RPartage - [RP] Hostel Sulignan à Rennes

Annaell

Annaell jeta un regard circonspect à la gueuse qui semblait faire de son mieux pour faire bonne figure. La pauvre fille avait l'air gentillette, et semblait surtout s'être fait embarquer dans une situation dont elle ne connaissait sans doute ni les tenants ni les aboutissants.

Sans répondre directement au sieur Watelse, la dame d'honneur de la reine se leva et déplia le lourd tissu de la robe devant les épaules de la jeune fille. Elle voyait du coin de l'oeil l'homme passer sa main sur son visage, visiblement en situation délicate. Pensait-il qu'elle allait le trahir ? Appeler la garde ? Le dénoncer ? Ou... le tuer... ? Mais rien de cela pour le moment. Annaell avait été chambellan, et ambassadeur... elle connaissait la diplomatie, la politique, les sacrifices, les chemins détournés pour atteindre le bien commun. Sans rien dire, elle observa le sosie, sa carrure, son maintien... celui-ci serait à améliorer. Mais elle avait la même taille qu'Eleonor, et un visage assez semblable. D'un ton sec, Annaell leur dit :

- Sachez que je considère sa Majesté non seulement comme une Reine, mais également comme une jeune demoiselle que j'ai prise en affection et que je considère comme ma petite soeur. Je ne tolérerai pas de votre part le moindre écart de conduite qui puisse lui porter préjudice, que ce soit d'un point de vue politique ou d'un point de vue personnel. Je vous éduquerai comme il le faudra, mais vous devez être capable de supporter la pression qui va tomber sur vos épaules.

Annaell jeta un regard à l'homme :

- Tournez-vous.

Puis à la gueuse :

- Déshabillez-vous.
_________________

Quiou

Il est magistral de voir se révéler sous les coups de semonce la cruelle destiné assurément effroyable de ceux que l’on a choisi pour accomplir supercheries et autres plaisanteries. C’est dire qu’assister au plaisir de forger de son propre poing, de sa propre pioche le diamant brut qui écorchera les mains et les cœurs, les espoirs et la douleur, ce n’est pas chose habituelle, mais bon Dieu !, que cela vous ensorcèle.

Ainsi, à l’ombre même du tableau, camouflée par un clair-obscur illusoire, tandis que la scène se joue sans trop de déboire, que les manivelles du malin s’en vont tirer les rideaux et agencer gauchement les corps désarticulés des garnements et autres pantins, à la Noire de jauger l’ensemble tel le régisseur assurément guère amateur de ce qui se fait de mieux en la matière non pas de comédie, ni de tragédie, mais bel et bien d’un ensemble opaque de ces deux éléments s’accouplant en un bloc compact.

Voici dès lors que se joue devant vous, Amis lecteurs, le futur d’un avenir sans merci, incarné pour l’heure au travers de cette chair sauvage de fermière, dans cet assemblage sans quintessence et sans substance, sans rien d’éloquent si ce n’est juste cette ressemblance royale et ses courbures acceptables.

Quant à notre deswaardienne Chambellan, il est temps pour elle de se redresser et d’avancer aux devants de l’échiquier, composant ainsi une aquarelle dans laquelle se trouvent la robuste Tour, le Cavalier trop souvent tiraillé, le Pion de service et la divine Dame aux impitoyables sévices. *

Votre vie n’avait pas de sens.
Jusqu’où pouvaient vous emmener la décrépitude de l’habitude, l’ennui de la routine durement établie ? Il doit pourtant bien exister quelque chose d’important dans la vie d’une personne, une raison de se lever, de manger, de travailler, de regarder autour de soi, de se mêler aux gens, de faire ce qu’il y a à faire quoi qu’il en soit.

Les froissements de la sombre vêture se mêlent aux susurrements de la froide créature qui se charge pour l’instant de rajuster une pelisse de vair obombrée sur ses épaules décharnées, prunelles de fer rivées sur la proie offerte en sacrifice.

Il est bon de croire qu’une personne se doit de contribuer au monde d’une façon ou d’une autre, sinon la vie serait pire que dénuée de sens. Elle ne serait qu’une farce obscène qui ne ferait rire uniquement que les âmes peu amènes plongées à jamais dans la souffrance.
C’est donc là ce que nous vous offrons en ce jour, Majesté. Une vie dans laquelle vous aurez tout intérêt à briller.

Un pâle sourire en coin, supplice de bien des infamies, s’en vint alors à fissurer l’harmonie fallacieuse du glacial visage de notre Noldor, qui se détourne alors vers le Lige féal aux idées désastreuses, tandis que l’on ne tardera guère à assister au déshabillage pseudo royal offert par l'autre Vicomtesse de la pièce.

Elle sera tout au plus passable devant le Roy, si nous arrivons d’ici là à lui estroprier son accent lors des quelques joliesses qu’elle déclarera, à écorcher sa posture de telle sorte qu’elle se dresse avec un port que l’on espérera altier, à tirailler sa chevelure qu’elle a de paille et d’acier.
En clair, il nous la faut briser avant que de la remodeler.

*Libre à chacun de se figurer qui est quoi.
_________________

Annaell

Annaell ne fut qu'à demi étonnée de voir la Deswaard sortir de l'ombre. Froide et digne, cette femme ne pouvait qu'impressionner fortement les esprits sur lesquels elle exerçait spontanément sa domination. La dame d'honneur jeta un bref coup d'oeil à l'homme de la pièce, s'interrogeant sur sa réaction au discours du chambellan aux allures de... oui, une allure de reine, qui eut sans doute bien mieux convenu à cette farce si seulement les traits de son visage eurent davantage ressemblé à ceux d'Eleonor que ceux que possédait la fille qu'ils avaient recruté. Cependant les mots de Quiou étaient durs, et Annaell plissa légèrement les yeux tandis que, son regard attaché à la nuque de la paysanne, elle dépliait les tissus lourds de la robe de la Reine. Briser... Une manière forte d'inculquer les choses. Sans mot dire pour le moment, Annaell attendit la suite. En son for intérieur, elle n'avait pas décidé de tyranniser la pauvre fille qui leur servirait de sosie, bien qu'elle ne fut point prête à s'attendrir non plus au vu de la grave situation. La robe fut dépliée, les doigts d'Annaell cherchèrent les pliures des épaules pour la mettre à bonne hauteur, attendant à la fois la réaction de l'homme et celle de la fille qui, à présent, ne serait plus, aux yeux de certains, qu'un grotesque pantin sans âme. Mais en un sens... la Deswaard n'avait pas tort. Il leur faudrait effacer toute existence de la paysanne, en son âme, en son esprit, en son corps, la gommer totalement de telle sorte que la naissance d'un être nouveau et totalement différent soit possible; et que l'âme de cette pauvre fille s'efface pour montrer le visage d'une Reine.
_________________

Anne

La fille s'était déjà dévêtue devant un tiers. Devant le foin, à 13 ans avec le Jehannot. A 15, derrière la grange avec le Claude et le Romain. Eh oui, deux en même temps. Faut dire, fallait bien qu'elle se fasse sa popularité rapidement. Elle n'était pas la seule joliette du coin, et fallait bien se caser avec un mari avec un peu de bien : une fermette et deux boeufs auraient suffi à son bonheur, à cette fille de rien. La Margot lui avait déjà soufflé le Renaud aux six vaches et deux cochons à la fête de la Saint-Jean et était déjà grosse depuis deux lunes.

Alors, sans même un regard pudique envers la seule présence masculine, elle délassa avec facilité le dos de son humble toilette et la laissa choir à terre, poitrine à l'air et culotte large en toile brute cachant la dernière partie de son anatomie.

Ce n'est donc pas par pudeur que sa peau prit la chair de poule, mais bien à cause de la voix presque glaciale de l'ombre. Cette haute stature sur laquelle la pauvrette leva des yeux terrorisés. "briser". Elle serait donc brisée, comme le cou des bons ânes qui se tuent à la tâche sans qu'on leur donne de carotte. Brisée comme la nuque du pendu qui se balance sous les éclats de hargne assouvie après la mortelle sentence. Brisée, enfin, comme la chope qu'un ivrogne vient de balancer contre le mur parce qu'il m'a pas eu ce qu'il voulait : une nouvelle rasade. Elle eut un hoquet de stupeur, qui se renouvela tout le long de l'enfilage. La douceur du tissu pourtant peu réconfortant. Elle se sentait étranglée. Étouffante déjà dans cette atmosphère pesante. La dame blonde, elle ne l'avait pas complètement comprise en plus, et ça la paniquait encore plus. Elle parlait un peu comme le curé, en latin ou pas, avec des mots trop longs, des phrases trop torturées, et des sous entendus que la gueuse n'entendait, mais alors, absolument pas. Et si sévère. Si juge. Si culpabilisant. Le ton cassant. Elle n'en demandait pas tant la An... Non elle n'avait plus de prénom, c'est vrai, failli oublier. Elle était l'ombre muette de la reine.

Que pouvait elle bien dire, la donzelle, qui pourrait apaiser cette forme de dragon, de cracheur de mots flamboyants qui lui brûlaient son assurance (qu'elle n'avait déjà pas bien grande)? Une platitude décevante servie par une bouche tremblotante et un regard baissé vers le sol :

Je m'en brillerai ben comme vous le voulez ma noble dame très belle.

La brune jeunette retroussa les manches de cette encombrante robe comme elle l'aurait fait de la sienne avant de laver le linge dans le ruisseau.
_________________

Annaell

La main d'Annaell se posa simplement sur le poignet révélé.

- Non, ne retrousse pas tes manches. L'on ne doit pas découvrir ses poignets, pas plus que ses chevilles. Pour une reine c'est tout aussi scandaleux que de se tenir cuisses ouvertes. Ce sont des choses qui se cachent avec soin.

Ses mains remirent les manches en place, cachant à nouveau la peau qui était apparue.

- Ici, l'on te mettra du parfum, fit-elle en posant le pouce au creux du poignets.

Elle tourna autour de la jeune fille, ajusta la robe, arrangea les plis. La taille était vraiment presque celle d'Eleonor. La gueuse avait un peu plus de hanche, un tout petit peu plus de poitrine, mais quelques coups d'aiguilles aux robes arrangerait cela sans le moindre problème.

- Ne garde pas le menton baissé comme ça. Tiens-toi droite. Imagine qu'un fil est attaché en haut de ton crâne et que le Tout-Puissant te tire vers le haut... Voilà, comme ça, redresse-moi ce visage. Et cesse donc de cligner des yeux comme une chouette !

Sans brusquerie ni douceur, Annaell lui releva le menton, puis recula d'un pas pour observer la jeune fille maintenant vêtue comme une reine. Le brocart bleu nuit qui ceignait son corps était magnifique, mais il semblait bizarrement arrangé sur cette fille qui n'était pas habituée à se tenir si raide et si droite.

- Mmm... Nous allons avoir du travail.

Elle se planta face à la poupée et ajouta :

- Te voilà reine, ma fille. Tâche de t'en souvenir.
_________________

Richard_watelse

Richard Watelse avait toujours vécu entouré d’hommes : son père d’abord, faible devant sa propre femme et coureur de jupons faciles, et ses frères aussi distants les uns des autres que les étoiles dans une constellation lointaine. Seules sa mère, froide et sévère, et sa sœur, douce et morte trop jeune, restaient la référence féminine du soldat. Aussi est il assez étonnant de le voir depuis quelques années dans un univers régis par les valeurs et humeurs féminines. Outre ses conquêtes d’une nuit, le connétable avait voué sa vie à une reine des sables, conté fleurette à une naïve nobliote et attaché son cœur à une vagabonde impétueuse. Et désormais, son destin semblait inévitablement lié à une pauvresse timorée, une froide blonde ressemblant étrangement à sa propre mère (problème d’Œdipe en prévision ?), et une noble brune toute en politesse et retenue.

Nul homme à l’horizon pour épauler le brave Richard Watelse. Les semaines de doute et d’instabilité provoquées par la disparition de Sa souveraine semblaient derrière lui. Seule demeurait l’inquiétude générée par Son absence. Où était-elle ? Avec qui ? Pourquoi ? Comment réagirait-elle si elle apprenait l’existence de son sosie ? Comprendrait-elle cette extrême nécessité ? Ou le pendrait-elle comme tout traitre au bout d’une corde ?
Toujours était-il qu’il ne pouvait plus reculer. Ils ne pouvaient plus reculer. Lui, elles, et … elle. Cette petite bouille un peu triste, un peu soumise, un peu effrayée… si peu royal. Richard n’était pas un dur envers les femmes et s’il les repoussait souvent, cela était surtout pour prévenir un quelconque attachement. Aussi, bloqua-t-il tout sentiment de pitié envers la gosse. En réponse au cinglant « briser » de la dure Dame Quiou, Richard répondit aussi posément que possible mais légèrement agacé par le ton supérieur de la dame :

Comme nous en avions convenu ensemble…

Richard ponctua le dernier terme d’une pause, tout en tournant le dos à la fermière se recouvrant de la royale toilette. Pas un regard sur ses formes et sa nudité, Richard s’imposant pour cette chair le même égard qu’il aurait pour Sa Souveraine. Il irait pourtant dès la sortie de réunion rencontrer la première catin brune dans le bordel breton du coin. L’homme a des besoins que voulez vous…

… Je vous ai apporté le bois brut. A votre guise de le façonner…

Il ne put toutefois pas s’empêcher de tempérer le flux glacial de ses paroles, percevant le frémissement de la victime :

Peut-être sera-t-elle assez souple pour ne pas avoir à la briser cependant. Les femmes ont généralement un certain ressort et une présence d’esprit qui pourraient nous surprendre ici. Enfin bref, je n’ai pas vos talents pour l’éducation. Ni votre expérience. Sachez juste qu’il a été des plus difficiles de trouver des traits approchant de ceux de Notre Reine. Veuillez considérer cette pucelle comme notre unique tentative.

D’un mouvement, on lui indiqua que le sosie était vêtu, ajustée par la réactive noble qui la prenait déjà en main. Gestes qui rassurèrent tout à fait le connétable sur l’adhésion de cette femme à leur supercherie.
Quant à la supercherie en elle-même… Passable vision qui ne correspondait que de très loin aux critères attendus de la très digne Eleonore. Son cœur tambourina un court instant : ainsi sa vie reposait-il dans les mains de cette médiocre apparition ?

Vos contacts ont-ils eu des nouvelles de la reine ? Mes espions sont revenus bredouilles de leur dernière piste.
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Annaell

Annaell jeta un regard circonspect à la gueuse qui semblait faire de son mieux pour faire bonne figure. La pauvre fille avait l'air gentillette, et semblait surtout s'être fait embarquer dans une situation dont elle ne connaissait sans doute ni les tenants ni les aboutissants.

Sans répondre directement au sieur Watelse, la dame d'honneur de la reine se leva et déplia le lourd tissu de la robe devant les épaules de la jeune fille. Elle voyait du coin de l'oeil l'homme passer sa main sur son visage, visiblement en situation délicate. Pensait-il qu'elle allait le trahir ? Appeler la garde ? Le dénoncer ? Ou... le tuer... ? Mais rien de cela pour le moment. Annaell avait été chambellan, et ambassadeur... elle connaissait la diplomatie, la politique, les sacrifices, les chemins détournés pour atteindre le bien commun. Sans rien dire, elle observa le sosie, sa carrure, son maintien... celui-ci serait à améliorer. Mais elle avait la même taille qu'Eleonor, et un visage assez semblable. D'un ton sec, Annaell leur dit :

- Sachez que je considère sa Majesté non seulement comme une Reine, mais également comme une jeune demoiselle que j'ai prise en affection et que je considère comme ma petite soeur. Je ne tolérerai pas de votre part le moindre écart de conduite qui puisse lui porter préjudice, que ce soit d'un point de vue politique ou d'un point de vue personnel. Je vous éduquerai comme il le faudra, mais vous devez être capable de supporter la pression qui va tomber sur vos épaules.

Annaell jeta un regard à l'homme :

- Tournez-vous.

Puis à la gueuse :

- Déshabillez-vous.
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Quiou

Il est magistral de voir se révéler sous les coups de semonce la cruelle destiné assurément effroyable de ceux que l’on a choisi pour accomplir supercheries et autres plaisanteries. C’est dire qu’assister au plaisir de forger de son propre poing, de sa propre pioche le diamant brut qui écorchera les mains et les cœurs, les espoirs et la douleur, ce n’est pas chose habituelle, mais bon Dieu !, que cela vous ensorcèle.

Ainsi, à l’ombre même du tableau, camouflée par un clair-obscur illusoire, tandis que la scène se joue sans trop de déboire, que les manivelles du malin s’en vont tirer les rideaux et agencer gauchement les corps désarticulés des garnements et autres pantins, à la Noire de jauger l’ensemble tel le régisseur assurément guère amateur de ce qui se fait de mieux en la matière non pas de comédie, ni de tragédie, mais bel et bien d’un ensemble opaque de ces deux éléments s’accouplant en un bloc compact.

Voici dès lors que se joue devant vous, Amis lecteurs, le futur d’un avenir sans merci, incarné pour l’heure au travers de cette chair sauvage de fermière, dans cet assemblage sans quintessence et sans substance, sans rien d’éloquent si ce n’est juste cette ressemblance royale et ses courbures acceptables.

Quant à notre deswaardienne Chambellan, il est temps pour elle de se redresser et d’avancer aux devants de l’échiquier, composant ainsi une aquarelle dans laquelle se trouvent la robuste Tour, le Cavalier trop souvent tiraillé, le Pion de service et la divine Dame aux impitoyables sévices. *

Votre vie n’avait pas de sens.
Jusqu’où pouvaient vous emmener la décrépitude de l’habitude, l’ennui de la routine durement établie ? Il doit pourtant bien exister quelque chose d’important dans la vie d’une personne, une raison de se lever, de manger, de travailler, de regarder autour de soi, de se mêler aux gens, de faire ce qu’il y a à faire quoi qu’il en soit.

Les froissements de la sombre vêture se mêlent aux susurrements de la froide créature qui se charge pour l’instant de rajuster une pelisse de vair obombrée sur ses épaules décharnées, prunelles de fer rivées sur la proie offerte en sacrifice.

Il est bon de croire qu’une personne se doit de contribuer au monde d’une façon ou d’une autre, sinon la vie serait pire que dénuée de sens. Elle ne serait qu’une farce obscène qui ne ferait rire uniquement que les âmes peu amènes plongées à jamais dans la souffrance.
C’est donc là ce que nous vous offrons en ce jour, Majesté. Une vie dans laquelle vous aurez tout intérêt à briller.

Un pâle sourire en coin, supplice de bien des infamies, s’en vint alors à fissurer l’harmonie fallacieuse du glacial visage de notre Noldor, qui se détourne alors vers le Lige féal aux idées désastreuses, tandis que l’on ne tardera guère à assister au déshabillage pseudo royal offert par l'autre Vicomtesse de la pièce.

Elle sera tout au plus passable devant le Roy, si nous arrivons d’ici là à lui estroprier son accent lors des quelques joliesses qu’elle déclarera, à écorcher sa posture de telle sorte qu’elle se dresse avec un port que l’on espérera altier, à tirailler sa chevelure qu’elle a de paille et d’acier.
En clair, il nous la faut briser avant que de la remodeler.

*Libre à chacun de se figurer qui est quoi.
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Annaell

Annaell ne fut qu'à demi étonnée de voir la Deswaard sortir de l'ombre. Froide et digne, cette femme ne pouvait qu'impressionner fortement les esprits sur lesquels elle exerçait spontanément sa domination. La dame d'honneur jeta un bref coup d'oeil à l'homme de la pièce, s'interrogeant sur sa réaction au discours du chambellan aux allures de... oui, une allure de reine, qui eut sans doute bien mieux convenu à cette farce si seulement les traits de son visage eurent davantage ressemblé à ceux d'Eleonor que ceux que possédait la fille qu'ils avaient recruté. Cependant les mots de Quiou étaient durs, et Annaell plissa légèrement les yeux tandis que, son regard attaché à la nuque de la paysanne, elle dépliait les tissus lourds de la robe de la Reine. Briser... Une manière forte d'inculquer les choses. Sans mot dire pour le moment, Annaell attendit la suite. En son for intérieur, elle n'avait pas décidé de tyranniser la pauvre fille qui leur servirait de sosie, bien qu'elle ne fut point prête à s'attendrir non plus au vu de la grave situation. La robe fut dépliée, les doigts d'Annaell cherchèrent les pliures des épaules pour la mettre à bonne hauteur, attendant à la fois la réaction de l'homme et celle de la fille qui, à présent, ne serait plus, aux yeux de certains, qu'un grotesque pantin sans âme. Mais en un sens... la Deswaard n'avait pas tort. Il leur faudrait effacer toute existence de la paysanne, en son âme, en son esprit, en son corps, la gommer totalement de telle sorte que la naissance d'un être nouveau et totalement différent soit possible; et que l'âme de cette pauvre fille s'efface pour montrer le visage d'une Reine.
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Anne

La fille s'était déjà dévêtue devant un tiers. Devant le foin, à 13 ans avec le Jehannot. A 15, derrière la grange avec le Claude et le Romain. Eh oui, deux en même temps. Faut dire, fallait bien qu'elle se fasse sa popularité rapidement. Elle n'était pas la seule joliette du coin, et fallait bien se caser avec un mari avec un peu de bien : une fermette et deux boeufs auraient suffi à son bonheur, à cette fille de rien. La Margot lui avait déjà soufflé le Renaud aux six vaches et deux cochons à la fête de la Saint-Jean et était déjà grosse depuis deux lunes.

Alors, sans même un regard pudique envers la seule présence masculine, elle délassa avec facilité le dos de son humble toilette et la laissa choir à terre, poitrine à l'air et culotte large en toile brute cachant la dernière partie de son anatomie.

Ce n'est donc pas par pudeur que sa peau prit la chair de poule, mais bien à cause de la voix presque glaciale de l'ombre. Cette haute stature sur laquelle la pauvrette leva des yeux terrorisés. "briser". Elle serait donc brisée, comme le cou des bons ânes qui se tuent à la tâche sans qu'on leur donne de carotte. Brisée comme la nuque du pendu qui se balance sous les éclats de hargne assouvie après la mortelle sentence. Brisée, enfin, comme la chope qu'un ivrogne vient de balancer contre le mur parce qu'il m'a pas eu ce qu'il voulait : une nouvelle rasade. Elle eut un hoquet de stupeur, qui se renouvela tout le long de l'enfilage. La douceur du tissu pourtant peu réconfortant. Elle se sentait étranglée. Étouffante déjà dans cette atmosphère pesante. La dame blonde, elle ne l'avait pas complètement comprise en plus, et ça la paniquait encore plus. Elle parlait un peu comme le curé, en latin ou pas, avec des mots trop longs, des phrases trop torturées, et des sous entendus que la gueuse n'entendait, mais alors, absolument pas. Et si sévère. Si juge. Si culpabilisant. Le ton cassant. Elle n'en demandait pas tant la An... Non elle n'avait plus de prénom, c'est vrai, failli oublier. Elle était l'ombre muette de la reine.

Que pouvait elle bien dire, la donzelle, qui pourrait apaiser cette forme de dragon, de cracheur de mots flamboyants qui lui brûlaient son assurance (qu'elle n'avait déjà pas bien grande)? Une platitude décevante servie par une bouche tremblotante et un regard baissé vers le sol :

Je m'en brillerai ben comme vous le voulez ma noble dame très belle.

La brune jeunette retroussa les manches de cette encombrante robe comme elle l'aurait fait de la sienne avant de laver le linge dans le ruisseau.
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Annaell

La main d'Annaell se posa simplement sur le poignet révélé.

- Non, ne retrousse pas tes manches. L'on ne doit pas découvrir ses poignets, pas plus que ses chevilles. Pour une reine c'est tout aussi scandaleux que de se tenir cuisses ouvertes. Ce sont des choses qui se cachent avec soin.

Ses mains remirent les manches en place, cachant à nouveau la peau qui était apparue.

- Ici, l'on te mettra du parfum, fit-elle en posant le pouce au creux du poignets.

Elle tourna autour de la jeune fille, ajusta la robe, arrangea les plis. La taille était vraiment presque celle d'Eleonor. La gueuse avait un peu plus de hanche, un tout petit peu plus de poitrine, mais quelques coups d'aiguilles aux robes arrangerait cela sans le moindre problème.

- Ne garde pas le menton baissé comme ça. Tiens-toi droite. Imagine qu'un fil est attaché en haut de ton crâne et que le Tout-Puissant te tire vers le haut... Voilà, comme ça, redresse-moi ce visage. Et cesse donc de cligner des yeux comme une chouette !

Sans brusquerie ni douceur, Annaell lui releva le menton, puis recula d'un pas pour observer la jeune fille maintenant vêtue comme une reine. Le brocart bleu nuit qui ceignait son corps était magnifique, mais il semblait bizarrement arrangé sur cette fille qui n'était pas habituée à se tenir si raide et si droite.

- Mmm... Nous allons avoir du travail.

Elle se planta face à la poupée et ajouta :

- Te voilà reine, ma fille. Tâche de t'en souvenir.
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Richard_watelse

Richard Watelse avait toujours vécu entouré d’hommes : son père d’abord, faible devant sa propre femme et coureur de jupons faciles, et ses frères aussi distants les uns des autres que les étoiles dans une constellation lointaine. Seules sa mère, froide et sévère, et sa sœur, douce et morte trop jeune, restaient la référence féminine du soldat. Aussi est il assez étonnant de le voir depuis quelques années dans un univers régis par les valeurs et humeurs féminines. Outre ses conquêtes d’une nuit, le connétable avait voué sa vie à une reine des sables, conté fleurette à une naïve nobliote et attaché son cœur à une vagabonde impétueuse. Et désormais, son destin semblait inévitablement lié à une pauvresse timorée, une froide blonde ressemblant étrangement à sa propre mère (problème d’Œdipe en prévision ?), et une noble brune toute en politesse et retenue.

Nul homme à l’horizon pour épauler le brave Richard Watelse. Les semaines de doute et d’instabilité provoquées par la disparition de Sa souveraine semblaient derrière lui. Seule demeurait l’inquiétude générée par Son absence. Où était-elle ? Avec qui ? Pourquoi ? Comment réagirait-elle si elle apprenait l’existence de son sosie ? Comprendrait-elle cette extrême nécessité ? Ou le pendrait-elle comme tout traitre au bout d’une corde ?
Toujours était-il qu’il ne pouvait plus reculer. Ils ne pouvaient plus reculer. Lui, elles, et … elle. Cette petite bouille un peu triste, un peu soumise, un peu effrayée… si peu royal. Richard n’était pas un dur envers les femmes et s’il les repoussait souvent, cela était surtout pour prévenir un quelconque attachement. Aussi, bloqua-t-il tout sentiment de pitié envers la gosse. En réponse au cinglant « briser » de la dure Dame Quiou, Richard répondit aussi posément que possible mais légèrement agacé par le ton supérieur de la dame :

Comme nous en avions convenu ensemble…

Richard ponctua le dernier terme d’une pause, tout en tournant le dos à la fermière se recouvrant de la royale toilette. Pas un regard sur ses formes et sa nudité, Richard s’imposant pour cette chair le même égard qu’il aurait pour Sa Souveraine. Il irait pourtant dès la sortie de réunion rencontrer la première catin brune dans le bordel breton du coin. L’homme a des besoins que voulez vous…

… Je vous ai apporté le bois brut. A votre guise de le façonner…

Il ne put toutefois pas s’empêcher de tempérer le flux glacial de ses paroles, percevant le frémissement de la victime :

Peut-être sera-t-elle assez souple pour ne pas avoir à la briser cependant. Les femmes ont généralement un certain ressort et une présence d’esprit qui pourraient nous surprendre ici. Enfin bref, je n’ai pas vos talents pour l’éducation. Ni votre expérience. Sachez juste qu’il a été des plus difficiles de trouver des traits approchant de ceux de Notre Reine. Veuillez considérer cette pucelle comme notre unique tentative.

D’un mouvement, on lui indiqua que le sosie était vêtu, ajustée par la réactive noble qui la prenait déjà en main. Gestes qui rassurèrent tout à fait le connétable sur l’adhésion de cette femme à leur supercherie.
Quant à la supercherie en elle-même… Passable vision qui ne correspondait que de très loin aux critères attendus de la très digne Eleonore. Son cœur tambourina un court instant : ainsi sa vie reposait-il dans les mains de cette médiocre apparition ?

Vos contacts ont-ils eu des nouvelles de la reine ? Mes espions sont revenus bredouilles de leur dernière piste.
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