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[RP] Ce soir, c'est moi qui cuisine ... (*)

Mahelya
... Enfin surtout Elles ...

    Un cuisinier, quand je dîne
    Me semble un être divin
    Qui du fond de sa cuisine
    Gouverne le genre humain.

(de Antoine Désaugiers)


A chaque grande occasion devait se tenir un grand festin. Du moins c'était la façon de voir de la Jeune Rousse, qui ne perdait jamais une occasion d'aider à organiser des fêtes somptueuses. Et quelle plus grande occasion que le mariage du Comte du Limousin avec la Mairesse de Limoges ? Chacun apportait sa pierre à l'édifice afin que la réception soit mémorable. Mahelya, passait le plus clair de son temps à tisser nappes immaculées et serviettes rouges carmin. C'était les tons qui avaient été choisis, c'est donc ceux qu'elle avait fabriqué avec attention et concentration, une pointe de personnification pour que leur mariage soit unique. Le tissu choisi était fin et irisé, du plus bel effet à la lumière des chandeliers. C'est que l'Incandescente s'était appliquée. Puisqu'il semblait que ce soit les seuls mariages auxquels elle ait le droit à présent. Le cœur se serra imperceptiblement, mais suffisamment pour que le souffle devint court, tandis que l'esprit chassait de son mieux l'obscurité envahissante, au fond de son être. Il y avait bien d'autres priorités pour le moment. Un mariage ! Bref ... Tisser c'était bien ! Mais ce n'était pas assez, selon les concepts de l'adulescente, aussi avait-elle sauté sur l'occasion lorsque Victoire s'était demandée si elle arriverait à préparer le banquet seule, en proposant l'aide de sa Fidèle, Bertille.
Le temps était froid dans les Rues de Limoges, et les fines mains resserrèrent le col en fourrure autour de la gorge délicate.


- Et c'te Victoire, Z'êtes sûre qu'elle sait cuisiner ?
- Oui Bertille j'en suis certaine. Presse le pas. Le mariage du Comte a lieu dans trois jours, il est plus que grand temps de vous présenter l'une à l'autre pour que vous puissiez commencer à travailler de concert.
- Et Z'êtes sûre qu'vous voulez faire d'paon ? ... Bordel ! c'est qu'on va s'amuser avec leurs plumes.
- C'est toujours comme ça avec toi, tu râles au début alors que tu es ravie de préparer un banquet.
- C'est pas faux ! ça va m'changer des ragouts ! Et puis j'vais laisser aller ma créativité. C'est bien comme ça qu'vous dites ?
- Tout à fait ! Allez ! Viens presse le pas, la taverne n'est plus très loin.


La petite chausse blanche pressa le pas sur les pavé de la rue de la Justice à Limoges. La Rousseur avait promis à Victoire, de lui amener sans délai, la fameuse cuisinière qui ravissait ses papilles depuis son enfance. Donc ni une, ni deux, la Frêle et la Généreuse, après le repas de midi qui fort gouteux - Un jambon en croûte agrémenté de quelques légumes mijotés et un gâteau moelleux aux raisins secs - , emmitouflées dans leurs capes, avait mis leur nez dehors afin d'exécuter la promesse formulée un peu plus tôt dans la journée. C'est que la jeune fille s'était engager à aider à l'organisation du mariage du Comte, et malgré tout ce qui était advenu au court des dernières semaines et qui l'avait ébranlé au plus profond d'elle, L’Étincelle se devait de respecter sa parole envers Erabal et Asarine qui eux, n'y étaient pour rien.

- Dites ! y'a un chose qu'je comprends pas ... Pourquoi z'êtes tavernière ? Z'en avez pas b'soin ? Encore que ... Si ça vous donne l'sourire moi ...
- Allez viens ! dépêches-toi ! C'est juste là, nous sommes arrivées, j'espère qu'elle sera là.


Éviter les sujets qui fâchent, voilà la politique de la Rouquine quand enfin elle se retrouve devant la porte de la 1001 chopines. * Tais-toi Bertille, Passons à autre chose. *. Délicatement la petite main blanche et fine ouvrit la lourde porte de chêne et doucement la Silhouette de la Frêle entra, suivit de près par celle de la Généreuse aux courbes féminines débordantes et rondes. Le passage de la clarté extérieure à l'obscurité intérieur aveugla quelques secondes la Flammèche, bien que les sinoples balayaient la salle avec attention.

- Victoire ? Victoire, vous êtes là ? ... Bertille m'accompagne ... Nous devons discuter du menu pour vendredi.

_____________________
(*) Titre largement inspiré du livre de recettes Oui, Chef ! C'est moi qui cuisine.
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Victoire_

« Quand le vin est tiré, il faut le boire » *


[nuit du 14 au 15 janvier]

Mais où avait-elle donc la tête la blondine d’avoir prolongé son séjour à Ventadour ?
Le mariage, Asa, Erabal ! Trois jours, il ne restait que trois jours !!!
Et c’est en catastrophe qu’elle partit de Ventadour cette nuit là, talonnant son cheval tout en lui murmurant :


Fonce Valen, plus de temps à perdre!

Plus facile à dire qu’à faire, surtout quand vous avez un malotrus qui surgit des fourrés et tente de vous désarçonner à coups de bâtons !
La blondine n’apprécia pas, mais alors pas du tout, esquivant les coups elle sauta de sa monture et se battit becs et ongles jusqu’à faire plier l’homme.

Temps perdu pour temps perdu, elle approcha sa torche du visage de l’homme pour en bien retenir les traits lorsqu’il fût à genoux à s'excuser.
Elle repartit aussitôt le laissant là, elle trouverait bien le temps de dessiner son portrait plus tard.


[Taverne "Aux 1001 chopines" matin du 15 janvier]


Rageant contre elle-même quand elle s’aperçut qu’elle n’avait pas laissé suffisamment de boissons durant son escapade, elle descendit rapidement à la cave pour en remonter un tonnelet avant que des clients éventuels arrivent.
Elle était à dessiner le portrait du brigand, lorsque Mahelya arriva, accompagnée de Bertille, la fameuse Bertille dont Mahelya lui avait tant parlé.

Laissant la sa tâche, se levant pour les accueillir, ne sachant pas trop si Bertille accepterait de partager son savoir avec une humble cuisinière telle que la blondine, elle esquissa tout de même un sourire et les salua d’une légère inclinaison de tête.


Bonjour Mahelya.

Bertille, ravie de vous rencontrer, Mahelya m’a dit tant de bien de vous et de vos talents culinaires.


Froissant nerveusement et ce, le plus discrètement possible, une des manches de sa houpelande, un serrement de gorge l’étreignit. "Pas de panique, quand il faut y aller, il faut y aller. Tu t'es lancée dans l'aventure, il faudra bien aller jusqu'au bout." pensa t’elle.

Je vous en prie, prenez place, vous prendrez bien quelque chose à boire le temps de notre discussion.




*Proverbe Français.
La_cuisiniere
    A tout repas, la faim est la meilleure et la plus piquante des sauces.

(de Chrétien de Troyes)

Au tour de la Généreuse de s'avancer et de toiser la jeune femme, encore un peu contrariée par la manipulation de Mahelya qui a évité un sujet que la Cuisinière aurait vraiment aimer aborder avec elle... Bref, retour à la dite Victoire. Elle n'est pas bien épaisse mais c'est vrai que toutes les cuisinières ne sont pas forcément aussi gourmandes que la pauvre Bertille, qui ne sait résister aux sauces et autres mets dont elle a le secret. Les yeux sombres observent la Blonde et s'arrêtent sur un détail, infime, imperceptible pour le novice en cuisine : Les mains ! Cette femme travaille la viande à coup sûr, elle le jurerai sur ce qu'elle a de plus cher : son tablier et son livre de recette transmit de générations en générations. Une chance, car ladite Victoire sait forcément manier le couteau. Sans plus tergiverser, la Ronde s'approche plus encore, un sourire sur son sourire aux quelques dents manquantes.

- Dit' voir, Vous'auriez pas une affinité avec l'viandes par hasard ? Il m'semble bien ! J'me trompe ou pas ?

La phrase était sortie comme ça de but en blanc, sans même un bonjour avant. Sur le coté la cuisinière remarqua la jeune rousse secouer la tête levant imperceptiblement les yeux au ciel. Bordel ! Et la Politesse Bertille qu'en fais-tu ? Toussotant légèrement elle reprit néanmoins de la même voix assurée.

- Ouais, Bertille c'est moi ! et j'suis égal'ment enchantée d'vous rencontrer Victoire. J'ai entendu aussi parler d'vos talents culinaires.


Puis jetant un regard sur sa maitresse qui esquissait un faible sourire. Elle se permit d'ajouter en prenant place.

- J'suis pas contre un petit verre ! C'qu'il vous plaira !
- Ne bougez pas, je m'en occupe. Ne bougez pas toutes les deux et commencez donc à échanger vos idées.


Ca, c'était la voix de Mahelya qui se dirigeait déjà vers le comptoir. Norf de Norf (*) Se faire servir par sa maîtresse voilà qui était une situation cocasse pour la Généreuse, Bien sur elle était habituée à la gentillesse de la Rousse qui l'aidait parfois dans les tâches journalières mais de là à ce que ça se passe en public, ça avait de quoi étonner Bertille. Mais en même temps ça semblait naturelle pour la petite Flamme, après tout n'était-elle pas tavernière ici ? Les yeux sombres se rapportent doucement sur la futur partenaire de cuisine.

- Bon p'êtes bien que la P'tit Flamme vous a parlé de son idée de paons à remplumer une fois rotis ? Mais vous, Z'avez des idées ? j'cru comprendre, qu'le banquet serait ouvert pour tous ! donc m'est d'avis qu'il nous faut beaucoup d'volailles, comme des pigeons, des cailles, des poulets et des coqs. Z'en pensez quoi vous ? J'vous écoute.

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Edit : (*) Han vile étrouderie norf de norf est une expression berrichonne qui marque la surprise. Bertille utilise parfois du jargon Berrichon.
Victoire_

S’il y avait bien quelque chose qui la mettait terriblement mal à l’aise c’était bien qu’on l’observe de la tête aux pieds, le regard de Bertille sur la blondine était plus que scrutateur et elle se sentait bien fluette dans ce face à face. Mais comme à son habitude Victoire tentait de ne rien laisser paraître de ce qui la touchait au plus profond d’elle-même.

Toujours une esquisse de sourire au coin des lèvres, ses azurs observaient également, son sang ne fît qu’un tour lorsque la cuisinière s’approcha d’elle, se demandant bien à qu’elle sauce elle allait être mangée, mais de sa place ne bougea pas et fût enfin rassurée au sourire de Bertille.

Un sourcil qui s’arque légèrement, étonnement de la blondine , comment la cuisinière pouvait-elle savoir qu’elle était bouchère ? Réflexion rapide avant de répondre à la question, baissant légèrement la tête afin de voir si sa tenue était immaculée, ce qui était bien le cas, puis discrètement regarda ses mains, quelques très fines cicatrices claires étaient encore légèrement visibles.
Souvenir révolu de ses débuts, ou presque, ses gants en maille de fer lui étaient devenus fort utiles évitant depuis toute blessure lors des désossages ou découpes, enfin … sauf quand les gants restaient sur le billot lorsque la tête était ailleurs...

La tête se releva lentement, les prunelles bleues se posèrent dans le regard sombre à quelques centimètres d’elle, le sourire se fît plus franc :


Très bonne déduction, je suis bouchère.

Au vu du sourire de Bertille, un premier cap venaît d'être franchi et certainement avec succès , la suite serait-elle dans la même lignée ?
Mahelya avait donc parlé d’elle à sa cuisinière, il fallait bien reconnaître que son rôti d’agneau aux herbes faisait la réputation de sa taverne.


Citation:


- Ne bougez pas, je m'en occupe. Ne bougez pas toutes les deux et commencez donc à échanger vos idées.



Laisser faire Mahelya, ne pas la laisser faire ? L’hésitation ne dura pas, Mahelya avait raison, mieux valait entrer rapidement dans le vif du sujet, le temps leur étant compté.
Un quart de tour sur elle-même :


Merci Mahelya, et si vous cherchez quelque chose d’un peu plus ... particulier comme boisson, vous savez où pourrez trouver, puisque vous avez la clé. Discret regard entendu à la rouquine qui savait très bien de qu’elle pièce il s’agissait.

Revenant à Bertille.


Mahelya m’en a en effet parlé je trouve que c’est une excellente idée.
J’y rajouterai des faisans à remplumer, ce qui pourrait faire pendant avec les paons, du cochon de lait grillé permettrait une variété dans les viandes, et bien entendu les sauces qui les accompagnent.
Ce qui serait d’ailleurs de bon goût à mon avis dans la disposition des plats , le cochon de lait sur un socle de pâte, entouré de deux paons et s’ensuivraient les autres volailles.
Il faudra penser au choix des légumes qui accompagneront le tout, des entremets pourquoi pas, sans oublier le choix des boissons.

Mahelya
    S'enivrer du plus doux nectar, n'apaise pas la douleur de l'âme.

La Frêle opina doucement du chef avant de prendre la direction de la Cave, qui fut un temps, tant convoitée. Elle se souvenait du Balafré qui était sien à l'époque, menacer de la fouiller intégralement pour retrouver la précieuse clé, gardienne des délicieux nectars que Victoire avait amassés, accumulés, entassés durant des jours, des semaines peut-être des mois dans ce sous-sol humide à l'abri des rayons du Soleil. Le cœur, bien que devenu glace ce serra à la réminiscence du temps où l’Étincelle était heureuse. Époque lointaine où elle croyait encore devenir Flamme scintillante de mille feu. Révolu, oublié, consumé, le temps du bonheur avait filé. Le Blond n'était plus sien et ce n'était l'affaire que de quelques heures, avant que le couple qu'ils formaient, ce "nous" tant aimé, ne soit dissout. Comme le serment d'une délivrance prochaine au néant, la Flammèche, devant la porte de la cave, flatta la doublure de sa robe, où reposait depuis quelques jours, une fiole de Belladone. - Pauvre flacon qui finirait sa course, brisé par Nizam sur le sol d'une taverne le lendemain... - Pour l'heure, il est là, dissimulé, compagnon secret d'une femme brisée, à l'abri dans la double couture de son jupon. C'est une promesse, un espoir, une quête. S'affranchir de tout pour oublier, ne plus respirer, ne plus penser, ne plus aimer, ne plus être... Les jours passaient, les minutes s'égrainaient et le vide ressentit la brûlait tout entière. La mort plutôt que la Folie ... Ne plus être plutôt que n'être qu'à demi.

Elle prenait son temps la Toute petite Flamme avant de remonter avec une bonne bouteille. Bien évidement, elle avait noté l'étonnement de la Généreuse lorsqu'elle avait proposé des les servir elle et Victoire. Mais Mahelya n'était pas vraiment en état de tenir une conversation tout aussi badine qu'elle soit. La raison de son volontariat c'est que derrière le comptoir, elle pourrait ruminer, seule, ses sombres pensées et l'occasion proposée par la Blonde propriétaire n'avait été que trop bonne. Isolée en sous-sol pour quelques instants. Même s'ils seraient de courte durée, ils ne pouvaient être que salutaire. Les doigts fins s'agitaient autour de la silhouette de la fiole. L'envie en devenait presque incontrôlable. Là, ici, dans ce sous-sol humide, qui vraiment pouvait l'empêcher de boire le jus de baies mortelles ? Un instant, L’Étincelle faillit céder au chœur des anges, mais ce n'était pas le moment, une ultime chose restait à faire : Lui rendre sa liberté, celle qu'il chérissait tant, celle contre qui la Frêle avait perdu... Une fois encore l'étau enserra davantage le palpitant agonisant. Il fallait qu'elle remonte, qu'elle serve à tous ce masque de mensonges, encore pour quelques jours. Ce costume qu'elle portait pour tous, tout comme sa peine la faisaient suffoquer, et devenait de minutes en minutes étriqué. Chaque souffle était une torture comme des aiguilles plantées dans ses poumons, chaque battement de cœur lui rappelait avec bien trop de violence qu'elle existait encore, chaque mot prononcé confirmait qu'elle ne s'était pas encore laissée enlacer par l'éternité... Cette existence ne valait pas la peine d'être vécue et la Belle Dame de la Mort en serait le sauveur inespéré ... Bientôt ... Bientôt ... Petite Flamme.

Les sinoples balayaient les étiquettes qui en temps normal auraient été plus alléchantes les unes que les autres. Finalement la fine main blanche se saisit d'un Bordeaux. Après un instant d'hésitation, une longue inspiration, elle gravit les marches afin de retrouver la salle. A mesure qu'elle s'élevait, le sourire mensonger fleurissait sur ses lèvres purpurines. Et c'est la parfaite illusion qu'elle servit aux deux femmes quand elle s'adressa enfin à elle.


- J'en ai mis du temps, mais j'ai enfin trouvé la Bouteille que je cherchais ! Un bon bordeaux à la robe pourpre flirtant, selon la lumière, avec le noir.

Noir, joli noir, voilà qu'on en revient toujours à toi ... * Fait fi Jeune Fille, pour quelques jours seulement ... Fait fi ... Bientôt ... Bientôt ... L’Étincelle deviendra fumée balayée par le vent. * Les godets furent remplis et servis et l'Incandescente prit place à la table des pourparlers. Illusion ... Illusion ... Il faut la maintenir aussi longtemps que possible.

- Alors ? qu'elles sont déjà vos idées ?
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La_cuisiniere
    Le vin est la partie intellectuelle d'un repas. Les viandes et les légumes n'en sont que la partie matérielle.

(de Alexandre Dumas)

Loin, très loin de se douter des pensées de sa petite Maîtresse, la Généreuse écoutait avec attention les idées proposées par la dénommée Victoire. Un cochon de lait, voilà qui était assez simple à réaliser et qui permettrait de nourrir en grande quantité les invités. Et déjà dans son esprit se formait les images des plats qu'elles allaient présenter. Ce cochon sur son socle de pâte encadré par deux paons et quatre faisans, ornés de leur plumes lissées et lustrées, comme s'ils en étaient couronné. Les plus beau apparats pour la plus belle des cérémonies. Ce serait grandiose, magistral mais toujours de bon gout. Voyons voir ce qu'elle pourrait ajouter au festin. Les rouages de l'esprit de la cuisinières se mettent en marche à vive allure et déjà elle imagine les soupes, douceur et légumes qui accompagneraient la viande de premier choix. Un florilège de recettes toutes plus succulentes les unes que les autres se mettent à défiler devant ses yeux. Poireau, céleri, mâche, champignons, et potirons seraient des compagnons idéals pour toutes ces douceurs culinaires. Cette cuisine avec Victoire, sera du grand art.
Les onyx pétilles à mesure que les idées viennent. L’excitation de cuisiner prenant le pas, la Bertille ne peut que déballer un flot de paroles toujours plus enjouée.


- Victoire ! j'vous aime bien ! Z'avez de très bonnes idées ! L'cochon d'lait j'adhère immédiat'ment ! ça permettra d'remplir les ventres.

La silhouette aux formes féminines débordantes se pencha davantage sur la petite blonde.

- Votre idée d'présentation et magnifique ! un cochon d'lait au centre, deux paons qui l'encadrent, puis quatre faisans. Ces six volailles s'raient toutes remplumées signes de l'importance d'la cérémonie. Après on pourrait présenter d'vastes plateaux d'poulets et d'cailles grillés. Qu'ques civet d'lapin aux épices clou de girofle, cannelle et noix d'muscade aussi.
Pour les légumes en cette saison, Z'avons l'choix entre les champignons, les poireaux, l'céleri, les portirons et variants, les carottes, les bettraves. On pourait bien faire des potages, des purées, des crèmes aussi. Qu'ques châtaignes et amandes grillées pourraient apporter un peu d'croquant pour réveiller les papilles. Pis z'avons des oeufs aussi, on pourrait bien faire qu'ques omlettes farçies.
Pour les desserts, nous p'vons composer avec les pommes et les poires.
Et les douceurs, pourquoi pas qu'ques dragées et pâtes d'fruits ?
En tout cas, 'vec nous derrière les fourneaux, c'banquet va être grand !


D'avoir tant parlé, le gosier de Bertille en était desséché, c'est alors que les onyx se firent plus sombres en constatant l'absence de Mahelya. Soit la cave était drôlement profonde, soit la petite Rousse avait une fois de plus, une soudaine envie de solitude. Ce qui avait été pris au départ comme une chose naturelle venant de la part d'une jeune fille qui devenait femme, commençait à inquiéter sérieusement la cuisinière. Ses crise devenaient de plus en plus fréquente et duraient parfois des heures. La Généreuse se fit la promesse de coincer la jeune fille entre quatre yeux. L'habitude de vivre avec la Volcanique, lui avait appris que lorsqu'elle dissimulait ses sentiments, cela ne laissait rien présager de bon. L'attention se rapporte sur la Blonde. * Ne pas embarrasser l'Etincelle, parler pour cacher son absence et les questions dérangeantes qui en découlerait. * Le visage grassouillet de la cuisinière se fend alors d'un sourire joviale, un peu forcé mais sincère.

- Dites vot' cave est si profonde qu'ça ? En tout cas pour les vins, un bon rouge, bien épais en bouche s'ra parfait pour les viandes de gibier, comme un bordeaux par exemple. Un vin plus doux comme un Bourgogne pour les viandes blanches. Mais vous d'vez mieux vous s'y connait' qu'moi. J'vous laisse le choix.

La phrase fut ponctuée par la réapparition de la Petite Flamme. Les perles noires se font alors scrutatrices, détaillant la Frêle avec attention. Elle ment, la cuisinière habituée le devine, quelque chose ne tourne pas rond, elle le sent, elle connait l'Incandescente comme s'il s'agissait de sa fille. Une tempête se prépare, seule question : Laquelle ? Mais ce n'est pas le moment d'attiser une Étincelle, tout aussi petite qu'elle soit. La Généreuse entre alors dans les jeu des faux-semblant.

- Ah c'donc ça ?! j'pensais qu'vous vous étiez perdue. J'm'apprêtais à aller quérir l'guet.


Le première gorgée de vin fut accueilli avec soulagement dans la gorge asséchée de la Bertille. Un court instant, elle s'autorisa même à fermer les yeux pour apprécier pleinement le gout du vin, avant de reprendre la parole.

- Ça des idées z'en manquons pas ! ç'va être grandiose ! Mais j'laisse votre amie Victoire vous raconter.
Victoire_

La discussion allait bon train entre les deux « cuisinières » les idées partagées avaient l’air de ravir autant l’une que l’autre, et c’est avec un plaisir certain que la blondine vît pétiller les yeux de Bertille.

Affichant un sourire plus prononcé lorsque Bertille se rapprocha encore plus et lui confia les idées de plats qui s’ensuivraient plus succulents les uns que les autres, enchaînant aussitôt, tout en jetant un coup d’œil de temps à autre sur l’entrée de la cave :


Très bonne idée que de marier toutes ces viandes, pour ce qui est des potages, je vous avoue que je n’ai pas franchement d’idées.
Et puis après tout, pourquoi ne pas remplacer le cochon de lait par un Chevreau rôti accompagné d’une sauce dorée ?

Que penseriez-vous d' une salade d’oignons rôtis, quant aux champignons pourquoi ne pas les faire sauter en y rajoutant quelques épices que je crois vous maîtrisez parfaitement et … en purée des lentilles ?

Pour la desserte, si on prend des poires, nous pourrions les présenter sous forme de Pâté, on les écrase sous forme de purée en y adjoignant une pointe de miel et on moule le tout.
Si nous avons assez d’amandes, nous pourrions en piler et les mélanger à un flan à base d’œufs et de fromage frais.


Les yeux pétillants à son tour en parlant des petites douceurs :

Pour ce qui est des dragées, là évidemment, je suis partante, pour les pâtes de fruits, nous pourrions y mettre de la coriandre ou du gingembre confits, non ?

Citation:
Dites vot' cave est si profonde qu'ça ?


Bon sang la cave ! Et Mahelya qui tardait bien trop, elle connaissait pourtant le lieu parfaitement bien, pourvu que la serrure de la porte dérobée tout au fond de la cave ne soit pas bloquée, ou que la rouquine n’ait pas trébuché sans qu’elle l’ait entendue. Ne laissant rien paraître de son inquiétude.

Heu … oui pardon, la cave est profonde parce que …. La blonde se penche à l’oreille de la brune et lui murmure au cas où quelqu'un entrerait inopinément ma réserve spéciale se trouve dans une pièce cachée de la cave, mais Mahelya a la clé.

Et donc pour les vins, parfait, du Bordeaux pour le faisan et du Bourgogne pour les viandes blanches, et pour terminer de l’hypocras et du clairet.
On pourrait rajouter un peu de diversité si j’arrive à me procurer du cidre.


Sa phrase à peine terminée Mahelya revenait enfin, rassurée de la voir indemne physiquement, bien que le ton n’y était toujours pas depuis quelques jours chez la rouquine.
Ne voulant pas en rajouter après la réflexion de Bertille, sachant le malaise qu’elle aurait pu accentuer, la blondine la remercia simplement tout en esquissant un sourire après que les godets furent servis.


Merci Mahelya

Les lèvres furent trempées légèrement dans le nectar, aspirant lentement une petite quantité, laissant les saveurs s’imprégner sur la langue un instant avant d’avaler, le goût qui reste parfaitement en bouche et la blondine de reprendre la conversation.

Comme le dit si bien Bertille, des idées, nous en avons et je pense que le banquet sera une réussite.


Et de détailler leurs idées à Mahelya, espérant qu'elle adhèrerait aussi.

Mahelya
    Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s'ouvraient tous les coeurs, où tous les vins coulaient.

(Une saison en enfer (1873) Citations de Arthur Rimbaud)

Que faire quand son propre cœur est fermé, seul et glacial ? On en revient toujours à ce masque dont l’Étincelle ne peut se défaire en public. Alors la Flammèche ne se départit pas de ce sourire de convenance, une façade arrangée pour ne pas troubler ses interlocuteurs. Un effort sur-humain pour ravaler tant bien que mal la peine, maitresse de son être. Et elle écouta avec la plus grande attention, ce que les deux cuisinières avaient prévu pour le Banquet. Même si parler de nourriture en ce moment, lui provoquer parfois des nausées. Ces seuls interventions durant leur discours se résumaient à quelques hochements de tête, parfois un oui franchissait ses purpurines, parfois simplement un "hum". Et sans le vouloir, Victoire et Bertille lui permettaient de penser à autre chose que la précieuse fiole dissimulée dans ses jupons sans pour autant l'oublier totalement. Le prisonnier ne peut occulter complétement sa promesse de Liberté. Involontairement, la scène se jouaient dans son esprit à mesure que les paroles étaient déversées par les deux femmes. Chevreau à la sauce doré, paons et faisans remplumés, plateaux de poulets grillés et de civets de lapin, salade d'oignon rôtis et champignons sautés aux épices, potages, purées et crèmes, amandes et pâte de fruit, pâté de poire au miel, tarte aux pommes, pommes et poires caramélisées. Pour sur le spectacle des plats servis serait magnifique.

Elle opina doucement quand tout fut annoncé avant de s'accorder quelques instants de réflexion. Pouvait-elle apporter quelque chose de plus à ce qui avait été décidé ? Le minois aux tâches de rousseurs, se balança de gauche à droite, de droite à gauche. Ca y est, la Petite Flamme avait rejoint son monde de pensées. Tout ce qui avait été annoncé, était alors analysé, décortiqué, à la recherche d'un moindre détail à rajouter. Force est de constater que La Généreuse et La Blonde n'avaient pas laisser grand pouvoir au hasard. Peut-être quelques décors à rajouter aux mets. Les sinoples cerclées de cernes se posèrent d'abord sur sa cuisinière avant de se glisser sur sa patronne. Si les prunelles de la Frêle ne brillaient plus autant qu'avant, que la fatigue froissait ses traits, le sourire qu'elle étira presque imperceptible à la commissure de ses lèvres, faisait la promesse d'être sincère.


- Et bien Mesdames, quelle imagination, tout me semble parfait, mais ne pouvons pas ajouter un peu de poisson au menu ?


Le vert de ses iris était interrogateur. Il fallait toujours un peu de poisson dans un menu festif. N'attendant pas vraiment de réponse, puisque le choix finale leur reviendrait, la Jeune Flamme poursuivit.

- Pour les vins rien à redire, ce sont d'excellent choix, Victoire, je dois avoir un peu de cidre dans ma réserve personnelle, ainsi qu'un peu d'alcool de poire et de prune, en digestif, cela pourrait être du meilleur effet non ? Surtout après tous ces délicieux mets que vous allez nous concocter.
Je pensais aussi que l'on pourrait, et c'est grâce à ma Cousine Sindanarie, dont la cuisinière est excellente, et qui avait fait cela lors de la cérémonie de mon anoblissement,
Une regard vers la Généreuse, avant de lui murmurer pour ne pas la contrarier. - Tu es excellente toi aussi ne t'en fais pas. - Nous, pourrions agrémenter le bec des volailles remplumées de quelques feuilles d'argent. Chic et distingué. Qu'en pensez-vous, vous-même ?

Le verre de Bordeaux, toujours devant La Rousseur n'avait même pas été goûté, par ses lèvres charnues. L’Étincelle boudait la nourriture et l'alcool, ne se sustentant que pour tenir debout encore quelques jours. Cependant, il était question d'illusion et pour que celle-ci prenne réellement il ne fallait commettre aucune erreur. A contre cœur, le godet fut porté à la bouche pulpeuse, et le velours du nectar caressa les purpurines. Ce vin devait être très bon, malheureusement aucune saveur ne s'attarda dans la gorge délicate de la Flamme vacillante. Et le sourire de façade réapparut immédiatement après que le cul de la chopine retrouva la rudesse du bois.

- Bon je crois que tout est décidé. Victoire ? Quand dois-je vous envoyer Bertille pour commencer les préparatifs ?
_________________
Victoire_
« Lorsque vous travaillez pour les autres, faites-le avec autant d'ardeur que si c'était pour vous-même. » *


Les explications données à Mahelya, la blondine regardait discrètement ce visage toujours aussi pâle et aux traits tirés qu’elle lui connaissait depuis quelques jours, ce sourire finement dessiné sur ses lèvres n’était pas le « vrai » sourire de la rouquine.
Surtout ne rien dire devant Bertille, attendre qu’elles soient à nouveau seules.

La main se saisit délicatement du verre, le porte aux lèvres, les yeux se ferment un court instant sous cette agréable sensation lorsque le vin généreux atteint les papilles, à peine le temps d’apprécier ce plaisir, que la question de Mahelya la fait réagir … le poisson … comment avait-elle pu oublier !


Hmmm…. de l’escherois de truites peut-être ?

Sans laisser le temps de répondre, le flot de paroles reprend :

Pour les boissons, nous partons donc sur du Bordeaux, du Bourgogne, du cidre, de l’alcool de poire et de prune … il faut que je me procure de la mirabelle, Erabal l’apprécie particulièrement, ce serait de mauvais goût de ma part que de l’oublier.

Faisant tourner machinalement le verre entre ses doigts, le rubis du vin châtoyant sous la lumière qui filtrait par la fenêtre, elle imaginait déjà :

Qu’elle excellente idée d’agrémenter le bec des volailles de la sorte, cela parfera le ballet de couleurs qui s’offrira à nos yeux ce jour là, entre les sauces brunes pour les unes, dorées pour les autres, vertes ou roses pour d’autres encore.

Mais là n'était pas le tout, il faudrait y mettre de l'ardeur afin que la tâche soit parfaitement réussie, et surtout que tout soit prêt pour ce grand jour, quitte à y passer jour et nuit.

Les azurs quittent alors le rubis du Bordeaux pour se poser dans les sinoples de Mahelya, puis dans les prunelles noires de Bertille.


Si Bertille est d'accord, il faut que nous nous mettions rapidement au travail, dans un premier temps nous devons réunir tous les ingrédients en allant passer des commandes auprès des producteurs.

Le regard balaye la pièce, une légère moue se dessine sur le visage pâle, et d'un air un peu gêné :

Je crains que ma cuisine soit bien trop petite pour préparer autant de mets, et d'ustensiles je manquerai ici.



*Confucius
Mahelya

(Paroles de C'est la Fête, La Belle et la Bête, Walt Disney)

La jeune Flamme écoutait avec attention les nouvelles idées de la Blondine. Là assise sur ce siège en taverne, la fiole effleurant sa cuisse, tout allait bien. Les trois parlaient de repas, festin, banquet et l'une pensait à sa délivrance prochaine. Bien qu'elle feintait l’intérêt pour le sujet, déjà son Esprit commençait à s'affranchir de tous les considérations matérielles. Qu'était-ce de la nourriture ? Juste un carburant pour faire avancer un corps. Mais une fois qu'elle n'aurait plus de corps ?
La conversation s'étirait et l'esprit de l’Étincelle sombrait inéluctablement. A mesure que les paroles étaient badines et enjouées, ses pensées était sombre et dure. Illusion ... Illusion ... Il faut tenir encore un peu. Alors la voix cristalline raisonna une nouvelle fois, juste après la question posée par Victoire.


- Pour la cuisine, je peux mettre à disposition la mienne, Bertille l'a agencée, elle sait parfaitement y utiliser l'espace.
- Pour sur : Pis l'banquet d'Noël c'est bien passé, Y'avat du monde quand même.
- Pour les volailles, de ce que je sais Bertille se fournit auprès d'un chasseur.
- Tout à fait ! d'ailleurs l'a déjà les paons ! Pisque Mahelya l'y a passé commande y'a qu'ques jours ! les faisans et les poulets y pourrait nous les avois là maint'nant ! C'est qui adore chasser l'Gontrand ! Les adorable ! Y m'donne toujours qu'ques herbes pour parfumer ses viandes.
Les légumes on en a à foison dans not' potager !
Manque les lapins et les poissons et le fromage aussi ! Z'on peut commencer quand qu'vous voulez !

- Bien tout est prêt si vous voulez nous pouvons y aller maintenant ainsi Victoire, vous verrez la cuisine.


Les sinoples toisaient à présent les yeux clairs de la Patronne en quête d'une réponse. Illusion ... Illusion qu'il fallait toujours maintenir, le godet fut saisi et bu dans son intégralité. Le verre encore caressant les purpurines dissimula la grimace qu'eut la Flammèche. Décidément plus rien ne passait. Allez plus que quelques jours à tenir... En attendant un mariage somptueux devait être préparé.
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Victoire_

Terminer lentement ce verre de vin généreux dont les arômes se distillent dans le palais, tout en écoutant l’échange entre Mahelya et sa cuisinière.
La blondine sait, la blondine ne dira rien, comme à chaque fois que l’on se confie à elle, éternelle étreinte de la souffrance des autres qu’elle absorbe et qui devient sienne sans jamais le montrer, toujours sous un masque arborant un léger sourire.
Mais à l’attitude de la Flammèche, il y avait certainement autre chose que la blonde ne savait pas, elle commençait à bien la connaître, mais pas encore suffisamment pour savoir ce qu’il en était.
Trouver … trouver ce que cachait Mahelya, ne pas la laisser s’enfoncer plus avant et surtout … tenter de l’aider.

Retour à la discussion lorsque les sinoples se veulent interrogateurs, le verre est posé, le sourire revient se dessiner finement sur ses lèvres.


Et bien, parfait, avant de nous rendre en votre cuisine, nous pourrions passer au marché, il y a peut-être ce qu’il nous manque, pour le chevreau je n’aurai pas de mal à le trouver.
Quant aux vins, mieux vaut qu’ils restent encore dans la cave pour le moment, je viendrai les chercher le matin du mariage et les déboucherai afin qu'ils soient à température ambiante pour le banquet.


Être de ceux qui feraient de ce jour là une réussite, était bien suffisant pour la blondine, elle ne serait jamais dans le rôle principal d'un tel jour, non, ce n'était pas pour elle, préférant apprécier le bonheur de certains et aider d'autres à le trouver, si elle le pouvait.

Prenant un léger appui sur la table, la blondine se lève


Je crois qu'il est grand temps d'y aller si nous voulons être dans les délais.


Mahelya
- Tout à fait raison ! Allons-y. Encore que... Pour gagner du temps, Bertille pourrait aller au Marché, pendant que je vous fais découvrir et ma maison et ma cuisine.

Aussitôt la frêle silhouette s'étira gracieusement pour se retrouver en position debout. Dans son mouvement, la fiole de Belladone, savamment dissimulée jusqu'à présent, cogna contre un des pieds du tabouret, laissant échapper un petit "ploc", lors du choc contre le bois. Bien que l’Étincelle, qui avait noté le bruit, ne laissa rien paraître sur son visage, imperceptiblement, le palpitant s'accéléra dans sa poitrine. Et si quelqu'un avait entendu le drôle de bruit ? Une étoffe ne faisait pas de "ploc". Heureusement, c'est l'instant même que Bertille choisit pour se lever à son tour. Raclant son siège contre le sol. Sauvée in-extrémis, la précieuse fiole ne serait pas encore découverte - Rappelons qu'elle ne le serait que le lendemain. Le sourire de façade étira alors une nouvelle fois les traits de la Flammèche et le regard émeraude se posa sur la Cuisinière en quête de son approbation quand à la proposition exposée par Mahelya, peu avant son petit coup de sang. La Généreuse opina immédiatement du chef, ce qui permit à la Jeune Flamme de se tourner vers Victoire afin de lui poser des questions, histoire que la Blondine ne réfléchisse pas trop si elle avait perçu le fameux "ploc".

- Victoire est-ce que cela vous convient-il ? Nous ferons le trajet toutes les deux et Bertille nous rejoindra un peu plus tard. Ne vous inquiétez pas pour elle, s'il y a une trop grande quantité à porter, elle trouvera toujours quelques bras fort et musclés pour l'aide. Puis la Rousse se penchant légèrement vers la Blonde, sur le ton de la confidence. - Je ne sais pas comment elle s'y prend, et à vrai dire je ne cherche pas vraiment à savoir, mais c'est une négociante hors pair. Elle se débrouille toujours pour allégé l'addition et se faire aider quand c'est trop lourd.

Et bien entendu, les secrets de Bertille devaient rester secrets. Ainsi la Cuisinière ne montrait pas sa tristesse depuis le départ d'Harchi, ne racontait pas à Mahelya ses secrets pour faire en sorte que les gâteaux que la Jeune Flamme fabriquaient depuis des mois soit encore plus moelleux et fondant à cœur. La Généreuse restait discrète. Un regard tendre se posa sur cette femme qui l'avait suivit depuis son Enfance. Et l'Espace d'un instant l'illusion s'étiole. Qui prendra soin de la Cuisinière quand elle sera partie ? Pour sur avec son talent elle trouvera rapidement une maison où œuvrer. Néanmoins, Elle lui manquerait sur la Lune. Et le cœur fragile se serra davantage avant que les sinoples ne glissent une nouvelle fois sur la Blondine, retrouvant immédiatement ce masque d'apparat qui ne quittait plus la Frêle.

- Alors ça vous convient ? La maison n'est pas loin et nous allons pouvoir bavasser toutes les deux.

Aie !!! ... * Alors Jeune Fille tu es tellement mal que même ton cerveau fonctionne au ralentis ? As-tu vraiment envie de te retrouver seule avec Victoire. Tu sais celle qui est perspicace et qui sait te faire parler ? *. L'idée n'avait même pas effleuré l'esprit de la Rouquine avant cet instant. Trop tard ... Bien trop tard ... La proposition était lancée, Bertille avait accepté, impossible de faire marcher arrière à présent. Trop tard ... Depuis quelques temps déjà, sa vie se résumait à ses deux mots ... "Trop Tard". Ils laisseront d'ailleurs un gout amère lors des "adieux" et bien après aussi ...
Le regard s'assombrit un instant contrarié par cette nouvelle faute d'inattention. Les souvenirs reviennent, le cœur suffoque, et comme un geste salvateur, une fois de plus la fiole est discrètement frôlée. *Respire ... Bientôt tu seras affranchit de cette souffrance.*. Sans ajouter mot, la Flammèche enfile sa cape blanche immaculée. Et déjà revêt sa parure de fantôme décharné. La porte fut ouverte et elle s'engouffra vers l'extérieur, où un froid mordant, piquait la peau de son visage. Heureusement du 4 rue de la Justice au 16 il n'y avait pas long.

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Victoire_

L’ouïe fine, développée au fil de ses gardes sur les remparts, fût attirée par un bruit sourd contre le bois lorsque Mahelya se leva, tout en débarrassant la table des verres à présent vides, les prunelles claires rapidement et discrètement se dirigèrent naturellement vers les jupons de Mahelya.

La tête ainsi baissée, les yeux légèrement plissés, tentant de déterminer quel objet avait bien pu produire ce bruit tandis que la rouquine lui tournait le dos.

Court instant où toutes les idées les plus sombres fusent dans l’esprit de la blonde mais suffisamment long pour faire grandir son inquiétude, trop d’éléments s'étaient accumulés ces derniers jours.

Le son cristallin émis par les verres entre ses mains la sortit de son trouble et au moment où l’Etincelle s’adressa à elle, son fin sourire se dessina sur ses lèvres tout en relevant la tête avec pour maître mot ne rien laisser paraître.

Ça me convient tout à fait, si ça ne dérange pas Bertille d'aller seule au marché et que je puisse visiter sa cuisine en son absence.


Discuter … si seulement elle pouvait trouver la clé lui permettant d’ouvrir la porte des secrets de la Flammèche, si seulement le flot de paroles contenues par celle-ci pouvait se déverser, si seulement …
Il était tellement facile avec des « si » d’imaginer ce que l’on pourrait faire, mais c'était peut-être là l’occasion unique.

Accentuant son sourire, employant un ton légèrement enjoué, pour encore et toujours ne rien laisser paraître :

Et bien, je vous suis.

Surtout ne pas en dire plus. La main s'était déjà saisie du mantel qui se retrouva rapidement sur ses épaules, remontant le col , accélérant le pas afin de ne pas trop se laisser distancer et de se retrouver à l'extérieur.

Mahelya
    Le désespoir est le suicide du coeur.

(de Jean-Paul Richter Extrait du Vie de Quintus Fixlein)

Si le pas de la Frêle s'était fait empressé à la sortie de la Taverne, doucement, elle avait ralentit la cadence. Toujours faire attention à ne pas éveiller les soupçons sur le Mal qui la rongeait inévitablement de l'intérieur. Ce désespoir qui s'était installé en elle tout entier. Ce renoncement qui maintenant la caractérisait. Ainsi partir à toute vitesse et faire courir Victoire derrière elle, non seulement c'était mal poli, mais connaissant la Blonde, tout un tas de questions auraient été alors assénées, comme autant de coups portés à son âme et à son cœur. Or la Frêle n'avait pas envie de parler, surtout pas de Nizam, cause de son tourment, de sa folie. Et puis il est inutile de s'acharner sur une proie déjà condamnée... Le Blond, bien que toujours présent à ses côtés, ne lui était déjà plus sien, voilà ce qui soufflait la pauvre Flamme. A contre cœur, la Flammèche se montrait donc patiente, le pied assuré et calme. Petites chausses blanches qui laissaient une emprunte éphémère sur le manteau neigeux couvrant les pavé de la rue de la Justice. Quand, au juste, les flocons avaient-ils commencé à tomber ? Aucune idée... En tout cas, ils ne dérangeaient la Flamme Vacillante. La morsure du froid était bien plus acceptable que celle de la Passion. Et de nouveau les idées noires s'imposèrent au cœur contrarié. *Bientôt ... bientôt ... La Faucheuse toute de noire parée, viendra me réclamer cette vie que j'ai brûlé *. Comme un refuge à ses souffrances, la fin est espérée. Et discrètement, les doigts fin taquinent la fiole de Belladone toujours dissimulée.

Le silence s'imposa alors vicieusement. Il faut savoir que la jeune fille quand elle est en présence d'une personne, ne supporte pas les silences. Ils deviennent étouffants, pesants, insupportables et bien souvent elle les évite en se plongeant dans ses pensées, occultant l’environnement, faisant fi du reste, seul son univers compte. Cet isolement psychique, dans ce monde qui n'appartient qu'à elle, la fait involontairement se balancer d'avant en arrière. Le problème ... C'est que lorsque l'on marche, il est difficile d'adopter pareille attitude. Les sinoples glissèrent alors doucement sur la silhouette de Victoire, qui progressait à ses côtés, Bertille, elle étant allée de son coté au marché. La blondine paraissait soucieuse et ça Mahelya avait eu loisir de le constater. L'adulescente utilisait des mêmes stratagèmes en société, aussi reconnaissait-elle parfaitement les signes. * Jeune fille, jeune fille, Et si la Blonde était soucieuse par ta propre attitude ? Veux-tu vraiment te risquer à poser la question ? * Pas le temps de formuler la pensée que déjà les paroles s'échappaient de la gorge délicate, fine main toujours serrées autour de la Fiole.


- Victoire ? ... Vous allez bien ? ... Vous me semblez soucieuse ? J'espère que ce n'est pas l'organisation du mariage qui vous met dans cet état ! Ne vous en faites pas, Bertille et Vous, ça sera parfait ! Allez racontez-moi ce qui vous contrarie... Puis-je vous aider en quoi que ce soit ?

La cadence ralentissait de nouveau et le regard vert scrutait la silhouette de la Patronne. La perche était malgré elle lancée, pour glisser sur le terrain des confidences.
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Victoire_
« A trop vouloir aider, ne perd-on pas chaque jour un peu de soi ? »

Les cheveux parsemés de flocons fondants au fur et à mesure, laissant glisser l’eau jusque dans son cou qu’elle tentait de protéger tant bien que mal par le col maintenu serré, le visage rougi par le vent qui cinglait son visage, avec pour seul accompagnement sonore le bruit des pas crissant dans la neige, la blondine accéléra le pas pour rejoindre Mahelya.

Les plaisirs des discussions et du vin en taverne avaient disparus, laissant place à une angoisse incontournable, savoir ce qui rongeait la rouquine, et qui la rongerait certainement à son tour, telle une éponge la blondine ne pourrait y échapper elle le savait pleinement, mais elle courrait encore le risque jusqu’à ne plus pouvoir évacuer ce trop plein d’émotions qui l’étreignait et où sonnerait sa propre fin.

Les pas ralentirent jusqu’à s’arrêter brusquement au moment où surgirent les questions de la Flammèche, le regard se fit vide de tout sentiment en la regardant, toujours ne rien laisser paraître, arborer le masque.


Je vais bien, oui … " Idiote que tu es, elle t’offre la clé sur un plateau d’argent, saisis là, c’est le moment où jamais"

L’organisation du mariage ? Oh ! Certes pas, Bertille est l’aide bien précieuse qu’il fallait pour un tel évènement.

Le regard se fait bienveillant, les traits se radoucissent.

Mahelya, de l'aide je n'ai nul besoin, ne serait-ce pas plutôt l'inverse ?

Et voilà, c'était lâché, laissant un temps de silence, lui permettant de scruter les sinoples pour tenter d’y voir une réaction.

Bien que je vous connaisse peu, je sens que vous portez la souffrance en vous depuis quelques temps, vous n’êtes plus telle que vous étiez, et ne me dites pas le contraire, j’aurai du mal à vous croire.



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