Ode..
[Quelque part en Bourgogne]
Je déteste la blondasse. Non contente de m'ennuyer de son vivant, elle continue de le faire une fois six pieds sous terre.
Je sais que j'aurais pu la libérer de ce marmot au lieu de lui mentir pour avoir le plaisir de la voir grossir et se déformer et même de frôler la mort.
Je sais que je pouvais la suivre durant sa grossesse, lui interdire de mener ce dernier combat fatal -bien qu'une moins cruche aurait pu se douter de l'incompatibilité du projet-.
Mais de une cette gosse m'insupportait, de deux, une idiote de moins dans ce royaume ne fait pas de mal et de trois, je ne suis pas sa mère !
Alors pourquoi est-ce que je me retrouve avec cet encombrant couffin à trimbaler durant nos longues escapades ? Parce que mon métier de faiseuse d'anges me confère certainement cette "légitimité" dont je me serais bien passée.
Certes la gamine est mignonne, oui je gagatise lorsque la meute tourne le dos, surtout lorsque Lui, le Tigre, tourne le dos, mais j'avoue tenter régulièrement d'abandonner la dénommée Myrtille aux bras de la Mère du groupe, Lady, qui ainsi, cesse de me materner moi, pour combler le manque de ses enfants chéris en le renvoyant sur un nouveau poupon.
Je refuse de m'attacher à cette petite chose, je veux qu'on s'en débarrasse, qu'on le vende comme le veut la Platine, qu'on en tire le meilleur prix possible et que cesse cette culpabilité qui s'installe et commence à prendre racine dans mon ventre.
Elle, au fond de ma tête, sort de son mutisme pour me rappeler à l'ordre.
Assume tes actes. Nous y avons pris du plaisir.
Oui, c'est vrai et j'ai même jubilé lorsque j'ai vu s'éteindre l'oeil unique de la blondie, tout en serrant dans mes bras cet être fragile.
Une mort pour une vie, cela se valait bien. Et si nous lui trouvons la famille adéquate, l'enfant deviendra plus intelligent, plus riche, plus doué, plus parfait donc.
Et quelle meilleure revanche que d'imaginer la fille surpassant sa mère ?
Aujourd'hui, j'entre dans une taverne alors que nous bivouaquons à l'extérieur de la ville.
Le couffin est abandonné sur la table, heureuse de pouvoir me libérer de ce fardeau qui m'a affaibli.
Je m'observe dans le reflet du miroir posé sur l'âtre de la cheminée et ne peux que constater mon teint cireux, mes cernes sombres, la maigreur de mon corps. J'ai cessé de m'alimenter correctement, par oubli, ou fatigue à l'idée de chasser puisque mes nuits ne cessent d'être interrompues par les braillements du bébé.
Cette petite aura déjà hérité de la même capacité vocale que sa défunte mère.
Mon bras se lève et je hèle le tavernier d'un geste las.
Du vin et un peu de lait.
Je lance un coup d'oeil sombre au tenancier et le message est on ne peut plus clair "m'emmerde pas, je ne suis pas d'humeur". Pourtant, Elle croit bon de me faire rajouter un :
S'il vous plait.
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Je déteste la blondasse. Non contente de m'ennuyer de son vivant, elle continue de le faire une fois six pieds sous terre.
Je sais que j'aurais pu la libérer de ce marmot au lieu de lui mentir pour avoir le plaisir de la voir grossir et se déformer et même de frôler la mort.
Je sais que je pouvais la suivre durant sa grossesse, lui interdire de mener ce dernier combat fatal -bien qu'une moins cruche aurait pu se douter de l'incompatibilité du projet-.
Mais de une cette gosse m'insupportait, de deux, une idiote de moins dans ce royaume ne fait pas de mal et de trois, je ne suis pas sa mère !
Alors pourquoi est-ce que je me retrouve avec cet encombrant couffin à trimbaler durant nos longues escapades ? Parce que mon métier de faiseuse d'anges me confère certainement cette "légitimité" dont je me serais bien passée.
Certes la gamine est mignonne, oui je gagatise lorsque la meute tourne le dos, surtout lorsque Lui, le Tigre, tourne le dos, mais j'avoue tenter régulièrement d'abandonner la dénommée Myrtille aux bras de la Mère du groupe, Lady, qui ainsi, cesse de me materner moi, pour combler le manque de ses enfants chéris en le renvoyant sur un nouveau poupon.
Je refuse de m'attacher à cette petite chose, je veux qu'on s'en débarrasse, qu'on le vende comme le veut la Platine, qu'on en tire le meilleur prix possible et que cesse cette culpabilité qui s'installe et commence à prendre racine dans mon ventre.
Elle, au fond de ma tête, sort de son mutisme pour me rappeler à l'ordre.
Assume tes actes. Nous y avons pris du plaisir.
Oui, c'est vrai et j'ai même jubilé lorsque j'ai vu s'éteindre l'oeil unique de la blondie, tout en serrant dans mes bras cet être fragile.
Une mort pour une vie, cela se valait bien. Et si nous lui trouvons la famille adéquate, l'enfant deviendra plus intelligent, plus riche, plus doué, plus parfait donc.
Et quelle meilleure revanche que d'imaginer la fille surpassant sa mère ?
Aujourd'hui, j'entre dans une taverne alors que nous bivouaquons à l'extérieur de la ville.
Le couffin est abandonné sur la table, heureuse de pouvoir me libérer de ce fardeau qui m'a affaibli.
Je m'observe dans le reflet du miroir posé sur l'âtre de la cheminée et ne peux que constater mon teint cireux, mes cernes sombres, la maigreur de mon corps. J'ai cessé de m'alimenter correctement, par oubli, ou fatigue à l'idée de chasser puisque mes nuits ne cessent d'être interrompues par les braillements du bébé.
Cette petite aura déjà hérité de la même capacité vocale que sa défunte mère.
Mon bras se lève et je hèle le tavernier d'un geste las.
Du vin et un peu de lait.
Je lance un coup d'oeil sombre au tenancier et le message est on ne peut plus clair "m'emmerde pas, je ne suis pas d'humeur". Pourtant, Elle croit bon de me faire rajouter un :
S'il vous plait.
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