Nizam
Titre inspiré par la chanson "Libre" d'Eiffel. RP ouvert à ceux qui croiseront Nizam, merci de prévenir par MP.
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« Hello Alone, it's me and you again
How can we pretend we've never met ? »*
Derniers jours de janvier.
Aujourd'hui il part. Aujourd'hui il s'en va.
Enfin ! Après une semaine agitée par multiples piques de fièvre et crises d'un coeur souvent au bord de ses lèvres, il quitte la capitale limousine et jure d'enterrer ses derniers jours de décadence tant physique que morale. Il avait noyé dans l'alcool sa cervelle et ses entrailles, le mélange associé à cette maudite maladie ne donna rien de bon, et c'était évidemment son but. Se détruire lentement pour que passent ses regrets, ses torts, s'enliser dans des idées noires, tout ce dont l'homme blessé dans son orgueil était capable. Depuis sa séparation avec lÉtincelle - fut-elle inévitable - les sauts d'humeurs étaient fréquents chez le Blond, il alternait morosité et colère, culpabilité et indifférence exacerbée : relation vouée à l'échec ? Elle avait tenu à lui rendre sa "Liberté" ? Parfait ! Il avait réagi trop tardivement, récoltait toutes les erreurs qu'il avait semées ? Qu'importe ! De la désillusion, il cédait désormais à l'aigreur. Il se complaisait de nouveau dans l'amertume et l'agressivité, préférant la hargne à la tristesse des sentiments, à ces perles d'eau salée qui roulent sur les joues et lui brûlent les yeux. Comme ce serait si simple s'il n'avait rien ressenti, s'il s'était joué d'elle au gré de ses envies et de ses besoins. Qu'elle pense ce qu'elle souhaite, qu'on lui donne le pire des rôles, celui qui profita, qui la détourna de son chaste chemin vers ce paradis solaire, qui n'a pas su mériter, ni garder, ce qu'elle lui donnait, elle naïve et généreuse, lui égoïste et corrompu. Il n'ira pas se justifier ni se battre, à ses yeux le jeu était truqué, perdu depuis longtemps. Fuir, toujours fuir, Nizam avait le courage des armes, non celui des mots ni de la sincérité, il avait refusé d'abandonner son rêve de môme, un marginal à l'avide soif de conquête, simplement pour le goût de liberté, utopique liberté. Tu ne peux t'en passer, mais à quoi ça te mènera Balafré ? Tu as brisé l'avenir avec la Frêle, alors tu retournes à tes anciens projets... Sans t'en être réellement séparé.
L'aube se leva malgré la grisaille. Tout était prêt. Il avait auparavant fait un détour par la bâtisse voisine pour rendre le contrat et la clef qui le liait à la noble, seule la cuisinière fut brièvement rencontrée, cela lui suffit. Il avait quitté le quinze les bras chargés, lui-même vêtu de tissus chauds afin de contrer le temps hivernal, le torse pris dans sa brigandine il avait sur les épaules, comme à l'ordinaire, une cape sombre et épaisse. Ses bottes s'enfonçaient dans les dernières épaisseurs de neige boueuse, et dire qu'il se dirigeait vers le Nord ! Les frissons qu'engendrait la morsure du froid sur sa peau l'auraient volontiers guidé jusqu'aux terres méditerranéennes, pourvu que brume et givre appartiennent au passé. L'homme entra dans les écuries, rue de la Justice, parmi les équidés présents il reconnut seulement le Noiraud, l'Alezan de la Flammèche avait déjà disparu. Quand était-elle partie ? Mercredi ? Jeudi peut-être ? Volontairement, il n'y prêta pas davantage attention. A quoi bon ?
Le mercenaire eut son premier sourire lorsqu'il entendit les sabots de son étalon marteler le sol et la paille, il le rejoignit rapidement et le fit sortir de son boxe. Le coursier était jeune mais avait déjà fait preuve de sa force, Nizam se souvenait de la description donnée par son ancienne patronne, "tempérament intrépide", il y avait bien ces similitudes entre l'homme et l'animal.
- Eh... On n's'est pas encore occupé d'toi ? Allez viens, on doit s'préparer mon beau, on a un long voyage, et j'suis sûr que tu vas aimer fouler autre chose que les pavés d'cette ville, 'voir c'que donne ton galop maint'nant.
Le palefrenier vint une fois la demi-heure écoulée, écopant d'une remarque acerbe du Blond, mais ce dernier avait mis à profit ce retard pour panser et seller lui-même Tahir. Chaque jour il apprivoisait le pur sang, les futures et longues semaines de routes accentueront aisément cette complicité, du moins l'espérait-il. Il sortit en cavalier dans la ruelle, baluchon et sacoches solidement attachés, avant de rabattre habituellement la capuche sur son visage écorché.
De retour à ses années de vagabond ! Garde précieusement ta monture Balafré, aujourd'hui toi et ta solitude prétendront être libres.
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[*Charlie Winston - Hello Alone. Traduction boiteuse : "Bonjour Solitude, c'est encore toi et moi, Comment pouvons-nous prétendre ne nous être jamais rencontrés ?"]