Matouminou
Bien sûr Matou s'aperçut de l'air incrédule qui était en train de passer sur le visage de Lave. Elle retint un sourire amusé, et la suivit.
Il y avait longtemps qu'elle n'avait pas pénêtré dans l'immense demeure de Tuck et de Lave. Un jour alors qu'elle était toute jeune, et que Tuck ne portait pas encore de toge, elle y était venue, mais n'avait pas pu aller bien loin de peur de se perdre. Toutefois, et ce souvenir la fit pouffer, elle avait pu voir dans une pièce, la formidable collection de caleçons, sans doute aujourd'hui remplacée par les inombrables toges du compagnon, frère, complice de Lave. Cette dernière, la pauvre, passait son temps à les repasser, tant et si bien que Matou se demandait comment Lave faisait pour venir en taverne, exercer son métier de médicastre, remplir ses devoirs conjug....fraternels, entretenir ses champs, faire du pain...et tout le reste qui faisait qu'une femme, en cette deuxième partie du XVIe siècle, avait fort à faire. Matou se rendit compte à quel point les talents et le travail de Lave étaient bien peu reconnus.
Et tandis qu'elle songeait à tout ça...oui Matou pensait beaucoup, et quand elle ne pensait pas, elle parlait...Bavarde, elle? noooon....simplement toujours prête à exposer ses idées, que Stromb adorait, ses points de vue, pas toujours partagés, il est vrai....bref...elle reconnaissait que parfois elle se fatiguait elle-même. Mais bon, on ne se refait pas! Donc, tandis qu'elle pensait activement, elle suivait Lave de très près comme celle-ci lui avait demandé, enregistrant mentalement des choses afin de pouvoir retrouver la sortie pour le cas où Lave l'abandonnerait...il fallait se méfier, Lave était parfois imprévisible.
A ce stade de l'histoire, il va s'en dire que Matou n'était guère rassurée. Outre le fait qu'elle était plutôt trouillarde, sauf dans les situations qui la prenaient à l'improviste, elle trouvait les lieux lugubres. Les reflets des bougies sur les murs de pierre donnaient à cette maison, une étrange atmosphère. Matou évita de penser aux bruits qu'elle pouvait entendre...couinements...un rat? non, non, non...ne pas imaginer cela....Grincement d'une porte...l'esprit d'un patient achevé par Lave? arfff...Matou frissonna.
Lave, pendant ce temps, papotait:
Citation:
Dis, faudrait que je te donne un courrier confidentiel pour Stromboli , tu pourrais lui remettre de ma part ?
Mais attention, Matou, il est scellé ! Il s'agit du secret médical , tu ne dois pas l'ouvrir , seul Stromb peut le faire .
Mais attention, Matou, il est scellé ! Il s'agit du secret médical , tu ne dois pas l'ouvrir , seul Stromb peut le faire .
Et elle s'arrêta pour lui tendre une enveloppe, en ajoutant:
Citation:
Tu es mon amie et je te fais confiance , tu arriveras bien à resister à l'envie de l'ouvrir, hein ?
Matou écarquilla les yeux et ses pensées se bousculèrent dans son esprit...haaan...un courrier confidentiel? pour Stromb? de la part de Lave?
Et là, Matou se mit à lutter de toutes ses forces et ça donnait:
Petit démon: hé hé hé...à tous les coups, c'est une lettre d'amour pour Stromb...tu dois l'ouvrir...fais comme si de rien n'était, prends là cette enveloppe...et vérifie...
Petit ange: voyons Matou, reprends toi...Lave est ton amie, jamais elle ne ferait ça...Prends cette enveloppe, et rapporte la à Stromb...il te la fera lire de toute façon...
Petit démon: tais toi bouffon...elle fait ce qu'elle veut, elle a droit de savoir!
Petit ange: Pffff...Matou rappelle-toi qu'une relation saine et forte est basée sur la confiance réciproque...
Elle chassa toutes ces voix en hochant la tête et avec un pâle sourire, prit l'enveloppe et la mit dans sa besace en disant:
- Bien sûr Lave, je donnerai ce pli à Stromb...j'espère que...euh..enfin, ce n'est pas grave...il ne va pas mourir hein??
Matou avait d'énormes qualités, mais ses défauts l'étaient tout autant parfois. Dès qu'il s'agissait de son volcan, son inquiétude frôlait la zone rouge. Elle ne se pensait pas jalouse, mais prudente, et si parfois elle était très excessive dans ses sentiments, pour elle c'était des réactions normales, celles d'une femme amoureuse...Toutefois, elle tentait chaque jour de se corriger un peu.
Elles reprirent leur "promenade". Les couloirs n'en finissaient pas, elles passèrent à travers de nombreuses pièces dont Matou n'avait pas le temps d'admirer la décoration.
Enfin, Lave annonça:
Citation:
Nous y voilà, entre !
Matou entra et crut que son coeur allait s'arrêter de battre. La pièce était de taille moyenne. Une odeur de moisi et de relent de pourriture flottaient. Elle mit sa main sur son nez. Elle aperçut dans un coin des crânes et dut se retenir à la table qui trônait au milieu de la pièce. Levant les yeux vers le plafond, elle vit un étrange appareil composé de pinces. Il lui sembla reconnaitre un bout d'une chemise qu'elle avait offerte à Stromb. Elle blêmit dangereusement.
Posant son regard sur Lave, elle balbutia:
- Superbe....euh...endroit...c'est...euh...bien...équipé...des outils de tortu, ahem, du matériel mé...médical...du dernier cri...je...je...suppose.
Brutalement, elle se rendit compte de la folie qu'elle était en train de faire. Elle était guérie, mais pourquoi se mettait-elle toujours dans ce genre de situation? Pourquoi? C'est sûr, elle allait mourir..ou pire devenir folle...
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