Anne_blanche
Et voilà, c'était parti.
Anne ne comprit rien aux propos du garde, ne les ayant pas écoutés, puisqu'elle ignorait totalement qu'il s'adressait à elle : depuis quand un garde s'adresse-t-il à une duchesse sans y être convié ?
Elle se serait volontiers bouché les oreilles à deux mains quand l'huissier fit son office, sa voix tonnant encore plus que celle de Bacchus. Mais elle supporta l'outrage, stoïquement. Il y en aurait tant d'autres à venir, au cours de cette cérémonie qui ne manquerait pas de paraître interminable.
Le lent défilé des tenues à la mode se mit en place. Du coin où elle s'était réfugiée, à l'ombre d'un gros pilier, Anne ne distinguait pas les visages. Sa courte vue ne le lui permettait pas, et en l'occurrence ça l'arrangeait bien : elle n'aurait pas à se donner le ridicule du "Bonjour, Untel ! Comment vas-tu ?"
Autre avantage du pilier : ça constitue un appui confortable pour l'épaule gauche. Pourquoi pas la droite ? Eh bien parce que la droite a besoin de liberté. En effet, si l'on suit attentivement du regard la chose mouvante qui émerge de l'épaule droite, on ne manque pas d'arriver à une main. Celle d'Anne était gantée de fin vélin blanc, qu'elle se refusait à retirer depuis l'incendie à l'Académie. Elle tenait déjà un calame. Et déjà, elle sortait subrepticement d'une des besaces de Bacchus un premier parchemin, qu'elle déroulait sur l'écritoire tenue par ledit.
Il tournait le dos à l'honorable assemblée, exposant aux yeux de tous un somptueux tabard jaune brodé des trois guses de Courtenay. Vu l'origine du Grand Maître de France, il y aurait là suffisamment d'Orléanais pour laisser passer l'occasion d'arborer des couleurs qu'on lui avait si ardemment reprochées en Orléans.
Appuyée au pilier, quasiment cachée par la lourde masse du gros Bacchus tout fier de son tabard neuf, elle pouvait travailler en paix, en croisant les doigts pour que personne ne s'aperçût du manège.
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Anne ne comprit rien aux propos du garde, ne les ayant pas écoutés, puisqu'elle ignorait totalement qu'il s'adressait à elle : depuis quand un garde s'adresse-t-il à une duchesse sans y être convié ?
Elle se serait volontiers bouché les oreilles à deux mains quand l'huissier fit son office, sa voix tonnant encore plus que celle de Bacchus. Mais elle supporta l'outrage, stoïquement. Il y en aurait tant d'autres à venir, au cours de cette cérémonie qui ne manquerait pas de paraître interminable.
Le lent défilé des tenues à la mode se mit en place. Du coin où elle s'était réfugiée, à l'ombre d'un gros pilier, Anne ne distinguait pas les visages. Sa courte vue ne le lui permettait pas, et en l'occurrence ça l'arrangeait bien : elle n'aurait pas à se donner le ridicule du "Bonjour, Untel ! Comment vas-tu ?"
Autre avantage du pilier : ça constitue un appui confortable pour l'épaule gauche. Pourquoi pas la droite ? Eh bien parce que la droite a besoin de liberté. En effet, si l'on suit attentivement du regard la chose mouvante qui émerge de l'épaule droite, on ne manque pas d'arriver à une main. Celle d'Anne était gantée de fin vélin blanc, qu'elle se refusait à retirer depuis l'incendie à l'Académie. Elle tenait déjà un calame. Et déjà, elle sortait subrepticement d'une des besaces de Bacchus un premier parchemin, qu'elle déroulait sur l'écritoire tenue par ledit.
Il tournait le dos à l'honorable assemblée, exposant aux yeux de tous un somptueux tabard jaune brodé des trois guses de Courtenay. Vu l'origine du Grand Maître de France, il y aurait là suffisamment d'Orléanais pour laisser passer l'occasion d'arborer des couleurs qu'on lui avait si ardemment reprochées en Orléans.
Appuyée au pilier, quasiment cachée par la lourde masse du gros Bacchus tout fier de son tabard neuf, elle pouvait travailler en paix, en croisant les doigts pour que personne ne s'aperçût du manège.
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