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[RP] Stakhanovisme & bienséance – Acte I

Ingeburge
Le Grand Chambellan de France et son Grand Maître des Cérémonies s'apprêtaient à vivre une semaine d'enfer. En plus de leurs occupations habituelles et respectives tant au sein de la Maison Royale qu'à l'extérieur, ils étaient sur le point de jongler avec l'imminence d'un grand événement et l'organisation de celui-ci tout en menant de front pas moins de cinq entretiens afin de trouver celui ou celle qui deviendrait le nouveau Maître des Cérémonies. Cinq, c'était beaucoup et cela aurait pu être davantage, et donc pire, car pas moins de neuf sujets du Royaume de France, toutes conditions confondues, avaient fait acte de candidature. Il avait bien été tenté d'écarter quelques noms sur des critères que l'on essaya de définir de la manière la plus juste, la duchesse d'Auxerre tenant notamment à ce que l'équité préside à la manière de choisir et, les circonstances firent que deux personnes furent écartées d'office, une autre eut la bonne idée – en tout cas pour les deux officiers royaux concernés – de disparaître et une quatrième enfin ne pourrait tout simplement pas être reçue. Cinq entretiens donc, et il s'agissait de ne pas mollir et de ne pas se laisser aller à la distraction afin de se montrer réceptif et attentif à ce qui leur serait servi.

Une pièce avait été réservée dans le château du Louvre dans l'optique de cette série d'entretiens. La salle était meublée d'une table et deux trois fauteuils : deux confortables à l'extrême – remplissant donc les exigeants critères de la duchesse d'Auxerre – placés d'un côté de la table afin de recevoir le divin fessier de celle-ci et le postérieur euh ahem du vicomte du Tournel et un autre, moins luxueux mais de bonne facture tout de même, placé de l'autre côté. Deux flacons et des hanaps avaient été disposés au centre du plateau de bois et, côté Maison Royale, l'on trouvait également de quoi écrire, parchemins, plumes, godets, canif, cire, etc. Des chandelles éclairaient les lieux, palliant s'il en était besoin la clarté de cette journée de juin pénétrant par les croisées laissées entrouvertes, et jetaient l'éclat de leur vacillante flamme sur les tapisseries habillant les murs de pierre. C'était là un avant-goût de ce que pourrait être le cadre de travail du candidat qui emporterait les faveurs conjuguées d'Actarius et d'Ingeburge.

Ces derniers avaient pris place dans la pièce de belles proportions et attendaient le premier postulant. Il s'agissait d'une femme, ou plutôt d'une toute jeune femme, elle n'avait que dix-sept ans et elle arrivait tout droit de l'Anjou. Ingeburge, avec le soin qui la caractérisait, tira d'une reliure de cuir de Cordoue la lettre de candidature de l'adolescente et la plaça entre le Languedocien et elle, afin que tous deux puissent s'y référer s'ils le désiraient durant l'entretien. Puis, de sa voix à la raucité légèrement marquée, elle indiqua au garde de faction :

— Faites entrer, je vous prie, Alinéa de Raveline.

La porte fut ouverte et l'appel de l'homme résonna. Ingeburge, elle, s'était replongée dans son mutisme et ne se risqua pas à parler à Actarius, comme elle ne l'avait pas fait dès lors qu'ils s'étaient tous deux trouvés en présence; depuis Vincennes et les festivités sylvestres s'y étant déroulées, la prudente réserve qu'elle lui opposait jusqu'alors s'était accrue et elle craignait quelque peu que cette retenue qu'elle affichait pût être battue en brèche.
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Alinea
Assise au milieu d'autres candidats, la jeune fille jouait distraitement avec sa chevelure châtain qui, pour une fois, était impeccablement coiffée, relevée et tenue par un petit ruban blanc. La question de sa tenue lui avait posée quelques problèmes. Comment était elle censée s'habiller pour ce genre de circonstance ? Avec sa marraine Johanara, elle avait opter pour une robe de soie d'un joli vert, sobre mais élégante. Un cadeau de Thibauld.

Elle patientait donc, attendant son tour. Discrètement, elle jetait des regards en biais sur les autres candidats qu'elle ne semblait pas connaître. Elle n'était pas particulièrement anxieuse de devoir entrer en concurrence avec d'autres personnes. Ce n'est pas qu'elle était absolument certaine de mériter le poste plus qu'eux, loin de là, c'est juste qu'elle n'était pas du genre à se préoccuper de ce qu'ils avaient a offrir. Ce qui l'inquiétait surtout, c'était son jeune âge qui lui avait déjà porté préjudice par le passé. Sa poisse aussi l'angoissait. Elle finirait par devenir superstitieuse si elle continuait à s'acharner sur elle et a faire foirer tous ces projets.

Plongée dans ses divagations, elle sursauta très légèrement lorsqu'on vint la chercher en appelant son nom. Elle esquissa un sourire poli à l'homme qui lui faisait face. Discrètement, elle plissa sa robe et vérifia que ses boucles rebelles ne s'échappait pas dans tous les sens de son chignon. Elle prit une grande inspiration. Il faut avouer qu'une angevine au Louvre, c'était pas des plus communs et pour être angevine, elle l'était.

Elle arriva devant le Grand Maître des Cérémonies et le Grand Chambellan de France et sourit, inclinant légèrement la tête en signe de respect.

Votre Altesse, Votre Seigneurie, merci à vous de me recevoir.


Elle se tenait droite devant elle et gardait un sourire discret sur ses lèvres. En réalité, elle ne savait pas réellement si elle devait se présenter ou si elle devait attendre des questions. Elle ne savait pas vraiment quoi faire au final donc elle préféra attendre qu'ils prennent la parole.
Actarius
Le Vicomte se tenait les bras croisés dans une attitude quelque peu martiale, les yeux rivés sur la missive de candidature qu'il relisait en attendant l'entrée de la première victime. Car oui, défendre ses chances devant la ténébreuse Bourguignonne dont la réputation de froideur et de sérieux et du "colosse" languedocien aux tempes grisonnant fièrement de ses quarante années ainsi qu'à la barbe diaboliquement taillée qui lui donnait, outre sa carrure, une allure générale sévère, relever d'une véritable épreuve de force, à plus forte raison pour une jeune demoiselle.

Et si de coutume, le Grand Chambellan se montrait plutôt bonhomme répandant un certain enjouement avec son accent d'oc, son humeur avait viré à la morosité depuis la mort de son épouse et le poids de ses charges avait avec les mois anéantit ou presque sa capacité à masquer derrière un beau sourire et un regard rieur la grisaille de son esprit. Enfin, depuis Vincennes, il se sentait oppressé en présence d'Ingeburge. Ainsi donc se trouvaient réunis dans cette pièce tous les ingrédients d'une tension palpable. Une atmosphère pesante et silencieuse que vint bientôt briser un ravissant minois.


Je vous en prie Demoiselle de Raveline, prenez place, lança le Languedocien en guise d'accueil courtois mais franchement solennel. Non décidément sa chaleur habituelle n'y était pas. Je dois vous dire que votre candidature est intéressante. Mais nous avons en tout et pour tout cinq postulants à recevoir. Aussi, il s'agira de briller ce jour pour nous convaincre. Décroisant les bras, il poursuivit toujours dans cette tonalité cérémonieuse. J'ai remarqué avec plaisir à vos premières paroles et à votre attitude que l'étiquette et la bienséance ne vous étaient pas inconnues. Votre cousine a semble-t-il bien pourvu à votre éducation. Etiquette, bienséance... qu'évoquent ces mots pour vous et en quoi leur application concrète est-elle fondamentale à la Cour et plus particulièrement lors des cérémonies ? Directement dans le vif du sujet, pas de fioritures, de circonvolutions, pas de marque particulière de bienveillance. A l'évidence pour quiconque connaissait le Mendois, quelque chose ne tournait pas rond.
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Alinea
Lorsqu'on l'y invita, Alinéa prit place face à ses interlocuteurs et écouta avec attention ce que le Grand Chambellan lui disait. Elle sourit à la mention de Baylina. Il est vrai que sa cousine l'avait souvent agacé avec son caractère si pointilleux mais cela avait fini par porter ses fruits. Malgré le sourire qui s'affichait sur son petit minois, elle avait bien ressenti une certaine tension dans la pièce. Etant donné qu'elle avait à peine ouvert la bouche et qu'elle n'avait pas trébuché ni eu un comportement déplacé jusqu'ici, elle en déduisit que cela n'avait sûrement rien à voir avec elle. Cela aurait pu être assez déconcertant mais avec les évènements actuels angevin, elle avait rapidement appris à passer outre la tension et faire bonne figure.

Cependant, la jeune femme était de nature directe et ne tournait que rarement autour du pot, ainsi, elle ne fut pas surprise d'entendre Actarius entrer directement dans le vif du sujet. La question soulevée était intéressante, seulement, la jeune fille n'y avait jamais réellement réfléchi. A dire vrai, c'est quelque chose qu'elle mettait en pratique depuis longtemps maintenant et cela lui semblait naturel de se comporter de telle manière en de telle circonstance. Elle réfléchit un instant puis se lança.


Pour moi, l'étiquette et la bienséance évoque un comportement que nous nous devons d'adopter en certaines circonstances et face à certaines personnes. Enfin, le mieux c'est de l'appliquer tout le temps, mais bon... Je pense qu'il faut savoir s'adresser à quelqu'un suivant le respect qui lui est dû en fonction son rang dans la société, son âge, la place qu'il occupe au sein de sa famille... Il s'agit donc d'une question de respect, de bonne manière et d'une prise de conscience de son propre rang, ainsi que celui des autres.

Elle marqua une petite pause afin de réfléchir à ce qu'elle pourrait ajouter. Sa réponse lui semblant globalement correcte, elle reprit.

A mon sens, c'est à la Cour et lors des Cérémonies Royales que la bienséance se doit d'être le plus vigoureusement appliquée. Les cérémonies ont lieu pour célébrer quelque chose de spéciale, c'est un événement solennel, il faut donc agir en conséquence. De plus, les personnes qui sont invitées à ce genre d'évènement, ou même à la Cour Royale sont souvent de la haute société donc doivent respecter ce qu'on appelle le savoir vivre noblement. C'est également une marque de respect envers la couronne puisque c'est un peu un milieu et des évènements qui lui servent de «Vitrine». Bien se comporter c'est faire honneur et respecter la Reyne et sa couronne mais aussi l'évènement qui est célébré.

Elle marque une seconde petite pause, ayant un peu de mal à répondre à la question puisque pour elle, cela semblait un peu naturel et logique. Il était toujours difficile d'expliquer quelque chose qu'on fait naturellement.

Ce sont des situations où on est en société, pas en privée, on ne peut pas se permettre d'agir avec autant de familiarité que dans la vie de tous les jours. Une fois encore, c'est une question de respect, de bonne manière et de savoir vivre.

Elle esquissa un léger sourire.
Ingeburge
L'avantage quand dans ses veines circule autant de sang que dans celles d'un cadavre et qu'on est aussi expressif qu'un macchabée, absence d'afflux sanguin on non, c'est que quelle que soit la situation, quelle que soit l'atmosphère, on arbore toujours le même air de profonde indifférence et bien malin celui qui pourrait affirmer que cette situation, cette atmosphère a de l'influence sur l'humeur de celui qui a l'heur d'être doté de cet avantage. Il fallait connaître Ingeburge intimement pour savoir qu'elle était moins détachée qu'à l'ordinaire, et il fallait pouvoir remarquer les signes trahissant sa fébrilité pour comprendre que cette froideur de façade était présentement mise à mal. Elle-même les sentait, à l'intérieur, tâchant de les repousser avec force et elle bénit l'entrée de l'Angevine comme elle loua la volonté d'Actarius d'entrer dans le vif du sujet sans gaspiller de temps.

Alors, elle se concentra sur les premiers échanges, ne manquant pas d'enregistrer ce qui était dit, regardant fixement la jeune candidate et quand elle jugea opportun d'intervenir, elle ne se priva pas, se focalisant uniquement sur Alinea et ses propos, faisant abstraction de tout le reste :

— Vous parlez de respect, de bienséance, de savoir-vivre lié à un événement public, vous est-il vous même arrivé de vous trouver dans une situation requérant de votre part de faire expression concrète de ces valeurs que vous évoquez? Et avez-vous ainsi jamais assisté à une cérémonie, qu'elle fût ou non royale?
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Alinea
La jeune femme réfléchit quelques instants à la question qui lui était posée. C'était une question plus personnelle. Elle avait rarement l'habitude de déballer sa vie privée, encore moins face à des inconnus. Cependant, les exemples qui lui venait en tête étaient des plus personnels alors il faudrait bien qu'elle se lance.

Si bien sur, je pense les mettre en pratique dans ma vie quotidienne dans le cadre des relations que j'entretiens avec mes proches.


Elle marqua une petite pause afin de rassembler ses idées.


Comme je l'ai indiqué dans ma lettre de candidature, je fais partie d'une famille très à cheval sur ces principes. Elle est aussi très pieuse. Ainsi, dans mes fréquentations intimes tout doit se faire de manière assez officielle avec un respect des règles de bienséance. Actuellement, je fréquente un jeune homme, Thibauld de Chandos-Penthièvre et nous avons du organiser des rencontres officielles avec ma famille ainsi qu'avec la sienne. Ces rencontres étaient de parfaits exemples de démonstration de bienséance et de respect à mon avis. Je pense d'ailleurs que mes relations avec sa mère sont celles où je dois utiliser le plus souvent ces principes. C'est une grande Duchesse pour laquelle j'ai le plus grand respect et je fais toujours bien attention à rester à ma place et à m'adresser à elle comme il se doit. De ce fait, on pourrait croire que nos relations sont un peu froides mais je ne pense pas que ce soit le cas, je pense que nous nous tenons juste aux places qui sont les notre.
Nous commençons d'ailleurs à penser au mariage et si cela doit se concrétiser, nous avons prévu d'organiser des fiançailles dans les règles, c'est à dire en la présence des deux familles afin de demander leur consentement, mais également avec la présente de notre évêque.
Ce sont des exemples assez personnels et je ne sais pas si c'est le genre de réponse que vous attendiez mais à mes yeux cela semble pertinent.

J'aime aussi respecter ces règles dans le cadre de mon travail. De mon point de vue, il est important de ne pas mélanger le travail et le plaisir. Dernièrement, Thibauld a été Duc d'Anjou, assez brièvement mais bon... J'étais moi-même procureur d'Anjou sous ce mandat et j'ai toujours fait attention à la manière de m'adresser à lui et à ce que je pouvais me permettre de dire en privée que je ne pouvais pas me permettre de dire dans le cadre du conseil ducal. Soit je m'adressais à mon Duc, soit je m'adressais à mon compagnon. D'ailleurs, pour les prochaines élections je compte participer à la liste de ma meilleure amie et une fois encore, si elle devient Duchesse, je ferai la même distinction et preuve de respect en m'adressant soit à la Duchesse d'Anjou, soit à mon amie.


Sinon, j'ai pas mal d'amis nobles ou issus de familles nobles. Ne l'étant pas moi même, je pense savoir quand est ce que je peux m'adresser à eux de manière légère, dans le cadre d'une discussion amicale et quand je dois retenir ma langue et me conduire comme il le faut dans une discussion ou situation plus officielle.

Un peu plus officiellement, il y a quelque temps j'ai passé un entretien avec l'ancien premier Secrétaire d'Etat, Sa Seigneurie Argael et je pense avoir fait preuve de bienséance comme je le fais
avec vous en ce moment.

Sinon j'ai bien sur participé à quelques cérémonies. Etant donné que je suis baptisée, celle de mon baptême, ainsi que quelques mariages. J'ai aussi assisté à l'anoblissement d'une amie.


Après sa longue tirade, elle reprit sa respiration et plissa légèrement le nez. Elle n'était pas sur que les exemples qu'elle avait donné répondaient réellement à la question.
Actarius
Le Phénix reprit son vol. Il avait docilement prêté une oreille attentive à l'échange entre les deux femmes, un échange intéressant et pertinent durant lequel son regard avait voyagé du Grand Maître des Cérémonies à la postulante. Avouons-le sans détour, ses yeux s'attardaient volontiers, quoique ce fût parfaitement inconscient, sur la Prinzessin. Ils ne rayonnaient d'aucune lueur particulière, d'aucune malice ou perversité. De fait, celui que l'on avait faussement considéré comme un jeune séducteur lors de son arrivée à Mende, n'avait aimé et connu qu'une seule femme: feue son épouse. Il n'était pas insensible au charme féminin et à la beauté et se permettait de temps à autre des compliments, mais jamais encore , ou trop rarement pour qu'il ne s'en souvînt, il avait envisagé de charmer une autre égérie, une autre muse. Oui, le Vicomte avait un côté ridiculement prude et avait fait montre d'une fidélité exemplaire, une fidélité à laquelle il ne comptait certainement pas déroger, quand bien même il fût veuf.

Ceci étant, en cet instant-là, dans cette pièce du Louvre, il demeurait pleinement absorbé par l'entretien et n'en avait perdu aucune miette, détournant tout à fait son regard des deux interlocutrices à quelques reprises afin de jeter une oeillade sur la missive et d'en souligner en son esprit quelques phrases-clés selon lui.


Je vous remercie pour votre réponse. J'aimerais vous questionner sur un point qui m'a interpellé dans votre candidature, glissa-t-il d'un ton toujours aussi neutre et d'une voix toujours aussi marquée par son accent occitan. Vous évoquez à un certain moment votre folie de grandeurs et votre envie d'organiser des cérémonies, fastueuses j'imagine, sans en avoir eu les moyens jusqu'à présent. L'office des Cérémonies bénéficie en effet de moyens... disons importants, pour mettre en place des réceptions de qualité. Si vous aviez ces moyens, qu'en feriez-vous concrètement ?
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Alinea
La jeune fille était calme, et au centre de l'entretien. Elle restait donc concentrée sur l'échange qu'elle avait avec ses interlocuteurs sans avoir réellement le temps de s'arrêter sur les détails du lieu, ni même sur les détails des personnes qui lui faisaient face, si ce n'est l'accent d'Actarius. Le ton de la conversation était des plus neutre, il était impossible pour la bonne Alinéa de savoir si elle allait dans la bonne direction mais cela ne la décontenançait pas vraiment.

La discussion prenait une nouvelle tournure. La question était intéressante et elle prit quelques minutes avant de répondre. Oui, la question était intéressante mais large. Elle offrait tellement de possibilités qu'il lui était difficile de répondre sans plus de précision.


Je pense que c'est une question assez difficile. En fait, je trouve qu'une cérémonie doit être unique, alors sans connaître l'évènement ou le thème, il est difficile d'élaborer un projet.

Elle marqua encore une petite pause en plissant légèrement le regard, signe de réflexion.


Oui c'est ça, je pense qu'une réception ne peut pas être organisée sans savoir quel genre d'évènement on célèbre. Pour moi, tout doit tourner, être organisé et dépendre de l'évènement, c'est ce qui déterminera le type de réception que je souhaiterais organiser et la tournure qu'elle prendra. Du coup, il m'est assez difficile de vous répondre de manière fictive. Je pense que pour une cérémonie solennel, il faut rester dans quelque chose de sobre et d'élégant. En sachant que pour ma part, la sobriété peut être somptueuse, parfois les choses les plus simples sont les plus raffinées. Pour un événement un peu plus festif, faire preuve d'un peu de fantaisie et d'imagination par exemple.

Ayant l'imagination assez fertile, elle décrocha quelques instants son regard de ses interlocuteurs pour se perdre quelque minute dans son imagination.
Ingeburge
Si les regards d'Actarius passaient de l'une à l'autre des jeunes femmes présentes, celui d'Ingeburge, opalin mais vide, restait posé sur Alinea. C'était une observation lente, attentive, minutieuse, qui, pour aussi constante qu'elle fût, n'en demeurait pas moins courtoise; la Prinzessin observait mais ne dévisageait point. Et Ingeburge était bien avisée de ne pas varier d'attitude car d'une part, cela l'aidait, comme elle l'appréciait, à jauger son interlocuteur, à tirer de son examen quelques éléments qui ne ressortiraient pas dans le discours de celui-ci et d'autre part, cela lui permettait de rester dans l'ignorance des allers-retours visuels du vicomte du Tournel car l'eût-elle constaté qu'elle se serait enfoncé dans un mutisme qui ne faciliterait en rien la menée de l'entretien.

Mais, toute ignorante qu'elle fût, elle n'en demeurait pas mois fébrile et il lui fallut toute son énergie pour se concentrer sur les propos de la Raveline et parce qu'elle luttait, elle laissa passer nombre de choses, ne rebondissant pas sur l'Anjou qui ne manquait jamais de la faire réagir, surtout quand on parlait des Penthièvre, ne donnant pas son avis sur cette question de mener sa relation avec un homme dans les formes là où le prélat en elle aurait eu nombre de choses à déclarer, ne faisant pas remarquer, cassante, qu'il était pour le moins curieux et même déplacé d'estimer devant eux, directement, qu'elle se conduisait de manière bienséante. L'évocation du baptême et de la piété évacua la pique avant même qu'elle ne sortît même si ce qui contribua en fait à l'écarter tout à fait était cette nervosité grandissante et qu'il lui fallait contenir, à tout prix.

Il fallait que cela cesse et ce fut la voix un peu tranchante, peut-être, certainement, qu'elle lança, sans prendre la peine de développer davantage :

— Sa Majesté la Reine de France reçoit l'Ambassadeur extraordinaire du Très Saint Empereur.

Ma demoiselle Alinea est servie.
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Alinea
La jeune femme reporta son intention sur le Grand Maître des Cérémonies, plissant légèrement les yeux. La phrase était courte, sèche et sortait de nulle part. Elle se demanda un moment si c'était un exemple qu'elle lui tendait afin de développer ou si c'était... Juste comme ça. En fait, elle savait que c'était un exemple mais il avait été tellement peu développé que ça la laissa quelque peu perplexe. En fait, l'ambiance globale de l'entretien commençait à la laisser perplexe. Elle se mordit légèrement la lèvre. Donc, la Reine de France recevait l'Ambassadeur du Très Saint Empereur et elle devait se débrouiller avec ça pour élaborer un projet en quelques secondes. Joie.

J'imagine que la Reine le reçoit pour des raisons diplomatiques qu'ils régleront ensemble en dehors de toute cérémonie. Ainsi, la cérémonie servirait surtout de distraction et de démonstration d'une bonne entente entre le Royaume de France et le Saint Empire
.

Elle réfléchissait tout en parlant.


Dans ces conditions, je penserais à organiser un repas suivi d'un bal. Les personnes pourront se présenter à ces évènements que sur invitation. Peut être que les invités du repas seraient en plus petits nombres que ceux du bal, des personnes importantes.
Il faudrait se charger de l'annonce de l'évènement, de la préparation et de l'envoie des invitations, de la création d'un menu riche et varié - peut être quelques spécialités de nos différentes régions et une dégustation de vin - , de préparer des salles somptueuses aux couleurs du Royaume de France et du Saint Empire, du personnel qui se chargerait de la vérification des entrées et du service. Il y aura donc deux sortes d'invitations, celles pour les personnes invitées au repas et au bal, celles pour les personnes uniquement invitées au bal. Il faudrait également trouver de bons musiciens.

Je pense que le repas et le bal se feront dans deux salles séparées afin de facilité l'organisation et d'éviter des moments de flottement. Il faudrait donc trouver deux salles non loin l'une de l'autre. Celle du bal serait plus grande, évidemment.
Le personnel devrait être choisi avec soin de manière à ce que le service soit impeccable. Des personnes vives et observatrices pour qu'elles anticipent les demandes des invités, surtout celles de la Reine et de l'Ambassadeur du Très Saint Empereur. De même qu'en plus des personnes chargées des vérifications des entrées, il faudrait prévoir une garde discrète qui veillera plus particulièrement sur la Reine et son invité. Comme je l'ai dit, il faudra qu'elle soit discrète, mais efficace en cas de besoin.


Elle s'arrêta un moment, réfléchissant.


Hmm.. Il faudrait des divertissements aussi pendant le bal je pense.. Comme hmm...


Elle se mordit légèrement les lèvres. Chez elle c'était signe de réflexion. Il faut dire que tout en parlant, elle mettait mentalement en image ce qu'elle proposait. Bien sur, étant donné les invités, elle ne pouvait pas organiser n'importe quel divertissement. Pour le coup, elle séchait un peu.


Là tout de suite je ne sais pas quel genre de divertissement, mais ça viendra sûrement.
Actarius
Le Grand Chambellan ne put s'empêcher de sourire. Il reprit la main dans cet entretien et enfin se fit-il plus cordial, ce qui pouvait être un bon signe ou au contraire un début de moquerie. Le voile d'incertitude se leva bientôt avec une réaction qui en disait long sur son ressenti.

Vous avez en quelques mots résumé grossièrement le fonctionnement de notre office pour ce qui concerne les cérémonies. L'organisation d'un grand événement nécessite plusieurs collaborations. Il convient effectivement de définir une date en premier lieu, puis de définir un lieu en prenant en compte les différents volets de la cérémonies, mais aussi le désir de Sa Majesté. Dès lors, il faut établir une liste d'invités. Cela est je dirai la première partie de l'organisation. La deuxième relève de la collaboration avec le Maître Enlumineur pour les cartons d'invitations, avec les huissiers pour les annonces et des gardes pour la sécurité, avec le Service de la Bouche pour le repas, avec la Chambre éventuellement pour les décorations... avec l'Intendant des Menus Plaisirs pour les distractions...

Sa main se porta machinalement sur l'hanap d'hypocras, qu'elle porta bientôt à ses lèvres. Le Phénix savoura l'explosion sensuelle et épicée du nectar sur son palais et continua après avoir reposé le contenant luxueux sur le petit plateau de bois. Mettons que les invitations sont prêtes à être envoyées, que la cérémonie est prête à être lancée. En quoi consistera la dernière phase de votre travail sur l'événement ?
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Alinea
La jeune fille se détendit légèrement lorsqu'elle aperçut enfin un sourire sur l'un de ces deux interlocuteurs. Elle commençait légèrement à se demander si elle n'était pas totalement à côté de la plaque. Elle se détendit très légèrement puisque l'ambiance générale l'avait forcé se sentir quelque peu tendu. Bon, a priori son projet n'était pas trop mauvais et elle n'avait pas de fausse idée sur ce qui l'attendrait si elle était choisie, voilà un point positif. Elle l'écouta attentivement et sourit. Elle le regarda se déshydrater et attendit la prochaine question qui ne tarda pas à venir.

Je pense déjà que les invitations seront envoyées avant que la cérémonie ne soit prête à être lancée. Donc suite à l'envoie de l'invitation j'imagine que je devrais m'assurer à ce que tous les différents intervenants de la préparation fassent leur travail, aient bien compris ce qu'on attendait d'eux pour être prêts lors du début de la cérémonie. C'est un peu un travail de coordination.

Elle s'arrêta un moment pour réfléchir. A vrai dire, elle avait du mal à cerner la dernière phase de son travail sur l'évènement, si ce n'est encore une question d'organisation et de gestion.

Ensuite, juste avant le lancement je pense qu'il faudrait que je fasse une vérification de tout le travail mené jusqu'ici, que je passe d'une équipe à l'autre afin de donner les dernières consignes, et de vérifier encore une fois que tout est au point et que tout se passera au mieux, sans imprévu. Enfin, je pense qu'il y a souvent quelques imprévus et j'imagine qu'il faudrait que je sois prête à ces éventualités et que j'y sois réactive. Après, il faudra sûrement que j'accueille les invités en mettant en pratique mes connaissances sur la bienséance, si besoin est, que je les place si un plan de table a été fait ou ce genre de chose. Je pense devoir être présente durant la cérémonie afin de veiller à l'application de tout ce qui a été prévu et en cas d'imprévus justement.

Elle sourit.
Actarius
Le Vicomte hochait régulièrement la tête en guise d'assentiment ou peut-être de désapprobation. Quoiqu'il en fût, il demeurait toute ouïe et jetait quelques furtifs coup d'oeil du côté de son Grand Maître des Cérémonies. Le temps était déjà venu d'abréger cet entretien. Non pas que tel fut la volonté du Languedocien, mais on frappa à la porte, qui s'ouvrit bientôt sur un serviteur, qui annonça au Grand Chambellan qu'il était attendu d'urgence pour une affaire ne souffrant aucun délai.

Dès que le valet eut disparu, le Phénix se leva et invita les personnes présentes à l'imiter, tandis que son regard se porta sur la postulante.
Demoiselle, je vous remercie d'avoir répondu à nos questions. Le devoir m'appelle et visiblement je ne puis m'y soustraire. Nous avons encore quelques entretiens à mener ces prochains jours et nous prendrons ensuite une décision que nous vous communiquerons. Que le Très-Haut veille sur vous !
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Ingeburge
La duchesse d'Auxerre, attentive, écouta les réponses fournies par Alinea suite à la question – car c'était bien une question – qu'elle avait posée. Ce qu'elle pensa comme ce qu'elle pensa de tout le reste de l'entretien ne serait confié qu'au seul vicomte du Tournel. Celui-ci était réclamé ailleurs et Ingeburge, à la suite d'Actarius, salua la jeune Angevine avant d'indiquer au Languedocien qu'elle devait se rendre, immédiatement, auprès de la dauphine de France afin de consulter celle-ci sur une idée qui lui était soudainement et qui ne pouvait souffrir d'aucun délai dans son traitement. Sans attendre de réponse, elle battit en une retraite qu'elle espéra point trop précipitée.

Dire qu'il restait pas moins de quatre entretiens... elle doutait de pouvoir garder l'empire qu'elle avait sur elle-même au terme de la folle semaine qu'ils ne faisaient que débuter.

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Alinea
La jeune femme sourit et se leva.

Merci à vous de m'avoir reçu et prit de temps pour m'écouter. Je vous souhaite une bonne fin de journée.

Petit signe de tête en guise de respect, elle sortit de la pièce et se sentit plus légère. Que ça se soit bien passé ou non, c'était terminée et elle était soulagée. Elle souffla un coup et se dit que maintenant, il n'y avait plus qu'à attendre. Elle prit la direction de la sortie et se rendit à Paris pour flâner un peu.
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