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Info:
Xm a posé pour l'instant ses bagages et entretient un petit commerce de remèdes très exotiques...

[RP] Au Tigre Blanc, remèdes d'Asie et d'Orient

Xmanfe1999
L'herboristerie "A l'Asphodèle Blanc" a fermé ses portes, Xm vous accueille désormais, comme l'annonçait le dernier post repris ci dessous, dans sa nouvelle échoppe "Au tigre Blanc". Elle y dispensera à ceux qui lui en feront la demande, les remèdes qu'elle a appris à utiliser au Cathay et aux Japons.


Après plusieurs jours de réflexion intense et de tâtonnements, Xm était enfin arrivée à mettre en forme un projet qui lui plaisait. Elle s'était longuement interrogée sur ce qui pourrait faire le succès d'une nouvelle échoppe et avait finalement trouvé la réponse: l'originalité.

Quand elle avait ouvert l'Asphodèle Blanc, quelques semaines auparavant, la boutique avait aussitôt attiré les curieux et certains y étaient même revenu plusieurs fois.
Cependant elle avait vite éprouvé les limites de la formule: les gens entraient et sortaient comme dans un moulin, se servaient sur les rayonnages et avaient même violé sans vergogne son intimité en pénétrant chez elle en son absence.

Tout bien réfléchi, c'était en fait ce qui avait posé problème. La boutique et son foyer occupaient le même endroit.
Elle avait donc décidé de faire en sorte que ces deux entités continuent à occuper le même espace, mais de manière à ce que le public n'empiète pas sur le privé.
C'était la partie de son projet qui lui avait pris le plus de temps. La demeure, qui avait abrité Océ avant son mariage, était en effet assez petite, mais son agencement permettait d'en tirer le meilleur parti.
Xm décida de consacrer la pièce principale, à l'avant de la maison à son activité professionnelle.

Cependant, celle-ci allait elle aussi devoir évoluer. Quel intérêt, en effet, de rester simplement herboriste, quand tout le monde à Genève se mettait à user des plantes comme si la connaissance des simples se trouvait sous le sabot d'un cheval?
Xm savait fort bien que si elle voulait tirer son épingle du jeu, il lui faudrait mettre à profit les connaissances acquises à travers ses voyages en Orient et en Asie.

Souriante, elle regarda avec fierté la claustra qui séparait sa pièce principale en deux volumes distincts: un pour la vente des remèdes, l'autre pour les consultations et les séances de soin.





Xm passa dans la seconde partie et regarda en souriant le coin intime et agréable qu'elle y avait aménagé pour ses futurs patients. Un divan bas, douillettement garni d'un matelas rembourré de la laine de ses moutons et couvert d'un drap propre. Une table basse confectionnée comme la claustra dans une des planches qu'elle avait trouvé ces derniers jours devant sa porte, couverte elle aussi d'un linge immaculé.
Sur ce linge luisaient doucement une vingtaine de fines aiguilles d'acier, d'épaisseurs et de longueurs diverses. Certaines semblaient avoir été recouvertes d'une fine couche d'or. Xm caressa d'un doigt délicat les plus belles d'entre elles. Le travail à la mine avait ses avantages...

Au dessus du divan, ainsi que dans la partie adjacente de la pièce, une belle lanterne de papier rouge, que Xm avait patiemment fabriqué avec des chiffons effilochés et de la colle de poisson, teinté de cochenille.
Le plus difficile avait été de trouver des branches de saule suffisamment fines pour en constituer l'armature, ainsi que la soie pour orner les deux lanternes d'un long gland noir et doré. Mais quelques promenades frisquettes au bord du lac, ainsi que le sacrifice d'une partie d'une de ses précieuses couvertures matelassées lui avaient fourni le nécessaire.



Dans la partie consacrée à la vente, les nouveaux bocaux, délicatement laqués, grâce à une essence de résineux dont les propriétés approchaient celle des arbres à laque d'Inde, s'alignaient sur les nouvelles étagères.
Leur contenu ne tarderait pas à circuler dans Genève et Xm s'amusait à l'avance d'imaginer la réaction des genevois et des genevoises devant l'étrangeté de certains des ingrédients.



Ah! sa rencontre avec Gianni à Sion avait été bien utile! Non seulement il lui avait apporté les nouvelles qu'elle attendait, mais son contrebandier préféré et elle-même avaient conclu les termes d'un accord commercial plus qu'avantageux pour les deux parties.
Dieu merci, Venise n'était pas bien loin, et l'on y trouvait vraiment tout ce que l'on voulait...

Xm jeta un regard circulaire sur la pièce. Tout était prêt. Il ne restait plus qu'à décrocher l'ancienne enseigne et à mettre à sa place la nouvelle. Elle alla dans sa resserre prendre son échelle, ramassa au passage marteau et clous et, sa nouvelle enseigne sous le bras, sortit devant sa maison. Elle regarda avec un pincement au coeur la belle enseigne rouge ornée de l'asphodèle blanc. Elle grimpa à l'échelle et fit sauter d'un mouvement précis les quatre clous qui la maintenaient en place. L'enseigne s'écrasa au sol avec fracas.

Xm sourit. Une période de sa vie s'achevait avec la chute de cette enseigne. Place à la nouvelle!

Elle redescendit vivement de l'échelle et remonta presque aussitôt, sa nouvelle enseigne sous le bras. Quatre clous plus tard, elle contemplait son oeuvre. Voilà qui allait faire sensation à Genève!





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Insaisissable comme la lumière
Dure comme le fer
Et en amour comme à la guerre...
Xmanfe1999
Xm était de retour de retraite depuis plusieurs jours et pourtant sa boutique restait désespérément vide. Elle se demandait où elle avait bien pu faire une erreur. Allongée mollement sur les coussins du divan dans l'espace réservé aux soins, elle contemplait la lanterne rouge suspendue au plafond au dessus d'elle. Après un long moment de méditation et s'assit brusquement, traversée comme par un éclair de lucidité.

Mais bien sûr! qu'est ce que je peux être bête!

Elle alla chercher dans son arrière boutique son pot de peinture et son pinceau pour faire un petit ajout à son enseigne. Elle attrapa au passage sa petite échelle et sortit.



Elle redescendit et jugea de l'effet de son ajout sur l'enseigne. Satisfaite du résultat elle rentra dans son échoppe. Les temps étaient durs, il est vrai, et les genevois n'étaient peut-être pas prêts à dépenser leurs précieux écus pour une médecine inconnue. Parcourant du regard son domaine, Xm se dit qu'il serait tout de même dommage que tout cela ait été peine perdue. L'investissement avait été important. Et surtout, qu'allait elle faire de tout cela si personne ne se présentait?

Xm soupira. Le fatalisme dont elle avait fait sa ligne de conduite depuis quelque temps l'aidait à faire face à sa solitude et au désoeuvrement les jours où elle n'était pas de garde.
Elle sentait pourtant l'ennui l'envahir et se dit qu'un peu de détente lui serait bénéfique.
Elle alla chercher sous son comptoir flambant neuf une précieuse boîte d'ivoire qu'elle posa sur la table basse à côté du divan.

A l'aide de pincettes elle saisit dans l'âtre quelques morceaux de bois incandescents, qu'elle déposa avec précaution dans son réchaud de fonte sur la table également. Elle sortit du tiroir de la table basse une longue pipe au foyer de cuivre et à la tige de bois foncé, ainsi qu'une baguette de bois.


Assise en tailleur sur son divan, elle entrepris de tirer de la petite boîte d'ivoire une boulette collante et noirâtre qu'elle déposa dans le foyer de la pipe. A l'aide de la baguette de bois qu'elle alluma au contact des braises, Xm alluma sa pipe et tira lentement quelques profondes bouffées.
La fumée douce et un peu écoeurante se répandit dans ses poumons et l'ivresse immédiate la fit s'allonger avec langueur sur les coussins.

Les paupières lourdes, Xm soupira à nouveau.
Les souvenirs lointains défilaient devant ses yeux vagues et un sourire indéfinissable éclairait son visage. Un instant, s'accrochant encore sans conviction à la réalité, elle se demanda si elle avait verrouillé sa porte. Elle pensait que non, mais qu'importait? Personne ne venait plus la voir de toutes façons...
Elle se laissa aller avec paresse aux délices trompeurs de l'opium. Elle était à nouveau dans les bras de Saburo, ses mains expertes la caressaient avec douceur. Mais pourquoi tout autour d'elle était rouge?
Roulant sur les coussins, les cheveux dénoués Xm gémissait doucement d'extase ou de douleur? Elle même ne le savait pas.
Une main réelle ou imaginaire, elle n'aurait pu le dire, effleurait son front, baignait de fraîcheur les cicatrices de son dos, lacées à même la peau en réseau pâle laissé là par le fouet.
Plaisir et douleur. Xm connaissait cet étrange et dangereux mélange par coeur. Elle n'en avait plus peur depuis longtemps et se languissait de le retrouver même si l'aveu de ce manque était impossible, aux hommes qu'elle avait rencontrés depuis son arrivée à Genève, en tous cas.

S'étirant avec volupté, aux franges du sommeil, Xm tira à nouveau quelques bouffées de la pipe qu'elle déposa sur la table.
Gianni... lui la comprendrait. Il fallait qu'elle essaie de le convaincre de passer la voir à Genève.
Xm ferma les yeux. Un léger bruit près de la porte ranima un infime moment son instinct de veille, mais la drogue fut la plus forte et Xm s'endormit.

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Xmanfe1999
Quelques heures plus tard, Xm s'était réveillée, glacée, la bouche pâteuse.
Une migraine féroce battait sous ses tempes. Les paupières crispées elle s'assit péniblement sur le divan.


Ach, vertammi, jura-t-elle entre ses dents. Qu'est-ce qui m'a pris de me laisser aller comme ça... J'ai plus l'habitude. C'est pas comme ça que je vais résoudre mes problèmes.

Elle se leva, raide et endolorie par ses heures de sommeil artificiel, dans le froid de la pièce où le feu s'était éteint.

Xm s'étira consciencieusement, ranimant chaque muscle et chaque articulation par des exercices rigoureusement répétés chaque matin pour entretenir la souplesse et l'agilité de son corps.
Contrairement à ce que s'imaginaient nombre de ses contemporains et en particuliers les hommes, dans un combat au corps à corps, la force n'était, de loin, pas l'élément déterminant; une femme ou même un adolescent, éduqué selon les préceptes que lui avait enseigné Saburo, aurait été à même de mettre à mal bien des soldats de la garde...

Xm termina sa série d'exercices par une posture qui la faisait un peu ressembler aux statues qu'elle avait pu admirer sur les temples lors de son passage en Inde.

Les mains jointes en un arc gracieux au dessus de la tête, la tête et le dos droits, la jambe gauche pliée sur le côté, dans l'axe du bassin, le pied reposant un peu au dessus du genou droit.

Légèreté, équilibre, maîtrise. Les yeux fermés, la respiration mesurée, Xm sentait le monde autour d'elle reprendre lentement sa place. Sa migraine refluait vers un coin de son cerveau où elle pourrait l'ignorer, jusqu'à ce qu'elle disparaisse d'elle même.


Sa séance terminée, Xm se dirigea vers la cuisine, où elle alluma un feu pour se préparer un frugal petit déjeûner.
Tout en mangeant, debout, appuyée contre sa table, elle réfléchissait à son comportement des ces dernières semaines.
Certes, la blessure d'amour et d'orgueil que lui avait infligée Mélian avait été sévère. Mais elle avait vécu auparavant dans sa vie des événements bien plus traumatisants. Peut-être fallait-il chercher ailleurs l'explication à son penchant marqué pour l'usage immodéré de l'alcool et maintenant de l'opium.
Xm savait pertinemment qu'à trop vouloir fuir la réalité - sa solitude, son ennui - celle-ci finirait par la rattraper. Ce qu'il fallait, ce n'était pas fuir cette réalité, mais la changer, faire en sorte que sa vie redevienne excitante, haletante, comme elle l'avait été pendant les sept années où elle avait parcouru le monde et fait toutes ces rencontres qui avaient fait d'elle ce qu'elle était maintenant.

Xm posa son bol et ses baguettes et s'approcha de la fenêtre.
Par delà le lac, les montagnes s'illuminaient sous le soleil levant.

Le soleil levant... Un pincement cruel lui saisit soudain le coeur. Impossible. Repartir pour les Japons signifiait ne jamais revenir. Et puis, qu'y avait-il là bas pour elle? Saburo était mort depuis plus
de trois ans et jamais le daimyo n'accepterait qu'une étrangère ne s'installe dans son fief. De toutes manières, elle avait mis plus d'un an à parvenir au Nippon lors de son premier voyage et rien ne pouvait lui garantir qu'elle trouverait à nouveau des voyageurs prêts à l'accueillir parmi eux pour l'y amener... Impensable.
Xm soupira. Elle se versa un bol de thé pour finir son repas.

Les montagnes revêtaient un manteau étincelant de neige éclaboussée de soleil. Pas de doute, le printemps serait bientôt là, la neige sur les basses pentes autour de Genève finirait de fondre. Les prairies se couvriraient de fleurs, les animaux quitteraient les étables pour retourner paître dans les alpages. Xm sourit.
A quel point cet aimable tableau différait des paysages altiers des montagnes nippones ou des dunes du désert lybien qu'elle gardait précieusement au fond de son coeur.
Elle imaginait la tête qu'aurait fait Saburo ou le sultan en voyant une vache... Le comique de la situation la fit glousser. Xm secoua la tête. Tout cela était bel et bien fini. Inutile de rêver d'un retour en arrière. La seul option souhaitable était de foncer vers l'avant. Quoique...

Xm admirait toujours les montagnes. La lumière changeante du soleil, filtrée ça et là par de légers nuages, descendait les pentes vers la ville. Bientôt elle frapperait la girouette de la cathédrale au sommet du clocher et ferait étinceler le cuivre comme de l'or incandescent.

Les montagnes, la neige qui fondait. Bientôt les cols seraient à nouveau rouverts, et la Lombardie était si proche... Xm sourit. Elle savait ce qu'elle allait faire. Elle repassa dans la pièce principale et sortit son écritoire du tiroir de son comptoir.


Pourvu que ce gros soiffard de Fratello Buffo soit toujours dans la bande! Xm leva les yeux au ciel.
Le seul dans cette troupe de vauriens qui sache lire et écrire.

Du coup elle devrait s'abstenir de choses trop personnelles et intimes, mais tant pis. Pas de sa faute si cette canaille de Gianni avait fui la maison de sa brute de père avant d'avoir appris ses lettres.
Elle s'installa à la table et commença à écrire.


Carissimo Gianni,

Une fois encore je t'appelle à mon secours.


Xm s'arrêta, saisie par un scrupule. Elle savait que malgré la désinvolture qu'il affichait, Gianni n'avait jamais pu s'empêcher de voler au secours des demoiselles en détresse. D'où, d'ailleurs, un certain nombre de disputes homériques avant leur séparation définitive. Mais cette fois, le secours dont elle avait besoin était d'une nature bien particulière...
Elle reprit sa lettre.


Depuis que nous nous sommes vus à Sion, j'ai beaucoup réfléchi. Je souhaite que tu viennes me retrouver à Genève dès que tu pourras. Je t'en prie, ne te déguise pas en prêtre cette fois. Les Genevois sont assez chatouilleux question religion, l'arrivée d'un curé inconnu en ville ne ferait qu'attiser les tensions et tu risquerais d'en faire les frais. Viens seul. Je t'attends très impatiemment.

Xm hésita sur la signature à apposer. Ton Xm? Ton amie Xm? Ta chère Xm?
Elle haussa les épaules et opta pour la simplicité: Xm

Elle enroula soigneusement la missive et alla dans son arrière cour pour la confier aux soins de sa plus jolie tourterelle. Gianni serait sensible à ce détail, elle le savait. La prenant dans ses mains, elle lui souffla doucement dans les plumes du cou. La tourterelle roucoula de plaisir. Xm déposa un baiser sur la tête de l'oiseau et la lança en l'air. Après deux tours au dessus des maisons, elle prit la direction du sud est.


Vai via.., paloma. Trouve-le pour moi et reviens-vite!

Frissonnant dans l'ombre de la cour derrière la maison, Xm rentra et s'habilla plus chaudement. Elle décida d'aller faire un tour en forêt.
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Xmanfe1999
Deux jours avaient passé depuis que Xm avait écrit à Gianni.
Deux jours d'attente impatiente, de promenades sans but, d'activité fiévreuse. Elle avait beau savoir que sa tourterelle favorite aurait peut-être du mal à localiser Gianni dans les montagnes, et que deux jours n'étaient que le début de la longue attente qu'elle aurait peut-être à subir, Xm enrageait d'être sans nouvelles, de devoir simplement endurer sans pouvoir rien faire pour accélérer les choses.
C'est donc avec soulagement qu'elle avait pris son service à la garde, pour les trois nuits de la fin de semaine.

Elle avait retrouvé ses fidèles soldats, et n'avait eu comme d'habitude qu'à se féliciter de leur ponctualité et de leur efficacité. D'autant qu'elle avait elle même dérogé à la discipline qu'elle s'imposait avant un tour de garde en passant un long moment en taverne.

Xm se versa un bol de thé fraichement préparé pour se réchauffer avant d'aller se reposer.

Elle repensait à la soirée de l'avant veille qui avait été riche en émotions. A peine remise de sa déconvenue amoureuse avec Mélian, la voilà qui se retrouvait à rêver.
Elle avait bu plus que de raison, ce soir là, toute à sa joie d'avoir pris la décision d'aller de l'avant, et pleine à nouveau de l'insouciance qui était la sienne quand elle était arrivée à Genève, l'été précédent. Si bien qu'avec son amie Anna, quand le nouveau venu était arrivé, elle avait laissé libre cours à son exubérance et parlé tout haut alors qu'elle était persuadée d'avoir chuchoté ou pensé.
L'homme ne s'en était pas trouvé choqué , au contraire. Il lui avait tenu une compagnie galante et chaleureuse, et elle s'était vite retrouvée fascinée par ce regard pénétrant et cette voix profonde et enveloppante. Elle s'était sentie étrangement attirée à le regarder siroter sa bière, sa fière moustache ornée de mousse. Il avait fallu qu'elle rassemble toute sa maitrise pour ne pas aller en effacer les traces d'un baiser.
Il avait définitivement achevé de la séduire quand il avait chanté une très belle chanson en allemand. Emue au larmes, car elle ne l'avait pas entendue depuis bien des années, quand sa grand-mère paternelle la chantait dans son enfance, elle s'était enfin laissée aller à la sensibilité qu'elle cherchait à étouffer en elle depuis des semaines. Elle avait ouvert son coeur à cet inconnu. Elle s'était prise à espérer.
Se pouvait-il qu'il soit celui qui la consolerait? Elle n'osait encore y croire.

Quand elle avait été prise d'un vertige, au moment de quitter la taverne, il l'avait tenue dans ses bras, avec fermeté et douceur et n'avait pas essayé d'abuser de la situation, alors même qu'elle n'aurait opposé aucune résistance à un baiser qu'elle avait souhaité de tout son coeur.

Xm rougit au souvenir de cet instant, elle se demandait même si elle ne lui avait pas carrément dit qu'elle mourait d'envie de l'embrasser... Toute la scène lui apparaissait comme à travers un brouillard.
Ach... maudite soit-elle, qu'allait-il penser d'elle maintenant?

Xm soupira.

Thorna... quand vous reverrai-je?
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Thorna
Thorna raccompagna Xm chez elle.
Durant tout le chemin il garda une distance respectueuse. Ils s'étaient certes embrassés longuement en taverne, mais comme disait le proverbe allemand "einmal ist keinmal" et il se méfiait un peu de Xm qui semblait être à la fois si indépendante, tout en étant vulnérable et farouche... par ailleurs, il trouvait le mélange très... intéressant et pour tout dire Xm très belle.
Tout le temps que dura leur marche nocturne dans les rues de Genève, il parla de choses et d'autres. Ils arrivèrent devant la maison de Xm.
Il s'arrêta devant sa porte, la regarda avec un demi sourire et lui souhaita la bonne nuit.
Xmanfe1999
Malgré la promesse qu'elle s'était faite de ne pas se laisser à nouveau émouvoir par un homme avant un bon moment, la confiance toute fraîchement retrouvée de Xm avait été sérieusement ébranlée par le baiser qu'elle avait échangé plus tôt dans la soirée avec Thorna, ce presque inconnu qui l'avait attirée au premier regard.
Si bien qu'elle avait grandement apprécié le fait qu'il se tienne un peu à distance, quand il l'avait raccompagnée chez elle.
Mais à présent qu'ils se tenaient devant sa porte, et qu'elle sentait chez lui comme chez elle une indéfinissable hésitation, elle brûlait qu'il la reprenne dans ses bras et qu'il la fasse à nouveau frissonner en effleurant son cou de sa magnifique moustache.
Jamais auparavant elle n'avait ressenti ce chatouillis délicieux, car même si avant Thorna elle avait connu un autre homme pourvu de ce viril attribut, personne avant lui ne lui avait aiguisé les nerfs au point de la rendre sensible au moindre contact. Elle trouvait cela à la fois surprenant et presque comique. En tout cas, elle aurait donné cher pour qu'il recommence séance tenante. Mais qu'est ce qui lui prenait?

Thorna l'attirait, certes, mais il la rendait aussi extrêmement nerveuse. Que voulait-il exactement? Ne sachant quoi faire, quand il lui souhaita bonne nuit, elle se contenta de sourire et de lui répondre
"Bonne nuit" elle aussi.
Pour rien au monde elle n'aurait essayé de pousser Thorna dans une direction qu'il ne souhaitait pas prendre. Mais après avoir récupéré sa clef derrière le volet poussé, au moment d'ouvrir sa porte, l'envie prit le pas sur la raison et elle se dressa sur la pointe des pieds pour déposer un furtif baiser sur ses lèvres.


Merci de m'avoir raccompagnée... murmura-t-elle. J'espère que la prochaine fois vous me ferez le plaisir d'entrer...
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Thorna n'avait pas vu Xm depuis plusieurs jours et il en était arrivé a se demander si elle n'était pas partie en voyage.
Par ailleurs, il n'avait pas non plus cherché à avoir de ses nouvelles en questionnant d'autres habitants de Genève. Il avait donc été agréablement surpris de la retrouver en taverne assez tardivement.
Ils avaient passé un bon bout de la soirée seuls, à discuter de choses et d'autres.
Xm lui avait parlé de ses années d'esclavage auprès d'un sultan dont elle avait été la maîtresse et lui avait dit qu'elle le soupçonnait d'être aussi cruel que le dit sultan...

Cette remarque avait étonné et quelque peu amusé Thorna! Il ne se pensait pas cruel mais certainement farouchement indépendant, voire indifférent à la plupart des gens et des événements...
Donc froid, plus que cruel. Disons qu'il ne tirait aucun plaisir à faire souffrir les gens. La plupart du temps, d'ailleurs, il ne s'en rendait sans doute même pas compte, tellement l'idée qu'on puisse s'attacher à lui, lui semblait saugrenue...

Xm lui avait à nouveau demandé de le raccompagner et cette fois ci de bien vouloir rentrer chez elle...
Ils s'étaient à nouveau embrassés en taverne et Thorna savait bien que cette femme en avait vu d'autres et qu'elle n'était pas née de la dernière pluie.
L'idée de coucher avec elle, ne lui déplaisait certes pas, mais il n'avait envie de s'encombrer de rien ni de personne...

Arrivé devant le porte de Xm, il la regarda donc fort attentivement et lui demanda:
Vous êtes certaine de vouloir laisser entrer le loup dans la bergerie?
Il rajouta: vous savez, je ne suis pas vraiment un "cadeau"...
Il lui sourit et ses dents brillèrent d'une lueur blanche dans le clair de lune...
Xmanfe1999
Xm, recula contre la porte qu'elle ouvrit. L'ombre de l'auvent recouvrait le haut de son visage et seule sa bouche était éclairée par les rayons obliques de la Lune. L'éclat de ses prunelles luisait au fond de deux lacs insondables.

Le loup dans la bergerie, dites-vous? Xm eut un imperceptible rire de gorge, presque un murmure. Je crois que vous n'avez pas bien lu l'enseigne de mon échoppe...

Elle eut un sourire éclatant dans le clair de lune. La pâleur de sa peau contrastait avec l'éclat carminé de ses lèvres et la nacre de ses dents.
Elle entra à reculons dans la maison, comme avalée par l'obscurité qui régnait dans la pièce.

Depuis le seuil,Thorna ne perçut bientôt plus que sa voix, quelque part vers le fond de la pièce, soudain rauque et douce à la fois, comme le feulement d'un fauve.


Entrez et constatez par vous même...
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Thorna
Thorna rentra dans la maison, à la suite de Xm.

Depuis qu'il avait quitté Murten, sa ville, il n'était rentré dans aucune maison.
Il dormait dans des granges, mangeait dans les tavernes et sur le marché et n'avait jamais essayé de se faire inviter quelque part.

La maison de Xm était absolument obscure et froide. Il s'étonna qu'elle n'alimente pas un feu en permanence comme la plupart des gens semblaient faire, pour garder toujours un fond de lumière et de chaleur...
Il y régnait une étrange odeur, à la fois envoûtante et poivrée qui lui rappelait l'odeur que l'on pouvait trouver dans les églises lors des grandes cérémonies.

Thorna poussa doucement la porte derrière lui qui se referma sans un bruit. il s'adossa contre le bois ouvragé de la porte et dit d'une voix calme et profonde:
Vous avez l'intention de jouer à colin-maillard avec moi? Où êtes-vous?
Xmanfe1999
Thorna sentit soudain un souffle près de son oreille:

Je suis là...

Un grattement sur le mur, une odeur étrange, proche de celle de l'ail, un lumière vive qui l'aveugla un instant.
Xm se tenait à côté de lui une longue baguette de pin enflammée à la main. Elle souriait.
La flamme intense, d'une couleur blanche inhabituelle, révélait dans un halo pâle des portions de la pièce autour d'eux.
Xm s'éloigna de Thorna et, s'approchant de l'âtre mit le feu, à l'aide de sa stupéfiante baguette, à une pyramide de petit bois soigneusement empilée dans le foyer.
Quand la flamme eut bien pris elle suspendit au dessus une bouilloire de fonte noire remplie d'eau et s'assit sur la marge de l'âtre où étaient disposés deux épais coussins de lin rembourrés de crin.


Venez donc vous asseoir, mon cher Thorna, et ne faites pas cette tête, on jurerait que vous avez vu le Diable...

Xm s'appuya confortablement contre le mur derrière elle, prenant garde de ne pas laisser trainer les manches de son vêtement trop près des flammes.
Dieu seul savait comment elle avait pu faire en aussi peu de temps, mais elle avait troqué sa tenue rouge habituelle contre une étonnante robe croisée d'un tissu de soie noire, semblait-il à Thorna dans la douce lumière de l'âtre.
Les larges manches tombantes formaient comme de vastes poches à partir du coude. Chaque pan, légèrement au dessus des seins, était brodé d'une fleur blanche, du diamètre de la paume de la main, aux multiples pétales, telle que Thorna n'en avait jamais vue, et il put voir à la faveur d'un mouvement de côté, que la même fleur était également brodée au milieu des omoplates.
La taille mince de la jeune femme était enserrée dans une large ceinture nouée, de même couleur.


Vous préférez rester debout? Comme il vous plaira... Profitez-en pour visiter la maison. Tenez, prenez une autre baguette à feu pour vous éclairer!

Xm extrait une nouvelle baguette d'un pot de terre cuite à côté de la cheminée et, après avoir soigneusement rebouché celui-ci, approcha la longue tige de la flamme. La baguette prit aussitôt feu avec un fort chuintement, en dégageant cette fois une odeur familière: le souffre!

Observant du coin de l'œil Thorna, qui avait imperceptiblement sursauté, elle se releva et s'approcha de lui d'un mouvement fluide.


Attrapez donc la lanterne là haut, je vous prie, vous êtes assez grand pour y parvenir sans peine...

Xm alluma la chandelle de la lanterne de papier rouge et la replaça avec précaution à son crochet. Le fragile luminaire baignait maintenant la pièce d'une ambiance intime et jetait des reflets chauds dans les cheveux de jais de la jeune femme.

Dans un glissement de soie, elle s'approcha à nouveau de Thorna et se coula contre lui en l'enlaçant souplement.


Alors? Que pensez vous de mon logis? murmura-t-elle la tête penchée de côté pour pouvoir le regarder dans les yeux.

Avant même que Thorna ne put répondre, un sifflement strident se fit entendre derrière Xm.


Ah, rit-elle en se détachant de Thorna. L'eau est chaude.
Elle posa la bouilloire brûlante sur la pierre d'âtre.
Vous aimeriez certainement vous désaltérer? Pour ma part, je vais préparer un peu de tchaï... Mais j'ai du très bon vin d'Italie, si vous préférez...
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Thorna
Citation:
Venez donc vous asseoir, mon cher Thorna, et ne faites pas cette tête, on jurerait que vous avez vu le Diable...


Thorna sourit à cette remarque. Il regarda Xm et lui dit avec un regard perçant:
Celui qui ne croit pas en Dieu ne croit pas au Diable non plus, chère Xm, mais j'avoue que vos baguettes sont "diablement" impressionnantes...
Il rit
j'ai entendu dire que les peuples asiatiques étaient très en avance par rapport à nous sur bien des points et je suis prêt à le croire, vu cette merveille d'ingéniosité.
Il porta la baguette à son nez et la renifla et la regarda sous toutes les coutures... Il murmura: ingénieux, très ingénieux, mais pas si compliqué en réalité. Il suffisait juste d'y penser.

Il reposa la baguette et regarda Xm, magnifique dans son kimono noir et lui demanda sur un ton mi-amusé mi-moqueur:
Vous êtes passée maîtresse dans l'art de vous déshabiller et de vous habiller dans le noir...?

Thorna sentait bien que Xm voulait sortir le grand jeu, avec ses tissus précieux d'orient et les babioles ou inventions exotiques qui apparemment peuplaient sa demeure... Et il n'aimait pas trop quand on essayait de lui en mettre plein la vue. Il préférait les rapports simples, d'égal à égal et les biens de ce monde ne l'attiraient pas plus que cela.
Il restait donc parfaitement détaché face à tout ce déploiement et quand Xm vient se lover contre lui, il ne fit pas un geste pour la retenir à lui, se contentant simplement de poser sur elle ses yeux verts sombres.
Quand elle s'écarta de lui pour aller enlever ce machin strident du feu (encore une autre invention), il alla s'installer tranquillement sur le coussin qu'elle lui avait indiqué et dit simplement:
Je préférerais un verre de vin italien, si vous me donnez le choix.
Puis il lui sourit, espérant qu'elle allait assez rapidement changer d'attitude...
Xmanfe1999
Quoiqu'un peu déçue par le refus muet de Thorna d'entrer dans le jeu qu'elle avait improvisé, Xm ne fut pas étonnée outre mesure.
Certes il l'intriguait, certes il l'attirait, mais sa froideur, qu'elle avait pensé, au premier abord, être un artifice de surface, semblait bien avoir pris dans sa glace un peu plus que son cœur...

Elle répondit cependant à sa demande:

Citation:
Je préférerais un verre de vin italien, si vous me donnez le choix.

avec la plus parfaite des politesses asiatiques.

Elle passa dans la partie arrière de sa maison et en revint avec une bouteille pansue et deux délicats gobelets de verre coloré.


Finalement, je vais prendre du vin, moi aussi. Le" t'chai" m'empêche de dormir après une certaine heure et la menthe que j'ai récolté cet été commence à perdre un peu de son arôme.
Un verre de ce délicieux moscato d'Asti me fera plus de bien... Tenez, ouvrez-la pour nous voulez-vous?


Elle tendit la bouteille glacée à Thorna, qui s'empressa d'en faire sauter le cachet de cire rouge avec son couteau et la déboucha avec adresse.
Le vin pétillant jaillit avec ardeur du col étroit de la bouteille et un peu de mousse vint éclabousser les chrysanthèmes brodés sur le kimono de soie de Xm.

Elle rit, ravie que l'incident vienne un peu détendre l'atmosphère.

Thorna, confus s'excusait.


Ne vous excusez pas, je vous prie, messire Thorna, c'est entièrement de ma faute. J'ai du un peu trop secouer la bouteille en la tirant du puits. Ces choses là doivent se manier avec un peu plus de délicatesse...

Elle tira de sa manche un mouchoir de lin blanc qu'elle utilisa pour tamponner son vêtement.

Ce n'est pas grave, je vous assure, le vin blanc ne tache pas, heureusement...

Xm posa le mouchoir à côté d'elle. Le tissu mouillé de son mince vêtement soulignait délicatement le contour de son sein. Sans doute surprit-elle un regard de Thorna, coulant dans cette direction, car elle s'empressa de décoller de sa peau le pan de kimono indiscret, ce qui n'eut pour effet que d'en entrouvrir l'encolure, révélant un croissant de peau nacrée dans la lumière chaude du feu.

Essayant de ne pas perdre contenance, Xm insista.


Tout cela sera sec dans un instant, vraiment.

Elle avait l'impression, à chaque geste, à chaque mot d'être de moins en moins dans le ton, de s'écarter de plus en plus de l'image idéale qu'elle s'était projetée d'une soirée intime et captivante avec un quasi inconnu.
L'échange simple et sans arrière pensée entre deux adultes consentants tournait à la mascarade.
Elle se sentait semblable à ces geiko de bas étage dont elle avait pu entrevoir les pitoyables simulacres de séduction quand elle arpentait, déguisée en homme, les rues des quartiers de plaisir d'Osaka, en compagnie de Saburo.
Un profond mépris d'elle même la saisit brusquement.
Par égard pour son invité, elle réussit à dissimuler son changement d'humeur et tendit son verre à Thorna.


Tenez, très cher, goûtez et appréciez.
Il vient tout droit des collines du Piémont, un ami m'en a fait parvenir quelques caisses. Peut-être est-il encore un peu vert. J'avoue avoir perdu un peu le goût du vin pendant mon séjour en Syrie, quoique mon "hôte", le sultan de Damas ait quelquefois bravé les interdits de sa foi pour goûter les vins de Crête ou de Chypre que ses hommes saisissaient sur les vaisseaux pirates qui infestent ces eaux...


Quoique flottant aux gré de ses souvenirs sur ces mers qui l'avaient amenée après maintes tribulations dans cette petite maison de Genève, Xm sentait que son bavardage nerveux ennuyait son invité.
Elle préféra donc de se taire.
Elle sirotait avec délices son vin glacé, les yeux perdus dans les flammes dont les reflets animaient ses prunelles d'une nuance changeante. Les craquements des bûches qui se fendaient furent bientôt le seul bruit qui brisait le silence feutré.
Thorna buvait lui aussi son vin, le visage impassible.
La tension était retombée. Le temps était comme suspendu.
Aussi sursautèrent-ils tous les deux quand trois coups discrets furent frappés à la porte.

Xm sortit instantanément de sa rêverie nostalgique, immédiatement sur le qui-vive. D'un élan souple elle fut sur ses pieds.


Vous attentiez de la visite? demanda Thorna dans un souffle?

Xm fit signe que non et un doigt sur les lèvres lui intima de se taire.
Elle s'approcha de la fenêtre à pas de loups, tâchant d'apercevoir derrière le rideau tiré celui ou celle qui avait frappé.
Rien à faire. La nuit était bien trop noire et l'auvent projetait une ombre large d'un bon pas devant la porte.
Xm se retira avec précaution de la fenêtre et s'approcha de la porte sans un bruit, si ce n'est le léger froissement de la soie de son kimono.
Elle regretta un instant d'avoir troqué ses braies, si pratiques contre une tenue plus féminine, mais résolut vite le problème en coinçant adroitement dans sa ceinture les pans flottants de son vêtement.
Soit, elle offrait ainsi à la vue Thorna la quasi totalité de ses longues jambes nues, mais au moins ne serait-elle pas gênée dans ses mouvements s'il fallait réagir avec célérité.

Trois nouveaux coup secs retentirent, un peu plus fort cette fois.
Xm tira de l'arrière de la large ceinture un long stylet d'acier qui lança un éclair bleuté dans la lueur du feu.

Thorna, qui ne perdait pas une miette du spectacle qu'elle offrait dans son kimono retroussé, lui jeta un regard surpris.
Xm se contenta de lui chuchoter, avec un sourire d'excuse:

On ne se refait pas, que voulez-vous... Toujours au moins une arme sur moi. Même dans mon lit.

Trois coups encore, mais cette fois une voix qu'elle aurait reconnue même au delà de la tombe. Un accent chantant, un inimitable mélange de français et d'italien:

Xm! Cara mia, tu es là? Risponde! Xm si tu es là, ouvre-moi! Apre la porta! Fa freddo!

Éclatant de rire, Xm ouvrit la porte en grand.

Gianni!!!

Elle se jeta dans le bras du contrebandier, tout aussi éberlué sur le pas de la porte que Thorna l'était à l'intérieur.

Eh bien, cara, quel accueil! Tu m'aimes ou tu veux me tuer? ajouta-t-il en découvrant le stylet que Xm tenait toujours à la main. La prochaine fois que tu m'appelles essaie de te montrer un peu plus... il hésita ,bienvenante?
Malgré son léger sarcasme, l'italien avait aux lèvres son éternel sourire ravageur.

Alors? tu me fais entrer ou pas? Je meurs de faim de soif, dit -il avec un regard avide vers la bouteille entamée posée au coin de l'âtre, seul point de la pièce qu'il pouvait voir depuis le pas de la porte. Et de fatigue.

Xm s'effaça pour lui laisser le passage et Gianni, faisant un pas vers l'intérieur, découvrit tout d'un coup Thorna, les deux verres encore à moitié pleins, les deux coussins près du feu. Il eut un regard interrogateur vers Xm.

Perdona me, je crois que j'interromps quelque chose... Xm tu ne m'avais pas dit que tu avais un...

Thorna se leva, et compléta la phrase, en s'inclinant avec civilité: un ami, messire, un ami. Permettez-moi de me présenter, je me nomme Thorna. J'allais partir.

Xm, sourit, imperceptiblement soulagée. Thorna se tourna vers Xm et s'inclina à son tour vers elle:

Merci pour cette charmante soirée, ma chère Xm et merci pour ce délicieux ... moscato? Je vous souhaite la bonne nuit.

Récupérant sa cape et son chapeau, il s'en fut dans la nuit.

Où en étions-nous?, demanda Gianni enlaçant Xm avec avidité. Vieni qui, donne-moi un baiser, amore...

Xm se glissa habilement hors de l'étreinte de Gianni qui eut une moue mi-surprise mi déçue.

La jeune femme fit comme si elle ne s'en était pas aperçue.


Alors tu as fini par arriver? Je ne t'attendais plus.

Tu aurais préféré que je n'arrive pas, on dirait, cara?


Xm tâcha tant bien que mal de cacher son irritation.
Quelques jours plus tôt, elle aurait vendu père et mère pour que Gianni vienne la sauver du marasme où elle avait la sensation de s'enfoncer. Ensuite il y avait eut la rencontre avec Thorna, les baisers échangés en taverne et cette désastreuse soirée qui n'avait fait que lui révéler la véritable nature de ses aspirations.
Et puis il y avait cette autre rencontre, capitale, dont elle ignorait encore jusqu'où elle allait la mener...
Xm ne savait plus trop si elle devait se réjouir ou non de l'arrivée de son ami. Elle décida de repousser au lendemain la solution à ces difficiles questions.


Ecoute, Gianni, je suis épuisée. Si tu as faim, il y a là du pain du fromage , dit-elle en désignant de la main le placard dans l'angle de la pièce et il reste encore plus de la moitié du vin dans la bouteille. Moi, je vais me coucher.

Sentant l'odeur du vin sur son kimono, elle s'en défit prestement avec une mine dégoutée et le jeta sur le sol.
Rhaa, faudra que je lave ça demain...
Laissant Gianni médusé au milieu de la pièce, elle monta nue l'escalier jusqu'à sa chambre, ses longs cheveux noirs balayant ses reins à chaque pas.

Buona notte, amore, souffla l'italien d'un ton caressant.
Xm répondit sans se retourner.


Bonne nuit à toi aussi, Gianni.
Sa phrase s'acheva sur un bâillement. Ses chevilles fines et ses pieds nus disparurent en haut de l'escalier.

J'espère que tu me feras un petite place dans ton lit, ma belle, songea Gianni, en se versant un gobelet de vin.
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Vive comme l'éclair
Insaisissable comme la lumière
Dure comme le fer
Et en amour comme à la guerre...
Precye_
Elle était revenue fort tard des abords de la ville, elle avait passé la soirée en rendez-vous discret qui s'était éternisé dans la nuit, et c'est épuisée mais le sourire aux lèvres que Precye revint sur Genève.

Elle tenait précieusement dans sa poche une missive qu'elle avait rédigé et qu'elle alla glisser sous la porte de l'échoppe d'Xm.

Elle avait tout d'abord pensé à frapper, mais vu l'heure tardive, Precye se dit qu'il vaudrait mieux reporter la visite à un autre jour et laisser un parchemin. Elle avait passé un certain temps à écrire de sa plume, les mots ne venant pas facilement....Il y avait eu tellement d'incompréhension et d'agressivité de la part d'Xm que Precye s'était dit qu'elle ne pourrait jamais oublier les moments par lesquels elle était passée....Mais il en allait autrement désormais.....





Chère Xm,

Après un silence de quelques jours de ma part et des rendez-vous tout aussi discrets en dehors de la ville, il s'avère que j'ai la preuve formelle que tu n'es pour rien dans les évènements qui se sont passés dernièrement me concernant.
Je t'avouerai que je t'ai observé en silence toute la journée de mon retour et qu'un infime détail sur lequel mon lieutenant d'amour à mis le doigt, m' a incité à réfléchir davantage sur tous ces faits.
Je tiens donc à ce que tous les genevois soient au courant de ton intégrité et sachent qu'à partir de ce jour, je te propose mon amitié sincère et loyale, tout comme je le suis avec mes amis actuels...S'il y a une chose que je ne supporte pas, c'est qu'une personne innocente soient injustement accusée....
Néanmoins, sache que jamais je n'ai demandé à Power de ne plus être ton ami, et ça m'a fait du mal que tu m'aies reproché que du fait de mon arrivée et de mon amour pour Power, je t'avais arraché ton meilleur ami...Que tu aies pu penser cela me désole...Tout comme tu aies pu m'en vouloir parce que Melian t'ait abandonné pour ma filleule.....Mais je ne suis en aucun cas responsable des actes de Douceange...
Personnellement je n'avais aucun à-priori te concernant jusqu'au jour où tu es venue t'immiscer dans notre vie privée à Power et moi...tu ne t'en es sans doute pas aperçue Xm mûrée dans ta souffrance comme tu l'étais....mais j'ai énormément souffert de ton attitude.
Et le fait de me retrouver arrachée à mes enfants , à mon amour qui représente toute ma vie et à mes amis m'avait enlevé toute mon énergie habituelle....Revenir sur Genève était pour moi un supplice mais désormais, je serais heureuse de nouer une sincère amitié même si elle n'est pas des plus intenses avec toi.
Je te souhaite d'être heureuse avec ton nouvel amoureux tout comme je le suis avec mon lieutenant d'amour.
Je veux que tout Genève sache qu'Xm est une personne intègre et droite. Avec un sale caractère on est bien d'accord, mais elle n'a pas failli et je suis heureuse de savoir cela. J'ai également mon caractère tu le sais bien , comment dis tu ? Je suis sacrément têtue en effet....Je n'ai pas oublié que grâce à toi, j'ai pu mener ma grossesse presqu' à terme, et que tu es intervenue lorsque la Chambérienne à tenté d'enlever notre fils. Je suis néanmoins au regret de te dire que malgré le fait que tu aies voulu me l'interdire je continuerai à appeller Power par les petits noms dont j'ai l'habitude de le nommer !!!!
Ceci étant, j'aimerai désormais que nous puissions nous cotoyer sans agressivité et débuter une amitié sur des bases saines.
Tu sais je pense que tu as tout de même pu te rendre compte depuis maintenant 3 mois que nous sommes ensemble Powerjeff et moi, que je fais tout pour le rendre heureux....
Notre maison t'es ouverte et tu viens quand tu veux voir Antoine, il sera content que tu lui rendes visite.

J'espère te compter désormais comme une amie sincère et loyale.
J'ai même envie de te faire une grosse bise^^.

Precye.
Xmanfe1999
Gianni était attablé en train de terminer la frugale collation que lui avait proposée Xm quand il entendit un pas léger derrière la porte.
Sa main vint par réflexe se poser sur sa dague, qu'il avait tirée de sa botte pour couper un peu de pain et de fromage, et qu'il avait reposée sur la table devant lui.
Retenant son souffle, il attendait que quelqu'un frappe.


Maledizione, jura-t-il mentalement. J'espère que ces figli de p... de doganieri* ne m'ont pas vu entrer en ville...

Le contrebandier en lui, l'incitait à rester calme et à attendre la suite.
Au bout de quelques secondes, comme si la personne derrière la porte avait hésité à frapper, il entendit un frottement de papier sous la porte et vit une feuille soigneusement pliée passer dans l'interstice entre le sol dallé et le bois.

Gianni s'approcha à pas de loups de la porte, colla son oreille contre le panneau épais. Plus rien. Le messager était reparti aussi discrètement qu'il était venu.

L'italien commençait à se dire que les genevois avaient de bien drôles d'habitudes... presque aussi étranges que celles de ces ... il cherchait le mot qui convenait... "insensati" de Sion.
Intrigué, il se baissa pour ramasser le papier.
Il dégageait un léger parfum de fleurs. Il passa la feuille sous son nez et huma avec curiosité: gelsomino?
Le contrebandier de plus en plus perplexe, déplia la missive parfumée au jasmin et l'examina à la lumière du feu. Il fronça les sourcils.
Bien que ne sachant ni lire ni écrire, il avait toujours éprouvé une intense fascination pour la chose écrite.
Seule une fierté mal placée l'avait empêché d'accepter que Xm lui enseigne les rudiments des lettres pendant leurs quelques mois ensemble.
Il regrettait maintenant de l'avoir seulement observée pendant qu'elle écrivait le soir les messages qu'il devait envoyer à ceux de ses lieutenants qui savaient lire, disséminés à travers toute l'Italie.

Gianni tournait et retournait la feuille dans la lumière. Seul le dernier mot isolé, en bas de page, marquant la signature, indiscutablement féminine, lui disait dans quel sens regarder cette énigme de papier. Il soupira, un instant agacé de son ignorance, et replia la feuille.

Il retourna à la table, versa le reste de moscato d'Asti dans le gobelet de verre et monta, le verre dans une main, la lettre dans l'autre, ruminant, marche après marche, que si Xm recevait maintenant en pleine nuit des lettres de femme parfumées au jasmin, il y avait quelque chose de pourri au royaume d'Helvétie...


Ah, vero! songea-t-il, Ces "eretici" de Suisses avait proclamé la repubblica...
Gianni leva les yeux au ciel. Madonna, pardonne-leur, pria-t-il à mi-voix ils ne savent pas ce qu'ils font...

Le hors-la-loi autocrate avait besoin de croire à la nature divine de l'exercice du pouvoir et la pensée d'un conseil démocratique régissant un organisme quel qu'il soit - sa bande de malandrins, par exemple - lui donnait des frissons dans le dos. Il fit les cornes vers le sol pour conjurer le mauvais sort.

Cara mia, chuchota-t-il pour lui même, j'espère que tu n'as pas trop changé tout de même... Enfin, ce n'est pas l'impression que j'avais eue à Sion en tout cas...

* doganieri : douaniers (pardon pour les douaniers de Genève qui sont tout sauf des "figli de p..." )
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Xmanfe1999
Arrivé au seuil de la chambre, Gianni eut un temps d'arrêt.

Dans la lumière douce de la lanterne sourde que Xm avait posée sur le tabouret près du lit, la beauté austère de la pièce le saisit.
Loin d'avoir reproduit, dans ce havre de sérénité, l'ambiance orientalisante et un peu clinquante de sa boutique à l'étage au dessous, Xm n'avait ajouté que quelques éléments de confort à la pièce - un broc et sa cuvette posés sur une simple table, un miroir sur pied, des perches pour suspendre ses vêtements et un lit - seule extravagance dans cette chambre presque monastique - un lit immense où Xm reposait nue sous sa précieuse couverture en peaux de loups.

La simplicité de la pièce faisait comme un écrin à sa beauté, d’autant plus époustouflante que Xm n’en avait jamais eu vraiment conscience et qu’elle n’en tirait en tout cas aucune vanité.
La jeune femme tournait le dos à la porte et Gianni pouvait admirer la nuque gracile de sa tendre amie sous la masse de cheveux noirs qu'elle avait relevés, pour qu'ils ne s'emmêlent pas trop pendant son sommeil.
Appuyé au chambranle, l'italien ne pouvait détacher les yeux du corps endormi de celle qui avait été sa flamboyante maitresse pendant quelques mois.
Son regard caressant détaillait les courbes qu'il voyait ou qu'il devinait sous la couverture, descendant de sa nuque vers ses épaules, ses omoplates et plus bas son dos...
Comme à leur retrouvailles à Sion quelques semaines plus tôt, Gianni réprima une grimace douloureuse devant le réseau de fines marques blanches qui marquait tout le dos de Xm, des épaules aux reins.
L'idée qu'un homme ait pu la traiter de cette manière le révoltait au plus haut point et le spectacle de ces cicatrices lui donnait envie de serrer sa belle amie dans ses bras et de la protéger.
Il secoua la tête, encore incrédule.


Madonna, songeait-il. Je sais pourtant que tu n'as pas besoin que je te protège... Mais si tu savais comme je saurais bien le faire si tu en avais envie...

Le contrebandier attendri s'assit sur le bord du lit.
Le désir qui l'animait en montant dans la chambre le disputait à sa loyauté et à son attachement envers son amie.
Posant sur le sol son verre et la lettre qu'il avait ramassée, à coté du lit, il tendit la main vers Xm dont le souffle régulier montrait qu'elle était profondément endormie. Cette marque de confiance inattendue chez la jeune femme suscita chez Gianni une nouvelle bouffée de tendresse.
Sa main un peu tremblante effleurait sans la toucher sa peau diaphane. Ses doigts halés par la vie au plein air suivaient l'entrelacs complexe des cicatrices sur son dos. Saisi d'une émotion d'une intensité incompréhensible, Gianni s'allongea derrière Xm et déposa doucement sur son épaule un baiser doux et léger comme une plume. Il luttait contre l'envie de prendre la belle endormie dans ses bras, de peur de la réveiller. En vain. Xm remua et se tourna vers lui, gardant les yeux fermés, mais remontant pudiquement la couverture sur sa poitrine. Elle murmura d'une voix presque inaudible:


Mmmm? Qu'est ce que tu veux Gianni?

Il contemplait avec amour le visage aux yeux fermés.

Niente, bellissima. Niente. Rendors-toi.

Les yeux toujours hermétiquement clos, Xm insista.

Ecoute, ça fait un bon quart d'heure que tu es planté là à me regarder dormir... alors ne me dis pas qu'il n'y a rien. Tu as un problème?

Gianni rit. Evidemment, elle ne dormait jamais que d’un œil.

Si, claro, j'ai un problème cara mia pensa-il pour lui même. Mais il vaudrait mieux que je le garde pour moi, ma douce.

Un problème? Non, pas du tout, cara. C'est juste que tu prends toute la place. Il va falloir que l'on se serre un peu...

Joignant le geste à la parole, il enlaça Xm, qui le repoussa avec un soupçon de brusquerie, les yeux toujours fermés.

Gianni! Fiche moi la paix je suis fatiguée... Il y a largement de la place pour nous deux dans ce lit, alors bas les pattes!

Gianni sourit. Il protestait pour la forme. Il devait assurer le rôle du hors-la-loi hâbleur jusqu'au bout.

Oh, cara, juste un petit câlin pour m'endormir... Sois gentille. Va, tu fais ça très bien !

Sans même cligner des paupières Xm lui asséna une tape sur le nez. Cette diablesse était décidément trop forte!

Aïe! protesta Gianni. Pas besoin de taper si fort! Je n'ai jamais fait de mal à une dame... pas contre son gré en tout cas!

Xm soupira. Gianni par pitié laisse moi dormir. Je suis de garde demain, je dois être en forme!

Xm se leva sur un coude et passa le bras par dessus le corps allongé du contrebandier pour attraper la lanterne qu'elle souffla. Une bouffée de chair douce et chaude et de parfum poudré monta jusqu’au visage de Gianni qui eut bien du mal à rester stoïque.
Xm se recoucha et tourna le dos à son ami. Elle avait mauvaise conscience de l'avoir appelé à l'aide quand elle allait mal. Comment allait-il prendre le fait qu'elle ait à nouveau quelqu'un dans sa vie?
Les yeux ouverts dans le noir elle se dit qu'elle aurait bien du mal à se rendormir.

Gianni pour sa part gardait, lui aussi, les yeux ouverts. Allongé tout habillé par dessus les couvertures, il se coula tout contre Xm qui respirait calmement. Il réfléchissait. Visiblement, Xm avait à nouveau un amant, sans quoi, Madonna, il aurait été dans son lit et pas au dessus comme un malheureux. Apparemment, Sion était loin derrière eux.
Gianni soupira et réussit, pour donner le change à Xm qui s'était imperceptiblement raidie en l'entendant soupirer, à déguiser ce soupir en bâillement.

Mieux valait pour eux deux que leurs rapports en restent là. Demain matin, il lui ferait ses adieux.

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