peu à peu, dans son dos, alors qu’il s’éloignera, d’un pas pesé, et rejoindra la couche initiale, se glissant contre sa brune, glissant un bras autour de sa taille, lèvres posées bientôt à sa nuque, nez enfoui à sa chevelure, pour en saisir le parfum. Lion à Chat. Il n’aura donc jamais été loup, à bien y réfléchir.



[Bretagne, ça et là.]

Ma maison c'est là… Exactement dans tes bras***

Combien de temps, combien de temps ? A rester en ville sans une visite des « sœurs », du frère ? Cet aîné là dont l’arrivée à point nommé lui aura ravi la place d’Alpha d’une meute dirigée par sa sœur ? Ce rival sans en être un, comme la cadette l’aura rapidement surnommé, et élu « roi de son cœur ». N’était-ce pas lui, qui y régnait jusqu’alors ? Nikolaï, par le fait même d’être là, lui aura pris sa place de mâle, de repère, de puits et d’abri aux yeux de Natasha par trop encline à s’en remettre à lui, dès lors. Les choses sont ainsi, la primeur du sang l’emporte sur tout. Le droit d’aînesse, également. Nikolaï est premier né, quand lui n’avait cru renaître qu’auprès de sa sœur. Deuxième naissance, par deux fois. Deux tares au vicié. Sa sœur, sa renaissance ; la même qui lui aura achevé le cœur. C’est ainsi.

Auprès de Lyson, il se construit des murs de protection, une île de quiétude chaleureuse où il peut donner libre cours à toute lascivité féline lui prenant au corps.

Les autres, ceux sensés être de la famille, les fuient comme la peste, semble-t-il ; ils s’habillent de distance, se parent de froideur, quand ils sont là. Parfois, une autre taverne que celle où ils se trouvent les abrite, parfois, ce sont d’autres remparts qui les couvent, alors qu’ils séjournent dans une autre ville. Marie et Lady seules, sont restées, égales à ce qu’elles ont toujours été. Un gouffre semble s’ériger et s’étendre entre eux et les autres, l’heure du départ, l’heure de quitter aurait-elle sonné ?


Mon pays c'est toi… Précisément dans tes bras***

Pourtant, ils ont filé, ont suivi, ultime tentative de raccrocher ce qui a jadis été. Ils ont laissé une Lady désemparée derrière eux, inquiète pour son fils, et pas seulement ; elle échange des lettres avec son époux, peut-être elle aussi doute de rester. Ou bien le redoute-t-elle ? Il sait ses peurs, à la Miel, pour en avoir souvent été le réceptacle. Il sait ses craintes de voir se détourner l’enfant qu’elle a recueilli et accueilli en son cœur meurtri, faisant de celui-ci, tombe d’un amour trop vibrant, le berceau d’un second, très puissant. Il a entendu ses larmes, essuyé ses tempêtes de pleurs, de colère, alors que l’adolescent a tourné le dos pour se forger ailleurs, en une autre compagnie, après qu’Ode ait rappelé inconsciemment sa véritable mère à l’enfant. Et il connaît son aveu d’impuissance face à tout cela, pour l’avoir écouté. Lady est mère blessée, comme a été épouse délaissée, comme elle a été amie-amante abandonnée, comme elle fut, en dernier lieu, Louve bafouée. Elle a souhaité demeurer seule, il y a finalement consenti, malgré de vifs efforts pour l’amener avec eux, ponctuant cela de « Sur toutes les plages du monde, Lady, sur toutes les plages y a des mômes qui tournent le dos à leurs mères**, il comprendra, plus tard, tu le sais bien. Il a besoin de cela, je crois. Tu le voudrais pour toujours petit garçon, il doit devenir homme…».

Elle avait balayé cela d’un revers amer de la main, et avait détourné le regard, pour s’allonger dos à lui. Il avait compris, alors, qu’il n’y pouvait plus rien, et après avoir apposé un baiser à sa joue, s’en était allé, avec la promesse d’un retour, pour la chercher. Elle n’avait alors pas répondu.


J'habite tes bras… Là où me caressent tes doigts***

Délicieux éveil, corps dissimulé aux yeux féminins par une couverture disposée sommairement, mais bien palpable de ce qu’il est soudé au sien, où elle s’est abritée. Les tentatives du Chat de le sortir de ses rêveries pour en atteindre d’autrement plus délicieusement charnelles faisant leurs preuves, le Lion d’enfin ouvrir les yeux, sourire étiré, ronronnement audible, et de murmurer :

- ‘Jour. Un voyage vers l’sud, ça t’dit ? J’voudrais t’présenter mon fils.


*Pierre de Ronsard, "Je n'ai plus que les os..."
**Jean-Louis Aubert, Les plages.
***Jean-Jacques Goldman, Si je t'avais pas.

_________________
Natasha_loup
[Quelque part, ailleurs…]

Si elle avait su lire les pensées, ou même, interpréter les signes, comme, parfois, on semblait en avoir le don, qu'aurait-elle découvert ? Mieux vaut ne pas savoir. Aurait-ce été différent alors ?...

Après tout, ne s'élevait-elle pas, à presque l'égale du créateur, qu'en bafouant, méprisant, humiliant, blessant, écrasant et, le meilleur pour la fin, en A-BAN-DON-NANT, ceux qu'elle croyait ses proches.

Ah, Natasha ! Reyne des Garces... oups, pardon… des Glaces, Reyne des Glaces. Que n'as-tu jamais eu la moindre compassion pour ne pas voir, ni même entendre, ces déferlantes d'amour, somme toutes aussi silencieuses qu'invisibles. Déesse des neiges éternelles, hissée sur les cœurs et les corps que tu auras donc détruits, intouchable statue d'un marbre aussi dur que l'organe nichant en ta poitrine, de fait.

Ah, Natasha ! Fabuleuse créature, faut-il que tu sois douée de pouvoirs titanesques et de force colossale, pour que tu sois à l'origine du chaos et que tes épaules seules en portent le poids des maux ; c'est toi, sans doute, qui la pomme, qui la boite, qui les sept plaies et que sais-je encore ?

Non Natasha, tu ne sauras être responsable de tout ; tu as pêché par orgueil, candide et confiante... Aurait-ce été différent alors ? Oui, car on ne peut lutter contre la bassesse....



La lourde tresse se balança quand elle sortit de ses rêveries et le sourire d'étirer ses lèvres carmines en observant le loupiot. Tous deux chevauchaient calmement, sans cri, sans heurt ; reposée, la Platine croquait la vie sans contrainte…Parfois, elle se prenait à songer aux autres ; parfois, elle se demandait si l’adolescent souffrait de cette distance, qu’elle mettait entre eux… et l’espièglerie du rouquin, son innocence encore, effaçaient les interrogations ; tantôt d’une colère provoquée, tantôt d’une tendresse fragilisée. Et puis, bientôt, ils se retrouveraient, pour certains du moins.

[Plus tard, à Genève]

Fais pas ci, fais pas ça , parle pas comme ça, sois correct avec les demoiselles.
C’était un peu ce qu’entendait tous les jours le rouquin lorsqu’il trainait dans la meute. Grande famille avec toutes ses qualités mais aussi avec tous ses défauts. Comment voulez-vous qu’un jeune adolescent en pleine crise existentielle, s’y retrouve là dedans ?
La Platine n’échappait pas à ceux qu’il cataloguait d’«adultes rébarbatifs avec un manche coincé dans l’fion » (n’allez pas lui répéter !), mais elle avait l’immunité divine en quelques sortes et elle a su prouver sa capacité à se détendre lors de leur petit tour en amoureux. Hum, enfin amoureux, c’était vite dit, car depuis qu’ils étaient à Genève, c’était impossible de voir la cheffe femelle. Il logeait dans une auberge confortable (encore heureux), mais il s’emm…ennuyait sérieusement et l’irascible passait ses nuits à s’éclipser, lui qui croyait avoir gagné du terrain depuis… Il s’était bien fourré le doigt dans l’œil.

Un soir, il décida de la suivre, arpentant les ruelles sombres, les yeux rivés sur la tresse blonde reconnaissable entre toutes. L’avantage d’être élevé en parti chez des voyous, c’est au moins d’apprendre à se faire discret. Et malgré son allure de grand dadet maladroit, il s’était un peu renforcé, le corps encore frêle mais les muscles secs commençant à se faire un peu sentir.
Les pas le guidèrent jusqu’à un carrefour, où, trop pris par le matage de formes novgorodiennes, il n’eut pas le temps d’éviter une charrette dont il prit le brancard dans les joyeuses, le poussant à beugler moult injures, plus indécentes les unes que les autres.


Bordel, Nom d’une sale femelle fripée !!! Par les bourses d’Aristote !! Foutrechiennasse j’ai mal !

Hurla-t-il, pour le plus grand plaisir du voisinage… et certainement de la Platine aussi.

Elle l’avait pourtant choisie minutieusement cette auberge ; elle avait pourtant grassement rétribué le taulier et, bien sur, elle était pourtant d’une discrétion sans pareille… mais non, il avait fallu qu’elle trimballe LE chieur du siècle. Tout se déroulait pour le mieux, il furetait en ville et, quiconque connaît la cité helvète, sait qu’elle recèle de trésors ; elle en profitait pour se détendre auprès de son ami. La nuit venue, elle bordait le minot –ouais, faut c’qui faut- et prenait la tangente pour rejoindre ledit ami qui l’hébergeait gentiment. Tout se déroulait pour le mieux donc, jusqu’au soir où…

Immobilisation de l’Irascible, l’oreille aux aguets, la truffe au vent… voyez les chiens d’arrêt ? Ben pareil, les crocs plus acérés et limite l’écume aux lèvres. Elle inspira profondément et se retourna lentement… la voix éraillée d’une donzelle hormonée, ou celle d’un puceau coincé dans un piège à souris, au choix ; toujours est-il que ladite voix, elle l’avait bien reconnue et qu’elle se faisait violence pour ne pas évacuer sur le cuir du mioche. Le minois arborait l’éternel sourire quand elle s’approcha du curieux ; la senestre lui caressa la joue gentiment avant qu’elle n’aille tirer l’oreille au cancre du jour :


Namého !!! c’est quoi c’vocabulaire ?!

Vous noterez qu’elle met un point d’honneur à lui fournir une éducation digne de ce nom ; sa mère, d’un autre âge, ne supporterait pas de récupérer un charretier et l’Arrogante d’imaginer l’hystérie qui s’en suivrait.

Il en fallait peu pour faire naître un sourire idiot sur la face du gamin. Et attirer l’attention de la Platine faisait parti de ces « peu », même si sa posture recroquevillée en deux, ne laissait pas tellement la possibilité au Paon de faire la roue pour la femelle. Cette dernière pourtant ne négligeait aucun détail dans cette danse nuptiale, du pas naturellement chaloupé, en passant par le lent mouvement de balance de la chevelure tressée, continuant par une douce caresse pour ainsi finir par l’approche (plutôt directe) qu’elle mit en place en touchant directement l’une des zones bien connue pour être érogène chez l’être humain : l’oreille. Si avec tout ça, le Loupiot n’avait pas ses chances... c’était à n’y rien comprendre.

Mais le charme fut rompu dès lors que la donzelle ouvrit la bouche, comme à chaque fois que l’une d’elles se prenait l’envie de jacasser. Comme on dit, « ça brise le charme ». Le jeune homme retroussait déjà le nez et vous remarquerez que lorsque nous disions plus haut, que certains avaient le comportement de pète-sec mal embouchés, c’est un peu de ça qu’il était question. Encore heureux, sa mère n’était pas là pour l’entendre. Pas la biologique, dont il se foutait royalement qu’elle renaisse de ses cendres ou pas pour lui mettre la taloche du siècle. Non celle qu’il redoutait, c’était la Miel, celle qui la couvait comme l’oisillon qu’il n’était plus et s’efforçait de le tenir à l’écart de tout ce qui peut trancher, couper, décapiter, zigouiller, maraver, massacrer, étriper… (Bref vous avez compris). Celle là, il n’avait même pas osé lui écrire pour lui parler de son départ, tant il avait craint son refus et toute personne connaissant la dame, savait qu’il ne valait mieux pas aller contre sa décision. Aussi s’était il « enfui » pour suivre la Divine, croyant qu’il échapperait à cette éducation que toutes les femelles, mères ou pas, semblent vouloir donner. Natasha finalement ne fit pas exception et sa réprimande eut pour réponse, un grognement prononcé, résultat de la douleur encore présente, tout comme celui de son mécontentement.


P’tain Nat’, t’en as pas marre d’jouer à la vieille ?

Ronchonna-t-il au risque de prendre un revers sévère tout en se redressant un peu pour échapper à la poigne de la slave.

J’sais bien qu’tu m’veux, mais s’tu pouvais attraper aut’ chose que mon oreille hein la prochaine fois.. d’ailleurs un baiser s’rait pas d’refus ! Et c'est qui qu'tu vas voir tous les soirs ?

Nikolai_et_ode
[Bivouac entre Fougères et Avranches]

On fait quoi maintenant ?

Comme d’habitude.

Je n’aime pas, qu’est-ce que tu crois que ça nous apporte de rester avec les deux ?

Je ne te demande pas ton avis, je veux rester… ne te souviens-tu pas de la nuit dernière ?

Je sais qu’Elle s’en souvient, elle m’a laissé faire en compagnie du slave et notre corps en vibre encore.

Non pas sur les lèvres
Même si j’en rêve
Même si j’en tremble
Et bien que mon cœur soit nu
Mon âme est revêtue
*

Mon âme fragmentée dit non quand mon corps dit oui. Ma conscience dispersée refuse quand mon cœur accepte.
Au fond, je crois que je l’aime ce Novgorod violent et destructeur. Je me l’avoue à mi-mots, car l’amour est impossible à déclarer dans la meute.
Le dire effacerait la beauté du sentiment, seule émotion qui enrobe mon cœur d’un nectar doux et réparateur depuis mon arrivée dans leur monde.
J’ai laissé mon agresseur me marquer plus profondément qu’il ne l’avait déjà fait de son couteau. D’après Elle, c’est ma perte que je signe, quand pour moi, je ne vois qu’un avancement, aussi secret soit ce ressenti.
Je me surprends chaque jour, à espérer que son humeur sera bonne et clémente, que l’argent se posera sur moi avec cet intérêt dont est capable le Tigre.
Me défendra-t-il, sur-protecteur, face à des hommes entreprenants ?
Toute personne qui me connaissait avant, saurait que je n’accepterais jamais de partager, si je n’étais pas totalement accro, quoiqu’en dise mon autre moi, quoique je puisse dire pour le nier. Cette violence, ces provocations, ces retrouvailles passionnelles, sont autant de drogues qu’il me faut absorber quotidiennement.

A ma plus grande surprise, je me suis même livrée un peu à Drusilia, douce et courageuse Insatiable, aux grands yeux candides, qui n’a de cesse de vouloir me séduire et me faire céder à ses avances constantes.

Tu ne lui as pas avoué la profondeur de ta jalousie !

Non, bien sûr que non, comment le pourrais-je ? Elle qui a bien plus de légitimité auprès du blond que moi-même.
Notre conversation a tout de même servi à nous rapprocher et savoir qu’elle n’a rien dévoilé à Nikolaï, même lorsque celui-ci le lui a réclamé, a positionné la blondinette en grande estime dans mon esprit.
C’est pour cette raison que je m’étais évertuée la veille à calmer Nikolaï, le séduire comme jamais encore je n’avais osé pour le distraire de sa colère.
Ne pas savoir. Là était l’objet de l’ire du slave et Drusilia et moi avions été assez souples pour parvenir à l’en détourner.
Nous allions reprendre la route ce jour, et j’émergeais de mes pensées, mordue par le froid que laissait passer le fin tissu de la tente.
Nikolaï dormait non loin, certainement plus habitué que moi aux climats ingrats.
Mes doigts parcoururent sa peau, chaude comme toujours, tandis que je me redressais, jades accrochées à l’homme.


[Triangle : (…) formée par trois points, appelés sommets (…) délimitant un domaine…Lorsque les sommets sont distincts deux à deux, en chaque sommet les côtés délimitent un angle intérieur, (...) Polygone qui (...) sert ainsi d’élément fondamental (…)]

Un mot, qui se suffit à lui-même dans le résumé de leur relation, les femelles avec leurs propres appréhensions comme le Sombre en esquisse les fondations à chaque instant, quand au hasard d’un regard ou d’un soupir, il interprète l’invitation ou la provocation, selon que son humeur, fluctuant à loisirs, n’en rende son verdict d’un jugement tranché et qu’elles, ses compagnes, n’en subissent inéluctablement la sentence.
La moribonde aventure bretonne se poursuit, le silence s’est taillé la part du lion au sein de la famille, le mutisme progresse chaque jour davantage depuis Saumur mais le Slave ne s’en trouble pas comme ses nombreuses années d’errance l’ont aguerri, il sait rester hermétique aux querelles insipides et la gente féminine prédomine dans l’art d’emm.erder le monde, capricieuses créatures dont il ne veut pourtant pas se priver. Elles jacassent, elles pleurnichent, elles ricanent, tantôt agaçantes, tantôt aguichantes, indubitablement attrayantes.

Le Triangle. Il est eux. Ses Délicieuses, les bien nommées, blondine docile contre roussette offensive. Celles qui supportent autant qu’elles subissent, qui savourent autant qu’elles profitent, de l’ire incisive aux mots blessants, des coups violents aux caresses jouissives, elles forment d’un couple opposé, son importance nouvelle et, si l’homme ignore les scrupules comme la perversité l’habite, il n’en reste néanmoins que plus attentif à leur bienêtre.
Un nouveau jour se lève, le Tigre est étendu sous la tente, détendu aussi, comme chaque matin qui s’éveille, la tignasse est libérée du catogan et la carcasse à peine dissimulée par cette couverture qui trône à sa taille frémit des doigts fins. Un grognement en écho comme il ouvre les yeux sur la Renarde, les lèvres s’ourlent de séduction et l’argent translucide de glisser sur la silhouette qu’il attire contre lui :


Hum, impatiente de repartir Belle Ode ?

Je me laissai emporter par les bras puissants, savourant cet instant de bonne humeur, propre à toute nuit charnelle ayant offert son lot de pulsions animales, d’étreintes effrénées, de baisers brûlants.
Bientôt, il changerait, tout comme moi, lorsque le bien-être post coïtal se serait estompé pour laisser place à nos névroses respectives.
Mais pour l’heure, je profitai de cette étreinte, déposant un baiser mordant sur les lèvres masculines. Mon corps fin, mais plus aussi maigre qu’avant, contrastant moins avec la large carrure de mon amant.
Mes doigts s’égarèrent entre les plis de la fine couverture, flattant ce qui restait recouvert, mes jades assombries par ces relents de souvenirs de notre nuit d’ivresse.
Partir ? Là tout de suite, je n’étais pas si pressée de m’en aller, mais même si je savais le Tigre intelligent et pas dupe, je n’allais pas avouer une chose pareille.


Pas tant… Mais si tu es assez insensible pour ne pas sentir la morsure du froid, ce n’est pas mon cas, mon mignon.

Il n’ignore rien, ni du froid qui la mord, ni des doigts agiles qui l’éveillent davantage aux pensées lubriques et, d’autant, il simule l’indifférence pourvu que son corps ne le trahisse pas trop rapidement. Les lèvres s’ourlent comme l’acier glisse à la silhouette délicate qu’il serre contre son torse, il baise la pulpe féminine d’un élan naturel et de ricaner à ses propos :

Délicieuse, comment pourrai-je l’ignorer quand tu frémis contre ma peau ?

Le timbre est rauque, plus encore au réveil, elle pourra néanmoins y discerner l’ironie d’un sous entendu malsain, comme sa large paume agace l’échine féminine d’une caresse éloquente, alors que déjà, sa joue rugueuse joue sur le derme fragile de la femelle. La Renarde, elle, sait l’art de la stimulation sous son masque de froideur, elle sait se consumer d’un feu sacré lors de leurs ébats débridés et, le simple souvenir de la nuit passée, suffit à rendre hommage à la menotte curieuse :

Il suffit d’un rien pour l’oublier, cette morsure, Belle Ode.

Les prunelles argentées abandonnent le minois opalin, elles quêtent une autre présente sous l’abri, et le Sombre de grogner comme il comprend que la Docile s’est déjà effacée, chacune plus prompte à fuir quand l’autre se fait complice du Slave.

Mon souffle perdait en régularité, les caresses tout comme les sous-entendus, prolongeant cet état de la veille.
C’est bon d’être animal parfois et j’appréciai de la museler Elle. Elle qui me martelait le cerveau à longueur de journée, je la savais assez consciente du mal que pourrait faire le slave, pour qu’elle ne le déprécie pas quand il nous faisait du bien.
La main puissante sur mon dos démontrait d'autant de lubricité que d’instinct protecteur. Homme contrasté entre ses pulsions d’être froid et intransigeant, confronté à l’attrait pour deux nymphes aussi différentes que le soleil et la lune.
Je soupirai, de bien être, mes doigts remportant toute la reconnaissance que je désirai avoir. Car si le Tigre pouvait mentir ou tenter le masque de l’indifférence, il est des choses qui ne mentent jamais.
Mais très vite, trop vite, Nikolaï gronda. Changement d’humeur attendu qui m’obligeait à suivre le regard du blond.
Je comprenai alors, qu’il lui manquait le troisième élément à notre équilibre à nous. La blondinette qui, était allée je ne savais où, mais dont l’absence, à mon grand désarroi, suffisait à distraire le Novgorod.
J’ignorai alors, que mes propres absences avaient le même effet sur lui. Tout ce que je saisis sur l’instant, est que c’était elle qu'il réclamait et aussitôt, Elle réagit, nous trouvant assez de force nécessaire pour quitter les bras aimés.

Je t’avais déjà dit que t’étais rien pour lui ? Si c’est pas le cas je te le rappelle hein.. des fois que.

Aïe. Oui c’était un peu douloureux, mais ça faisait juste l’effet d’un pincement et c’était surtout mon orgueil qui prenait le plus gros du coup.
J’attrapai un drap dont je me recouvrai avant de sortir de cette tente étouffante non sans dire :


T’as raison Nikolaï, rien de mieux que de se remettre en route pour réchauffer.

Tu crois à ce que tu dis ?

Non.

Ah.


* "La ceinture" Elodie Frégé


Drusilia_et_nikolai
[De la Bretagne à la Normandie]

La taverne de la Moche, tendre surnom que la Cistude avait hérité de la Précieuse, leur offrit un abri modeste, les murs en uniques témoins taciturnes des écarts Novgorodiens comme la relation triangulaire s’étoffait davantage, les lieux généralement désertés par toute âme, l’hygiène rembarrée au second plan quand il valait mieux ignorer le contenu des tonneaux et la ville n’aura résonnée que des murmures étouffés, le temps d’un séjour succinct.
La Belle Marie avait su trouver les arguments, le Sombre avait consenti comme la famille restait l’essentiel et le trio de prendre la route en amont, quand les autres suivraient bientôt.

Ainsi, l’on pouvait voir sur les chemins boueux de trop de pluie, la haute silhouette flanquée des délicates, jamais l’un sans l’une, jamais l’une sans l’autre, les femelles s’apprenant, comme lui s’y attachait indéniablement, chacune plus importante dans la vie du rustre à mesure des lieues parcourues. Le Slave, quant à lui, s’initiait aux caprices féminins, il assimilait les signes de frustration chez ses compagnes et comprenait qu’elles subissaient le concept de partage, plus qu’elles ne l’acceptaient. Elles concédaient à la même tente lors des bivouacs, elles admettaient la même piaule dans une quelconque auberge mais, elles imposaient leurs décisions malgré sa domination naturelle et l’homme d’aller d’une couche à l’autre quand il serait si simple, dans son esprit pervers, de la partager. Le sommeil ravi, tantôt par la blonde, tantôt par la rousse.

Repartir sur les chemins, il était temps ! Pas par manque d’activité, loin de là, mais juste pour l’envie de se retrouver à nouveau juste « entre eux »… Faut avouer que l’ambiance et la proximité du petit groupe était très intime, ils en partageaient des choses, sans réellement en être conscient. Une parenthèse dans la vie de famille, si on peut dire comme ça. Les autres suivaient de près, mais ça leur laissait quand même du temps ensemble !
La blonde est partageuse et pas jalouse, quoi de plus normal que de laisser un peu sa place quand l’ambiance se fait moins tendue entre ses compagnons de route ? Elle savait se faire discrète, elle savait s’effacer mais c’était loin de plaire à tout le monde. Pas de soucis, elle trouvait toujours des excuses plus ou moins bonnes pour se dépatouiller des interrogations gênantes. Les promesses sont parfois difficiles à tenir, mais il faut ce qu’il faut pour que tout se passe bien !

Qu’elle soit seule ou non, ce qui comptait c’était l’humeur du Slave et toutes les petites attentions qu’il voulait bien lui témoigner ! Connaissant le malaise, le partage des couches n’était pas facile et les absences se remarquaient vite, par l’un ou l’autre. Certaines colères pourraient être si simplement évitées et dans la caboche d’une petite chose blondine, l’espoir d’un rapprochement encore plus intime ne la quittait jamais, même si ça prendrait beaucoup de temps ! En attendant, le plus dur était de trouver le moyen de disparaître discrètement le temps des ébats et de revenir avant que les esprits ne s’éveillent et le remarquent…


Elles. Ses Délicieuses, ses complices, ses compagnes, « Elles » sont tout à la fois, son tout étrangement, quand l’homme est plus proche de la bête, comme il n’octroyait de compassion qu’à sa fratrie, de tendresse affichée qu’à sa Précieuse, il se surprend à quelques faiblesses, lors de provocations des femelles, un mot, une fuite et le Prédateur de laisser courir alors que son instinct le pousse, il se contrôle des barbaries et, finalement, il découvre l’abnégation. Le Triangle n’est autre qu’un apprentissage quotidien pour chaque membre, ils évoluent au rythme des éclats pour mieux se confronter en échanges corporels, inquiétés ou simplement attentifs au bien de l’autre, pourvu que la ceinture fictive les maintienne toujours proches. Il y veille, la brutalité en toile de fond et la cruauté dans les propos, parfois à l’égard de celles qu’il considère comme « siennes », la colère passe d’abord par leurs dermes soyeux comme la violence s’abat sur un quelconque malandrin, qu’il aura dégoté, au gré d’une balade nocturne.

Le dernier courroux, justement, provoqué par le secret des donzelles, auxquelles il n’aura su délier les langues. Il a mis la pression pourtant, la blondine terrifiée des mots entendus et des gestes rageurs, la promesse de milles douleurs en finalité d’abandon, mais la frêle a tenu et la rousse, cette fois, d’en payer le prix, comme l’opposée fuyait. Maudites femelles qu’il a dans la peau tant que dans la tête.

Faiblesse d’une blonde ou simple instinct de survie ? Difficile de faire la différence quand le prédateur est un Maître dans l’art de déchiffrer les cachotteries… La fuite, y a que ça de vrai en fin de compte, mais le revers est très douloureux. La joue n’a gardé aucune marque visible, le souvenir par contre reste bien brûlant ! Ne rien dire, garder les confidences, c’est pas facile quand même, heureusement que les menaces, d’un côté ou de l’autre, lui font bien assez peur, rien ne sera divulgué. Pas évident d’être Drusilia dans des moments comme ça !
Elle a toujours l’excuse des bestiaux, ça sauve bien aussi quand on veut s’éclipser sans avoir trop d’explications à donner ! Tout est presque réfléchi, du moment que les trois protagonistes restent soudés, seul souhait de l’Insatiable qui s’est attachée à leur compagnie et qui n’arrive pas à imaginer une suite sans leur trio improbable !
Les routes glacées, des gens bizarres croisés au détour des tavernes et pourtant, eux sont toujours là et les tensions semblent bien moins nombreuses au fil des jours, même si de temps en temps, un petit écart fait que le ton peut monter vite… Mais les petites attentions ramènent rapidement le calme. Ils se découvrent chaque jour et trouvent, peut-être sans vraiment s’en rendre compte, les petits gestes qui font que tout fini par s’apaiser, sans blessures inutiles. L’entente semble parfaite entre eux et rien de plus ne semble nécessaire pour le moment, pas même un petit canidé, perdu dans les méandres de la caboche blonde. Chaleur des corps, chaleureuses discussions au gré des soirées, que demander de plus ?





Drusilia_et_ode
En général, j’aime bien être seule.
Ca me permet de pouvoir converser avec Elle qui me bouffe quand même pas mal le cerveau et me prend une grande partie de mon énergie pour ne pas laisser entrevoir ma folie à mes compagnons de route.
Serg’ est l’un des rares à me traiter d’esprit détraqué et je crois qu’il ne sait pas à quel point il a raison.
Mais ma cohabitation avec Drus’ et Niko, m’oblige à revoir mes temps d’intimité, l’homme très à cheval sur notre protection, s’acharnant à nous interdire de trainer seule.

Foutu minet ! Coupe lui les… qu’il arrête d’nous prendre pour un territoire conquis !

Ressasse-t-Elle à longueur de temps, vieille rengaine qui m’amuse.
Bien qu’un jour je risque de crier tout fort ce qu’Elle me susurre tout bas et là, je risque d’être mal.
En attendant, une nouvelle complicité est née avec la blonde, depuis que je ne consacre plus la majorité du temps à moi-même.
Drusilia est drôle, attachante et plus intelligente qu’elle ne le dit. Je la redécouvre et si avant je la considérais comme Louve, aujourd’hui je l’estime Amie.

Il y a quelques jours, j’étais saisie de quelques douleurs musculaires dans le cou et la blondinette m’avait prêté ses mains afin de détendre la zone douloureuse, me prouvant qu’elle pouvait aussi me toucher sans voir en moi ce défi qu’elle s’acharne à garder en ligne de mire : me séduire.
Elle m’avait alors aussi parlé de son don pour des massages plus complets, accompagnés d’huiles et cette idée m’avait séduite. Les longs jours de bivouac nous avaient un peu rouillés.
Le froid, l’inconfort, le sol dur, les ébats effrénés, sont autant de raisons qui font que nous avons apprécié sans le crier trop fort, que le Tigre daigne prendre une chambre dans une auberge.

Je rentrai cette après-midi dans la piaule, où nous nous étions données rendez-vous elle et moi afin que je connaisse enfin ce que les mots « prendre soin de soi » pouvaient bien vouloir dire. J’allai tirer les rideaux, allumai les quelques bougies et défis un des deux lits, qui serait notre lieu de soins.


Les journées s’alignaient mais ne se ressemblaient pas et c’était quand même ça le plus important ! Le trio ne se quittait presque pas et la blonde adorait cette complicité naissante entre eux. Et surtout le rapprochement qui se faisait petit à petit entre elle et la belle rousse. Encore bien loin de la faire succomber totalement à son charme, le chemin parcouru était déjà une victoire en soi ! Promesse de beaucoup d’autres petites victoires, à n’en pas douter.
Impossible de savoir ce qu’en pensait exactement le mâle dominant mais il ne semblait pas contre, du moins c’est ce qu’elle espérait. Les cachotteries l’irritait un peu, c’est sûr, mais rien de bien méchant en fin de compte… Tant qu’elle arrivait à tenir sa langue, tout était pour le mieux. Et le protectionnisme dont il faisait preuve à leur égard la rassurait vraiment. On pourrait le prendre comme une sorte de cage, si on analyse bien tout ce qu’il faut éviter, mais pour la blondinette ça ressemblait plus à une belle bulle protectrice qu’elle comptait bien garder intact !

Mais aujourd’hui, pour l’Insatiable, il était grand temps d’arrêter de rêvasser et de se concentrer sur sa tâche. Promesse faite à Ode de lui faire découvrir les joies d’un bon massage aux huiles parfumées ! La petite fiole qu’elle avait pris grand soin de cacher au fond de sa besace allait faire son œuvre une fois de plus. Elle ne savait pas exactement ce qui la composait et s’en fichait un peu en réalité. Du moment que ça sentait bon et que ça détendait sans brûler la peau, c’est tout ce qui importait. Ode semblait apprécier les massages de ses petites mimines et elle avait bien l’intention de lui prouver qu’elle savait faire autre chose que s’acharner à la séduire. D’une manière bien camouflée, c’est une façon de gagner un peu de terrain, non ? Elle comptait bien en profiter, même si le sérieux de la tâche ne lui laisserait pas beaucoup de manœuvre pour tenter quoique se soit de plus… à moins que…

Arrivée devant la chambre, que le géant avait eu l’extrême gentillesse de prendre pour leur confort, elle ouvre la porte, se glisse à l’intérieur et est surprise par la pénombre qui y règne. Mais très vite, cette ambiance feutrée lui semble parfaite pour ce qui allait se dérouler dans cette pièce ! Un sourire à la vue de la belle et le sérieux de s’afficher sur le visage blondin – faut ce qu’il faut – alors qu’elle sors la petite fiole de sa besace et l’invite à s’installer :


Belle demoiselle, si vous voulez bien vous installer par ici ! *petit sourire amusé et grand geste du bras pour monter la couche, avant de poursuivre* Sur le ventre, le haut du corps découvert. Je ferme les yeux hein, je regarde pas !

C’est inutile de les fermer, pour ce qu’il y a à voir.

Et je m’exécutai avant qu’elle ne ferme les yeux, délaçant les cordes qui resserraient ma robe libérant mes épaules, mon buste en la laissant glisser jusqu’à mes hanches, trop fines pour la retenir.
Ce sont mes mains qui vinrent la maintenir, tandis que je me présentai à demie nue devant la blondinette.
Qu’est-ce que ça pouvait bien faire après tout, avec cette nouvelle proximité elle avait au moins dû apercevoir ces parties de mon anatomie lorsque j’errais dans les bras de Morphée, trop inconsciente pour prendre gare à ma tenue.
Les femmes normalement n’ont pas cette pudeur entre elles, mais la mienne me collait à la peau, comme un vieux reste de timidité qui aura voulu persister.

J’affrontai les iris émeraudes, non sans lui décocher un regard d’avertissement. Que voulez-vous, je n’y peux rien si je suis méfiante.
Et enfin je m’allongeai sur le ventre, ma poitrine de nacre s’écrasant sur les draps de chanvre, mes bras croisés au dessus de moi, afin que je puisse y reposer ma tête, sur le côté.

T’vas voir qu’elle va nous palper en douce la vic’larde !

Peste-t-elle furieusement. Je soufflai sur une mèche rousse qui me chatouillait le nez de façon désagréable.
En réalité, je ne cessai de bouger, ajustant la robe à la frontière de mes reins, croisant les chevilles, les décroisant, retirant ma lourde chevelure de mon dos, expirant un soupir.

T’es aussi à l’aise qu’une morue hors de l’eau hein ! Sympa l’aspect relaxant, j’aime beaucoup, t’as l’mérite d’me faire marrer au moins !

Réplique qui m’arrachai un sourire amusé, en attendant que Drus’ commence.
En effet, j’étais loin d’être à l’aise et je ne savais pas expliquer pourquoi, car la Déesse savait qu’avec le slave, je n’avais pas l’air tant maladroit.


Bon allez bouge Drus’ ! Je me gèle !

Oui, je suis de mauvaise foi, mais je ne vais quand même pas lui avouer qu’elle me fout les chocottes !
Il me reste un peu de dignité tout de même.


Et pourtant, les yeux grands ouverts, il y avait pleins de choses qui attiraient l’œil de la blonde ! Un corps magnifique quoiqu’elle en dise, et l’envie de la charmer encore bien plus présente dans son esprit. L’avertissement pourtant, freine d’instinct le « T’es trop belle » qui lui brûle les lèvres. Ce corps qui l’attire tant, elle allait l’avoir sous ses mains dans quelques instants… mais elle avait promis de ne pas déborder, de rester bien sérieuse, toussa toussa… Mince, la poisse quand même ! De la voir s’agiter autant lui donnait pleins d’idées pas sage du tout, mais c’est très sérieusement qu’elle attrape le drap de la couche voisine et qu’elle la couvre jusqu’à la taille avec, la lèvre inférieure furieusement malmenée.

Comme ça, tu seras plus à l’aise ! J’irai pas plus bas que le drap… Sauf si tu veux que je fasse aussi les jambes !

La fiole est débouchée et une petite quantité de l’huile parfumée versée au creux de sa paume qu’elle fait chauffer contre son autre paume quelques secondes avant de s’approcher du dos offert à ses soins. Dans un souffle la blondine de murmurer : Tu me dis si c’est trop froid hein… D’abord, la nuque, en douceur, petits cercles appliqués du bout des pouces sans trop appuyer à cause de la cicatrice qui peut encore être douloureuse… Elle ne lui a jamais posé la question et de toute façon, ça ne la regarde pas. Et les mains glisse sur les épaules, tous les doigts s’activent en douceur, avec sensualité aussi, faut bien que ça serve un peu quand même ! Palpations discrètes, mais en respectant bien les règles et en restant très sérieuse ! Pas de débordement, même si la poitrine pourrait être si vite atteinte.

Mhm… Il faudrait que tu mettes ta tête bien droite par contre… Que toute ta colonne soit bien dans l’axe…

Comprenez la tête plantée dans la couche ou sur ses mains, au choix… Mais le corps soit bien droit, sinon ça a moins d’effet… Et le but c’est qu’elle soit bien détendue. Si elle somnole en prime, c’est que c’est gagné ! Qui aurait cru que la blonde était masseuse ? Heureusement qu’elle observe beaucoup et qu’elle se borne à vouloir apprendre pleins de choses, ça peut toujours être utile !
Les mains glissent sur la peau nacrée, savourant au passage sa douceur – ben oui, elle en profite aussi, faut pas lui en vouloir – dénouant avec brio quelques tensions musculaires en appliquant des pressions plus ou moins fortes aux endroits stratégiques. Eh oui, elle fait ça bien en plus et sans violence… Une goutte d’huile en plus et la voilà repartie le long de la colonne…


Le contact était plus chaud que ce que je m’étais imaginée.
Il a suffit de quelques mouvements sur ma peau pour que je daigne m’abandonner à la volupté du massage.
Nul doute que le Tigre serait furieux de n’avoir pas pu assister à la scène tant elle dégageait en tension et sensualité.
Les doigts de fées de la blondinette venaient de débloquer l’infime détail qui me faisait passer de désagréable, à tout à fait à l’aise en un rien de temps.
J’expirai un soupir de bien être, obéissant aux conseils de ma masseuse en posant mon front sur mes mains.
Aveuglée, je ressentais bien plus fortement les sensations sur mon corps et je m’étonnai d’y détecter d’agréables frissons naissant au creux de mes reins pour s’étioler jusque dans ma nuque.
La sensation se renforçait, à mesure que les mains habiles s’aventuraient sur ce corps encore jamais traité de la sorte.


Sûr qu’avec l’aut’ là, t’as pas l’temps d’être à poil qu’t’es déjà malmenée.

Oui mais j’aimais ça aussi. Là c’était juste différent, tendre, sensuel, doux, à l’image de celle qui exerçait cet art avec application.
Je ne me rendais pas forcément compte de cette concentration qu’était obligée de déployer Drusilia, pour ne pas tenter d’autres caresses.
Non, j’avais chaud, d’une chaleur agréable qui m’emplissait de l’intérieur à mesure que mes muscles se détendaient.
Avais-je jamais été aussi apaisée de ma vie ? Même Elle devenait un vague écho au fond de mon crâne, s’atténuant à petit feu, comme l’on baisse le volume d’un objet futuriste.
La myriade de picots qui parcourait ma peau diaphane, n’avait rien de désagréable et m’obligeai parfois à me cambrer pour mieux supporter son passage au creux de mes reins.
Par la Déesse, j’étais en train d’apprécier le contact d’une femme et pour l’instant, je ne voulais pas que cela cesse !

S’il te plait…

Haletai-je, presque étonnée d’avoir le souffle un peu court.

Tu pourras continuer ailleurs ? Partout ? Enfin plus bas ?

Qu’est-ce que je disais ! Ca ne me ressemblait pas de ne pas placer le mot juste sur ce que je voulais exprimer. Et pourtant ces mots là étaient à la fois vrais et confus, car je brûlai intérieurement de curiosité.
Que me feront ces mains ailleurs ?


Nikolai.
[Les boeufs made in Normandie]

Le frison renâcle, un sabot cogne nerveusement le sol boueux, lourd des pluies passées, trop humide est la région et le cavalier grogne de subir encore le climat hostile du littoral, alors qu’il talonne les flancs de l’animal qui, sitôt, se meut à nouveau. La large silhouette se détache dans la brume matinale, il s’apprête à rejoindre un semblant de civilisation comme il perçoit déjà quelques signes d’activités de vies sans relief, ceux-là vont aux champs, ceux-ci à la mine et, bientôt, les odeurs entêtantes des échoppes lui agacent les narines, couvrant les relents débauchés de la nuit par des fragrances affamantes.

L’appétit s’éveille à l’instar du village insipide qu’ils occupent d’un séjour moribond, les femelles s’agacent de la longue attente, comme lui s’irrite, elles s’agitent et, d’autant, s’adonnent à l’effronterie, alors le Sombre s’isole, un peu, assez pour qu’elles emm.erdent autrui mais, surtout, assez pour que lui, libère l’ire à d’autres gibiers.
Les première lueurs du jour agressent les prunelles translucides, le crane résonne de l’orchestre qu’il héberge, larsen sous la tignasse et le Slave de maudire l’Astre récemment croisé, d’une beuverie à l’addition salée, comme c’est le bordel dans la caboche. Il se frotte la trogne en pénétrant la taverne, l’acier avise la salle encore désertée et les lèvres de s’ourler quand il s’installe contre un mur, pénombre bienfaitrice dont il espère profiter avant l’arrivée des pinailleuses.

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Natasha_loup
[Genève, pour le plaisir]

La comparer à n’importe quelle femelle était déjà une erreur en soi ; la mettre dans le même panier que les mères en tous genres, tenait clairement du suicide… par chance pour le minot, la Platine ignorait ses pensées profondes, sans quoi le tirage d’oreille n’aurait été qu’un préliminaire bien doux aux tortures qui s’en suivraient. Pour l’heure, elle lui secouait la caboche avec ardeur quand le mot « vieille » finit de l’agacer ; le sourcil se haussa et la voix de répondre, sensiblement menaçante :


Namého ! Il baisse d’un ton l’Gamin hein !

Sauf que le mioche en question décida d’en rajouter une couche, et pas des moindres… le sourire étira les lèvres carmines d’abord ; elle s’amusait toujours de le voir si sur de son charme qu’il prenait râteau sur râteau. Non pas qu’il soit désagréable physiquement, mais l’acné juvénile n’était pas franchement ragoutante et le goupil s’attaquait systématiquement aux femmes plutôt qu’aux chieuses de son âge.
La question finale, en revanche, ne la réjouit pas. L’ambre disparut au profit de l’onyx et la senestre de s’abattre violemment sur la joue imberbe ; les mâchoires serrées, elle siffla :


J’ai pas d’comptes à t’rendre morveux… M’fais pas regretter de t’avoir sorti du giron d’ta mère, t’pourrais y retourner à coups d’bottes dans l’fion sinon !

Est-ce que la Slave imaginait que ça suffirait à museler la curiosité de l’adolescent ? Non, bien sur que non ; simplement qu’elle se donnait le temps de réfléchir à quelconque pirouette…

Aoutch. Quand le coup siffle, il y a de quoi retourner le cerveau de notre adolescent. Elle le surkiffe c’est évident. Aucune femelle ne peut mettre autant de passion sans éprouver... une passion dévorante. En tout cas le Paon national se sent pousser des ailes et pour peu il ferait la roue devant la furieuse slave… pour peu hein. Il tient un minimum à sa vie et s’est rendu compte qu’à force de persévérance et de patience il était parvenu à « adoucir » très très très… très légèrement,
le comportement de l’Irascible envers lui. D’ici quelques années… toute une vie peut-être, parviendra-t-il à ses fins. En attendant il se frotte la joue, rajoutant une grimace pour montrer à la blonde combien elle lui a fait mal, histoire de ne pas abimer l’ego Russe. Bon alors ne nous méprenons pas. Oui elle lui a fait mal, ce n’est pas un colosse insensible à la douleur, loin de là, mais c’est que le boutonneux commence à se transformer en homme et aurait été tout à fait capable de mimer l’indifférence, à l’instar de ces pré pubères insolents.


J’vais où j’veux, et j’étais pas dans l’giron de ma mère, c’moi qui la protégeais surtout !

Râleur, de mauvaise foi, ingrat et totalement siphonné du cerveau ?... Oui il le sait. Par contre, il est loin d’être crétin, le rouquin. Et quoiqu’elle en dise, la Platine s’est défilée plutôt que de répondre.. ce qui n’est pas pour rassurer le jeune fougueux car si elle répond pas c’est qu’elle a un secret, si c’est secret c’est qu’elle veut pas l’avouer, si elle veut pas l’avouer c’est que ça a plus d’importance qu’elle ne veut le dire. Raisonnement infaillible d’un morveux qui a tout compris à la vie. Ouais sauf que ça n’arrange pas ses affaires que Natasha s’éclipse voir il ne sait qui, ça l’empêche d’avancer lui dans sa tentative de conquête blondesque. Par les burnes d’Aristote, cela ne saurait se laisser faire !

P’tain Nat c’est dégoutant ! Han t’es amoureuse ou quoi ? Pouah, ouais y’a qu’ça pour que tu m’foutes une torgnole à une simple question ! Pour sûr t’as l’cœur plus mielleux qu’une minette !

Oups…

C’était officiel, il voulait mourir ! A cet instant précis, elle se souvint pourquoi elle exécrait autant les chiards ; ils chouinent pour rien, se plaignent de tout, bavassent sans cesse et ne semblent utiles qu’à vous pourrir la vie, sans compter qu’ils bouffent comme personne. Fallait voir ce qu’il engloutissait le rouquin ; en pleine croissance soi disant, hin hin… Conclusion hâtive de la Platine, certes mais ô combien perspicace, la preuve est là. Elle l’observa un instant, partagée entre l’envie de lui coller la raclée du siècle et la mission qu’elle s’était auto-confiée…Dans la caboche dérangée, le Loupiot n’aurait su s’épanouir pleinement, coincé entre une mère poule frisant la mièvrerie et ses frères, totalement barrés. On est charitable ou on ne l’est pas.

Bref, elle oscillait la Slave ; agacée par l’effronterie du mioche mais encore plus par sa curiosité… Elle soupira ostensiblement et se redressa en feignant l’indifférence ; le minois se fit angélique et le sourire tout autant :


Alors déjà, t’vas pas où tu veux mais où j’te dis et t’avises pas d’faire l’malin, t’pourrais plus t’asseoir pendant quelques jours sinon.

Attitude digne d’une gravure de mode, la dextre posée à la taille et la tête sensiblement inclinée ; elle repoussa une mèche échappée de la tresse –parce qu’elle le vaut bien, hop, ça c’est fait- et la voix douce mais sans doute plus dangereuse que jamais :

Loup, Loup, Loup… les enfants sont amusants… ou agaçants d’ailleurs, tout dépend de l’appréhension qu’on en a… franchement, moi, amoureuse, non mais à l’eau quoi !! Ne sois pas ridicule, la jalousie te défigure et t’es d’jà pas gâté…

Elle lui claqua un clin d’œil mais ne manqua pas d’afficher un enchantement narquois et de poursuivre calmement en lui ébouriffant la crinière flamboyante :

T’es trop curieux Gamin, mais dans ma grande générosité, j’peux comprendre et j’te pardonne. J’allais préparer les chevaux puisque tu veux tout savoir, il est temps d’reprendre la route, on m’attend ailleurs…

Natasha, ou l’art de la mauvaise foi… manquerait plus qu’elle rende des comptes à un moutard, namého !!

Natasha ou l’art de prendre le gamin pour un co…une quiche surtout. Mais le Paon a autre chose à faire que de se rebiffer sur le coup. Il pourrait sortir sa grande argumentation sur le fait qu’il sait qu’elle fait ça tous les soirs et que ce n’est même pas là la direction des chevaux à moins de faire un détour inutile. Il pourrait aussi rajouter que ce n’est pas son genre de préférer le chemin le plus long, qu’elle et son sale caractère préfèrent foncer dans le tas, l’obligeant LUI, grand guerrier (ou pas), à veiller sur elle plus encore. Ouais tout ça il le pourrait, sauf qu’elle a osé sortir le grand jeu du « je le vaux bien » et qu’il est très connu que Loup est incapable de rester concentré devant cette position en particulier. La bave est limite visible sur le coin de sa bouche ouverte avant qu’il ne déglutisse bruyamment au moment où elle passe sensuellement (ou pas) sa main dans ses cheveux.

Je.. je… ouais les ch’vaux hein. Hmpf.

Il vient gratter le visage boutonneux d’un geste incertain. Faire le p’tit con ou pas… toute l’hésitation se résume à cette question. Faire une scène ? Non c’est un truc de filles ça. Donc le choix se résume à un haussement d’épaules maladroit et à un marmonnement effet « désintéressé » pas très concluant.

Ah ben fallait l’dire, c’pas un travail de femel… demoiselle j’aurais pu t’aider.

Sage décision Rouquin, tu vivras plus longtemps.



Natasha
[Ici ou là… sur la route]

Le rouquin survécu ! La Platine aussi.

Le voyage les éprouva pourtant ; le temps pourri, les rencontres pourries, les déserts pourris… Que du bonheur en somme ; mais le duo improbable persista sans faiblir, ou presque. Sanguine mais non moins obstinée, elle s’était engagée et le loupiot avec ; quoiqu’on en dise, quoiqu’on en pense, elle considérait que l’adolescent était en âge d’apprendre…et, accessoirement, de s’imposer en tant qu’individu plutôt que « fils de ».

Les terres angevines foulées, ils purent recouvrer leurs forces ; escale de quelques jours qu’elle mit à profit… agencer son appart’, approvisionner la taverne, agacer un illuminé porteur de postiche et vêtu d’un kilt –ouais, on croise des phénomènes en Anjou-, encourager l’Oisillon, et elle parvint même à croiser la Miel. Des missives aussi, rarement elle avait tant écrit sans y être obligée ; les billets régulièrement informatifs plutôt que narratifs mais pas cette fois… non, de « La Meute Assoiffée », s’envolaient des emplumés porteurs de courriers ; de ceux qu’on échange pour se rapprocher des siens, quand des lieues vous séparent.

Les retours lui parvinrent alors qu’ils arpentaient de nouveau les routes ; les montures parmi tant d’autres, cavaliers d’horizons multiples…Le Poitou en terrain de jeu inédit, tantôt une auberge Pictave, tantôt un campement et, c’est le faucon qui repartait lesté d’un parchemin.
La tension s’accroissait à mesure que les jours s’écoulaient ; chaque nuit passée était un duel cérébral pour la Slave –je sais, ça surprend mais l’unique neurone résiste… aussi, elle trompait l’ennui en griffonnant plutôt que céder à quelques folies ; l’éviscération d’autochtones sans la moindre saveur, à l’instar de leur corruption putride.

A l’aube d’un nouveau soir, elle siffla Morana ; le rapace répondit à l’appel et vint se poser sur la dextre, protégée de cuir… l’oiseau fut récompensé de viande séchée avant de prendre son envol et disparaître ; un vélin, aussi précieux, pour l’expéditrice que ne l’était l’unique réponse reçue.

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Le_couple_de_vieux
[Le jour s’est levé…]

…je crois que j’ai rêvé, que ce soir je mourrai…*

De nombreuses lunes, suivies d’autant de jours ; la quête blondesque, de toujours, provoquer les cieux, de toujours, braver les dieux…Quel meilleur moyen de tromper l’ennui que partir en campagne ? Quel meilleur moyen d’accroitre les inimitiés qu’en piétinant les lois ? Quel meilleur moyen de combler le vide qu’en s’accoquinant à l’armée ? Les motivations sans importances réelles, l’Arrogante drapée d’une vanité à faire pâlir les Princes-démon ; la proposition n’avait tardé à faire son chemin, dans les méandres de la caboche dérangée…

Des nombreuses lunes, suivies d’autant de jours ; l’assurance de l’aventure, la curiosité de l’expérience nouvelle…Discrète et anonyme, malgré son manque flagrant de modestie ; familière des coups de génie et d’autant plus foireux, malgré sa vingtaine d’années ; elle n’en demeurait que plus excessive et irréfléchie. Violer un comté, participer à la prise de contrôle, flirter avec l’ennemi dans quelques danses macabres…

De nombreuses lunes, suivies d’autant de jours ; la mélodie du chaos, mélopées funèbres et l’Irascible protégée de Péroun…Les bals sanglants se succédèrent, les offrandes de l’acier à Tchernobog…et les rayons du soleil de rendre l’ambre originelle aux prunelles, les reflets dorées à la lourde tresse ; la Slave avançait en compagnie des survivants, savourant chaque victoire sur les ténèbres…

…si ce n’était pas un rêve…qu’il faille s’en aller…*

Repoussés, chassés, vaincus par les armées locales, selon les autorités ; lassés, fatigués, repus par les nombreuses victoires, selon les organisateurs… Ils rendirent le château aux autochtones, lassés du jouet et, grands princes, quittèrent le comté dominé si longtemps –comment ça je suis de mauvaise foi ? Ouais, peut-être un peu, mais c’est mon histoire épicétout !
Quelques heures de repos, un bon bain et la marche reprenait pour d’autres contrées…En théorie, c’était l’objectif, mais en théorie seulement ; la pratique fut tout autre…un régiment, sans doute frustré de leurs échecs successifs, les avait pistés ; une greluche tenta de l’occire, la lame céda des nombreux combats mais l’écu la sauva en trépassant…l'hongre talonné de rage, la Platine traversa les rangs ennemis ; le sourire étira les lèvres alors qu’elle aperçut les remparts guyennais et de ralentir la cadence…Un bruit sourd, le choc fut fatal…

[Campagne Blayaise]


…si ce n’était pas un rêve…ce n’était qu’une trêve dans ma réalité*


La charrette avance lentement afin de préserver le singulier chargement… la vieille femme, assise à l’arrière, est couverte du carmin qu’elle tente de tarir ; l’homme, au visage buriné, s’attache à les mener sans encombre… Il marmonne quelques mots d’un patois passé quand, enfin, la ferme est atteinte et qu’il décharge doucement la voiture ; son épouse s’active déjà et, bientôt, le couple de découvrir le visage de l’inconnue, ramassée à l’aube…

Lui, retourne à l’attelage rapidement ; Elle, s’emploie à nettoyer l’invitée… un vélin échappé du corsage est posé pour plus tard ; les soins sont prodigués avec l’art des mains agiles, le temps comme seul témoin d’un probable trépas…
Elle rejoint son époux, ils échangent quelques phrases ; Lui râle des éventuels problèmes, elle décide d’user du courrier.

…Le voile est levé…qu’ai-je donc à garder…déjà tard…*



* Jean Louis Aubert
Edit = ortho + mise en forme
Carensa.
[Campement au fin fond du Bourbonnais]

Citation:
Qui que vous soyez, j'vous remercie d'avoir pris soin de ma..soeur. Dites moi où vous vous trouvez, je viendrais vous rejoindre dans les prochains jours afin d'être à ses cotés et pour vous dédommager. Ne parlez à personne de sa présence chez vous, je me chargerai de prévenir qui de droit de mon coté.

Merci, j'attends de vos nouvelles.

Carensa



Le velin fût plié et remis au gosse qui se chargerait de le faire partir au plus vite par le pigeon qui l'avait amené.
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Le_couple_de_vieux
[Campagne Guyennaise]

Douleur…celle des plaies ; les chairs profondément offensées sans doute… Elle ignore l’ampleur des blessures ; elle ignore tout en vérité. De cette nuit, elle ne retient qu’une marée humaine, nuée de cadavres qu’elle imagine fondre sur elle pour l’ensevelir.
Fièvre…brulante d’intensité ; la caboche distille, le corps exsude… L’esprit divague encore ; chaque bataille ravive les souvenirs. De cette vie, elle ne retient que le meilleur, bouquet de parfums qu’elle respire et qui l’enivre.

Les paupières closes frémissent alors qu’une silhouette se dessine… drapée dans sa large cape noire, elle lui tend la main ; longs doigts fins décharnés qui prennent la senestre…le souffle glacial de la créature sèche le derme féminin ; le murmure d’outre-tombe chante à son ouïe :

Cette danse est finie…vaincs tes rancoeurs…

La pulpe s’étire d’un sourire apaisé…le mal a disparu au profit d’une plénitude éthérée ; elle serre, s’accroche au timbre lugubre… l’impression de flotter comme si le corps et l’esprit s’étaient scindés ; légère et versatile dans son délire funeste :

Partir pour partir, je ne veux pas attendre...*

Le silence reprend ses droits…TIC TAC… le temps semble s’être arrêté… TIC TAC…le palpitant manque un accord… TIC TAC…la mélodie s’affaiblit… TIC TAC…la présence s’estompe… TIC TAC…la tête menace d’imploser dans l’étau de souffrance… TIC TAC…

Sur un long voilier noir*… TIC… Je quitte vos rivages*… TAC…

Quand l’heure sonne…pas de regret, elle n’est pas arrivée…

C’est le froid qui l’enveloppe maintenant ; la douleur qui irradie par tous les pores… Les râles étouffés s’échappent au contact du linge humide ; le corps tressaille quand, enfin, une perle libératrice fuit les cils…La voix de la vieille femme, chargée des années, lui parvient plus nettement… TIC…


Crévindiou l’oiselle, te v’la revenue, t’es ben vaillante… c’est-y ta sœur qu’va êt’ ben contente…je m’en va lui écrire, rest’don’ calme que j’va pas r’faire l’bandage, té.

Une sœur... La Slave convulse, elle s’agite…un poupon de porcelaine, le visage de sa mère et celui du père… l’onde salée purifie la joue et vient mourir à la pulpe exsangue…TAC…

Morbleu Natasha, t’vas-tu t’calmer, qu’est-ce j’va lui dire à la Carensa qu’tu guérisse don’ pas !

Carrie…

Ultime effort avant de retrouver les ténèbres… La vieille en profite pour quitter le chevet et d’envoyer un nouveau message.

Pensées de Natasha
** « A mourir pour mourir » - Barbara
Carensa.


La mort n'est pas une fin en soi, mais quand même..

Ne t'en va pas
Te confiner aux oubliettes
Je n' suis pas prête
À te coiffer de cette croix
Où l'on aurait
Gravé ton nom avec des dates
Que l'on plant'rait
Comme un vulgaire plant d' tomates



Que les jours peuvent paraître interminables lorsque l'on attend une réponse. Comme les nuits vous semblent plus sombres quand l'inquiétude vous hante. Comme la vie vous paraît sordide quand vous vous sentez inutile..

Natasha..ne me quitte pas..pas maintenant..attends moi..

Les yeux braqués sur le ciel inondé d'étoiles, la rousse s'était prise à prier. Elle qui ne croyait en rien, s'était entendue murmurer une prière. Pourquoi ce besoin de se rattacher à quelque chose lorsque l'ont croit que tout est ..fini ? Simplement parce que croire s'était avoir encore l'espoir ...

Le campement était petit à petit replié, encore quelques jours de repos et ils reprendraient la route.

Elle était à s'occuper d'Ira lorsque le gamin de l'autre jour arriva pour porter un nouveau message dont elle prit bien vite connaissance. Rejoignant le groupe qui était attablé elle fût brève :

J'dois prendre la route ce soir, j'reviendrais aussi vite que possible avant le départ

Ils ne demandèrent rien, car dans ce groupe là on ne s'occupe pas des affaires des autres, on ne demande pas de compte, et on tolère de pouvoir avoir un avis, ça n'est pas donné à tout le monde d'être ouvert de la sorte mais son « groupe à elle » l'est, comme la meute l'avait été.

Les fontes furent bientôt installées sur Ira, Carrie suivie, Sasha contre son sein.

Le temps était clément, elle pourrait balayer les lieues qui les séparaient. Dans sa tête les mots résonnaient et l'inquiétude grandissait au fur et à mesure que les sabots d'Ira s'approchaient de leur destination.

Cinq jours..ils avaient mis cinq jours, dormant peu, mangeant vite. Une chance qu'elle ne soit pas épaisse ça permettait à Ira de pouvoir marcher plus longtemps et donc de faire gagner des lieues à tout le monde.

Au petit matin du cinquième jour, ils entraient dans l'enceinte bordelaise. Elle chercha un long moment, suivant petit à petit le parcourt des armées. Une femme et un enfant, y'avait pas à craindre grand chose. Sasha comme « laisser-passer ». Il y avait quelque chose d'ironique là dedans, lui qui avait été la cause de son départ de vers « elle », aujourd'hui il « servait » à la retrouver. On se prenait même à avoir de la pitié pour la rousse, et elle d'en rajouter. Les lieues coulèrent encore avant d'arriver dans un petit village dont elle ne savait même pas le nom, à quoi bon, elle connaissait celui des précieux « protecteurs » de sa blonde, elle avait même inventé une histoire de famille pour retrouver ses « grands-parents » Ginette et Roger.

Une taverne, un vieil homme et celui-ci de lui indiquer l'adresse du vieux couple. Sasha dans les bras, caché sous l'épaisse cape, épuisée, elle frappa à la porte...


C'est pas ton heure
Et çà n'est pas demain la veille
Que ton grand coeur
Aura à c' point besoin d' sommeil*


*Ne t'en va pas - Lynda Lemay
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Le_couple_de_vieux
[Guyenne, toujours]

C’est comme ça
Y’a rien à dire

Sitôt qu’c’est l’heure, on doit partir
On s’casse le cœur, comme une tirelire
On laisse derrière c’qu’on a d’plus cher
Et on recommence ailleurs…

C’pas vrai qu’on meurt*


Le temps s’égraine dans le sablier, elle le passe à lutter ; conscience et limbes se disputent la caboche aurifère… tantôt les souvenirs l’entrainent, l’éthérée d’un ballet rassurant auquel elle s’abandonne ; tantôt la plaie la rappelle, brutalité des chairs offensées qui la savent vivante. Etranges paradoxes que ces douleurs bienfaitrices qui exigent une nouvelle victoire…Le jeu se poursuit d’attente cruelle ; le gong ne retentit pas encore et la Faucheuse de patienter au sommeil.

Cronos mène la danse, les moires se lassent, Hadès s’agace… Elle, semble s’épuiser à la lugubre farandole, fausse note du palpitant, soubresaut inquiétant ; on la rattrape, on étanche la soif et de repartir dans la ronde…à la cadence d’un requiem lancinant, elle cède à la protection d’une voix usée, d’un regard ridé.
Ainsi les jours passent, rythmés par les soins prodigués ; l’esprit ne s’évade plus que rarement, la Platine affaiblie mais sauvée.

C’est comme ça,
C’est bien dommage
Sitôt qu’c’est l’heure, on ferme sa gueule
On remet son cœur, dans ses bagages (…)
On laisse derrière, c’qu’on a de plus cher
Et on recommence
On recommence…
C’pas vrai qu’on meurt.*


Le couple avait-il changé ses habitudes depuis l’encombrante invitée ? Peut-être un peu, peut-être pas… La ferme paraissait isolée, enveloppée de tranquillité ; le silence troublé par les seules voix salvatrices ou quelques chants animaliers.
Lui, s’est absenté dés l’aube pour affaires ; Elle, vaque à ses corvées entre deux bandages à la convalescente…

Oups!


Crévindiou, l’soupièr’ d’la Raymonde!... v’là, v’là, j’va ouvrir, ça vient!

Elle ouvre la porte sur une jeune inconnue qu’elle scrute d’un œil curieux ; les poings sur des hanches aux nombreux enfantements, elle lorgne sur la rousse avant d’apercevoir le bambin qu’elle niche… Le sourire attendri s’appose au visage craquelé et de libérer l’accès :

Mort’couille ma fille, qu’tu fais tu don’ perdue là ? Entr’don qu’tu vas t’en j’ter un, t’donnera des couleurs, té !

Ginette l’invite à s’installer pendant qu’elle lui sert un verre de nectar local ; sur la table, cochonnailles et pain frais trônent déjà… L’ancienne de nettoyer les dégâts et l’interrogatoire peut commencer :

Comment c’est don’ qu’tu t’appelles ? Bois don’ qu’on l’fait ici, c’pas d’la vinasse aigre, té ! l’est à toi l’petiot ? Pis comment qu’t’es rendue là ? T’pas ben épaisse dis, manges un bout !

Un court répit alors qu’elle reprend son souffle et qu’elle s’envoie une bonne rasade de vin… Profites-en rouquine ou la Ginette va t’assommer de questions !


* « C’est comme ça » - Linda Lemay
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